Le Tigre et ses Démons

9


Le lendemain matin, après une nuit blanche, Kôjiro sortit de bonne heure, il faisait encore noir dans le ciel, mais justement ! Il ne mit que quelques minutes, à arriver devant la maison des Wakashimazu et armé de quelques cailloux, il frappa la fenêtre de Ken quelques secondes. L'autre avait le sommeil léger et il ne voulait pas risqué d'attirer l'attention du paternel. Une tête ébouriffée sortit de l'embrasure, en grommelant.

- Descends ! Dépêche-toi ! »
- Mais… »
- Tais-toi et descends ! »

Un Ken à moitié comateux s'habilla rapidement et sortit de la maison par sa fenêtre atterrissant vers son Capitaine qui le défiait d'un regard amusé.

- Tu as confiance en ton capitaine ? »
- Oui… »
- Alors ferme les yeux, et suis-moi ! »
- Mais je… »
- Je te guiderais ne t'en fais pas, suis-moi c'est tout et ne pose pas de question. »

Kôjiro lui tendit la main et Ken ferma les yeux, comme demandé. Il se laissa entraîner dans la course de son capitaine, sans rien demander de plus, de toute façon, Kô ne semblait pas vouloir en dire plus sur la destination ou le pourquoi du comment. Tout ce qu'il sut, c'est qu'après une dizaine de minutes de marche en direction de l'est de la ville, son capitaine s'arrêta. Il s'attendit à l'entendre parler et lui expliquer, mais rien, au lieu de ça, le corps de Hyûga glissa dans son dos et ses bras se refermèrent sur son corps légèrement transi par la fatigue et la fraicheur de la nuit. Kôjiro Hyûga siffla un air, tendre et triste à la fois, les yeux toujours clos, Ken laissa sa tête partir en arrière, contre l'épaule robuste de son ami. Il se sentait bien, un frisson le parcourut quand deux lèvres chaudes lui chuchotèrent au creux du cou :

- Tu peux ouvrir les yeux. »

Ils étaient dans le parc, en face du lac, le soleil commençait à peine, à poindre son nez, l'eau était rouge orangée, le spectacle était tout simplement magnifique. Ainsi donc, son capitaine l'avait emmené voir un levé de soleil ? Avait-il conscience du romantisme étrange que ce moment pouvait dégager ? Kôjiro s'assit par terre et prit Ken dans ses bras, ils restèrent là à ne rien dire jusqu'à temps que le soleil soit totalement levé.

- Capitaine… »
- Chut ! Pardonne-moi ! Je n'ai pas de cerveau, que des hormones d'après ce qu'en dit ma mère… A vrai dire je ne sais pas ce qui m'a pris. Juste une chose me martelait l'esprit, j'avais envie de te toucher. Ken des fois je suis complètement imprévisible et des fois je fais des choses que je regrette, j'ai peur un jour de te faire du mal… »
- Capitaine… »
- Si un jour je t'en fais, promet-moi de me foutre un pain dans la gueule ! »
- Capitaine ! »
- Ken, je ne veux pas te faire pleurer, jamais plus ! Alors promets-le-moi ! »
- Je te le promets… »
- Ken ? »
- Hum ? »
- Je peux ? »

Ken émit un sourire gêné, il ferma les yeux, Kôjiro attrapa sa tête et posa ses lèvres sur celles du goal, dans un baiser tout aussi chaste que le premier, leurs lèvres s'effleurèrent un long moment, l'emprise du Tigre s'affirma avec le temps, jusqu'à ce que Kôjiro franchisse toutes les barrières qu'il s'était imposées et qu'il ne dévore le corps entre ses bras. Des larmes lui montèrent lentement aux yeux, sous cet acte qu'hier encore il aurait qualifié de répugnant. Non, il se sentait si bien… Il n'y avait pas de mal d'embrasser un homme, tant que c'était Ken.

- Capitaine ? »
- Hum ? »
- Je t'aime. »
- Je sais… »
- Et toi ? »
- Je n'en sais rien, et je m'en fiche ! »

Hyûga avait dit ça d'une façon brusque, mais sa voix était chaude et rauque. Il passait et repassait sa main dans la longue chevelure ébène, il adorait les cheveux de Ken, ils étaient doux…
Ils passèrent la journée, allongés dans le parc, sans se préoccuper du regard des autres, se parlant, se touchant, s'embrassant, Kôjiro lui fit enfin part de tout ce qu'il avait sur le cœur, de ses doutes, de ses peurs, de cette fureur en lui, de ses démons… Ken avait happé toutes les paroles du Tigre, enfin, enfin le Tigre se confessait, il se dévoilait, Ken était heureux, si heureux qu'il en aurait pleuré, pas à un seul moment le football n'avait était mentionné, pas une seule fois le mot ballon n'avait franchi ses lèvres, il découvrait enfin l'enfant qu'il aurait dû connaître, il y a quelques années, c'était un Kôjiro timide, fragile et apeuré…
Ils regardèrent le coucher du soleil main dans la main puis se quittèrent à regret.

- Kôjiro ? »
- Hum ! »
- Je vais voir une amie de longue date à Hokkaido, j'emmène les enfants avec moi, on part pour le week-end, j'ai laissé de quoi manger. »
- Tu me préviens que là ? »
- Ça c'est décidé aujourd'hui ! Invite-le ! J'ai rangé ma chambre, vous serez mieux que dans la tienne ! »
- Mais MAMAN ! »
- Ho ! Ne me dit pas que tu n'y penses pas ! »
- Mais ce n'est pas une raison ! »
- Bon on y va ! Vous êtes prêt elle va arriver d'un moment à l'autre ! Au faite, il y a tout ce qu'il faut pour… dans le premier tiroir de la table de chevet ! »
- Oui ! A dimanche Oni-san ! »

Kôjiro se mit à rougir, sa mère lui lança un dernier regard et attacha les manteaux de ses trois enfants. Le Tigre se leva avant que sa mère ne quitte l'appartement, il avait besoin de lui exprimer un doute.

- Heu… »
- Tout va bien se passer, tu verras, t'as lu le livre non ? Alors respire à fond, prends ces clefs et va le chercher ! Bon les enfants la voiture est là ! »
- Maman, merci… »
- Allez les enfants, on monte ! »

Kôjiro resta un moment à regarder la route maintenant déserte. Il n'était pas sûr d'arriver jusque-là avec Ken, d'ailleurs en y pensant, il se rappela l'avoir vu... enfin, Ken avait tout l'air d'un... ou tout du moins il ne devait plus être... Kô se frotta le crâne mélangeant sa chevelure nerveusement. Il n'avait jamais... et si jamais... Si il continuait ainsi, il allait rester tout le week-end seul, alors il ferma la porte de chez lui et se mit à courir partit en direction de la maison de Ken. Il resta sur le pas de la porte un moment, ressassent tout ce qu'il ressentait avant de se décider à sonner et de clore une bonne fois pour toute ses problèmes de conscience.

- Oui, oui j'arrive ! »
- Ken, viens ! »
- Où ? »
- Chez moi ! »