Chapitre 6 : Killer's Bond

Akihito serra avec force la tasse de café brûlant qui se trouvait entre ses mains. Il la fixait avec intensité et Akiko, installée en face de lui, finit par lui faire remarquer que ce n'était pas parce qu'il regardait ainsi le liquide que celui-ci allait pour autant s'en évaporer ou se mettre à geler.
Après sa 'petite discussion' avec Asami, il n'avait pas tardé à quitter l'appartement de celui-ci pour trouver refuge chez lui à faire les 100 pas. Il n'avait quasiment pas dormi de la nuit et avait passé son temps à trier des photos qui ne valaient strictement rien pour les journaux. Et à présent, il se retrouvait en tête-à-tête non-romantique.
« - Je vous l'ai déjà dit, mais je suis psychologue avant d'être profiler, alors si vous avez envie de parler, vous pouvez le faire… » soupira-t-elle non sans impatience en se reversant du thé.
Le jeune homme reposa la tasse et jeta un regard au bar vide à cette heure de la journée. Pourquoi était-il ici déjà ? Ah oui, pour discuter du tueur en série. Tout du moins, c'était le premier motif, en voyant sa mine aussi animée que celle d'un zombie dans Resident Evil, Akiko lui avait proposé de quitter le commissariat pour aller boire un 'petit remontant'. Mais il n'avait pas eu le droit au whisky, juste à un café, un misérable café qui lui brûlait les lèvres et la langue chaque fois qu'il tentait de le boire.
« - Vous vous êtes disputé avec Lui ? » questionna avec insistance la jeune femme nouveau souriante. « Je trouve ça mignon… »
« - Ce n'est pas mignon ! Surtout pas mignon ! » rétorqua Akihito sur un ton offensé. « Il prend ses grands airs comme s'il s'apprêtait à faire une déclaration et… Et tout ce qu'il trouve à dire… Est-ce que je ne suis qu'un bon coup au lit ! J'espère qu'il gardera un bel hématome de mon coup de poing ! Connard ! »
Akiko se racla la gorge avec un petit air gêné. Heureusement, personne n'avait entendu la soudaine esclandre du photographe. Ou bien tout le monde préférait l'ignorer…
« - Vous ne devriez pas parler aussi fort, » fit-elle en remettant une mèche de cheveux derrière son oreille. Puis elle se mit à rire tout bas. « Un coup de poing… Vous n'y allez pas de main morte lorsqu'on vous blesse. Vous avez l'air d'une jeune fille déçue que son petit ami ne soit pas un preux chevalier. On dirait moi il y a quelques années. Mais je suis sûre que tout va s'arranger. »
Akihito claqua de la langue et faillit taper du poing sur la table. Il s'en retint de justesse et passa nerveusement sa main sur sa nuque.
« - Mais… Ce n'est pas si simple. Je suis quoi moi ? Un photographe insignifiant… Et lui un riche… »
Yakuza, mais il ne termina pas sa phrase et se contenta de secouer la tête.
« - Il s'amuse à me rendre dingue depuis le départ. Et le pire c'est que ça marche. Je suis tombée dans son piège. Je… Je suis tombé amoureux de lui. Est-ce que ce n'est pas pitoyable ? C'est ce que je me dis depuis plusieurs jours. C'est quand même dingue : je suis la proie d'un serial killer et la première chose qui me préoccupe c'est de savoir si Asami a ne serait ce qu'un peu de considération pour moi. Parfois il me le laisse croire mais il est tellement froid, dur et indifférent. Je le déteste. Quand je cesserai de l'amuser, il me délaissera et cherchera quelqu'un d'autre. Il n'a même pas d'amis et il s'en fout. Si je n'avais pas été là, il aurait même passé la nouvelle année seul. Et j'aurai préféré ne pas être là ! Et… Et je ferai mieux de l'envoyer chier et de me trouver une vraie petite amie, parce que j'aime pas les mecs. »
Akiko semblait réfléchir et Akihito pria pour qu'elle n'ose pas lui sortir une quelconque analyse psychologique censée résoudre sa situation en un claquement de doigts.
« - Vous devriez peut-être lui dire vos sentiments, au moins vous seriez fixé… »
Le jeune homme haussa des épaules avec un froncement de sourcil réprobateur. Sûrement pas. Il posa la main sur le sac à dos posé à côté de lui, contenant son appareil photo et le Beretta qu'Asami lui avait confié.
« - Je suppose que vous ne vouliez pas me voir pour discuter uniquement de ma vie privée ? »
L'espace d'un instant, Akihito eut l'impression de voir une lueur de mépris dans le regard de la profiler. Mais l'instant d'après, son visage était égal à l'expression qu'elle affichait précédemment. Il détourna la tête, sans doute était ce un jeu de son imagination. Il manquait de sommeil et cela le rendait nerveux, voire parano.
« - Vous souvenez-vous de notre discussion sur Feilong il y a quelques jours ? Vous aviez un peu de trop bu… »
Asami… Et maintenant Feilong. Ô joie, ses sujets de conversation favoris !
« - Il est en ville, » poursuivit Akiko en profitant du silence du jeune photographe qui feignait l'intérêt tout en consultant sa montre. « Et vous l'avez rencontré au cimetière de Aoyama, on vous y a vu…
« - Quoi ? Ca veut dire que vous me faites suivre aussi ?
« - C'est pour votre protection. Si cela ne vous plait pas, cela m'est égal. J'espère que vous avez un permis de port d'arme pour ce Beretta que vous aviez là bas. Quoiqu'il en soit, j'aimerai savoir de quoi vous aviez parlé exactement et quelle relation exactement vous entretenez avec ce Feilong. Cela pourrait m'éclairer un peu plus sur cette affaire.
« - J'en doute, » rétorqua Akihito en tentant de garder son calme et de ne pas succomber à la crise de nerf montant en lui. « Il ne peut pas être le responsable de tout cela. Il est plus direct. Je le connais assez bien maintenant, malheureusement. »
Akihito avait un ton amer mais tenta de se reprendre après un soupir.
« - Mais je pense qu'il doit être impliqué d'une façon ou d'une autre. Il m'a sauvé, le soir où ce tueur à gage a essayé de me tuer, » ajouta-t-il en touchant son bras. « Je ne l'ai pas dit car je ne savais pas moi-même quoi penser de cela. Il ne m'a pas dit pourquoi il était à Tokyo, ni pourquoi il était à l'université, mais je pense que vous devriez chercher. C'est peut-être important. Mais je suis certain qu'il n'est pas responsable de tout cela. S'il voulait me tuer, il aurait pu le faire dans ce cimetière, j'étais à sa merci. Et je ne le vois pas jouer à cache-cache avec moi. Pour lui, je suis juste la pute d'Asami.
« - Charmant surnom, » ironisa-t-elle. « Bien, je demanderai à Imamiya de faire des recherches sur la présence de Liu Feilong ici. Et j'aimerai que désormais vous m'informiez de tout. La prochaine fois que vous me cachez un détail aussi important que la présence d'un ponte des Triades sur le lieu d'un meurtre, je vous colle en prison Akihito. Est-ce clair ? Prenez-moi pour une vieille conne du haut de vos 22 ans mais j'essaye de vous sauver la vie et vous ne me facilitez pas les choses… »
Akihito se contenta de marmonner entre ses dents alors que la profiler se levait pour payer l'addition et partir. Il s'effondra ensuite sur la table, le front reposant sur ses bras croisés. Il avait la désagréable impression que tout le monde prenait plaisir à s'acharner sur lui et que ce n'était que le début.
Il serait resté longtemps ainsi si la sonnerie de son portable n'avait pas retentie. Il ouvrit son sac à dos et plongea la main dedans pour en extirper l'appareil bruyant. Le nom d'Asami s'affichait sur le cadran et il hésita à décrocher. A tous les coups, ce n'était certainement pas pour s'excuser de son comportement. Le photographe décida d'ignorer l'appel et se leva en glissant la bandoulière du sac à dos sur son épaule.
Il marcha dans la rue quelques mètres avant que ce fichu téléphone ne sonne à nouveau. Dans son humeur morose, il eut envie de le jeter sur la route avec espoir de le voir finir en miette sous les pneus d'une voiture. Mais un coup d'œil lui assura que cette fois-ci ce n'était pas l'Autre qui appelait.
Une voix féminine, quelque peu énervée, se fit entendre à l'autre bout. Akiko ? Non, ce n'était que la femme d'un politicien qui se plaignait et se plaignait. Monsieur avait une maîtresse, elle en avait marre de Monsieur, on lui avait parlé d'une façon de ruiner l'image de Monsieur qui passait pour un saint auprès de son public, qu'à cela ne tienne, elle avait aussi entendu parler de Takaba Akihito par une amie d'un ami d'une amie d'une cousine d'une amie et le chargeait de ce croustillant scoop précédent divorce retentissant avec Monsieur.
Akihito se contenta de répondre par de simples onomatopées, laissant sa 'cliente' lâcher tout son fiel sur son mari, s'il avait pu il aurait participé en disant tout autant de mal d'Asami mais ce n'était pas le moment de parler de ses problèmes d'homosexualité contrainte.
La jolie somme proposée en récompense de ce travail fit siffler Akihito, voilà de quoi régler ses problèmes de loyer pour un mois et même plus. Ses yeux brillaient d'étoiles alors qu'il s'empressait d'accepter. Il en oubliait Asami, le serial killer, Akiko et Feilong.

Sa commission n'avait pas été difficile à exécuter en soi. Il s'était rendu au Century Hyatt, situé en plein cœur de Shinjuku. C'était un des hôtels que Asami fréquentait parfois mais le jeune homme savait qu'il ne risquait pas de le croiser.Un des employés avait été payé pour le faire entrer et l'aider à se faire passer pour un membre du personnel en lui fournissant le costume et en faisant office de couverture. Akihito n'avait eu aucune difficulté à jouer le garçon de chambre et avait pris les compromettantes photo au sein de l'Executive Suite que le politicien avait réservé pour ses petits plaisirs. Autant dire que les journaux allaient être ravis de pareils clichés…
Akihito avait usé d'une de ses techniques favorites pour ce genre de mission : cacher un appareil photo miniature dans sa manche pour obtenir les clichés en toute discrétion.
Malheureusement, les choses ne devaient pas rester bien longtemps au beau fixe. Alors qu'il s'apprêtait à emprunter l'ascenseur en transportant sur un chariot les restes du dîner du politicien – après tout il était 'employé' par l'hôtel -, le malicieux destin le rattrapa d'une façon cruelle.
Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent et Akihito se demanda si un quelconque Kami n'aurait pas l'obligeance de le rendre aussi transparent qu'une feuille de papier calque.
« - Akihito, quelle agréable surprise de te trouver ici, » s'exclama Feilong après que tout deux se furent longuement fixés en chiens de faïence. « Quand tu en auras fini avec ça, tu pourrais passer faire le ménage dans ma suite. Je te donnerai un pourboire conséquent. (1) »
Un pourboire ? Et puis quoi encore ? Le photographe inclina légèrement la tête et contempla l'une des assiettes encore pleine de sauce posée sur le chariot. Oh, si seulement il pouvait l'envoyer par accident sur le magnifique costume trois pièce de son 'ami'. Si seulement ! Même si c'était Feilong la cible, celui-ci ne pourrait rien tenter contre lui dans un hôtel…
« - Je crois que tu vas devoir prendre ta brosse et récurer tes chiottes tout seul, » rétorqua Akihito entre ses dents.
Feilong haussa des sourcils et sortit enfin de l'ascenseur avant que les portes ne se referment. Il jeta un regard pour le moins malveillant à Akihito tout en s'approchant de lui. Le photographe ne broncha pas et resta de marbre.
« - Je te trouve bien sûr de toi aujourd'hui. Pourtant hier tu tremblais de tous tes membres au cimetière. Oh, ne me dis pas que tu te crois en sécurité parce que tu es dans un prestigieux hôtel ? Akihito, l'argent règle tout, si je le veux, je peux te tuer et demander au service de se débarrasser de ton corps avec quelques billets. »
Le doute envahit insidieusement Akihito, puis la peur qui ne pouvait que suivre. Il avait sans doute eu tort de provoquer ainsi Feilong. Sa nature impulsive ne cesserait jamais de le mettre en danger…
Il eut un mouvement de recul et se retrouva dos au mur. Son regard se dirigea vers sa droite, là où se trouvait le chariot. S'il le poussait sur Feilong, cela lui permettrait de…
Feilong plaqua ses mains sur les épaules d'Akihito et le cloua définitivement contre le mur. Le jeune homme comprit en croisant le regard du Chinois que, s'il tentait quoique ce soit, il était mort. Ou pire.
« - Akihito, tu as tout intérêt à m'écouter attentivement. Plusieurs de mes hommes ont été assassinés à Hong Kong. Ils étaient loyaux et c'est une lourde perte. Je n'ai pas pu remonter jusqu'au commanditaire. Quelques jours plus tard, j'ai reçu une lettre me demandant de me rendre à Tokyo pour trouver des réponses et je commence à me lasser de ces 'vacances'. Je vais te poser à présent une question et tu n'as pas intérêt à mentir car les conséquences pour toi et ton entourage... Est-ce une attaque d'Asami ?
« - Je n'en sais rien ! » s'écria Akihito tout en grimaçant alors que son interlocuteur pesait de tout son poids sur ses épaules. Il ne pouvait s'empêcher de trembler et ses jambes lui paraissaient un appui bien fragile.
« - Tu n'en sais rien ? Comme c'est pratique ! Si Asami est responsable, as-tu bien conscience de ce que cela va provoquer ? Je serais dans l'obligation de déclencher une guerre, je doute que cela te plaise de te retrouver au milieu de ce bain de sang. »
Dans l'obligation ? Vu ses précédentes expériences avec Feilong, Akihito savait que la guerre était depuis longtemps déclenchée et que rien ne ferait plus plaisir à son ennemi de pouvoir tuer Asami de ses mains. Il ne comprenait pas pourquoi il se montrait soudainement si… Scrupuleux.
« - Je ne pense pas qu'Asami soit responsable même si cela me coûte de le dire, il n'utiliserait pas ce genre de méthodes, se cacher derrière des hommes de paille, » ajouta Feilong dans un froncement de sourcils contrarié. « Mais si jamais je découvre qu'Asami est tout de même impliqué, tu seras le premier à en pâtir. »
La main de l'homme se posa sur la joue d'Akihito. Il la caressa du pouce en affichant un sourire faussement tendre. Le photographe avala péniblement sa salive tout en se demandant s'il était en train de vivre ses derniers instants.
« - Et tu trouveras ce que j'ai pu te faire subir jusqu'à aujourd'hui bien fade en comparaison de ce que je pourrai éventuellement te réserver… Tu comprends, n'est ce pas ? » demanda dans un chuchotement amical son tortionnaire.
Akihito acquiesça. Il ne pouvait qu'acquiescer. La parole lui faisait défaut sous l'angoisse et il imaginait fort bien quel destin pouvait lui réserver ce démon au visage si agréable. Il le torturait, il le violerait et il le tuerait. Il prendrait certainement tout son temps, plusieurs jours, plusieurs semaines, jusqu'à ce qu'Akihito réclame lui-même la mort. C'était ce que lui promettait l'expression de Feilong et le jeune homme ne pouvait être qu'incité à le croire.
Lorsque Feilong le relâcha enfin, Akihito eut peine à ne pas tomber à genoux et du rester appuyé dos contre le mur. L'homme lui adressa un regard de pur dédain et recula en lissant méticuleusement son costume pourtant nullement froissé lors de l'entretien.
« - En attendant, évite de te faire égorger par ton serial killer. Je pourrai avoir d'autres questions à te poser un jour ou l'autre…
« - Ouais, c'est ça, » grogna Akihito en respirant profondément pour essayer de retrouver son calme. C'était plutôt de Feilong dont il se méfiait comme de la peste pour le moment. Mais le Chinois s'éloignait déjà comme si de rien n'était. Si habile pour jouer la comédie. Il l'imaginait fort bien croiser un membre de la haute société logeant dans une des suites et tenir une conversation policée d'homme qui n'a absolument rien à se reprocher.
Ce serial killer, avec ses lettres et ses manigances à la mord moi le nœud, comme lui envoyer un tueur à gage pour l'assassiner, ce n'était rien à côté de Feilong. Ah, bon sang, il avait abattu d'une balle dans la tête sans ciller un homme, et devant ses yeux, il avait même été au première loge. Rien que ça, c'était suffisant pour lui glacer le sang.
Peut-être devait-il prévenir Asami de tout ça même si lui parler ne l'enchantait guère. Après tout, il devait savoir que Feilong le soupçonnait de prendre plaisir à dégommer ses hommes puis à lui envoyer des mots d'amour pour l'attirer au Japon.
A cet instant, un déclic se produisit dans l'esprit d'Akihito et il se frappa le front. Mais… Mais quel idiot il était ! Et Feilong aussi par la même occasion mais mieux valait éviter de le lui faire remarquer.
« - Feilong, attends ! » s'exclama le jeune homme en se redressant.
L'intéressé stoppa net mais ne se tourna pas vers Akihito. Il se contenta de lever la tête vers le plafond, sans doute était-il exaspéré et se demandait-il s'il n'allait pas faire goûter immédiatement ses entrailles à ce jeune impertinent.
« - Pourquoi tuer tes hommes pour t'envoyer une lettre ensuite… Te demandant d'aller à Teiou. Où, 'comme par hasard', tu me sauves d'un tueur. Cela n'est-il pas un concours de circonstances étranges ?
« - Tu te trompes, la lettre me disait juste de venir à Tokyo. C'est toi qui m'a amené à Teiou. J'ai quelques informateurs et certains m'ont mis au courant de tes entretiens avec cette… Akiko Inoue. Je comptais en profiter pour t'interroger là bas.
« - Quoi ? Mais tu m'as demandé hier pourquoi j'étais à Teiou !
« - J'étais curieux de savoir ta version des faits. »
Feilong marqua une brève pose avant de poursuivre.
« - Que suggères-tu donc ? Qu'un malade mental m'implique dans son jeu d'échec ? Pourquoi ? Espère-t-il que je termine à sa place ce qu'il n'a pas su exécuter lui-même hier ? Ou bien il espère me frustrer en te tuant avant moi ? Akihito, ne me dérange pas pour m'exposer des théories aussi stupides, je n'ai pas de patience pour cela.
« - Mais… Je…, » commença le jeune homme qui sentait que le débat avec Feilong s'annonçait difficile. Et surtout, il hésitait à continuer sur cette voie… « Mais ce n'est pas normal. Et… Et puis tu l'as dit toi-même hier qu'il se passait des choses étranges… Je ne sais pas pourquoi mais… Je suis sûr qu'il y a un lien ! Shimizusawa Monoe a été tuée par lui, c'était une avocate qui avait pour principaux clients des gens impliqués dans les réseaux mafieux et les politiciens véreux. »
Feilong daigna enfin se retourner. Son visage affichait un air neutre, Akihito ignorait ce qu'il pouvait bien penser de ses hypothèses et cela l'inquiétait d'autant plus.
« - Shimizusawa ? Elle s'est occupé de quelques unes de mes affaires à caractère juridique à Tokyo, durant un ou deux ans, puis elle s'est mise à travailler pour Asami. Elle était très douée…
« - Pour remettre les criminels en liberté malgré des preuves évidentes de trafics de drogue, de meurtres, de blanchiments d'argent, » énuméra rapidement Akihito.
« - Trop douée. Elle se faisait beaucoup d'argent. J'ai toujours pensé que quelqu'un finirait par la tuer, par vengeance. Et les autres victimes de ce tueur ?
« - Un homme d'affaire, je n'ai rien entendu de spécial sur lui, deux dealers, une prostituée, et ce professeur qui enseignait dans l'université où Asami a fait ses études.
« - Dis m'en plus sur cet homme d'affaire.
« - Il travaillait pour une compagnie d'assurance, Asahi Mutual Life Insurance Co. et était plutôt haut placé.
« - Cette compagnie a trempé dans des affaires louches, il y a quelques années. Blanchiment d'argent et plusieurs familles auraient été arnaquées sur leur assurance. Certains frais médicaux qui n'étaient en vérité pas couvert alors que l'argent avait bien été versé. Mais la faute a été rejetée sur quelques employés qui ont été licenciés et condamnés par la justice. Il me semble que quelques 'amis' d'Asami avaient des intérêts là bas. J'essayerai d'en savoir plus sur le passé de cet homme. Tu as peut-être raison finalement… Ce qui veut dire que nous allons devoir temporairement nous allier. Mais ne t'en réjouis pas. »
Oh ça non, Akihito n'allait certainement pas s'en réjouir. Il ne voulait pas avoir Feilong comme ennemi, mais pas comme allié non plus. Il ne savait jamais à quoi s'attendre avec lui. Il pouvait tout aussi bien tenir une discussion calme comme à cet instant ou lui sauter à la gorge pour le menacer comme précédemment.

(1) Non, il ne s'agit pas d'une allusion à double sens... Quoique... ? En général (mais il y a toujours des exceptions), le pourboire est très mal vu au Japon, certains hôtels ou restaurants l'interdisent même. Contrairement à nos pays où celui-ci valorise le travail de ceux qui le reçoivent, le pourboire est perçu comme un signe de mépris envers l'employé (les japonais sont très tatillons sur la notion de respect). En gros, cela leur donne l'impression de faire l'aumône pour avoir de l'argent en plus. On offre plutôt à l'employé des cadeaux en cas de service exceptionnel mais cela reste tout de même rare. Il arrive souvent que des touristes soient piégés par cette 'coutume' pour la moins inhabituelle. En Chine, le pourboire est lui aussi inexistant (ou presque) pour des raisons différentes. Il ne faut donc pas s'étonner si Akihito prend plutôt mal l'offre de Feifei…