Sawyer, chapitre 1 Auteur: Titinaw

Sa respiration se fit soudain plus rapide, presque saccadée. Englué dans des rêves sombres, Sawyer ne discernait plus la réalité du rêve.
Il se revit sur l'île, étouffé par la chaleur et l'humidité écrasantes. Il courrait à travers les arbres, évitant les longues branches. Il fuyait.
Mais qui fuyait-il au juste ? Il jeta un œil derrière son épaule et émit un son étranglé. Un sanglier démesurément gros l'avait pris en chasse.
Sawyer avait peu de marge. Il se concentra alors sur sa course pour tenter de semer la bête. C'est alors qu'il entendit hurler dans son dos :
- Meurtrier ! Meurtrier ! Tu m'as tué !
Le jeune homme sursauta et reporta à nouveau son regard en arrière. Seul le sanglier était présent. C'est alors qu'il se prit le pied dans la racine d'un arbre. Il tomba en avant. Pour amortir sa chute il tendit les bras. Mais au lieu de rencontrer la terre, ses mains touchèrent l'eau glaciale. Il ouvrit grand les yeux et se retrouva subitement dans les profondeurs d'une mer déchaînée. A travers l'eau sombre, il vit les restes du radeau qui flottaient, en flamme. Sawyer tenta de remonter à la surface, mais une force mystérieuse le retenait et l'entraînait vers les abysses. Il hurla alors d'impuissance.

Ce fut ce cri qui le ramena à la réalité. Il se leva d'un bond et jeta un regard affolé dans la pièce dans laquelle il se tenait.
Sa respiration retrouvait un rythme normal au fur et à mesure qu'il reprenait ses esprits.
- Et merde ! jura-t-il.
Il devrait y être habitué pourtant… Depuis son retour à la civilisation, cela faisait deux jours maintenant, le même cauchemar revenait hanter ses nuits. Mais malgré ce fait, chaque nuit il se réveillait en sursaut, trempé, et le souffle saccadé.
Rien ne se passait comme il l'aurait voulu. Il avait tant voulu échapper à cette île, qu'il n'avait pas pensé une seule seconde à la façon dont il appréhenderait son retour sur la terre ferme. Il n'aurait jamais cru qu'il puisse se sentir si désorienté et si fragilisé par ce retour fracassant et si médiatisé.
Bizarrement, le fait de ne plus être avec tâche de rousseur, le toubib, le génie ou encore Bruce Lee, l'avait laissé complètement désarmé. C'était la raison pour laquelle il avait tenu à prendre cette chambre d'hôtel et décider de ne plus en sortir. Il devait reprendre des forces avant de faire face au monde entier.
Il se dirigea vers la petite salle de bain et s'aspergea le visage d'eau froide. Il leva la tête et observa durant quelques instants son reflet dans le miroir. Pensivement, il se gratta la barbe. Il devrait penser à faire un brin de toilette avant de mettre le nez dehors. Car il ressemblait de plus en plus à un sauvage tout droit sorti d'un asile. Son regard se porta vers son torse nu. Quelques gouttes de sueurs perlaient sur sa large poitrine. Mais ce qui retenait son attention, était la fine entaille laissait par la balle qui l'avait effleuré alors qu'il avait été attaqué par les « autres ».
Il secoua la tête et tenta d'évacuer cet épisode. Il prit une bière dans le petit bar, puis s'installa dans un fauteuil sur le balcon. Il leva les yeux au ciel et se mit à contempler les étoiles scintillantes, avant de porter la bière à ses lèvres.
Ses pensées revinrent deux jours en arrière, à sa sortie d'avion, qui l'avait ramené, avec les autres rescapés, à Los Angeles.
Il avait tout d'abord été heureux et soulagé de retrouver le sol américain. Durant le vol, ils avaient été beaucoup à être tendu. Le souvenir d'un précédent vol avait hanté tout le monde, mais personne n'en avait parlé. Il lui avait suffi de lire la peur dans les yeux de chacun pour comprendre que tous partageaient la même crainte. Seul Hurley avait quitté rapidement son siège pour se réfugier dans les toilettes de l'avion. Sawyer avait tout d'abord pensé qu'il rendait le repas qu'il avait prit quelques minutes plutôt. Il avait appris plus tard, qu'il avait en fait voulu se tenir à l'écart du groupe, de peur d'être la cause d'un nouveau crash. Un sourire moqueur se dessina sur ses lèvres. Sacré Hurley !
Mais il devint plus sombre quand il se remémora le moment qui avait suivi l'atterrissage. Dès l'instant où l'avion avait atterri, des membres du FBI accompagné d'un marshal avaient pénétré l'appareil. Ils avaient saisi brutalement Kate. Elle avait seulement eu le temps de jeter un regard plein de détresse et de peur à Jack et lui. Un instant plus tard, elle avait disparu de leur champ de vision.
Il avait regardé cette scène sans faire un geste. Puis, une rage intense était montée en lui. Les yeux sombres, et la mâchoire contractée, il s'était levé d'un bond, déterminé à libérer Kate de ses bourreaux. Mais Jack l'avait arrêté dans son élan.
- Toi le toubib, lâche-moi, s'était-il écrié.
Sayid les avait rejoint. Les yeux désolés, il avait posé une main ferme sur son bras.
- Calme-toi Sawyer.
Sawyer avait secoué la tête et l'avait fusillé du regard.
- Je ne le répéterai pas une troisième fois. Lâchez-moi, avait-il rajouté lentement, d'une voix glaciale.
Il avait alors rencontré le regard de Jack, et il y avait lu la même rage impuissante. Ce fut seulement cela qui lui avait permis de retrouver un semblant de calme.
- Nous ne pouvons rien faire pour l'instant, Sawyer, avait murmuré Jack. Mais je te promets que nous ferons tout pour l'aider.
Par la suite, leur sortie d'avion avait été vraiment tumultueuse. Une foule de journalistes les avaient attendu de pied ferme, ainsi que les familles des rescapés. Il avait entendu des cris de joie, des pleurs, des flashs, et dans cet immense chaos, il s'était senti vraiment seul. Personne n'avait été pas là pour l'accueillir. Personne. Sauf ces satanés journalistes qui l'encerclaient et l'harcelaient de leurs questions stupides et vides de sens. Il s'était senti alors sombrer dans l'amertume et la tristesse. Et comme à son habitude, il avait réagi à cela avec brutalité. Il avait poussé les journalistes et sans un mot avait échappé à cette foule. Il avait pris un taxi et avait fui pour se réfugier jusqu'à cet hôtel. Finalement, on lui avait fait parvenir sa valise. Jack probablement.
La sonnerie du téléphone le fit revenir à l'instant présent. Il se leva de son siège et se dirigea d'un pas souple vers le téléphone, se demandant qui pouvait bien l'appeler. Autant qu'il s'en souvenait, il n'avait donné à personne le numéro de téléphone de sa chambre. D'ailleurs, lui-même ne le connaissait pas.
- Allo ?
Seul le silence lui répondit.
- Qui est à l'appareil ? demanda-t-il d'une voix impatiente en levant les yeux au ciel.
- Je sais où il se cache… murmura quelqu'un.
Sawyer plissa les yeux, vraiment attentif maintenant à ce coup de fil tardif.
- Qui donc ?
La voix mit du temps à répondre. Sawyer entendait seulement le souffle bruyant de la personne.
- Sawyer… répondit la voix.
Il voulut poser une nouvelle question, mais il n'en eu pas le temps.
On avait raccroché.