Résumé du chapitre précédent :
Harry Ron et Hermione découvrent Poudlard en ruines et prennent la mesure des pertes humaines. Accablé par la culpabilité il fuit la Grande Salle pour trouver du réconfort dans les paroles sage de Kingsley.
Alors qu'Harry se promène dans le parc, il est attaqué par deux Mangemorts qui ne s'avouent pas encore vaincu. Blessé, Harry reçoit le soutien sans faille de Ginny, et celui plus surprenant de Drago Malefoy.
Harry n'arrivait pas à ouvrir les yeux. Il se sentait faible, mais il se doutait qu'il avait été transporté, en effet, il reconnaissait le confort qui apportait un lit douillet. Il ressentait la douleur dans ses membres, mais il avait l'impression d'être hors de son corps et éprouvait la sensation de planer au-dessus de lui-même. Harry savait qu'il n'était pas seul, car il concevait une agitation désagréable autour de lui.
— Comment va-t-il ?
C'était la voix lointaine du professeur McGonagall.
— Madame Pomfresh a réussi à arrêter l'hémorragie. Une plaie causée par un maléfice cuisant, il a eu de la chance, répondit Ron en soupirant.
— Sectumsempra j'imagine, ajouta Hermione tremblante.
— Et Greyback ? Et Rowle ?
Cette fois-ci, c'était Ginny qu'il entendait beaucoup plus proche que les autres. Harry sentit la chaleur des doigts de la jeune femme qui entouraient sa main lourde.
— Envolés. Kingsley Shacklebolt m'a rapporté que vos frères ont failli mettre la main sur Greyback, mais Rowle a réussi à blesser Percy… Ne vous inquiétez pas Miss Weasley, il va très bien, ajouta rapidement le professeur McGonagall. Vos parents sont en bas avec lui, ils s'inquiètent de l'état de Potter.
Ginny avait serré plus fort la main de Harry.
— Professeur, que vont devenir les victimes et les blessés ? demanda Hermione.
— Poudlard est maintenant un lieu de réfugiés et de familles éplorées Miss Granger. Nous avons aménagé certaines salles de classe encore intactes afin qu'elles puissent accueillir les défunts. Quant aux cadavres des autres, ils ne se trouvent déjà plus dans l'enceinte de cette école, le ministère de la Magie a fait rapidement le nécessaire. Certaines familles sont cependant reparties. Je viens d'accompagner Mr et Mrs Crivey jusqu'aux portes du château, dit-elle d'un ton plus mesuré et lent, ils ont accepté — grâce au jeune Denis — que les guérisseurs de Ste-Mangouste s'occupent d'eux. Quant aux victimes les plus graves, elles sont également en cours de transfert. Les autres sont prises en charge ici à l'aide des renforts que nous a envoyés l'hôpital.
— Et le professeur Rogue ? ajouta timidement Hermione.
— Le professeur Rogue ? répéta le professeur McGonagall.
— Son corps est dans la cabane hurlante professeur, continua-t-elle. Vous devez le rapatrier au château. Nous devons lui offrir des funérailles décentes. Vous ne comprenez sans doute pas ma demande professeur, couina Hermione d'une petite voix aigüe devant le regard sévère de Minerva McGonagall, mais bientôt, Harry vous expliquera peut-être ce que nous avons fait et comment nous avons réussi à le faire.
Il y eut un silence qui sembla s'éterniser. Harry n'arrivait toujours pas à ouvrir ses yeux, mais ne savait pas non plus s'il en avait réellement envie. La présence de Ginny le soulageait et il préférait égoïstement profiter de la chaleur de sa paume.
— Bien Miss Granger, bien que ce ne soit pas — excusez-moi du peu — la plus brillante de vos idées, je vais tâcher de faire ce que vous me demandez, répondit sèchement le professeur McGonagall visiblement piquée au vif.
— Nom d'une gargouille difforme, jura Ron. Les Mangemorts qui s'enfuient, les blessés qui affluent, qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire ?
— C'est le prix de la guerre, monsieur Weasley, affirma le professeur McGonagall.
— Nous allons nous battre Ron, nous allons continuer pour reconstruire un monde meilleur, argumenta Hermione. Nous allons…
— Mais qu'est-ce qu'il se passe ici ?
— Pompom, je venais prendre des nouvelles de Mr Potter, se défendit le professeur McGonagall.
— Et vous en avez eu Minerva, ce garçon a besoin de repos. Beaucoup de repos, ajouta-t-elle plus fort. Il va survivre, à condition qu'il puisse se reposer pendant encore les quelques heures que la potion de Sommeil agisse. Vos parents vous attendent.
Des pas précipités s'éloignaient du lit de Harry, suivis par d'autres, un peu plus lents.
— Ginny ? demanda Ron.
— Allez-y, je ne le laisserais pas seul une fois de plus. Dis à maman et papa que je les retrouverais plus tard.
Les bruits s'évanouirent et bientôt Harry n'entendit plus rien. Il sentait la présence à ses côtés de Ginny qui lui tenait fermement la main. Puis lentement sans qu'il puisse s'en rendre compte il sombra de nouveau dans un sommeil profond.
Des ombres se dessinaient. Une voix, une voix aigüe et froide résonnait aux oreilles de Harry. Elle parlait dans un sifflement rapide, il ne comprenait pas ce qu'elle disait.
— Pas Harry, pas Harry pitié. Tuez-moi, pas Harry.
Il entendait un hurlement, le hurlement de sa mère, puis un rire hystérique. Il avait froid, de grandes silhouettes encapuchonnées l'encerclaient. Le brouillard était tombé sur lui. Un Détraqueur souleva sa capuche, sa main croutée et grisâtre glissant lentement.
— Spero Patronum, s'exclama Harry, mais il se rendit compte que sa baguette avait disparu.
Il voyait maintenant des corps entassés devant lui. Il reconnut Ron et Hermione. Les membres de la famille Weasley qui gisaient sur les marches du Grand Hall. Neville avec l'épée de Gryffondor logée dans sa poitrine. Ginny avançait vers lui, elle courait.
- Avada Kedavra
Un éclair de lumière verte jaillit, atteignant Ginny dans le dos. Elle s'écroula, ses yeux marron perdant de son éclat en regardant Harry. Rowle s'approcha.
— Ce n'est pas fini Potter. Le Seigneur des Ténèbres n'est plus, mais sa noirceur renaitra de nouveau. En attendant Potter, nous te traquerons toi et tous ceux qui te sont fidèles, et nous le vengerons.
Puis Rowle tourna sur lui-même et Harry vit apparaitre un corps plus grand, avec de longues mains pâles. Les fentes de ses narines étaient à peine visibles alors que sa bouche s'étirait en un large sourire froid. Ses yeux rouges le regardaient d'un air satisfait.
Tue-le ! Voldemort parlait à l'immense serpent qui avait jailli derrière lui et qui se précipita sur Harry.
— NON !
Harry se réveilla en sursaut. Il se débattait en faisant des gestes violents et incontrôlés alors qu'il voyait des formes diffuses qui dansaient devant ses yeux. Il repoussa ce qui l'empêchait de saisir sa baguette et un bruit sourd retentit et tandis qu'il se croyait libre de ses mouvements, deux mains lui plaquaient les épaules sur le matelas avec plus de forces encore. Il entendit un cri, puis des pas précipités. Il était maintenant maintenu plus fort, et ses gestes étaient entravés. Puis un liquide coula le long de sa bouche et on le força à boire. Alors lentement, son corps se détendit. Ses muscles ne répondaient plus, sa tête s'enfonçait plus profondément dans l'oreiller de plumes. Et de nouveau, le vide s'empara de lui.
Les rayons du soleil venaient réchauffer la joue de Harry. Ses paupières bougèrent et enfin il les ouvrit brusquement. La lumière de l'aube bien que douce le força à cligner des yeux plusieurs fois pour s'y habituer. Il avait le bras gauche engourdi. Il essaya d'attraper ses lunettes sur la table de nuit et quand il tourna la tête, il se heurta doucement à une crinière rousse flamboyante. Ginny dormait, dans une position qui lui paraissait inconfortable au vu de l'étroitesse des lits de l'infirmerie. Sa respiration paisible faisant soulever à un rythme régulier sa cage thoracique. Il remarqua qu'elle avait posé une main sur la peau de sa poitrine ce qui l'apaisait plus que toutes les potions que Madame Pomfresh pouvait lui fournir. Il entendit un ronflement sourd et vit Ron plus loin la bouche grande ouverte qui entourait de ses bras une Hermione pâle, mais profondément endormie également. Harry tenta de bouger doucement, mais Ginny avait dû le sentir, car brusquement les doigts de la jeune fille quittèrent son torse brulant. Elle se redressa et le regarda fixement. Harry était mal à l'aise, incertain de ce qu'il avait vécu dans son demi-sommeil. Elle mit son index sur ses lèvres en montrant de la tête Ron et Hermione qui n'avaient pas semblé remuer.
— Habille-toi, chuchota-t-elle. Et viens manger. Je t'attends dehors.
Harry regarda Ginny s'éloigner en acquiesçant. Il prit ses affaires posées sur la chaise à côté de son lit. Il entreprit de passer son jean et son vieux t-shirt lorsqu'il découvrit un bandage épais qui n'empêchait pas cependant son sang de continuer à couler lentement en considération de la tache sombre qui se formait. Il sortit de l'infirmerie sans bruit afin de ne pas réveiller ses amis. Ginny l'attendait comme promis. Et c'est en silence qu'ils avancèrent tous deux en direction de la Grande Salle. Harry regarda sa montre, il était à peine sept heures ce qui le fit s'arrêter.
— Il est trop tôt pour déjeuner, soupira Harry en essayant de ne pas accorder de l'attention à son estomac qui criait famine.
— Les choses ont changé, répondit Ginny en haussant les sourcils. Et je pensais qu'après un jeûne de plusieurs jours tu préfèrerais manger avant que la plupart des gens ne se réveillent.
Harry se réjouissait, avide de se remplir le ventre. Ils poursuivirent leur chemin sans un mot de plus. Harry regardait du coin de l'œil Ginny qui marchait à ses côtés. Elle avait l'air fatiguée. Elle aussi était pâle, et avait les traits tirés. Elle semblait préoccupée.
En arrivant dans la Grande Salle, les quatre grandes tables avaient été redisposées. Ginny avait eu raison, peu de personnes devaient être réveillées, car, quand ils entrèrent, il n'y avait que Kingsley Shacklebolt qui était assis à la table des Serdaigle. Il fit un signe de tête dans leur direction et retourna à la lecture de son parchemin, sa tasse brulante devant lui. Par habitude, Harry se dirigea vers la table de Gryffondor.
— Il faut passer commande, ajouta Ginny.
Harry qui avait déjà vu le professeur Dumbledore le faire lors d'un banquet de Noël n'hésita pas à demander aux elfes de maison de faire apparaitre un bon petit déjeuner. Ginny et lui prirent le temps de savourer en silence leurs assiettes et leurs tasses de thé. Quand Harry soudain se rappela vaguement son rêve, mais surtout très nettement l'altercation qui s'en était suivie. La gorge nouée il regarda Ginny qui le fixait sans dire un mot.
— Tu étais là n'est-ce pas ? C'est toi qui me maintenais ? demanda-t-il horrifié.
Elle acquiesça, toujours silencieuse. En fouillant dans sa mémoire, il reconstituait la scène.
— Je suis désolé, bredouilla-t-il. Je ne t'ai pas fait mal ?
— Non, mais tu ne te laissais pas faire. Quand je suis tombée, j'ai cru que je n'arriverais pas à te calmer. Heureusement, maman, papa et Madame Pomfresh n'étaient pas loin et m'ont entendu crier sans eux je n'aurais pas réussi à te redonner une goutte de potion.
— C'est pour ça que Ron et Hermione étaient là, pour te protéger si ça recommençait ? dit-il tristement en passant une main maladroite dans ses cheveux de jais.
— Non. Ils étaient là, car ils s'inquiètent pour toi, répondit la jeune fille d'un ton cinglant, ses narines se dilatant légèrement. Harry, tu es resté inconscient une journée entière. Et puis tu te mets à hurler mon nom, en te débattant et couvert de sueur ! Nous étions obligés de te rendormir. Nous avons eu peur. J'ai eu peur ! sa dernière phrase n'était plus qu'un murmure si bien qu'il ne savait pas si elle lui était réellement adressée.
Ginny avait la voix tremblante qui trahissait l'angoisse ou la fureur, Harry n'aurait su le dire. Ce qu'il était sûr par contre c'est qu'elle le regardait intensément. Son regard accentuait le malaise qu'il ressentait. Jusqu'à quel point lui en voulait-elle ? Car il était certain qu'elle n'avait pas quitté son chevet. Qu'elle était restée à ses côtés pendant son séjour à l'infirmerie, préférant le veiller plutôt que de retrouver sa famille. Elle avait perdu un de ses frères par sa faute et c'est lui, Harry, qu'elle veillait au lieu de succomber à sa peine. Ginny était probablement une des femmes les plus fortes qu'il avait été donné à Harry de rencontrer peut-être était-ce dû au fait qu'elle était la seule fille d'une fratrie de sept, et qu'elle en était également la plus jeune. Sa dévotion pour les autres et le refus qu'on la protège lui assénaient une personnalité imposante, presque volcanique. Si Harry n'éprouvait pas de profonds sentiments pour elle, il en aurait eu peur. Peur d'être la raison de sa colère. Elle finit par respirer lentement ce qui la détendit quelque peu.
— Est-ce que j'ai le droit de savoir ce qu'il s'est passé pour que je sois obligée de me battre avec toi ? demanda-t-elle.
— Un cauchemar. Rien qu'un cauchemar, souffla-t-il.
Ginny le regardait d'un air crispé et Harry lui prit la main pour la rassurer.
— Ma cicatrice ne m'a pas fait mal, c'était… C'était horrible. J'ai revécu mes pires souvenirs, j'ai entendu ma mère, je vous ai vu tous mort j'ai vu Rowle te tuer, puis Voldemort. J'ai cru… j'ai cru que ça recommençait qu'il était toujours là. Je… je suis désolée Ginny, ajouta Harry dans un souffle.
Ginny le serra dans ses bras. Harry lui rendit son étreinte, soulagé de sentir contre lui la jeune femme. Il ne savait dire où se situaient les sentiments de Ginny à son égard, mais à cet instant il ne voulait que profiter de ce moment de bonheur.
Les portes de la Grande Salle s'ouvrirent à la volée. Harry et Ginny se séparèrent instantanément quand ils virent entrer Mr et Mrs Weasley qui étaient suivit de près par Ron et Hermione. Ron avait les oreilles rouges et Hermione les joues rosées, mais leurs visages étaient tendus.
— Harry mon chéri !
Quand elle le vit, Mrs Weasley fondit sur lui et le prit dans ses bras à la manière d'une mère. Elle le sera un peu trop fort au goût du jeune homme et surtout de son flan douloureux. Par-dessus son épaule Harry vit Mr Weasley émettre un soupir de soulagement, et ses deux meilleurs amis se détendre. Alors qu'elle relâchait son étreinte Mrs Weasley plongea le regard dans celui vert de Harry.
— Plus de traces de toi à l'infirmerie, lorsque Arthur et moi avons passé la porte ! Ton lit vide, Ron et Hermione…
Harry remarqua que ces deux derniers, visiblement gênés, sautillaient sur place, il pensa que le fait que Mrs Weasley ait pu les surprendre dans le même lit n'y était pas anodin.
— … toujours endormis, aucune trace de toi non plus jeune fille, ajouta-t-elle en se tournant vers Ginny et en la fusillant du regard. Est-ce que vous réalisez à quel point nous avons eu peur ? Après l'épisode que nous avons vu hier, nous avons songé qu'il se passait quelque chose ! Que tu t'étais mis en tête d'une nouvelle quête Harry ! Nous avons déjà perdu un fils, je refuse de perdre deux autres enfants !
Elle avait dit cela sous le ton de la colère, mais au fil de ses paroles, ses yeux s'étaient embués. Harry bien qu'il fût plus grand qu'elle d'une tête et demie, était redevenu un petit garçon qui supportait le sermon d'une femme qu'il considérait comme sa mère. Il ne put s'empêcher de penser au nombre de fois où les jumeaux avaient subi sa fureur et le visage de Fred s'accrocha devant son regard.
— Harry avait faim maman, il avait juste besoin de manger, dit Ginny sans sourciller devant Molly Weasley.
— Mrs Weasley, ajouta Harry, ce n'était qu'un rêve. Je ne partirai pas. Je ne partirais plus. Tout du moins pas sans en informer Ron ni Hermione.
— Ne me refais plus jamais ça Harry chéri ! termina Mrs Weasley en reprenant son étreinte qui fit cette fois basculer ses lunettes rondes.
Ils s'assirent tous à table pendant que la Grande Salle commençait à se remplir. Tandis que Harry répondait d'un signe de main ou de la tête aux bonjours que lui lançaient les arrivants, Ron et Hermione qui semblaient résolument ne plus se regarder, lui racontèrent la fuite des Mangemorts. Celui-ci se tut afin de ne pas révéler devant tout le monde qu'il se souvenait de quelques bribes et qu'il n'avait pas ouvert les yeux, préférant se concentrer sur la paume rassurante de Ginny qui tenait alors la sienne. Ils lui rapportèrent que Percy avait presque réussi à coincer Greyback tout seul, mais probablement que Rowle lui était venu en aide. Percy s'en était tiré avec une épaule démise et quelques fractures de côtes, rien que Madame Pomfresh ne puisse réparer en quelques minutes.
— C'est Rowle, ou bien un autre, se demanda Hermione l'air absent sa fourchette levée.
Harry mâchait en silence, pensif. Hermione avait raison, combien de Mangemorts avaient réussi à prendre la fuite ? Il avait été stupide de croire que la fin de Voldemort rendrait les Mangemorts moins dangereux. Lorsqu'il posa la question, Ron s'empressa de lui répondre :
— Mon vieux, on en a eu pas mal. Bellatrix Lestrange, et son beau-frère Rabastan, Rosier et Yaxley, compta Ron sur ses doigts, sans oublier Crabbe et Goyle Sénior, les dizaines de rafleurs sous leurs ordres. On a eu quelques loups-garous également, et les géants ne se sont pas fait prier pour repartir plus vite qu'ils ne sont arrivés. Mais beaucoup encore ont réussi à s'échapper.
Mr Weasley hochait la tête et approuvait les dires de son fils alors que le visage de Ron se ferma et que la colère déforma ses traits.
— Rookwood par exemple nous a échappé ! grogna-t-il en abattant son poing sur la table faisant sursauter Mr Weasley tandis que sa femme avait fait tomber sa tasse qui se brisa sur le sol de la Grande Salle, quant à Ginny elle regardait son frère en partageant le même regard triste qu'Hermione. Je n'aurais de répit que lorsque cet affreux bonhomme se retrouvera derrière les barreaux ou six pieds sous terre, ajouta-t-il les lèvres serrées.
— On l'attrapera, mon garçon. Nous y arriverons, murmura Arthur en posant la main sur l'épaule de son fils.
— Fred n'aurait certainement pas voulu que nous ne soyons pas à la fête et que sa disparition nous empêche de vivre. Il faut qu'on se relève, pour lui, dit une voix qui s'approchait d'eux.
George venait de se joindre à eux à la table. Le silence qui était tombé sur sa famille était pesant. Harry devinait qu'ils n'avaient pas dû ouvrir beaucoup la bouche depuis cette fameuse nuit. Il vit Ron et son père hocher la tête et Mrs Weasley serrer le bras de sa fille. Harry se sentait étouffer et réprima un haut-le-cœur, son corps refusait de se confronter à la réalité de la disparition de Fred. Bien sûr, il faudrait l'affronter, mais il ne se semblait pas de taille alors que toute la famille était réunie. Ce sentiment se renforça quand il comprit que George le fuyait du regard. Hermione vint au secours de Harry.
— Que vas-tu faire ? demanda-t-elle timidement.
— Aujourd'hui, pleurer. Mais demain, les gens auront besoin de rire, répondit George en s'éloignant en direction de son ami Lee.
— Les obsèques de Fred sont demain au cimetière de Loutry-Ste-Chaspoule, ajouta Hermione à l'intention de Harry. Ainsi que celles de Tonks et Lupin qui se tiendront chez Mrs Tonks.
— Et nous leur rendrons un merveilleux hommage, sanglota Mrs Weasley.
Harry acquiesça tandis qu'il refoulait une nouvelle vague nauséeuse et qu'il sentait la formation d'une boule dans sa gorge. Affronter les funérailles était un moment plus difficile encore que de se battre pour sauver sa propre vie. Sa peine commençait à ressurgir en pensant à Teddy qui était maintenant orphelin. Lui au moins il aurait une grand-mère et un parrain qui s'occuperaient de lui. Mais ils ne remplaceraient jamais l'amour de ses parents.
— Harry ! Mais tu saignes ! s'était écriée Hermione bien trop fort pour que l'information reste discrète aux oreilles de tous.
En baissant les yeux, il vit la tache de sang qui s'épandait sur son t-shirt et devina que le bandage n'avait pas suffi. Il sentait les regards des autres braqués sur lui, et le tintement des couverts avait momentanément cessé. L'ancienne attrapeuse de Serdaigle, Cho Chang qui se trouvait à la table voisine s'approcha d'eux.
— Je peux t'arranger ça, proposa-t-elle. Je ne suis pas encore une guérisseuse confirmée, mais je suis sur la bonne voie, assura Cho.
Cho et Harry avaient été un peu plus que des amis lors de la cinquième année de celui-ci. Elle était toujours aussi belle et même si leur relation avait été vouée à l'échec il était heureux que Cho demeure une personne sur qui Harry pouvait compter. Il fut très surpris de l'avoir vu se tenir avec les autres dans la Salle sur Demande après avoir répondu à l'appel de Neville, mais en était néanmoins content.
— Je vais m'en occuper, merci de ton aide Cho, dit Ginny d'un ton cinglant.
— Mais je… commença Cho.
— Merci ! répliqua-t-elle, un sourire carnassier sur le visage et en attrapant le bras d'un Harry perplexe qu'elle entrainait hors de la Grande Salle. Il ne maitrisait pas suffisamment la gent féminine pour percer tous les secrets des femmes, mais il décida de ne pas prendre le risque de tenter un regard d'excuse à l'intention de Cho ne souhaitant pas s'attirer davantage les foudres de Ginny qui se déplaçait d'un pas rapide. Leur ancienne camarade de Serdaigle était restée figée, et visiblement mécontente entre les tables.
Ginny entraina Harry vers le deuxième étage. Après la première volée de marche, elle lâcha son bras et le devança de quelques pas. Harry la connaissait suffisamment pour savoir qu'elle était furieuse. Il n'avait jusqu'alors pas remarqué les efforts de Cho pour se rapprocher de lui et ceux de Ginny pour les éloigner, d'abord avant la bataille puis maintenant, mais à présent il fallait être aveugle pour ne pas voir la manœuvre. Il n'avait jamais vraiment été doué pour interpréter le comportement des femmes, mais que la seule femme qu'il espérait à son bras était visiblement très en colère.
Ils entrèrent dans l'infirmerie, et Harry s'attendait à apercevoir Madame Pomfresh avant de constater que le lieu était vide et que l'infirmière devait probablement s'occuper des blessés dans les salles aménagées à cet effet.
— Une douche ne te ferait pas de mal, jugea-t-elle tandis qu'elle le dévisageait son regard s'attardant sur ses cheveux toujours remplis de poussières. Voilà des vêtements propres qu'Hermione a apportés.
L'eau qui lui coulait sur le corps le délassait et lui rapporta tout le réconfort dont il avait besoin. Une fois sec et habillé, Ginny l'entraina vers le lit qui fut le sien jusqu'au matin, et sortit de la table de chevet d'épais bandages qu'elle imbibait avec une potion grisâtre et fumante.
— Enlève ton t-shirt, demanda-t-elle sans le regarder.
— Pardon ?
Harry hésitait, la main fermement posée sur son vêtement. Il était pudique, et la présence de la jeune femme n'arrangeait pas son malaise.
— Oh par la barbe de Merlin, Harry ! s'impatienta Ginny. Je t'ai déjà vu torse nu ! Madame Pomfresh m'a demandé de faire ton pansement pour pouvoir retourner s'occuper de Lavande. Au cas où tu ne l'aurais pas deviné, je n'ai pas bougé de l'infirmerie depuis qui tu y es entré, ajouta-t-elle pincée.
Penaud, Harry souleva son t-shirt et essaya de ne pas tenir compte du regard de braise que lançait Ginny sur son corps ni des battements de son cœur si rapides qu'ils menaçaient de lui fracturer les côtes. Il la laissa retirer le pansement et appliquer un peu de potion sur sa plaie. La mixture était froide et il ressentait des picotements avant qu'elle ne lui brule douloureusement ses chairs à vifs. Il se mordit la langue pour ne pas pousser un juron, et observa Ginny, de ses mains expertes replacer le bandage. Tandis qu'il se rhabillait, elle lui posa une question qu'elle semblait retenir depuis leur réveil.
— Qui suis-je pour toi Harry ?
Interloqué Harry la dévisagea tandis que le regard intense qu'elle lui jetait le déstabilisa.
— Je… euh, tu es la sœur de Ron et… balbutia-t-il en rougissant tout en essayant de soutenir son regard.
Il eut envie de se jeter du haut de la tour de Gryffondor sitôt que ces mots avaient franchi ses lèvres. Il savait que ce n'était pas la réponse que Ginny attendait. Elle détourna la tête et il fut certain de voir des larmes de fureur se former aux coins de ses yeux. Qui était-elle pour lui ? Probablement la meilleure chose qui lui soit arrivée. Une main tendue, promesse d'un avenir serein. Elle était celle qui avait été son ancre et son espoir face aux dangers qu'il avait rencontrés. Alors qu'il courait dans sa chasse aux Horcruxes, elle avait été son fantasme lors de ses nuits agitées, l'imaginer à ses côtés avait rendu ses couleurs au pâle monde qu'il avait sillonné. L'idée de son corps avait été source de tant de plaisirs inavoués. Il en était sûr, elle était sa moitié, mais il était bien trop idiot pour lui admettre. Lorsqu'elle se retourna enfin vers lui, ses traits étaient crispés et ses yeux bruns avaient recommencé à lancer des éclairs.
— Alors c'est ça, je ne suis que la sœur de Ron pour toi ! La dernière des Weasley. La pauvre petite imbécile qui se fait posséder par un stupide journal intime ! La petite fille qui est bienvenue pour partager les bons moments, mais qu'on laisse de côté dans les pires. Je ne suis pas faible, Harry ! siffla-t-elle.
Harry se recroquevilla sur lui-même, comme il l'avait fait plus tôt devant Mrs Weasley, et bien que la matriarche lui fasse peur, ce n'était rien à côté de la volcanique rouquine qui se tenait en face de lui. Il frémit en attendant la suite de sa tirade se contentant de planter son regard émeraude dans le sien.
— Tu m'abandonnes et j'attends docilement ton retour en espérant qu'il ne t'arrive rien ni à toi, ni à mon frère, ni à Hermione. Pendant ton absence, nous nous sommes rebellés contre ce qu'était devenue cette école. Nous avons tenté de voler l'épée de Gryffondor dans le bureau de Rogue. Nous avons lutté contre les Carrow. Nous nous sommes battus, je me suis battue ! Et toi tu débarques d'on ne sait où, prétextant que tu cherches je ne sais quoi, mais nous te faisons confiance. Je te fais confiance. Et tu m'empêches de me battre, tu me considères comme une enfant, m'ordonnant de rester en arrière, tu refuses que je sois à tes côtés. Après le Département des Mystères, après la tour d'Astronomie. Mais malgré ça, je suis toujours là. Je te veille, je prends soin de toi.
À cet instant, Harry fit le pas qui le séparait d'elle en un mouvement tellement vif que Ginny n'avait pas bougé. Priant pour qu'elle ne le rejette pas, Harry entoura de ses mains ce visage qu'il aimait tant et écrasa sa bouche contre la sienne. Il la sentit se crisper puis s'abandonner entièrement contre son corps, ses mains le serrant un peu plus contre elle. Harry savait qu'elle avait gardé tout cela pour elle depuis longtemps et quand leurs lèvres se détachèrent, ils restèrent un long moment enlacés dans le silence qui propageait leurs sentiments.
— Tu aurais pu mourir Ginny, je ne voulais pas prendre ce risque, murmura Harry contre le front de la jeune femme.
— Je n'ai pas besoin de ta protection ! chuchota-t-elle brutalement. J'ai besoin de toi ! J'ai besoin d'une épaule sur laquelle pleurer mon frère ! Fred est mort ! J'ai besoin de nous dans cette épreuve.
Elle sécha ses larmes et s'éloigna de quelques pas.
— Nous ferions mieux de nous dépêcher de rejoindre la Grande Salle, intima Ginny, sinon maman risque de ne pas aimer ça.
Elle tendit alors sa main vers celle du jeune homme, et Harry la saisit sans hésiter, bien que la perspective de dévoiler aux yeux des Weasley leur relation le fît frémir.
N'hésitez pas a me donner vos impressions, envies commentaires. Si c'est tout nul je suis prête a le savoir aussi :)
Quand au rythme de mes publications, pardonnez moi mais je ne saurais être régulière. J'ai quelques chapitres d'avances mais pas assez pour assumer une publication hebdo :) Et puis j'ai besoin de voir si ça colle avant de me presser a les mettre en ligne.
