Point de vue : Mia
Je me réveillais péniblement, dans la pénombre de la pièce, le corps lourd et les yeux à moitié endormis. Mon corps se réveillait difficilement et se trouvait dans le même état que dans ce lit d'hôpital. Je m'apretais à revivre une vague de panique face à ces sensations désagréables et ce nouveau trou noir lorsque je reprenais mes esprits. Je comprenais que je m'étais assoupie et que j'avais dormi d'un sommeil de plomb toute l'après-midi en remarquant les derniers rayons du soleil traverser les voiles de rideaux de ma chambre. Mon cœur retrouvait sa course normale en sentant ensuite le souffle chaud et les bras protecteurs de Charlie qui m'avait visiblement escorté jusqu'à mon lit et s'était laissé aller au même sommeil que moi, contre moi.
Je restais immobile et silencieuse pour voler un peu plus de ce moment. Ses bras n'avaient pourtant plus de secrets pour moi, pour les avoir eu toutes ces nuits sur l'Île ou sur la plage quelques jours plus tôt mais pour la première fois il n'y avait que lui et moi, dans le confort et l'intimité nouvelle de mes draps en satin et je ne pouvais pas me retenir de rougir à cette pensée.
J'étais restée dans cette position plusieurs dizaines de minutes lorsque je sentais Charlie revenir lentement de sa sieste. Je remarquais le changement de rythme de sa respiration sous ma main, j'entendais l'accélération soudaine de son cœur sous mon visage et je sentais ses mains reprendre leurs douces cajoleries sur ma peau.
"Je ne savais pas que tu étais le genre d'homme à t'inviter dans le lit d'une femme sans permission", j'avais relevé la tête et je regardais Charlie avec malice. Dieu qu'il était beau sous cette lumière, son visage reposé sur mes coussins et ce sourire si envoûtant sur ses lèvres.
"Sans permission ? Tu refusais de me lâcher avec ton air d'adorable koala", Charlie me répondait de sa voix encore ensommeillée, en me serrant encore plus dans ses bras et en déposant plusieurs baisers sur le sommet de ma tête avec une spontanéité et une tendresse qui me faisaient tourner la tête.
"Tu t'es endormie sans prévenir ce midi. Comment est-ce que tu te sens ?", Charlie m'avait retourné pour mieux me regarder. Je souriais en comprenant qu'il savait désormais que j'avais plus de mal à mentir avec son regard sur le miens et je ressentais un stress assez intense en constatant ce nouveau stade d'intimité.
"J'ai l'impression d'être passée sous un train mais je vais mieux", je m'étais mise à rouler jusqu'au bord du lit pour fuir la situation et regagner la salle de bain mais je vacillais au même moment et je sentais l'instant d'après les bras solides de Charlie me retenir de la chute et me ramener sur le lit après ce vertige.
"Mieux ? Vraiment ? Vas-y doucement Mia s'il te plaît. Dis-moi ce qu'il te faut, je m'en occupe", je le regardais avec toute l'affection que je ressentais en ce moment. Je réfléchissais à sa proposition et j'en profitais pour afficher un sourire espiègle qui serait de nature à l'inquiéter.
"Un bain moussant… des bougies parfumées...et...une pizza", j'entendais Charlie soupirer de soulagement et rire de mon caprice innocent.
"Je m'attendais à bien pire venant de toi", je relevais le sous-entendu et je fermais les yeux au baiser qu'il déposait sur ma joue mais c'était effectivement et bizarrement tout ce dont j'avais besoin et envie pour le moment. Je le regardais ensuite depuis mon lit faire couler l'eau savonneuse de la baignoire de ma terrasse, allumer mes photophores puis quitter la chambre après un baiser furtif sur mon épaule.
"Je reviens vite avec la livraison de Madame".
Dans d'autres circonstances, Charlie n'aurait jamais été autorisé à ressortir de ce lit sans avoir donné à mon corps tout ce dont il rêvait depuis un an, mais ce soir j'appréciais et je remerciais la chasteté inhabituelle qu'il mettait dans ses baisers et ses caresses. Je pensais que je pourrais m'habituer à ce qu'il s'occupe de moi de cette façon, sans arrière-pensée.
Je profitais de son départ ensuite pour me déshabiller et rejoindre l'eau brûlante du bain. La musique, les odeurs et la chaleur de l'eau étaient une bénédiction après cette sieste interminable. J'en venais à comparer ce bien-être à mon premier bain après le sauvetage. Le moment était mal choisi pour me replonger dans ces souvenirs désagréables et je décidais plutôt de me concentrer sur ce sentiment de régénérescence et sur les rythmes suaves de la musique en fermant les yeux.
J'étais tirée de mon sommeil ensuite par une envie soudaine de me gratter le nez et je tombais sur le regard doux et très proche de Charlie qui me souriait de façon beaucoup trop craquante, les bras croisés sur le rebord de la baignoire. Je voyais une pointe d'écume sur mon nez et sa main savonneuse comme preuve évidente de culpabilité et je ne trouvais rien à dire pour le sermonner.
"La pizza de Madame est arrivée".
"Je me suis encore endormie", je répondais à Charlie avec un air coupable, en reprenant mes esprits et en chassant la mousse sur mon nez. Je réalisais également sa proximité et la situation dans laquelle je me trouvais malgré moi, le corps entièrement nu, à portée de main de l'objet de tous mes désirs.
"Mais tu ne t'es pas noyée, c'est une bonne nouvelle, j'ai été inconscient de te laisser sans surveillance", je voyais Charlie se concentrer difficilement sur mon visage avec un teint rougissant et un sourire presque timide. Le moment était incroyablement érotique et je sentais mon cœur tambouriner dans ma poitrine, stimulé par cette mise en scène romantique. J'avais d'abord entrepris instinctivement de répartir de façon plus appropriée la mousse au-dessus de mon corps puis je repensais à tous ces regards et gestes contradictoires qu'il accumulait depuis son rejet implacable au feu de camp. Si mon corps était fatigué, mon cœur l'était encore plus et avait besoin de réponse alors je décidais qu'il était temps de mettre à l'épreuve ma théorie ainsi que la détermination de Charlie.
"Tu peux me passer mon peignoir ?", je désignais du regard le peignoir blanc qui était posé derrière lui et j'attendais qu'il se retourne pour me lever et sortir complètement de l'eau, les bras le long de mon corps en exposant mon corps totalement dénudé. Charlie se retournait et se figeait de surprise face à ma tenue d'Eve. Je le voyais baisser son regard plus bas puis beaucoup trop bas et remonter péniblement ses yeux au ciel en serrant la mâchoire. J'attendais patiemment qu'il réagisse et choisisse sa prochaine action avec un air faussement innocent. Je le regardais soupirer et se rapprocher avec un sourire amusé et séduisant au possible, qui me mettait à l'épreuve en retour. Charlie dépliait docilement le peignoir et me le passait délicatement sur les épaules. Je manquais un nouveau vertige face au regard irrésistible qu'il me jetait. Je retrouvais mon sérieux et j'avais le cœur entre les cuisses en sentant ensuite et contre toute attente ses mains passer autour de ma taille puis serrer la lanière du peignoir avec une assurance, une fermeté et une envie lourds de promesse.
J'étais ensuite partagée entre la déception et le soulagement d'avoir vu toutefois passer sur son visage toutes les dernières preuves dont j'avais besoin. Je l'avais reconnu et j'en étais convaincue : Charlie avait envie de moi. S'il n'avait rien tenté ce soir pour des raisons qui m'échappaient, je savais que ce n'était plus qu'une question de temps avant qu'il ne change d'avis et je sentais un poids immense quitter ma poitrine après cette conclusion.
Point de vue : Charlie
J'étais sur le pas de porte, de retour du restaurant avec notre commande, quand je lisais ce message de Harry
"Tout va bien ?".
Je m'amusais de constater qu'il avait fait l'effort de tenir toute la journée avant de prendre de ses nouvelles. Harry s'apparentait ces temps-ci au parfait cliché du grand frère castrateur et de mon point de vue, c'était bien mieux que celui d'amoureux secret que j'avais redouté. Je me décidais donc à lui répondre mais de façon adaptée aux circonstances.
"Dans elle. Je te redis ça une fois terminé", je montais les escaliers en même temps que je m'amusais de lire sa réponse quasi-instantanée
"Je vais me faire vomir à cette pensée d'abord et je rentre te péter les dents ensuite pour l'entorse au règlement".
Je rangeais mon téléphone, les pizzas en mains, en arrivant dans la chambre de Mia. Ma première pensée avait été l'inquiétude en la trouvant absente de son lit mais je comprenais rapidement qu'elle avait simplement changé de pièce en entendant la musique s'élever de la terrasse. Je ne m'étais pas attendu à cette scène ensuite en ouvrant la baie vitrée. J'avais fait tous les efforts du monde depuis ce feu de camp pour chasser mon flux incontrôlable de pensées lubriques et je finissais ce soir sur une mise à l'épreuve aussi redoutable. J'avais en face de moi cette vision divine de Mia, endormie paisiblement dans son bain, bercée par la musique et éclairée par la lumière douce des bougies. Je voyais ses sous-vêtements en dentelle négligemment posés au sol et je la devinais complètement nue sous cette mousse qui caressait la surface de l'eau et la recouvrait subtilement.
Mia avait cédé à la fatigue pour la deuxième fois de la journée. Une vague de tendresse me parcourait en la voyant si vulnérable et une vague de culpabilité ensuite pour avoir eu l'inconscience de la laisser seule dans ce bain plein à ras bord alors que j'avais connaissance de ses épisodes de somnolences et de vertiges.
J'avais été incapable de repartir et de résister à cette envie irrésistible de me rapprocher de cette baignoire. J'aurai pu faire demi-tour pour respecter son intimité mais j'avais besoin d'être près d'elle et de m'occuper encore d'elle, après les dangers qu'elle venait d'affronter.
Je m'agenouillais à sa hauteur, les bras contre le rebord de la baignoire et je profitais de son sommeil paisible pour admirer encore plus la femme de mes rêves. Mia était envoûtante avec ses traits délicats, ses lèvres parfaites légèrement entrouvertes, ses boucles brunes collées sur sa nuque et ces gouttelettes d'eau qui ruisselaient sur son cou. Je rêvais de la rejoindre dans ce bain, de sentir son corps contre le mien et de laisser s'exprimer toute la tendresse que j'éprouvais pour elle ce soir.
J'étais fou de cette femme et je ne savais pas combien de temps j'allais encore tenir avant de lui avouer. J'étais tiraillé entre l'envie de me libérer de ce poids et la crainte de la perdre après mes révélations. Je pouvais dire que je lui plaisais aux avances qu'elle me faisait et aux gestes tendres qu'elle me rendait mais je savais également que Mia avait toujours repoussé et congédié les hommes qui lui en demandait trop. C'était là tout mon problème car je voulais tout d'elle. J'aurais été incapable de me contenter de quelques nuits et d'une simple aventure et je ne savais pas ce qu'il en était pour elle. Je me perdais dans ces pensées sinueuses et me disais qu'il fallait très vite qu'elle sorte de ce bain pour me permettre de reporter ce dilemme à plus tard.
"La pizza de Madame est arrivée", je décidais de la réveiller en déposant une pointe de mousse sur son nez, en limitant au maximum les contacts physiques qui pourraient me faire perdre pied. Je l'avais vu replacer la mousse avec pudeur sur son corps et je faisais tous les efforts du monde pour ne pas m'intéresser aux parties de son anatomie qui s'étaient révélées à ses premiers mouvements. Je la regardais sortir de son sommeil et remuer son nez de la façon la plus craquante qui soit et je notais son air gêné et surpris en me voyant.
"Je me suis encore endormie",
"Mais tu ne t'es pas noyée, c'est une bonne nouvelle, j'ai été inconscient de te laisser sans surveillance"
"Tu peux me donner mon peignoir ?
Je trouvais effectivement que c'était une très bonne idée et j'étais soulagée de la voir pour une fois si sage et angélique. Je me sentais hors de danger pour ce soir jusqu'à ce que Mia ne prenne une nouvelle initiative malheureuse aussitôt mon dos tourné. Elle me mettait au supplice une fois de plus en me servant sur un plateau l'objet de tous mes fantasmes. Elle était encore plus parfaite et désirable que dans mes souvenirs. Mon corps réagissait immédiatement à la vue de ses courbes de rêve et de la douceur évidente de sa peau tendre et hâlée. Je me sentais lourdement à l'étroit dans mon pantalon. Je ne savais pas si je devais me laisser berner par son faux air innocent mais je rejoignais Harry sur le fait qu'elle n'était pas en état de subir mon assaut aujourd'hui. Je savais également que mon cœur n'était pas encore prêt pour cette épreuve de feu. Je commandais donc mon corps et je trouvais péniblement la force de la fixer et surtout de la rhabiller. J'espérais qu'elle comprenne, à l'intensité de mon regard et la fermeté de mes gestes, que je luttais contre une envie brûlante.
Je finissais par un baiser tendre et chaste sur son front en coupant court au silence pesant qui régnait depuis quelques instants
"Ta pizza est en train de refroidir", et je la regardais sourire au sous-entendu et quitter la terrasse non sans un avertissement subtile à mon attention
"Je suis d'accord avec toi, ce serait dommage de la faire attendre davantage", et c'est bien ce que je soupçonnais : cette femme était l'enfant de Satan.
Nous étions maintenant sur la terrasse, installés sagement dans le canapé, à des coins opposés. J'avais mes mains posées sur les jambes de Mia et j'étais incapable de me retenir de les caresser.
"C'est la meilleure pizza de toute ma vie. Mon dieu ce que c'est bon !", je m'amusais de la voir tourner de l'œil en engloutissant sa dernière part avec un appétit féroce et un plaisir sincère.
"Tu penses ça parce que tu n'as pas encore goûté à cet italien en bas de chez moi. Je te garantis que celle-ci est d'une fadeur sans nom à côté", j'essayais de garder les pieds sur terre et de ne pas repartir dans mes pensées lubriques, après ce temps beaucoup trop long à regarder les mouvements de sa bouche et de sa langue.
"Si c'est vrai, je t'ordonne de m'y amener samedi prochain", mon cœur ratait un battement en réalisant le sens de ses paroles car je réalisais que les derniers événements n'avaient rien changé à sa décision. Mia rentrait bien avec nous après-demain. Je n'avais pas encore eu le temps d'apprécier la nouvelle et j'intériorisais une danse de la joie à cette perspective. J'étais aussi rêveur et soulagé de constater qu'elle envisageait des moments ensemble, après l'Ile et le Mexique.
"Samedi prochain, c'est noté...J'ai du mal à réaliser que tu rentres. Ça me parait beaucoup trop beau pour être vrai", et je la regardais rougir.
"Et ça aurait dû arriver plus tôt. J'appréhende un peu pour être honnête. La vie ici est à des années lumières de Paris."
"Qu'est-ce qui t'as fait changer d'avis ?"
"Julia, Harry, Théo… toi", elle n'imaginait pas le bien fou que me faisait ses mots.
"Pourquoi est-ce que tu n'es pas rentrée plus tôt ?"
"Le temps est passé beaucoup plus vite que je ne l'avais prévu. Je pensais juste prendre quelques semaines pour….tu sais régler mes problèmes médicaux. Et puis le deuxième mois est arrivé sans que je ne le vois venir et ainsi de suite. J'ai pensé rentrer à plusieurs reprises mais plus le temps passait et plus j'appréhendais vos réactions. Je me sentais affreusement coupable d'avoir abandonné Harry, de ne pas répondre à vos appels avec Théo. J'imagine que ça aurait pu durer encore une éternité si Julia n'était pas venue frapper à ma porte il y a trois semaines pour me sortir de cette bulle d'illusions"
"Ne t'inquiète pas tu n'as pas manqué grand-chose", j'essayais de la rassurer avec mes mensonges.
"Non c'est sûr. Juste l'enterrement de mon amie, la dépression de mon meilleur ami, l'hospitalisation de Théo, quelques attentats et la fin du monde moderne", je la regardais en retour avec un air compatissant et désolé.
"Tu vois. Tu étais donc bien mieux ici. Tu ne dois pas regretter, cesse de te torturer avec ça. Tu en as suffisamment fait pour tout le monde. Je t'assure que Harry et Théo ont su se débrouiller sans toi, même si tu leur a terriblement manqué. On a connu bien pire".
"Et toi ?", je ne m'étais pas attendu à ce qu'elle me pose la question. J'étais habitué à ce que ses préoccupations ne portent que sur Harry et Théo. C'était ce qui nous avait rapproché. C'était comme ça sur l'Île. Je passais mes journées à la rassurer, à veiller sur Harry et Théo pour la soutenir et la soulager. Je n'étais pas sûr de bien comprendre également le sens de sa question : si elle voulait savoir comment s'était passé mon retour ou si elle m'avait manqué. Je l'entendais reprendre et changer de sujet en voyant que je ne répondais pas à sa question.
"J'ai essayé de te contacter. La 2ème semaine. J'étais pourtant déterminée à te laisser en paix après ton retour en France mais j'ai eu un moment de faiblesse. Je n'avais plus le courage ce matin-là d'affronter les événements seule et il n'y avait personne de mieux placé que toi pour me comprendre et me soutenir. Je suis tellement honteuse d'avoir osé t'appeler. Catherine a répondu à ta place et j'ai raccroché aussi vite. J'aurais pu te causer encore plus de tort si elle m'avait entendu.
Je suis désolée Charlie de t'avoir poussé à fauter ce jour-là. Je sais que tu n'es pas ce genre d'homme, j'ai toujours été la première à le respecter et l'admirer et je regrette vraiment de t'avoir mis dans cette position.
Si je devais être encore plus honnête avec toi je te dirai que j'en ai eu envie dès le premier jour où je t'ai vu mais je n'aurai jamais osé quoique ce soit en dehors du contexte de fin du monde dans lequel nous étions. J'ai été la pire des égoïstes et des idiotes ce jour-là.",
Mia baissait le regard de honte et de gêne après ces aveux et elle ne pouvait pas voir à quel point j'étais bouleversé par ses révélations. Elle avait cherché à me contacter moi. Pas Harry, ni Théo, moi et je ne savais pas ce que je devais en déduire. Je mourrais de regret de n'avoir pas décroché le téléphone ce jour-là alors que j'avais pourtant passé tout mon temps à le veiller dans l'espoir qu'elle me contacte. Je voyais très exactement le jour dont elle parlait car j'avais rompu avec Catherine la première semaine de mon retour. Ça ne pouvait donc être que ce dimanche où elle était venue déménager ses affaires de chez moi. J'étais paralysé ensuite de l'entendre m'avouer que son initiative ce jour-là était le fruit d'un désir inavoué qu'elle mûrissait depuis le premier jour de notre rencontre tout comme moi, et non d'un geste de désespoir lié à notre condition sur l'Ile. J'étais complètement perdu dans mes pensées et mon analyse et j'écoutais difficilement la suite de ses confessions.
"Julia m'a dit que vous aviez rompu. Dis moi qu'elle ne t'a pas quitté à cause de ce que je t'ai forcé à faire et que je ne suis pas une horrible garce", je voyais Mia s'enfoncer un peu plus encore dans l'assise, rougissant de honte et de remords. Je me décidais à sortir de mon mutisme pour l'empêcher d'aller plus loin dans ses égarements.
"J'ai rompu avec elle dans la semaine qui a suivi notre retour. Crois-moi si je te dis que ma décision n'avait rien à voir avec les regrets ou la culpabilité. J'ai juste réalisé un certain nombre de choses sur l'Ile dont le fait que je ne voulais plus être avec Catherine. C'est tout. Je n'allais pas continuer une histoire en sachant ça, c'est aussi simple que ça.
Et j'ai mal de t'entendre dire toutes ses bêtises à ton sujet. D'abord, absolument rien n'est horrible chez toi et tous les hommes de cette planète seraient d'accord avec moi et ensuite, tu es la plus belle âme que je connaisse et tu l'as prouvé à maintes reprises sur cette Ile. De mon point de vue, je dirais que tu tiens plutôt à la limite de l'ange démoniaque que de l'horrible garce", je la regardais sourire tête baissée. J'avais un peu honte de ne pas lui dire que je n'avais rien avoué à Catherine et je prenais un moment pour choisir les mots justes pour la suite de mes propos, parce que je ne tenais plus de tous ces non-dits et sous-entendus avec elle.
"Mia...je ne regrette absolument rien de ce moment avec toi. Ce qu'il s'est passé dans ce bassin était sublime et tu as la mémoire très altérée si tu penses aujourd'hui que je me suis forcé. J'aurais recommencé tous les jours d'après si tu me l'avais demandé...", je m'étonnais de la facilité avec laquelle j'avais livré également mes confessions. J'avais gardé pour moi la partie où je tombais fou amoureux d'elle mais je me sentais déjà plus léger. Je ressentais les frissons sur sa jambe après mes derniers aveux, je la voyais entrouvrir la bouche sous l'effet de la surprise et je brûlais d'impatience d'entendre sa réaction.
"OH MA BEAUTÉ, TU ES RÉVEILLÉE, TU VAS MIEUX ?", Julia venait de faire irruption bruyamment sur la terrasse, suivie de Harry et Théo. C'était un euphémisme de dire que j'étais extrêmement frustré d'avoir été interrompu à un moment aussi décisif de notre soirée. Je faisais semblant d'écouter la joyeuse bande nous raconter sa journée mais j'étais dans mes pensées et incapable de prendre part aux discussions. Mia semblait aussi absente et je la voyais au bout de quelques minutes se retirer en saluant tout le monde, après un dernier regard entendu à mon attention. C'était une conclusion qui devait être reportée à plus tard.
