Chapitre 2
Quand Shanmir ouvrit les yeux, elle su qu'elle était au paradis. Elle était étendue sur de somptueuses étoffes, à la fois et fines et moelleuses, douce et légères. Tout autour d'elle était blanc, comme un immense palais de marbre scintillant faiblement. Un courant d'air caressa la joue de la jeune fille et elle se redressa légèrement pour admirer la vue qui s'offrait à elle. L'adolescente était étendue sur ce qui semblait être un banc de pierre recouvert des étoffes si douillettes, tout près d'une grande arche aux hautes colonnes ouvrant sur un large balcon. Et par delà le balcon, des nuages à perte de vue.
L'adolescente se redressa un peu plus et la Lumière du Telperion se balança doucement au bout de la chaîne à son cou.
Oh non, la Lumière !
Shanmir se pris la tête entre les mains en réalisant qu'en mourant elle avait abandonné la Lumière, la laissant sans protection dans le monde des mortels ! La jeune fille gémit et ramena ses genoux contre sa poitrine, désespérée.
- Allons allons Shanmir, fille de Shanoa, pourquoi cet air si affligé ?
La jeune fille redressa la tête en entendant ces mots pour poser ses yeux sur un ange. La femme qui se tenait devant elle était tellement belle que s'en était indescriptible, mais sa beauté n'était pas écrasante, non, l'ange respirait la bonté et la gentillesse. L'adolescente ne se sentit que plus misérable de devoir annoncer son échec à un être aussi beau et pur, et elle sentit des larmes de honte et de détresse couler le long de ses joues.
- Je suis morte, répondit-elle d'une voix désespérée, alors que je devais absolument protéger la Lumière du Telperion. Mes ancêtres on veillé sur ce bijou depuis des siècles, et tout ce labeur vient d'être réduit à néant par ma faute.
- Ne pleures pas mon enfant, fit doucement l'ange en s'asseyant à ses côtés, ta mort n'était pas de ton fait.
- Dites-moi madame l'ange, pourquoi ai-je encore la Lumière autours du cou ?
A ces mots, l'être divin éclata d'un rire cristallin, rappelant douloureusement à la jeune fille celui de sa mère. Mère qu'elle allait bientôt revoir d'ailleurs, mais comment pourrait-elle lui faire face après son échec ?
- Je ne suis pas un ange mon enfant, et tu peut m'appeler Varda.
A ces mots, Shanmir cligna des yeux, surprise pour de bon. Varda était un être divin, sortie tout droit des légendes que lui racontaient sa mère quand elle était petite. Mais personne d'autre ne connaissait ces légendes, alors en grandissant elle était partie du principe que Varda et les autres dieux dont elle lui parlait le soir dans son lit avaient tout simplement été inventés par sa mère pour distraire la fillette qu'elle était alors.
- Une déesse. Vous êtes une déesse.
Et pas n'importe laquelle avec ça. Varda était la femme de Manwë, chef du panthéon, et si la mémoire de Shanmir était bonne, s'était elle qui avait créé les étoiles. La tête lui tournait rien que d'y penser.
- Je suis une Vala, répondit Varda avec un sourire maternel, mais je suppose que pour les gens de ton monde nous les Valar sommes l'équivalent de dieux. Mais passons à autre chose : comment va ta blessure ?
Une blessure ? Shanmir baissa les yeux vers sont corps pour constater que ses seuls vêtements constituaient en une culotte et des bandages entourant tout le haut de son corps. Elle rougit légèrement quand la Vala entreprit de défaire les bandages – d'autant plus qu'elle ne portait strictement rien en dessous – mais n'envisagea pas un seul instant de résister. Varda dégageait bien trop de bonté et bienveillance pour que l'adolescente puisse douter de sa bonne foi. Une fois les bandages retirés, la jeune fille ne pu retenir une grimace de dégoût devant la large plaque de peau rosâtre qui parcourant tout son flanc droit depuis son aisselle jusqu'à sa hanche et s'étendait légèrement sur son ventre et son dos.
- Ne fais donc pas cette tête, tu t'en tire plutôt bien. Tes côtes ont été brisées en plusieurs morceaux et ont perforé ton poumon droit ainsi qu'une grande partie de tes organes internes. La douleur a du être horrible, fit doucement la Vala en caressant gentiment la tête de la jeune fille. Et je ne peux soigner tes autres blessures, car elles ne sont pas la cause de ta mort...
- C'est vous qui m'avez soignée ? demanda Shanmir avec curiosité.
La déesse hocha la tête et la jeune fille fronça les sourcils.
- Pourquoi ? Enfin je veux dire, merci beaucoup, se reprit-elle, mais je ne suis pas euh... morte ?
Varda posa délicatement sa main sur la joue tuméfiée depuis le coup reçu la veille et malgré la légèreté du touché l'adolescente cilla. Cependant, la tristesse sans nom qu'elle lu dans le regard de la Vala lui déchira le cœur, douleur bien plus lancinante que tous les coups physiques reçus jusqu'à présent.
- Si, mon enfant, fit doucement la déesse, tu es morte, emportant avec toi la dernière étincelle de ma lignée.
Hein ? Alors que Shanmir se demandait si elle avait bien entendu les paroles de la déesse, une porte s'ouvrit dans son dos et elle entendit des bruits de pas précipités dans sa direction. Consciente d'être à moitié nue, la jeune fille rougit furieusement en entourant sa poitrine de ses bras, jetant un coup d'œil inquiet vers la personne qui venait d'arriver. C'était une jeune femme, magnifique elle aussi – quoi que moins que la déesse - et rayonnante de la même bienveillance que Varda.
- Ilmarë, salua la déesse.
- Mère, répondit la nouvelle venue avant de reporter son attention sur Shanmir.
L'adolescente inclina la tête devant la nouvelle venue, ne sachant trop que dire ou faire et toujours sous le choc des deniers mots de Varda.
- Oh Mère, elle ressemble tellement à Noïsha, murmura la nouvelle venue avant de serrer soudainement la jeune fille dans ses bras. Pourquoi faut-il donc que vous mourriez tous si jeunes ?
L'adolescente était complètement perdue et ne comprenait pas pourquoi cette femme – probablement une déesse elle aussi – la prenait ainsi dans ses bras, mais il y avait tellement longtemps qu'elle n'avait pas reçue une telle étreinte... Shanmir se laissa aller dans les bras d'Ilmarë, vaguement consciente que la main de Varda caressait doucement ses cheveux. Quand enfin la jeune femme mit fin à son câlin, Shanmir pu lire dans ses yeux la même douleur sans fond que dans ceux de la mère de la déesse, et sentit les larmes monter de nouveau à ses yeux.
- Pourquoi êtes vous si triste, ma dame ? Des gens meurent tous les jours.
- Parce que je suis condamnée à voir le fruit de mes entrailles mourir génération après génération, de plus en plus jeune. Tu n'es encore qu'une enfant...
Shanmir cligna des yeux en entendant ces mots.
- Vous êtes mon ancêtre ? demanda-t-elle d'un ton incrédule à la déesse.
Ilmarë hocha gravement la tête, ses beaux yeux emplis de tristesse.
- Tu ressemble tellement à mon petit-fils, mon Noïsha bien aimé. En ce temps là ma lignée était encore bénie d'une longue vie, et sa mort ne me causa du chagrin que quatre cents ans après sa naissance.
L'adolescente écarquilla les yeux à ces mots. Quatre cents ans ? Aucun humain ne peut vivre aussi longtemps ! Elle doutait fortement d'avoir quelqu'un comme ça pour ancêtre, sans parler de ces déesses !
- Je... quatre cents ans ? J'ai bien peur que vous ne vous trompiez, je ne peux pas être votre descendante... Personne parmi les hommes n'a jamais vécu si longtemps.
- Pas sur Terre c'est vrai, confirma Varda.
La jeune fille fronça les sourcils, méditant ce que ces mots impliquaient. Soudain les paroles prononcées par la Vala un peu plus tôt résonnèrent dans son esprit « pour les gens de ton monde »... Shanmir écarquilla les yeux.
- Non, murmura la jeune fille, c'est impossible...
- Ah tu sembles également avoir hérité de l'esprit rapide de Sheny, la sœur de mon Noïsha, fit Ilmarë avec fierté. Quel dommage qu'elle ne se soit jamais mariée.
- Mais comment est-ce possible ?
- Comme tu l'as compris mon enfant, reprit Varda, tu n'est plus sur Terre mais sur Arda. Ces deux mondes ont été créés par le Père de toutes choses, Illùvatar. Cependant il laissa la Terre au soin des seuls Hommes tandis qu'Arda fut également peuplé des Elfes majestueux et des Nains sous les montagnes.
- Donc actuellement nous sommes en Arda... Attendez une minute, je suis morte non ?
Les deux femmes échangèrent un regard emplis d'un mélange de chagrin et d'espoir, puis Varda tourna son visage maternel vers l'adolescente.
- Comme tu étais la dernière de notre lignée, la Lumière du Telperion est restée sans Protecteur à ta mort sur Terre.
Shanmir baissa la tête, honteuse. Cependant un doigt fin et délicat se posa sous son menton et lui releva délicatement la tête.
- Cependant, poursuivit la déesse, la Lumière ne peut rester sans Protecteur. Nous ne pouvons la prendre en charge, car c'est aux mortels que je l'ai confiée. Le Père de toutes choses a vu ta jeune vie emplie de souffrance et nous a compté ton malheur. Étant donné que tu es la dernière de notre lignée, Illùvatar a décidé de t'offrir une seconde chance, en Arda.
La jeune fille eut un long moment de silence, les yeux perdus dans le vague, son cerveau peinant à assimiler ce que cela signifiait.
- Vous voulez dire que je vais ressusciter ? demanda-t-elle finalement d'un ton incrédule.
- Non Shanmir, fille de Shanoa, répondit doucement la Vala. Ta nouvelle vie coule déjà dans tes veines.
La porte s'ouvrit brutalement et l'adolescente poussa un petit cri avant d'entourer de nouveau sa poitrine de ses bras. Varda fronça légèrement les sourcils avait de saisir un pan de sa longue robe pour couvrir la nudité de sa descendante tandis qu'Ilmarë allait à l'encontre du visiteur.
- Père, le salua-t-elle
- Ilmarë. Oh, mais il semblerait que ma présence en ce lieu ne soit pas désirée. Je souhaitais savoir où vous en étiez, car il nous faut garder du temps pour parler de l'avenir de cette jeune fille.
- Tu as raison, Manwë, acquiesça Varda, le temps de donner une robe à cette enfant et nous venons.
La jeune fille était restée fermement plaquée contre le corps de la Vala pendant toute la discussion et la déesse se détacha doucement de son étreinte avant d'entreprendre de refaire le bandage couvrant le buste de l'adolescente. Ilmarë – qui était sortie en même temps que son père – revint au bout de quelques minutes avec une petite robe douce et légère, semblant faite de la même matière que les étoffes posées sur le banc de pierre.
Shanmir protesta faiblement qu'elle ne méritait pas de porter vêtement si somptueux mais les déesses ne voulurent rien entendre et lui passèrent la robe par-dessus la tête. Elle lui arrivait aux genoux, dévoilant la peau blanche parsemée d'hématomes de ses jambes et ses bras.
- Tu as des cheveux si doux, soupira Ilmarë d'un air nostalgique, quel dommage que tu les gardes courts.
- C'est plus pratique pour se défendre et tirer à l'arc, répondit la jeune fille avec un haussement d'épaules.
- Ainsi donc vous avez continuer à pratiquer ces activités ?
- Et bien mon enfant, fit Varda en la poussant doucement vers la porte, il semblerait fort que tout ce savoir te sera bientôt utile.
La jeune fille pénétra dans la pièce adjacente où se trouvaient Manwë en compagnie de deux autres hommes et une femme.
- Mes amis, fit Varda, permettez moi de vous présenter Shanmir, fille de Shanoa, la dernière de notre lignée.
L'adolescente esquissa une révérence maladroite tandis que les personnes présentes inclinèrent légèrement le front en guise salut. La Vala lui présenta Aulë, Oromë et Yavanna, puis son compagnon prit la parole.
- Vous connaissez tous la raison de la présence de cette jeune fille ici, mais maintenant une question se pose : qu'allons- nous faire d'elle ?
Shanmir sursauta à ces mots avant de lancer un regard désespéré à Manwë. Qu'avait-elle fait de mal pour qu'on ne veuille pas d'elle ici ? Cependant elle ne lut que bonté et regrets sincères dans les yeux de son ancêtre.
- Je suis navré mon enfant, mais aucun mortel ne peut demeurer en ce lieu, fit-il d'une voix douce.
La jeune fille hocha, la tête, se sentant soulagée. Pour une raison inexplicable il était important pour elle que ses si lointains ancêtres ne la détestent pas. Quand aux autres Valar, Shanmir les connaissait de noms, grâce à sa mère et à ses légendes – qui n'en étaient finalement pas d'ailleurs. Yavanna était la déesse de la terre, et de tout ce qui y pousse. Son époux, Aulë, régnait sur les montagnes qu'il avait toutes créées, de même que les Nains. Oromë enfin était un dieu bon avec les hommes, et un chasseur hors paires. Il s'agissait là des membres les plus éminents du panthéon, et se retrouver en si auguste compagnie rendit la jeune fille terriblement anxieuse.
Une main délicate se posa dans sa chevelure désordonnée tandis qu'Ilmarë lui caressait gentiment la tête, semblant contrariée de ne pouvoir garder sa dernière descendante auprès d'elle. Bien que ça ne soit pas spécialement l'effet escompté, le geste calma grandement Shanmir, qui se concentra sur la discussion des Valar.
- Nous devons songer à la protection de la Lumière du Telperion, intervint Yavanna. Il faut un endroit sûr où envoyer cette jeune fille.
- Et pourquoi pas en Terre du Milieu, proposa soudain Oromë.
Sa déclaration jeta comme un froid dans la pièce, et Shanmir sentit la main d'Ilmarë se crisper légèrement sur sa tête. Puis les dieux se lancèrent dans une discussion animée. Apparemment la plupart n'avaient confiance qu'en les Elfes et se méfiaient grandement des Hommes – l'adolescente rougit légèrement quand elle réalisa qu'elle faisait partie d'un peuple peu apprécié de ses ancêtres.
- C'est pourtant la seule solution valable, soutint Oromë en regardant Manwë dans les yeux. Vous le savez aussi bien que moi mon ami.
Le Vala soupira avant de hocher la tête, mettant fin à la discussion.
- Nous pourrions la confier à Sarouman, proposa finalement Yavanna sans grande conviction. Il protégera la Lumière.
- Le magicien blanc est fort et il pourrait sûrement la protéger avec efficacité, répondit Manwë d'une voix douce, mais il n'a guère de patience pour les Hommes, et je crains fort que cette pauvre enfant ne soit malheureuse en sa compagnie. Elle me semble avoir déjà assez souffert dans sa précédente vie.
Shanmir sursauta en entendant ces paroles et planta son regard dans celui de Manwë. Et là elle comprit qu'il savait. D'une manière où d'une autre, il connaissait son passé, et son regard n'était que bonté et compassion envers la jeune fille. Cela n'empêcha toutefois pas l'adolescente de pâlir légèrement – elle n'avait jamais rien dit à personne sur les coups que lui portait son père quand il rentrait saoul.
- Qu'en est-il des Elfes, demanda Ilmarë d'une petite voix.
- Tu sais que c'est impossible ma fille, répondit Varda. Il est vrai que Fëanor et moi-même avons forgé la Lumière du Telperion, mais elle a été offerte aux mortels et ne peut être gardée que par l'un d'entre eux.
La déesse soupira mais hocha la tête. Il y eut ensuite quelques secondes de silence méditatif avant que Manwë ne lance une nouvelle proposition.
- Mithrandir pourrait convenir pour cette tâche. Il protégera cette jeune fille et la Lumière, et est de bonne compagnie. Il saura la mettre en sécurité si l'ombre de Sauron devient trop menaçante.
- La Magicien Gris est actuellement occupé, intervint Aulë qui était resté silencieux jusque là. Il a rendez-vous ce soir même avec le descendant de Durin. D'ailleurs, il est étrange que cette jeune demoiselle retourne auprès de ses ancêtres, apportant la Lumière avec elle alors que le roi déchu d'Erebor part en quête de son trône perdu... C'est peut être un signe, peut être était-elle destinée à les aider dans leur quête. Ils avaient rendez vous dans la Comté si je me souvient bien.
- Oui, fit Yavanna, les nains sont loyaux et courageux envers leurs camarades, et si Mithrandir est avec eux la petite devrait être en sécurité.
La main d'Ilmarë se crispa de nouveau sur la tête de Shanmir.
- La Montagne Solitaire est toujours le domaine de Smaug, sans compter que le voyage risque de durer plusieurs mois... C'est bien trop dangereux.
Il y eut quelques secondes de silence avant que les Valar ne se remettent à débattre de la question sous les yeux d'une Shanmir légèrement perdue. Seule Varda resta silencieuse, les sourcils légèrement froncés et les yeux perdus dans le vague. Soudain la déesse sembla reprendre conscience et papillonna légèrement des yeux avant de tourner la tête vers Manwë. Quand le Vala intercepta le regard de sa femme, il réclama le silence.
- Qu'as-tu vu, mon aimée ?
Un petit sourire étira les lèvres parfaites de la Vala qui adressa un regard réconfortant à sa fille.
- Thorin fils de Thráin se lance dans une quête dangereuse et son chemin sera semé d'embûches. La fin de sa quête m'apparaît bien ombrageuse... Cependant, parmi tous les futurs possibles, l'un d'eux est éclairé d'une douce lueur.
La Vala se tourna vers Shanmir avant de poursuivre.
- Et tu es dans ce futur-ci mon enfant. La Lumière que tu portes fournira chance et prospérité au courageux peuple des montagnes, et si vous réussissez tu vivras heureuse durant de très longues années avant de rejoindre tes ancêtres auprès du Père de toutes choses.
Ce futur là plaisait bien à Shanmir, et le parfum légèrement enivrant de l'aventure commençait à planer autours d'elle. Cependant, Ilmarë voulu clarifier un point.
- Et que se passera-t-il si ils échouent ?
Sa mère lui répondit par un regard triste lourd de sens qui eut le mérite de refroidir quelque peu les ardeurs de la jeune fille. Elle venait à peine de mourir et n'avait pas vraiment envie de réitérer l'expérience tout de suite !
- Cependant, reprit Varda en souriant de nouveau, il n'y a que peu de futurs dans lesquels sa vie prend fin, et dans tous les cas je vois Mithrandir récupérer la Lumière du Telperion.
Cette dernière remarque acheva de convaincre les autres Valar et Ilmarë inclina légèrement la tête, se pliant à la volonté de sa mère.
- Ne risque-t-elle pas d'être désavantagée par sa grande taille parmi une troupe de nains, demanda soudain Oromë. Il serait fâcheux qu'elle ne puisse les suivre par certains passages.
- En effet, répondit Aulë, sans compter qu'elle ferait une cible trop évidente avec ses trente centimètres de plus que mes guerriers.
- Je m'en occupe, fit Yavanna, trente bon centimètres de moins c'est ça ?
Aulë acquiesça et la déesse se tourna vers le chef du panthéon qui donna son accord d'un léger hochement de tête. La Vala s'approcha de Shanmir en souriant, et avant même que la jeune fille n'ai le temps de comprendre qu'on allait la rétrécir, tout devint soudainement plus grand autours d'elle et la tête lui tourna, la forçant à fermer les yeux. Quand elle les rouvrit, l'adolescente arrivait à peine aux coudes des Valar et sa robe lui tombait jusqu'aux chevilles.
oOo
Shanmir s'admira encore une fois dans le miroir devant elle. Elle ne pouvait nier qu'elle avait fière allure dans ses vêtements sombres de voyages : un pantalon ample surmonté de hautes bottes fourrées lui arrivant jusqu'aux genoux, une chemise à longues manches surmontée d'une tunique serrée à sa taille par une ceinture en cuir par dessus laquelle elle avait enfilé une veste – également en cuir - puis enfin un long manteau de voyage à large capuche. Les habits étaient à la fois légers et chauds - taillés pour la route et le combat, ils étaient assez près du corps pour ne pas risquer de s'accrocher à la moindre brindille et assez amples pour ne pas entraver ses mouvements.
Les Valar lui avaient également fait cadeau d'une dague qu'elle passa à sa ceinture et d'un magnifique arc accompagné d'un carquois bien fournit. La jeune fille avait ensuite eut droit à un petit débriefing sur la situation de la Compagnie qu'elle allait rejoindre, ce qu'elle devait faire et dire. Shanmir sentit un frisson de peur et d'excitation lui parcourir la colonne vertébrale en entendant parler du dragon, ainsi qu'une vague de compassion pour les nains chassés de leurs terres.
Finalement quand tout eut été dit et que les Valar se furent assurés que la jeune fille avait bien retenu les noms et descriptions physiques de Mithrandir – également appelé Gandalf le Gris - et de Thorin Oakenshield, Manwë se saisit de sa petite main avant de lui faire traverser de nombreuses pièces, jusqu'à finalement arriver devant une sorte de vortex blanc tourbillonnant.
- Tu vas parcourir une très grande distance en très peu de temps avec ce vortex, expliqua le Vala, mais je crains fort que le voyage, tout court qu'il soit, ne soit quelques peu... désagréable.
- Vous savez, je viens de me faire écraser par une voiture alors je doute que ce soit pire...
Manwë eut un rire mi-figue mi-raisin avant de frotter gentiment la tête de Shanmir, ébouriffant un peu plus les cheveux indisciplinés de sa descendante. Vint ensuite le tour D'Ilmarë qui se plia en deux pour serrer la petite dans ses bras.
- Je souhaite que ta nouvelle vie soit aussi longue et prospère que celle de mon cher Noïsha, lui murmura la déesse à l'oreille avant de se détacher d'elle.
Varda s'approcha enfin de l'adolescente et se pencha pour déposer un baiser sur son front.
- Adieu donc, Shanmir fille de Shanoa, et que les étoiles illuminent ta voie.
La jeune fille hocha solennellement la tête, gravant dans sa mémoire les visages de ses ancêtres divins. Puis, prenant son courage à deux mains, elle se tourna pour pénétrer dans le vortex.
Aussitôt, elle comprit ce que le chef du panthéon avait voulu dire. L'adolescente avait l'impression qu'on l'avait fait entrer dans une machine à laver qui tournait furieusement, la ballonnant de tous sens. Shanmir ferma les yeux aussi fort qu'elle le pouvait tandis que son estomac se révulsait. La jeune fille se dit qu'elle allait définitivement vomir avant de sombrer dans l'inconscience.
