Hello,
Me revoilà avec un nouvel OS écrit dans le cadre d'un autre fest' organisé par FESTUMSEMPRA, sur le thème « FLUFFY » cette fois-ci.
Il fallait choisir un gif en tant que défi, intégrer des mots tirés d'une colonne au choix, et tourner une roue pour se voir remettre un "cliché/lieu commun/trope" au hasard.
Toutes les œuvres participantes à cette édition sont disponibles sur AO3 dans la collection Fluffy_Fest :
archiveofourown (point) org / collections / Fluffy_Fest
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Bonne lecture !
PS : à lire en écoutant la version de Sinatra de Have Yourself A Merry Little Christmas💕
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Out of Sight
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Des murs couverts de livres.
Des étagères pleines de photos de famille et souvenirs d'amis.
Des compte-rendus d'audience disséminés aux quatre coins de la pièce.
Et un fauteuil placé sous une fenêtre ; un bouquin encore ouvert oublié sur l'accoudoir.
Depuis le canapé, Drago laissait ses yeux parcourir la pièce. Une pièce qu'il découvrait pour la toute première fois, mais dans laquelle il se sentait étonnamment bien.
Presque comme s'il y avait déjà sa place.
Ce n'était peut-être qu'une impression, un sentiment accentué par le paysage enneigé qu'il pouvait apercevoir à travers la vitre, par ce sapin beaucoup trop décoré trônant près de la cheminée, ou par cette vieille mélodie s'échappant d'un tourne-disque ensorcelé.
Have yourself a merry little Christmas, let your heart be light…
Derrière le velours de cette voix, Drago parvenait à l'entendre, explorant sa cuisine à la recherche d'une cuillère de miel dont il pouvait aisément se passer, mais qu'elle tenait à trouver.
Dans l'air, la menthe poivrée de son thé se mêlait aux effluves sucrées de son chocolat chaud.
Drago inspira.
Il y avait quelque chose derrière cet accord à l'harmonie parfaite, derrière ces deux tasses bêtement posées l'une contre l'autre. Une chose à laquelle Drago s'habituerait volontiers ; si ces deux yeux dorés lui en laissaient la possibilité.
Assis sur la table basse, dans l'ombre de leurs deux tasses, il veillait.
Lui. Le véritable propriétaire des lieux. Celui qu'elle surnommait l'homme de sa vie, après chaque désillusion.
L'increvable Pattenrond.
Drago s'adossa dans le canapé, parcourant du regard cette fourrure bien trop criarde à son goût. A croire que sur cette table se tenait un énième Weasley.
"Il était temps qu'on se rencontre, toi et moi."
Imperturbable, immobile, Pattenrond ne répondit que d'un simple plissement d'yeux.
Subtil, léger – menaçant .
"Tu penses déjà à ce que tu pourrais me faire subir ?"
Se tenant sur la table comme il se tiendrait sur le monde, Pattenrond continua de le toiser avec froideur et mépris.
"Très bien." Drago reposa son bras gauche sur le dossier du canapé, un sourire au bord des lèvres. "Je t'écoute. Qu'est-ce que tu comptes faire ? Pisser sur mes affaires à chaque fois que je mettrai les pieds ici ? Grogner dès que je m'approcherai d'elle ? Est-ce que mes chaussures finiront au fond de ta litière et ma baguette dans la cheminée ? Ou encore mieux, est-ce que moi aussi je dois m'attendre à retrouver des cadavres de rats dans le fond de mes poches ?"
Drago esquissa un nouveau sourire, incontrôlable cette fois-ci. Il la revoyait, ce matin-là. Raturant parchemin après parchemin, renversant encrier sur encrier, elle avait passé des heures à marmonner derrière son bureau, les yeux légèrement fatigués, mais les sourcils résolument froncés.
"C'était pour qui le coup des rats déjà ? Smith ?"
Encore un de moins, avait songé Drago, derrière son propre bureau.
"Tu sais qu'elle a passé des jours à se demander où tu les avais trouvés ?"
Pattenrond n'eut aucune réaction. Toujours immobile, seule sa queue flottait dans les airs, effleurant la table avec élégance et suffisance.
Si Drago avait été aussi naïf que tous les autres, peut-être aurait-il pu voir en Pattenrond un chat simplement hostile à la présence d'un inconnu. Et alors, peut-être aurait-il pu croire, comme eux, que le temps adoucirait ses craintes.
Mais Drago n'était pas naïf, et Pattenrond bien plus qu'un chat hostile. L'homme de sa vie , oui. Ou plutôt, celui ayant savamment précipité la fuite de tous les prétendants à ce poste.
"Est-ce que moi aussi tu vas essayer de m'étouffer pendant la nuit si un jour j'ai le privilège de la passer ici ?"
Drago haussa un sourcil, les yeux toujours rivés sur ces oreilles dressées, ce museau écrasé, ces yeux menaçants.
De toutes les manoeuvres de Pattenrond, c'était celle que Drago avait préférée. De loin, la plus efficace.
Abandonnant le dossier du canapé, Drago se pencha vers lui. "Alors ?"
La queue de Pattenrond se posa sur la table, avec la même délicatesse que les notes de violons s'échappant du tourne-disque. Ses yeux jaunes quittèrent ceux de Drago et se posèrent sur les deux tasses se trouvant juste devant lui. Leurs tasses.
Il les observa un instant, jusqu'à ce que l'une de ses pattes ne se glisse entre elles et que, lentement, il ne les éloigne l'une de l'autre.
Fixant de nouveau Drago, Pattenrond se leva, s'étira, s'avança. Et se rassit juste entre elles.
Amusé, impressionné - s'il fallait vraiment l'admettre - Drago laissa un léger rire lui échapper. "Quelque chose de nouveau, donc. Logique. Tu n'en as jamais fait fuir deux de la même manière."
Pattenrond releva fièrement le menton. Dans le coin de sa gueule, un croc apparut. Comme s'il souriait.
Non, pas comme si. Bien sûr qu'il souriait. D'un sourire altier, arrogant, suffisant.
Drago se radossa dans le canapé, perdu dans les souvenirs de plusieurs sourires similaires et familiers. Aucun doute, si ce chat venait un jour à s'approcher du Choixpeau, ce dernier n'aurait sûrement pas à hésiter.
"J'ai compris ce que tu faisais après le départ du troisième..."
Des chœurs s'élevèrent du tourne-disque et Drago l'entendit de nouveau invoquer ce pot de miel qu'elle ne possédait manifestement pas.
"... Et pourtant, après tout ce que tu as fait, elle reste persuadée que rien de tout ça n'était volontaire. Elle pense que ce n'était qu'une façon de - je la cite - réagir à l'arrivée de plusieurs éléments extérieurs perturbant ton équilibre environnemental ."
Drago secoua la tête, un sourire sur les lèvres. Un sourire identique à celui qu'il avait esquissé en l'entendant chuchoter, quelques secondes avant son plaidoyer, que ces rats morts n'étaient rien de plus que des cadeaux. Une tentative de trêve ratée avec le dernier abruti partageant sa vie.
Le dernier ayant osé l'inviter, songea Drago.
Son sourire fana, un long soupir lui échappa, et son regard retrouva les photographies jonchant les étagères.
Drago détailla chacune d'elles. Ses parents, Pattenrond, Potter, un nombre considérable de Gryffondors, et encore plus de Weasley.
Mais aucune de lui.
"Ça va faire deux ans qu'on partage le même bureau."
Drago s'attarda sur l'une des photos. Un quai de gare figé où elle se tenait fièrement, souriant à pleine dents dans son uniforme de première année.
"Elle t'a peut-être raconté les nombreuses fois où on a failli s'entretuer."
Drago observa une nouvelle photographie, prise quelques années plus tard, à Poudlard cette fois-ci. Un cliché mouvant de Potter, Weasley et elle, enlacés et riant aux éclats dans ce qui semblait être leur salle commune.
"On a passé des semaines à remettre en cause toutes les décisions que l'autre prenait, tout en sachant pertinemment qu'on aurait pris les mêmes. On ne s'adressait la parole que pour se balancer des reproches qui n'avaient pas lieu d'être, si bien que notre assistant a parfois été forcé d'insonoriser la pièce pour que nos hurlements ne dérangent pas tout l'étage."
Une nouvelle photo lui arracha un sourire. Tout aussi fièrement que sur le quai de la gare, elle tenait entre ses mains ses deux diplômes de droit, moldu et sorcier.
"Je ne me rappelle plus quand tout ça a changé. Je me rappelle seulement la voir arriver un matin et déposer sur mon bureau une tasse de thé. Un thé à la menthe poivrée, avec une cuillère de miel. Exactement comme j'ai l'habitude de le boire. Elle a déposé cette tasse et est simplement allée s'asseoir derrière son bureau, un chocolat chaud à la main. Comme si de rien n'était. Comme si c'était… normal."
Le regard de Drago glissa vers une autre photo. Une coupure de journal célébrant sa première victoire devant le Magenmagot, quelques mois avant le début de cette collaboration forcée.
"J'ai fixé cette tasse comme un con pendant des heures, cherchant à me rappeler quand avait cessé les reproches et les hurlements. En vain… Je ne sais plus à partir de quand j'ai préféré voir ses joues rougir de colère à cause d'une plaidoirie, plutôt qu'à cause de mes conneries. Je ne sais plus quand j'ai commencé à relever les yeux de mes dossiers juste pour l'observer travailler. Ni quand j'ai commencé à préférer les lundis matin aux vendredis soir."
Ces vendredis soirs où Drago l'avait regardé partir aux bras de ces hommes ne prenant jamais la peine de complimenter les robes qu'elle s'efforçait d'enfiler, tandis que derrière son bureau, Drago sentait son cœur s'emballer.
Plissant légèrement les yeux, il chercha à la distinguer parmi la foule présente sur l'une des dernières photos. Il la repéra finalement, coincée entre Weasley et sa femme, un enfant bien trop roux dans les bras.
"Je ne sais plus à partir de quand j'ai détesté la savoir auprès d'un autre. Je sais juste que ça fait plus d'un an que je suis soulagé de les voir disparaître les uns après les autres."
Drago abandonna l'étagère pour retrouver les yeux dorés d'un Pattenrond toujours aussi immobile.
"Je ne peux pas te reprocher d'avoir fait ce que tu as fait. J'aurais probablement agi de la même manière si j'avais été à ta place. Je comprends que tu ne veuilles pas la partager, surtout avec des abrutis pareils. Ces crétins ne la méritaient pas."
Le regard de Pattenrond se fit encore plus condescendant qu'il ne l'était déjà.
"Détrompe-toi, je ne suis pas en train de te dire que moi je la mérite. Je ne vaux certainement pas mieux."
Surpris, les yeux de Pattenrond s'arrondirent enfin. Drago se pencha vers lui, approchant son visage du sien.
"La seule différence, c'est que contrairement à eux, je n'abandonnerai pas. J'ai connu pire, tu sais. Alors quoi que tu puisses trouver, j'encaisserai. Parce qu'elle en vaut la peine. Parce qu'il n'y a que quand elle me regarde que j'ai l'impression de pouvoir devenir quelqu'un. Quelqu'un d'autre, quelqu'un de bien. Et j'ai envie d'être quelqu'un de bien, Pattenrond. Pour elle."
Le regard de Drago retrouva brièvement les étagères et cette dernière photo qu'il avait jusqu'alors évité de regarder. Celle d'un couple en noir et blanc, se tenant devant une petite chapelle, en costume et robe de mariée.
"Hier soir, j'ai annoncé à mes parents que je ne pouvais pas épouser Astoria… Je fixais cette bûche au chocolat posée au beau milieu de la table du réveillon et, comme depuis des mois, comme à chaque seconde qui passe, c'était à elle que je pensais. Alors je– je me suis levé, et j'ai décidé de mettre un terme à cette putain de mascarade que je me croyais forcé d'accepter. Je me suis levé, et j'ai fait un choix. Un choix. Moi. Et c'est elle, Pattenrond. C'est elle que je choisis. Avant mon nom, avant ma fortune. C'est elle, mon choix. Et tu ne peux pas me le refuser." D'un signe de tête, Drago désigna la cuisine. "Elle, si. Mais c'est pour ça que je suis là. Je veux savoir si je peux être le sien. Je veux savoir si j'aurais un jour la chance de la voir lire dans ce fauteuil, de l'aider à décorer ce sapin jusqu'à ce qu'on ne puisse plus voir que c'en est un, et surtout, d'être avec elle sur ces putain d'étagères. Même si c'est à côté de Weasley, même si je dois porter son gosse sur toutes les photos… Parce que je la veux elle, et bien plus encore. Je la veux toute entière, Pattenrond. Et pour ça, je suis prêt à supporter tout ce que tu me feras endurer."
Drago termina sa tirade à bout de souffle. L'un en face de l'autre, Pattenrond et lui se fixèrent, mais là où le regard de l'un brillait d'impatience, le regard de l'autre resta désespérément vide.
Commençant à douter du génie qu'il prêtait à ce chat depuis des mois, Drago éloigna son visage du sien ; mais dès l'instant où il s'adossa dans le canapé, Pattenrond se leva et sauta sur ses cuisses pour venir s'y lover. Ebahi, Drago le regarda s'enrouler sur lui-même, son museau s'enfouissant sous sa queue.
La mélodie grésillante s'envolant du vieux tourne-disque s'atténua peu à peu, laissant place au silence et aux ronronnements d'un Pattenrond visiblement endormi.
Drago esquissa un sourire. Délicatement, il laissa ses doigts parcourir cette fourrure à laquelle il pourrait s'habituer, maintenant que ces deux yeux dorés lui en laissaient la possibilité.
"Joyeux Noël à toi aussi, sale bête."
Dans la cuisine, un cri victorieux résonna, à l'instant même où le tourne-disque ensorcelé redémarra.
Have yourself a merry little Christmas, let your heart be light,
From now on, our troubles will be out of sight.
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Je dédie cet OS à celle qui aime sûrement plus Pattenrond que Pattenrond lui-même, celle que vous connaissez déjà (si ce n'est pas le cas, j'ai une question : qu'attendez-vous bordel ?), celle dont le génie surpasse à chaque fois mes attentes, j'ai nommé TheWhiteQuill !
J'espère qu'il vous aura plu autant qu'à elle :)
PS : A celles et ceux lisant Home et attendant depuis… juillet (aïe, ça pique de l'écrire), je suis toujours en vie. Ne vous en faites pas, cette fic n'est pas abandonnée. I'LL BE BACK, PROMIS !
