8) La forêt

Les deux hommes sortirent de l'eau, se séchèrent et reprirent leur exploration, détendus et heureux.

Ils arrivèrent à la lisière de la forêt et marquèrent une pause, hésitants. Puis le major s'y engagea et Rodney suivit, savourant déjà la fraîcheur du sous-bois. C'était une belle forêt peuplée d'arbres géants, de fougères et de buissons chargés de baies.

-Dites major, vous croyez qu'elles sont comestibles ? S'enquit Rodney penché sur des fruits d'un rouge éclatant. On dirait un peu des groseilles. Je me demande si c'est bon.

-McKay, vous n'allez pas y goûter quand même ? S'écria le major alarmé.

-Mais non, major, pour qui me prenez vous, pour un inconscient ?

-Pour un inconscient, ça je ne sais pas mais pour un gourmand, j'en suis sur ! J'en ai bien eu un exemple tout à l'heure !

Le scientifique se tortilla, gêné. Maintenant le major n'allait pas se priver de lui rappeler l'incident du chocolat, histoire de le taquiner de temps en temps. Ah, il n'avait pas fini d'en entendre parler de cette affaire !

-Major, vous allez me la ressortir souvent, celle-là ?

-Aussi souvent que j'en aurai envie, McKay. D'ailleurs, j'y pense, il vaudrait mieux éviter de l'ébruiter, ça ferait jaser..dit le major d'un ton taquin.

-Major, que faut- il que je fasse pour que vous oubliiez cette histoire ? demanda le scientifique excédé.

-Ca dépend, jusqu'où êtes-vous prêt à aller, Rodney ?

-Euh, je sais pas…

-Vous ne savez pas ou bien vous ne voulez pas savoir ?

Le major plaisantait, Rodney en était sûr. Il pouvait l'entendre sourire. Il savait qu'il n'était pas sérieux mais il préféra cesser cette conversation qui commençait à prendre un double sens et qui le mettait mal à l'aise. Et puis il avait un doute : avec le major, c'était parfois difficile de savoir ce qu'il pensait vraiment.

John dut s'en apercevoir car il cessa de taquiner le scientifique et reporta son attention sur l' environnement. Oui, c'était véritablement une belle forêt, éclatante, saine, propre. ( John se surprit d'avoir eu cette pensée, comme si cela n'était pas naturel de se promener dans les bois sans y découvrir de vieilles boites de conserves, des cartouches, des pneus ou encore d'anciennes carcasses de voitures rouillées ).

C'était une forêt vierge de toute civilisation.

Des animaux s'y ébattaient, peu farouches. John sourit en découvrant un couple d'écureuils qui sautaient de branches en branches, rapides et agiles.

Les deux hommes s'arrêtèrent un moment et Rodney sortit une gourde de son sac.

-Tenez major, buvez.

Ce dernier tendit la main pour prendre la bouteille quand Rodney stoppa net son geste.

-Major, major, balbutia t'il. Major, votre main, je la vois!

Le major Sheppard en resta sans voix, abasourdi. Il reprenait son apparence normale. Il redevenait visible. Un large sourire éclaira son visage. Rodney était aux anges. Fou de joie, il serra le major contre lui.

-Oh major, je suis si heureux pour vous !

Sheppard, indécis, se décida et entoura le scientifique avec ses bras. Il baissa la tête et sa joue rencontra celle de son ami. Il resserra son étreinte et laissa courir ses lèvres sur la peau douce et chaude quand il sentit Rodney se tendre brusquement entre ses bras. Il allait le questionner quand il sentit le danger.

C'était trop tard. Il étaient cernés par un groupe d'individus étranges, menaçants et hostiles, armés d'arcs pointés sur eux. L'arme de John reposait près du sac, impossible de s'en saisir.

Un homme qui semblait être leur chef s'approcha et les dévisagea, intrigué. Puis il s'agita et donna des ordres. Un indigène s'avança vers Rodney et lui tendit une écorce creuse remplie d'un curieux liquide violet. Il fit signe au scientifique de boire. Ce dernier secoua la tête. Ils le saisirent, le forcèrent à s'agenouiller et introduirent de force le liquide dans sa bouche. Rodney se sentit vaciller. Ses yeux papillotèrent et il eut juste le temps de se rendre compte que le major subissait le même sort avant de sombrer dans l'inconscience.