Contribution : Isa'ralia Faradien


#10 - Avortement
(Zannah, 17 ans, headcanon)

Zannah n'en revenait toujours pas, même plusieurs heures plus tard. Elle ne pouvait chasser de ses pensées ce maudit test rapide de grossesse qui lui était revenu positif.

Elle se trouvait sur Serenno depuis quelques jours, et elle avait décidé de s'occuper de ce retard de règles qui la tracassait avant de repartir pour Ambria. Une pharmacie lui avait vendu un test de grossesse, et la jeune Sith s'auto-flagellait mentalement pour ne pas avoir pris ses précautions. Elle était désormais en quête d'un centre de planning familial discret, qui pourrait lui permettre d'accéder à son droit fondamental à l'avortement.

Beaucoup de portes s'étaient déjà fermées devant elle, car personne n'avait voulu se mettre dans l'illégalité en accédant à sa demande immédiatement, alors même qu'ils étaient tous contraints de respecter un délai de réflexion d'une semaine, qu'elle refusait de prendre. Elle serait bientôt de retour sur Ambria, et elle pourrait difficilement en repartir sans éveiller les soupçons de Bane.

Finalement, de fil en aiguille, Zannah s'était tournée vers une sorte de marché parallèle. Quelques médecins acceptaient de falsifier leurs dossiers et de prescrire les deux médicaments nécessaires à toute IVG médicamenteuse.

Sa précieuse - et illégale - ordonnance en main, la jeune apprentie entra dans une nouvelle pharmacie pour obtenir les médicaments en question. Elle avait également réclamé une prescription de pilule contraceptive, en attendant de pouvoir de nouveau, entre deux missions, s'occuper plus sérieusement de ce volet primordial de sa santé. Elle songeait déjà à une pose de stérilet, moins contraignant.

Elle retourna ensuite à son vaisseau, et s'empressa de prendre le premier comprimé de la procédure, celui de mifépristone. D'après ce qui lui avait été expliqué, cette molécule allait ramollir son col de l'utérus, préparer son muscle utérin aux contractions et favoriser le décollement de l'embryon.

La seconde phase pouvait attendre qu'elle ait rejoint le calme d'Ambria. Il s'agirait, entre trente-six et quarante-huit heures plus tard, de prendre l'autre comprimé, celui de misoprostol. Celui-ci déclencherait les contractions et expulserait l'embryon.

.

Cela faisait bien deux jours que Zannah était de retour sur Ambria, et les médicaments faisaient clairement leur effet. Le jour se levait paresseusement à l'extérieur de sa tente, et elle-même aurait dû quitter son lit pour prendre son petit-déjeuner et attaquer une nouvelle journée d'entraînement.

Les douleurs des contractions étaient abominables. Elle était pourtant tout sauf douillette. Combien de sales blessures avait-elle récoltées au cours de sa vie...

Elle accueillait pourtant la douleur comme une véritable leçon, une de celles que Bane ne pourrait jamais lui enseigner. Elle n'avait pas su être prudente, et elle en payait désormais les conséquences. Comme toujours, elle apprendrait ensuite de cette erreur pour avancer, encore plus forte et préparée qu'auparavant.

Serrant les dents, Zannah se redressa avec difficulté. Assise au bord de son lit, elle se baissa avec raideur pour enfiler ses bottes. Heureusement, elle avait pris quelques précautions la veille au soir, et elle portait quelques protections périodiques épaisses, qu'elle devrait pourtant bientôt changer.

Elle parvint à se mettre debout, mais sa posture était quelque peu affaissée, penchée vers l'avant pour atténuer instinctivement les tiraillements dans son ventre. Elle quitta finalement sa tente, à pas lents.

Bane se rendrait rapidement compte de son état. Il était bien trop observateur pour que cela lui échappe.

.

- Tu n'es pas concentrée sur ta méditation, aujourd'hui, apprentie, remarqua-t-il finalement à voix haute.

Zannah tressaillit, puis espéra immédiatement que Bane, assis face à elle, n'avait pas ouvert les yeux.

- Je le reconnais, Maître, admit-elle en baissant la tête.

Elle ouvrit les yeux, et jeta un regard furtif à Bane. Lui aussi avait interrompu sa transe, et la fixait, les sourcils froncés.

- Quelle est cette douleur que tu laisses t'envahir et te contrôler ?

- Des menstruations plus douloureuses que d'habitude, répliqua Zannah, les dents serrées. Je vous promets que je vais me concentrer mieux que cela, Maître.

- S'il t'arrive quelque chose de pénible et d'inhabituel, tu peux te sentir libre de m'en faire part. J'ai une certaine marge de tolérance.

- Ce n'est pas la douleur qui va m'empêcher d'avancer, siffla-t-elle avec hargne.

- Et tu n'aurais aucun intérêt à la laisser te dévorer. Pourtant, elle ne doit pas être ignorée, car elle peut être révélatrice de quelque trouble médical important.

- Je sais que ce n'est rien d'inquiétant, Maître.

- Comment peux-tu en être aussi certaine ?

- Parce que c'est moi qui l'ai provoquée, avoua-t-elle finalement. C'est un avortement.

Zannah plaqua immédiatement les deux mains sur sa bouche. Elle avait été trop directe à son goût, alors même que cette affaire ne concernait en rien Bane.

- Je suis navrée de vous avoir embêté avec ça..., s'excusa-t-elle.

- Ce n'est en rien un événement négligeable dans la vie d'une femme, répliqua Bane. Cela demande beaucoup de ressources à ton organisme, en plus des inquiétudes morales qui peuvent s'en mêler.

- Je ne regrette pas ma décision, lui assura Zannah. C'était la seule solution, car avoir un enfant n'a jamais été dans mes projets. Je serai d'ailleurs plus prudente à l'avenir.

- Je sais que tu as déjà appris une leçon de ton erreur, et que tu ne la commettras plus jamais. Maintenant, je te laisse le choix de méditer tranquillement sur celle-ci dans ta tente, ou bien de rester à mes côtés pour poursuivre ta formation, même si pratiquer le combat au sabre-laser ne me semble pas approprié dans ton état de santé.

- Je ne suis pas malade, objecta-t-elle. Je ne vois donc pas pourquoi je changerai mes plans pour la journée.

.

Zannah avait rarement connu une séance de combat au sabre-laser aussi éprouvante, mais également aussi brève. Il était clair que Bane avait retenu ses coups contre elle - et elle espérait que ce n'était pas par pitié, mais pour ne pas abîmer la santé de son héritière -, mais pourtant, cela ne lui avait pas permis de tenir sur la durée. Elle rentra rapidement dans sa tente, penaude, défaite, presque humiliée par la situation.

Elle se débarrassa rageusement de ses bottes et se roula en boule sur son lit de camp. Ce ne fut qu'à cet instant qu'elle se rendit compte que son pantalon était taché de sang, ce qui n'était pas visible lorsqu'elle était debout et que sa tunique souple couvrait cet endroit de son corps. Elle se releva difficilement pour changer ses protections et ses vêtements.

Finalement, elle put se remettre dans son lit, alors même que le soleil n'était pas couché et que le repas du soir n'avait pas été servi. Elle se sentait exténuée, vidée de toute substance. Son orgueil avait été plus fort que sa raison, et elle avait passé la journée à se battre contre les lois de la nature, qui lui recommandaient un repos de tout instant dans de telles épreuves physiques.

Douleur et fatigue lui donnèrent même envie de pleurer de rage et de frustration. Elle ravala cependant ces larmes. Elle était une apprentie Sith, nom de la Force !

Rapidement, elle sombra dans un demi-sommeil agité, chaque crampe l'empêchant de véritablement fermer l'œil. Elle n'eut plus aucune conscience du temps, et elle sursauta lorsqu'une grande main calleuse se posa sur son épaule.

Bane se tenait au-dessus d'elle, son expression indéchiffrable, un bol de soupe dans son autre main.

- Il n'est pas bon de sauter un repas lorsque l'on perd du sang, dit-il avec une certaine douceur.

Zannah hocha faiblement la tête, et se redressa de nouveau. Il lui semblait que la douleur s'estompait peu à peu, mais la fatigue, elle, ne s'en allait pas. Même assise, elle vacilla, et la main libre de Bane la retint fermement. De son autre main, il lui tendit le bol fumant, dont elle s'empara avec reconnaissance.

Bane lui serra presque affectueusement l'épaule avant de s'en aller.