Ruptures d'un processus linéaire
Disclaimer habituel et regret de me voir privée par ffnet du droit de vous parler en préalable de l'histoire… mais je vais vous écrire à chacun et je vous remercie de votre passage !
Dette éternelle et permanente à ma chère Alixe.
Celui-ci a mis du temps à arriver parce que le suivant s'est révélé particulièrement rebelle à la narration (surtout la fin) et que je m'impose de ne pas poster avant d'avoir la suite…
Trente et un : L'important de l'affaire
L'audience était à huis clos, mais cela n'interdisait pas à la presse d'attendre le loup-garou-qui-sait, tel que l'avait surnommé Skeeters – dans les couloirs du Magenmagot.
Justin ouvrait la voie – répétant aimablement toutes les trois secondes qu'il n'y aurait aucun commentaire avant l'audience, car ils n'étaient pas venus ici pour risquer une déqualification du témoignage. A la question logique qui suivait – y en aurait-il après ? – il se contentait de sourire.
Harry et Remus suivaient – il était difficile de savoir lequel était le plus attendu. Mais ni l'un ni l'autre ne répondait aux questions variées qui fusaient de toutes parts. Sobrement vêtu d'une robe de velours vert sombre choisie par Justin, Remus s'efforçait de boiter le moins possible et Harry de marcher à son pas.
A ce train, il leur fallut un temps relativement important pour atteindre le bureau de la juge Rivers. Dès qu'ils les virent, les deux Aurors de garde, Quint et Crivey, s'avancèrent à leur rencontre, repoussant fermement les journalistes qui les avaient suivis jusque-là. Le greffier qui travaillait habituellement avec Rivers les accueillit avec empressement :
« Juste à l'heure ! Maître Deauclaire-Weasley est déjà arrivée. »
Constatant que l'information ne semblait pas inquiéter Justin, Harry décida de faire comme lui. De toute façon, sa capacité à s'inquiéter aujourd'hui était toute entière dédiée à Remus Lupin – à Justin de s'occuper du reste !
« Aspirant Potter, vous ne pouvez pas entrer », continua le greffier avec un air désolé et Harry se demanda ce qu'il devait comprendre de la révérence et de la sympathie de l'homme. « Seuls les avocats son autorisés dans ce type d'audience… et les chargés d'enquête s'il y avait lieu… Mais, aujourd'hui…»
« Je sais, je sais », le rassura rapidement Harry. « Je voulais juste l'accompagner jusqu'ici » expliqua-t-il en désignant Lupin. « Vous savez, les journalistes.. ; »
« Ils sont là depuis l'aube », compatit le greffier. « Mais ne faisons pas attendre Mme la
Juge !» ajouta-t-il, ouvrant la porte pour faire pénétrer Justin et Lupin.
Quand la porte se referma, Harry se retrouva seul et désemparé dans le couloir. Où allait-il pouvoir aller se cacher des journalistes pendant l'audience ? Il envisageait de sortir du Magenmagot quand Quint revint vers lui :
« On a établi un camp de base dans le bureau là bas », lui indiqua-t-il, désignant le bout du couloir du menton. « Y'a du café, des fauteuils… »
Harry voulut dire qu'il était tout sauf en mission, mais Quint ne lui en laissa pas le temps.
« Ça calmera peut-être les journalistes s'ils ne te voient plus », expliqua-t-il avec cette grimace que Harry savait être un sourire. « On pourra venir te rejoindre… l'un après l'autre »
Il y avait des offres qu'on ne pouvait refuser. Qu'un vieux de la vieille comme Quint le traite comme un égal, un collègue, c'était un geste fort et Harry avait besoin de démonstrations comme celle-là. Il remercia l'Auror chevronné et obtempéra. Quelques minutes, plus tard, Crivey et son infatigable enthousiasme vinrent lui rendre visite.
« Les journalistes ne partent pas », l'informa-t-il joyeusement comme si c'était une victoire. « Ils semblent prêts à attendre toute la journée s'il le faut ! Quelle histoire, Harry, quelle histoire ! » Colin se versa un grand café qu'il sucra et créma d'abondance avant d'ajouter sur un ton admiratif définitif : « Avec toi, Harry, il s'en passe toujours de belles ! »
Harry passa les dix minutes de la pause de Crivey à essayer de minimiser son rôle dans l'affaire et à insister sur les mérites de Justin en tant que stratège. Il n'était pas sûr d'avoir pour autant entamer l'admiration de Colin ! Il fut en quelque sorte soulager de le voir repartir à son poste de maintien de l'ordre. Et c'est avec une certaine crispation qu'il vit entrer une demi-heure plus tard, Quint ! Il se sentait finalement un peu pris au piège de la sollicitude des deux Aurors.
« Ça va ? » lança l'homme en entrant.
Harry eut l'impression que le vieil Auror lisait en lui comme dans un livre ouvert et opta pour la sincérité :
« Si je pouvais, je serais là-dedans à sa place », avoua-t-il. « C'est le dernier ami vivant de mes parents… mon seul lien avec mon passé – je sais que ça peut paraître un peu grandiloquent mais… je supporterais très mal qu'il souffre encore à cause de moi ! »
Quint le regarda à la dérobée en se servant son café qu'il semblait aimer noir et très sucré – avant de demander sur le ton du constat :
« Tu es sûr de toi, hein, Potter ? C'est vraiment une erreur ? »
« Tu crois que je fais tout ça pour qu'on me regarde ? »
Quint secoua la tête :
« Non, je ne pense pas, je te connais pas beaucoup mais t'es pas le gars qui la ramène – et pourtant, après tout, tu pourrais… »
Harry ne trouva rien à répondre à ça. Quint but une nouvelle gorgée de café avant de reprendre :
« On se demande juste pourquoi Fudge se bat comme cela, de quoi il a peur ! Après tout, c'est Croupton qui l'a balancé à Azkaban, Black ; lui, il pourrait se contenter de présenter les excuses du Ministère ! »
« On ». Harry ne doutait pas que l'affaire soit devenue un sujet de conversation de la Division. Ron et Parvati ne le cachaient pas. Mais entendre de quelqu'un qu'il ne pouvait soupçonner de chercher à l'épargner que la plupart le soutenaient, c'était plus qu'il n'en avait espéré de cette journée-là !
« Justin – mon avocat – pense qu'il le fera peut-être en dernier recours », lui confia encore Harry. « Mais si « on » veut bien se souvenir, Fudge n'a jamais adoré reconnaître ses torts ! »
Quint s'esclaffa :
« Tu lui en veux encore ? »
Harry haussa les épaules :
« Tu sais, être pris pour un fou affabulateur à quinze ans, c'est pas génial ! »
« Etre la cible de Voldemort non plus, j'imagine »
Harry se demanda furtivement ce qui était le pire, et comme il n'était pas sûr de la réponse – il haussa de nouveau les épaules.
« Tout ce que je demande, moi, c'est la vérité sur la mort de mes parents ! » finit-il par cracher.
Quint qui avait fini sa tasse pendant le silence de Harry leva les yeux au ciel.
« Ça sera jamais que ça ! Plus maintenant ! Si ça l'a jamais été » - l'admonesta l'Auror, sur le ton qu'il aurait pris pour le réprimander pour s'être laisser surprendre par un Pitiponk. « Et d'ailleurs, c'est pas le moins intéressant de l'affaire ! »
Harry se mordit les lèvres, agacé par l'instrumentalisation politique que l'homme suggérait. Il se fichait, lui, que Fudge tombe ! Il cherchait encore une réponse polie mais claire quand le greffier entra.
« Aspirant Potter », annonça ce dernier avec une infime hésitation. « Le juge Rivers vous demande de vous joindre à l'audience.»
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Le bureau de Rivers avait été aménagé pour que les deux assesseurs qui la secondaient – Simmons et Grimright – puissent s'installer à ses côtés. Remus leur faisait face sur une chaise tendue de velours cramoisie assez imposante. A leur droite, les deux avocats étaient assis côte à côte sur des sièges moins recherchés.
Harry chercha les yeux de Justin pour évaluer ce qu'il se passait mais Rivers l'interpella et il estima impoli de ne pas la regarder en face.
« M. Potter, nous avons attentivement écouté la narration de M. Lupin », commença-t-elle sans autre préalable. « Ses souvenirs de la période précédant ce terrible Halloween de 1981 sont évidemment très éclairants…»
Harry hocha prudemment la tête. Pénélope lui paraissait sur le point d'exploser, encore qu'il n'aurait sut dire quoi attendre précisément de cette explosion. Justin regardait la pointe de son stylo.
« Et sa relation des évènements advenus à Poudlard en 1994… Je comprends bien la portée de ces évènements », finit par conclure Rivers avec l'air de quelqu'un qui marche sur des œufs. « Mais, comme le faisait remarquer Maître Deauclaire, le témoignage d'un loup-garou, aussi intéressant soit-il, reste sujet à caution… En particulier en l'absence de preuves physiques de l'audacieuse thèse que nous voyons se profiler. »
« Votre Honneur, Pettigrow… » - objecta Harry en se demandant pourquoi Justin se taisait toujours.
La juge le fit taire d'un geste :
« Je n'ai pas fini, M. Potter ! Il se trouve que M. Lupin a cité un certain nombre de témoins : M. Ronald Weasley, Melle Hermione Granger, tous deux malheureusement mineurs à l'époque des faits – M. Severus Rogue, et vous-même »
Moi aussi, j'étais mineur, faillit commenter Harry, mais il capta du coin de l'oeil un mouvement négatif du coûteux stylo à plume de Justin. Il se tut donc.
« Il se trouve que mes assesseurs et moi-même, nous sommes tombés d'accord sur la manière de sortir de cette situation juridique inédite », annonça alors Rivers avec un air satisfait. « Il nous semble, M. Potter, que ce procès ne peut plus avancer sans que les motivations de toutes les parties prenantes se soient clairement exprimées »
Rivers le regarda franchement après avoir dit cela, comme si elle s'attendait à qu'il perçoive un message caché. Harry, lui, se demandait où elle voulait en venir et chercha une nouvelle fois les conseils de Justin, mais celui-ci semblait maintenant hypnotisé par l'observation du plafond.
« En d'autres termes, M. Potter, il nous semble impossible de considérer le témoignage de… M. Lupin sans l'engagement, à ses côtés, d'un sorcier responsable »
Rogue en garantie de Lupin ? Il y a de sacrées ironies dans la vie ! - estima Harry un peu vite. Il se retint de sourire. Simmons s'éclaircit alors la gorge et Rivers hocha la tête :
« Oui, soyons plus clairs, M. Potter, êtes-vous d'accord pour garantir le témoignage de M. Lupin ? » demanda Rivers d'un ton grave.
« Moi ? Mais… »
Harry regarda les trois juges tour à tour, puis les deux avocats. Il se tourna vers Lupin qui semblait ailleurs. Il comprit que le deal était là : Il fallait qu'il se mouille pour que les juges prennent une décision aussi politiquement risqué. Il repensa au commentaire de Quint qui avait estimé que la vérité n'était plus l'enjeu. Il ne prit pas le temps d'être triste mais se demanda si c'était là une exigence de Fudge.
« Votre Honneur, j'étais moi-même mineur au moment des faits », objecta-t-il pour la forme, et puisque Justin semblait avoir abandonné la partie. Peut-être que l'option avait déjà été discutée avant.
« On peut sans doute demander à ce professeur Rogue de confirmer les évènements », intervint alors Grimright.
Mais moi, dans tous les cas, faut que je me mouille, comprit Harry. Il regarda franchement Justin cette fois – il lui semblait que demander l'avis de son conseil juridique n'était pas inenvisageable à ce point de non-respect de toute procédure. Ce dernier ne détourna pas les yeux cette fois, mais haussa imperceptiblement les épaules comme si Harry était le mieux placé pour décider !
Harry ne se contenta pas de cette demi-réponse et continua de le regarder. Justin se rembrunit un peu, mais sembla peser plus sérieusement le pour et le contre et, finalement, il fit un infime signe de tête qui pouvait passer pour une acquiescement.
Harry se tourna alors vers Lupin et croisa ses yeux fatigués et lointains – sans doute, s'entendre rappeler une fois de plus que son témoignage, son expérience et sa mémoire ne comptaient pour rien n'avait rien eu d'agréable. Mais si je recule, songea Harry, cette humiliation de plus n'aura été qu'une humiliation pour rien. Sa décision se forgea brusquement – on reste finalement un Gryffondor toute sa vie, commenta une petite voix amusée dans sa tête.
« M. Potter ? » - s'enquit alors Rivers comme si elle avait senti qu'il était arrivé au terme de son cheminement intérieur.
« Puisqu'il ne semble pas y avoir d'alternative».
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La presse n'avait pas de superlatifs assez forts pour parler du « coup de théâtre », de « l'inimaginable » ou du « défi : Potter contre le Ministère ». Ledit Potter s'était d'ailleurs prudemment terré dans son appartement moldu depuis que le prochain acte avait été annoncé dans la presse, refusant catégoriquement de répondre aux diverses sollicitations d'interviews qui lui arrivaient par hibou.
Skeeters avait réussi à camper un portrait de l'Auror Potter qui nommait ses meilleurs amis : Parvati Patil, « plus qu'une amie, selon nos sources », Ronald Weasley, « le beau frère de Maître Deauclaire, chacun l'aura compris », et Seamus Finningan, « un autre jeune Auror plein de talent ». L'article sous-entendait que la Division avait pris le parti de Potter contre le cabinet de Fudge et les Affaires internes.
Parvati avait avoué que depuis, ils devaient tous les trois raser les murs du Ministère pour éviter les sollicitations des journalistes. Mais elle disait aussi que tous les Aurors étaient contents que Harry témoigne :
« C'est un peu comme s'ils avaient enfin l'explication que tu ne leur as pas donné », avait-elle estimé.
Mais la Division ne semblait pas la seule à attendre de grandes révélations du témoignage de Harry. Bien sûr Pieternel les tournait déjà par avance en dérision – « on saura peut-être si Dumbledore préférait les sorbets au citron ou les dragées de Bertie Crochue ! » Mais le reste de la presse était plutôt excitée et attendait « la vérité sur la fin de Voldemort » - qu'on semblait soudain trouver beaucoup plus sombre qu'elle était présentée dans les livres d'histoire contemporaine. On prêtait à Harry des soutiens politiques dans le Conseil européen qui rappelait si souvent la communauté britannique à l'ordre. Certains allaient jusqu'à imaginer à Harry des ambitions très directes sur le poste de Ministre – il était d'ailleurs à noter que de nouvelles voix se faisaient entendre, faisant état de candidatures plus ou moins claires au suffrage sorcier. « Les grandes manœuvres commencent », avait d'ailleurs confié Arthur à Harry.
Qui d'autre que moi et Lupin pensent encore à Sirius, soupira Harry allongé sur son lit, les yeux perdus dans le ciel gris. Il se demandait confusément s'il pourrait un jour retrouver la place – avec ses certitudes – qu'il avait eue pendant deux ans dans le corps d'élite des Aurors.
Les paroles de Fleur lui revinrent une fois de plus en mémoire : « Tous les petits garçons veulent être Aurors, Harry, puis ils grandissent ». Harry avait l'impression qu'il avait énormément grandi pendant ces deux mois de procès et pourtant, il n'arrivait toujours pas à s'imaginer une vie différente. Manquait-il d'imagination à ce point ou devait-il accepter une fois pour toute qu'être un Auror était son idéal ?
Il en était là dans ses pensées lorsqu'il entendit la porte de l'appartement s'ouvrir et se refermer. Harry sortit de sa chambre pour se retrouver nez à nez avec Dudley.
« Salut, Harry, alors, pas encore parti chez Justin ? » demanda son cousin. « Remus y est déjà ! »
« Remus ? Mais on a rendez-vous que cet après-midi ? » - s'étonna Harry.
Justin avait demandé deux jours pour affiner ses propositions – « Deux jours, Harry ! » « Tu n'imaginais pas, hein, qu'ils allaient me mettre en première ligne ? » « Je l'avais envisagé mais pas aussi vite… enfin, pas avant que tous NOS témoins aient été entendus… » « Ça veut dire quoi, Justin ? Je ne suis pas le témoin de Pénélope ! » « Il ne faudrait pas que tu le deviennes ! » Sur cette sombre perspective, Harry avait été persuadé de l'intérêt de laisser Justin bosser !
« Vraiment ? Alors j'avais raison » - estima Dudley avec une visible satisfaction. « Ton vieil ami a craqué ! » Il pouffa. « Faut dire que avoir un loup-garou sous son toit semblait mettre le père de Luna dans tous ses états ! Je crois qu'il a posé toutes les questions imaginables ! »
Harry imagina Lupin face au vieil éditeur farfelu et il grimaça. Il aurait dû y penser ! Même si l'idée de Justin de planquer Remus là où personne n'irait le chercher parce que ça paraîtrait trop évident (chez son éditeur), et là où un service de communication pouvait le protéger – avait paru opérationnelle sur le moment.
« Tu crois qu'il est chez Justin ? » demanda-t-il à son cousin dans un soupir de remords. Ce dernier haussa les épaules tout en allumant ses ordinateurs.
« Je m'attendais presque à le trouver ici, mais s'il n'est pas venu vers toi, il doit être allé voir Mel et Hope », estima Dudley entrant des codes et des codes sur les trois claviers qui lui faisaient face sans même se retourner. « Je crois qu'elle est de nouveau sans travail… »
Harry mesura à quel point Dudley était maintenant impliqué dans les affaires sorcières, combien il en savait sur les différents protagonistes - sans doute plus que lui sur certains sujets ! Le constat était déstabilisant : il ne le poussa pas plus loin. Harry se demanda plutôt s'il oserait aller chez les Hespero sans y être invité.
« Luna était débordée aujourd'hui », continua son cousin, le visage étrangement éclairé par la lumière de ses ordinateurs. « Ils doivent retirer 25 jours en urgence ! Il a été épuisé en deux jours, tu te rends compte ? Comme j'avais du boulot à finir… »
« …et que tu avais ta dose de Ronflaks cornus », termina Harry plus amusé que sarcastique.
Dudley se retournait avec un sourire entendu quand une étincelle jaillit au milieu des airs entre les deux cousins. Le temps que Harry sorte sa baguette, une silhouette était apparue dans les airs.
« M. Potter ? » s'enquit l'apparition avec autorité.
« Oui », répondit Harry, ravalant son indignation de voir le Ministère si ouvertement violer le 1er article du règlement de protection de la vie privée qui interdisait formellement la matérialisation (partielle ou complète) sans consentement préalable dans la demeure d'autrui – sauf cas de force majeure. Harry doutait que cette dernière réserve s'applique.
« Le Ministre veut vous parler, M. Potter »
« Le… à moi ? »
« Cette entrevue ne doit pas avoir de témoins », ajouta l'homme en jetant un regard désapprobateur à Dudley – et sans prendre la peine de répondre à la question de Harry.
« Mon cousin HABITE ici », objecta ce dernier avec fermeté.
« Il ne doit pas être là lorsque M. le Ministre arrivera… dans approximativement cinq minutes », précisa encore l'apparition qui n'avait jamais pris la peine de se présenter et sur un ton qui n'acceptait aucune contradiction.
Harry pesa rapidement ses options – quasiment inexistantes- et hocha la tête.
« Cinq minutes, M. Potter », rappela le sorcier, avant de disparaître dans une nouvelle étincelle.
« Mais tu l'entends ? » s'indigna Dudley. « Qu'est-ce qu'il croit ! »
« On n'a pas le temps, Dudley, tu dois partir ! » l'interrompit Harry sombrement.
« Ah ouais ? Je te connaissais moins soumis ! Et s'il venait pour t'enlever ? » - objecta Dudley.
La perspective amusa franchement Harry :
« Tu fréquentes un peu trop les Lovegood, Dudley ! Je ne pense pas que Fudge soit un grand combattant ! »
« Mais il ne viendra peut-être pas seul ! »
L'objection était plus intéressante et Harry hésita :
« Je devrais sans doute prévenir Justin », reconnut-il, raisonnant à haute voix, « mais j'imagine que les moyens de communications magiques sont coupés ou surveillés ! »
« Je peux lui envoyer un message, moi », proposa Dudley en sortant son téléphone de sa poche. « Je peux lui envoyer un SMS comme ça, Ron et Luna en recevront une copie ! »
L'efficacité du minuscule engin brillant que Dudley agitait dans sa main laissa Harry sans voix. Comme son cousin mettait immédiatement son projet à exécution, il répéta plus doucement :
« Après, il faut mieux que tu partes… »
« Tu crois pas que ce serait mieux que je me cache ici ? » demanda Dudley avec une suite dans les idées qui aurait surpris Harry s'il avait eu le temps d'y réfléchir. « Je peux laisser mon téléphone ouvert pour que Justin entende… Sans doute que votre fichu tribunal ne reconnaîtrait pas mon témoignage mais… »
Harry se rendit brusquement compte que Dudley avait profondément raison. Si Fudge venait le menacer d'une manière ou d'une autre, un témoin était utile – surtout que son cousin se trompait sur une chose : des centaines de Moldus avaient déjà été entendus par le Magenmagot !
« Tu ne peux pas me déguiser ou me rendre… transparent ? » demanda finalement Dudley avec un curieux espoir dans la voix.
Harry chercha dans sa tête une métamorphose ou un charme rapide, peu détectable et relativement stable sans grande dépense d'énergie pendant un temps raisonnablement long… Il n'y avait pas beaucoup d'alternatives.
« Je peux te rendre minuscule », proposa-t-il finalement à son cousin.
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« Potter… hem… Harry ? »
La voix de Fudge hésitait entre l'autorité et la sympathie ; mélange curieux du ton de leurs dernières entrevues et de celui de la première fois que Harry avait rencontré le Ministre sur le chemin de Traverse.
« Oui », dit simplement Harry en se retournant vers lui. Il s'appuya brièvement contre l'étagère – un peu pour cacher Dudley, un peu pour rassurer son cousin, un peu pour tromper son propre trac. Le téléphone, ouvert derrière les figurines, était un peu son viatique et Dudley, assis sur les genoux de Lamu était sa meilleure assurance. « Et si je bouge ?» avait murmuré Dudley quand Harry lui avait proposé de se cacher parmi ses figurines Manga. « Pour les sorciers, ce qui est très curieux, ce sont les objets totalement immobiles », lui avait assuré Harry.
« Harry, je… je peux vous appeler Harry ? » demanda le Ministre.
« Ça fait des années que vous le faites, M. le Ministre », constata le jeune homme, croisant les bras sur sa poitrine. Sa main droite tenait toujours sa baguette et Fudge loucha dessus.
« Je… je ne crois pas que ça soit nécessaire », protesta-t-il.
« Quoi ? Oh, ça ? » - demanda Harry comme s'il se rendait seulement compte de ce qu'il tenait dans sa main. « Excusez-moi, je ne savais pas trop à quoi m'attendre ! »
« Je suis venu en… paix », affirma Fudge les mains vides tendues devant lui.
En m'imposant ta présence ! En brisant les règles ! En exigeant le secret ! La paix de Fudge était armée !
« Acceptons-en le présage », rétorqua Harry, sarcastique et sans ranger sa baguette. Fudge attendit puis soupira :
« Harry, tu ne me fais pas confiance… »
« Non », admit Harry.
« Pourtant… Enfin mon garçon, ne vois-tu pas à quel point nos destins sont liés ? »
S'il avait été un Animagus, les poils de l'échine de Harry se seraient sans doute redressés ! Dans sa forme toute humaine, il ressentit une grande bouffée d'agacement. Il s'obligea à respirer profondément, certain que toute explosion le desservirait :
« Assez mal, M. le Ministre »
« Harry, Harry » Fudge avança vers lui, sans doute pour lui poser le bras sur les épaules et le jeune homme se sentit se raidir encore. Fudge sembla s'en rendre compte et interrompit son geste.
« Nous… il y a un grand malentendu entre nous ! » se désola le Ministre, en se mettant à marcher dans la pièce. « J'ai toujours eu beaucoup de sympathie pour toi, beaucoup d'admiration – un tel destin ! Et j'aurais été si heureux de… de t'aider – dans la mesure de mes pauvres moyens bien sûr… Mais Dumbledore ne voulait pas ! Il ne m'a pas laissé m'approcher de toi ! Il nous a séparés Harry ! »
Et, c'est sans doute une de ses décisions que je serai le moins enclin à critiquer ! - songea douloureusement Harry. Il à son tour fit quelques pas vers le centre de la pièce, pour se donner le temps de la réflexion, et aussi pour éloigner le Ministre de l'étagère où Dudley devait se faire microscopique.
« M. le Ministre, je suis très touché, mais je ne comprends pas ce que vous voulez », finit-il par dire. « Dumbledore est mort, Voldemort est mort… Tout ça, c'est du passé ! »
« C'est toi, Harry, qui réveille le passé… ce que notre passé a de plus…. douloureux ! » protesta Fudge.
« Je souhaite juste que la vérité soit connue », répéta Harry avec l'impression qu'il ne faisait que dire cela depuis des mois.
« Pourquoi ? »
« Parce que je crois qu'on ne gagne rien collectivement à vivre dans le mensonge ! Parce que beaucoup des idées qui ont permis à Voldemort….– Arrêtez de sauter en l'air à chaque fois que je dis son nom, c'est ridicule à la fin ! »
Fudge rougit et Harry se remit à marcher dans la pièce, agacé de sa propre colère. Il fallait rester calme, il fallait garder la tête froide, peser chacun de ses mots et pas se laisser embarquer dans une dispute stérile avec le Ministre de la Magie !
« Je pense qu'il reste beaucoup de préjugés et de non-dits qui avaient servis Voldemort en son temps et qui perdurent parce que personne ne dit à quel point ils sont dangereux », expliqua-t-il plus calmement.
Fudge le dévisagea relativement longtemps et Harry se demanda ce qu'il avait dit de si intéressant. Finalement, contre toute attente, l'homme sourit.
« Je sais ton amitié pour ce Lupin – sans doute que sans parent proche vivant, on s'accroche facilement à ceux qui peuvent en parler ! Mais crois-tu vraiment que la question est la lycanthropie ? »
« Les loups-garous, les elfes, les centaures et tous les autres ! » - affirma Harry, s'emportant de nouveau plus rapidement qu'il l'aurait souhaité.
« Tout ça pour ça ! »
La moutarde était particulièrement forte…. Harry éternua :
« Ça et la mémoire de Sirius… mais qu'importe mes raisons ! La question est plutôt pourquoi ça vous fait si peur, M. le ministre ! »
Le sourire supérieur de Fudge se figea.
« Je n'ai pas peur ! »
« Qu'est-ce que vous faites là, alors ? »
« Tu crois que j'ai peur ! Moi ! » Fudge secoua la tête. « Si j'ai peur c'est pour toi, Harry ! Comme je te l'ai déjà dit, je… je voudrais t'aider ! »
Le regard sombre que Harry lança en réponse à cette introduction valait sans doute tous les développements.
« Je m'inquiète de voir un jeune homme comme toi, qui a déjà tellement souffert ! - gâcher son avenir ! » - termina malgré tout le Ministre, « se perdre en luttes….stériles ! »
« Je ne lutte que pour la vérité sur la mort de mes parents et l'honneur de mon parrain » cracha Harry – parce que même les plus puissants mantras ont leurs limites !
« Mon garçon, mon garçon… Black est une erreur ! Une triste erreur… ! Soit ! Mais qu'est-ce que ça changera… d'en faire une affaire d'Etat ? »
Une affaire d'Etat ? Brutalement, Harry décida que tous ceux qui voyaient dans cette affaire l'occasion de se débarrasser de Fudge devaient être exaucés.
« C'est vous qui en faites une affaire d'Etat, M. le ministre ! Moi, je ne demande que l'arbitrage du Magenmagot… »
« Est-ce que tu sais Harry, que nous avons déjà reçu plus de 25 demandes de réouverture de procès de la période 79-82 ? Crois-tu que nous avons les moyens de démêler les vrais des faux Mangemorts ? »
« Il est vrai que cette tâche ne vous a jamais beaucoup intéressée ! »
« Mais enfin, Harry ! Tu es un Auror ! Tu sais bien que ce genre de mouvements… »
« Ecoutez, Fudge, je ne cherche pas à défendre qui que ce soit ! Je ne sais pas si ces 25 personnes ont été envoyées à tort ou à raison à Azkaban ! J'espère même que c'était à raison ! J'espère qu'on peut croire dans notre justice ! »
Fudge lui parut rétrécir et il se rendit compte qu'il avait hurlé et levé les bras en l'air - brandissant ainsi sa baguette. Harry inspira profondément pour retrouver son calme. Il se demanda combien de minutes la transformation de Dudley allait encore tenir. Il ne pouvait plus perdre trop de temps !
« Je ne vais pas passer ma journées à discuter avec vous ! » reprit-il d'une voix dans laquelle il avait forcé le calme. « J'ai d'autres projets. Mais j'attends toujours de savoir ce que vous voulez ? »
Le Ministre britannique de la Magie hésita puis se lança, en essayant de cacher son hésitation :
« Je voudrais comprendre ce que tu veux, Harry » commença-t-il. Ce que veut le Survivant ! - estima Harry, on dirait Pieternel… « Faire exploser la cohésion de notre société qui a tant souffert ? Pourquoi perturber sans cesse nos concitoyens, les faire douter ? »
« En fait, vous avez peur qu'ils réfléchissent », ironisa Harry. « Manquerait plus qu'ils reviennent sur la confiance qu'ils vous accorde, c'est ça ? »
Fudge blêmit :
« Ah, c'est ça ! Tu veux ma place ! Je le savais ! »
Ce sera de ta faute, pensa Harry sombrement avant de répliquer :
« Il me semble difficile de faire pire que vous ! »
La mine apeurée de Fudge lui apprit qu'il avait fait mouche. Que ce dernier, se voilant la face comme à son habitude, avait espéré un accord amiable, et était en train de se rendre compte que ce ne serait pas le cas. Harry se demanda avec une impression de froid au niveau de l'estomac, jusqu'où ce politicien ambitieux et borné serait prêt à aller pour conserver son pouvoir. Qu'est ce qui allait l'emporter chez l'inconsistant personnage : l'ambition ou la trouille ?
« Méfie-toi Harry » commença péniblement Fudge quand la respiration lui revint.
Harry voulait bien le croire : Il avait sans doute été inutilement agressif, inutilement menaçant… Justin se ferait un devoir de lui sonner les cloches.
« …tu te crois peut-être arrivé… »
Si Fudge tombait, des inconscients le proposeraient peut-être pour remplacer le Ministre ! Harry e sentit près de la nausée : non seulement parce qu'il ne saurait pas quoi leur répondre, mais aussi parce que remplacer Fudge paraissait une tâche démesurée.
« Mais crois-moi, je n'ai pas dit mon dernier mot ! »
Harry n'avait aucune idée de ce que Fudge, désespéré comme il le paraissait, pourrait imaginer comme réplique. Mais sans doute, il n'est pire d'adversaire qu'un dragon blessé ! Heureusement, il avait des objectifs plus pressant : se débarrasser dans les plus bref délais du futur ex-Ministre, avant que Dudley ne panique ou retrouve son gabarit habituel.
« Eh bien, voilà au moins un message clair » - répondit-il, le plus calmement qu'il put.
« Tu découvriras trop tard que ta chère clarté n'est qu'un leurre » cracha Fudge avant de transplaner.
« Eh bien, il doit être l'heure d'aller voir Justin », conclut Harry à voix haute, bizarrement soulagé par la radicalisation du conflit.
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La suite – on a toujours le droit d'annoncer la suite ? – s'appelle : « ce qu'on lit dans le journal »… un peu de Tam, pas mal de Parvati, beaucoup de Justin...On peut dire que Harry s'y retrouve encore sur tous les fronts !
