Disclaimer : Harry Potter et son univers ne m'appartiennent pas, je ne gagne aucun argent à publier cette traduction, laquelle m'appartient, par contre. Les passages en italiques sont une emphase sur certains mots, ou la pensée d'un personnage, le contexte vous aidera.

Ceci est une traduction de la fanfiction de Lomonaaeren, « Stargazer », ( s/13141493/1/Stargazer ). Je n'ai pas encore son autorisation pour publier ma version française, je la retirerai si elle me le demande.

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Harry sait que ce n'est la faute de personne. Ses parents ne peuvent pas faire autrement que d'être des sorciers puissants, pas plus que ses petits frères Sol et Romulus et sa petite sœur Alicia. Les choses sont ainsi.

Mais ils le regardent, parfois, comme si c'était de sa faute. Comme si avoir à peine suffisamment de magie pour aller à Poudlard signifie qu'ils peuvent à peine le regarder.

Père est toujours en train d'inventer des jeux auxquels les autres peuvent participer sans problème, mais pas Harry, parce que ça implique qu'ils fassent appel à la magie qui brûle dans leurs yeux marron et noisette et presque dorés. Et Mère parle fièrement des beaux sorciers et sorcière qu'ils seront plus tard, mais sa voix vacille quand ses yeux se posent sur Harry. Et Sirius se gratte juste la tête en disant : « Euh… » à Harry avant d'aller jouer avec Sol, qui est nommé après lui, en quelques sortes, de toutes façons.

Remus est mieux, parce qu'il sait ce que c'est que d'être un paria, mais même lui est suffisamment fort pour Métamorphoser ses propres habits ou conjurer un verre d'eau s'il a soif. Harry ne sera probablement jamais aussi fort. Et Peter l'évite activement. C'est comme si Harry lui rappelait quelque chose de mal qu'il aurait fait.

Mère et Père lui parlent parfois, anxieusement, toujours pour s'assurer qu'il ne blâme pas ses frères et sœur.

« Tu sais qu'ils ne te détestent pas, affirme Mère encore et encore, caressant les cheveux de Harry et regardant dehors vers le jardin où sa fratrie sont en train de jouer. » Ou dans les airs sur des balais, ou rassemblés autour du feu, ou en cercle au milieu de jouets qui ne lui répondront jamais. « Ils n'ont pas d'aversion envers toi parce que tu es un Krakmol. »

Harry hoche juste du chef, la tête tombante et affaissée. Mère a l'air si déçue. Elle ne veut pas qu'il ressente de la jalousie, ou de l'aversion, ou de l'auto-apitoiement, ou la peur d'être rejeté, ou…

Ou quoi que ce soit, en réalité.

Père est pareil. Il lance des regards nerveux à Harry, comme si être un Krakmol, ou presque un Krakmol, était contagieux, et se racle beaucoup la gorge quand il est avec lui, et lui raconte des histoires sur d'autres gens avec peu de magie qui sont devenus de puissants Ministres.

- Les sorciers moyens n'ont que peu de magie, lui répète-t-il encore et encore. Beaucoup d'entre eux ne peuvent pas exécuter le Charme du Bouclier, ou le Charme de Désillusion, ou Transplaner. Tu vas aller à Poudlard, Harry. Le test du Médicomage l'a confirmé. Tu vas juste…

Ne pas pouvoir faire beaucoup d'autres choses. La phrase flotte, non dite, entre eux. Harry acquiesce solennellement, et plante son orteil dans la terre, et observe son père se précipiter aux côtés de ses frères et sœur, des enfants Potter normaux qui peuvent faire des choses normales. Il y a une différence entre « moyen » et « normal », du moins pour sa famille.

Et Harry ne se satisfait pas d'être normal. Peut-être que s'il était né avec la magie que Sol ou Romulus ou Alicia ont, il serait satisfait. Mais il veut être plus que ça. Et il sait comment y parvenir.

Il va juste devoir travailler vraiment dur.

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Severus laisse échapper une grimace sous la douleur martelante et s'assied, raide, à la Grande Table, le regard fixé sur les première année se bousculant et chuchotant entre eux dans l'attente d'être Répartis. Le remède contre les maux de tête qu'il élaborait ces derniers temps ne marchait pas exactement comme il l'espérait. Toutes les potions expérimentales ne pouvaient pas fonctionner, mais cela n'ajoutait pas à son humeur déjà massacrante.

Ou à la douleur qui devra partir toute seule, il le sait. Aucun antidote ne sera efficace.

- Vous attendez l'arrivée du fils de votre meilleure amie ? lui demande Albus avant d'engouffrer un bonbon au citron dans sa bouche en souriant.

Avec un rictus -cet homme est toujours en train de mange ces satanées sucreries, et de les offrir à Severus en sus de ça- il se contente de répondre :

- Ce n'est plus ma meilleure amie. Plus depuis qu'elle a épousé James Potter.

Le souvenir du choix de Lily pique toujours. Severus comprend pourquoi elle l'a fait. Il était trop réservé, au final, pour que même leur amitié survive. Il l'avait découragée avec son besoin constant d'être rassuré, puis sa froideur et ses disparitions dans les cachots pour brasser des potions.

Ses contacts avec les Mangemorts n'avaient probablement pas aidé, non plus. Et bien qu'il ne porte pas la Marque Noire sur son bras comme beaucoup de prisonniers, seul un miracle de self-control lui avait permis d'y échapper. En vérité, il avait été suffisamment proche de suiveurs du Seigneur des Ténèbres ayant été arrêtés, Lucius Malfoy y compris, pour que peu de gens veuillent l'engager une fois son procès terminé. Il devait être reconnaissant d'avoir trouvé une position à Poudlard.

Devait être reconnaissant. Cela ne voulait pas dire qu'il voulait l'être.

- Eh bien, il y a toujours l'espoir que la page se tourne, mon garçon !

Severus ne réagit pas à la taquinerie, et se concentre plutôt sur la Répartition. Les premiers enfants vont vite, mais une longue file attend derrière eux. Il grimace. Ce n'est pas bien de souhaiter que la guerre ait davantage frappé quelques familles avant qu'Albus n'y mette fin, mais son Occlumencie est suffisamment forte pour empêcher qu'Albus lise ce souhait dans son esprit.

Et personne d'autre ne peut l'atteindre.

Enfin, la file s'étrécit jusqu'au moment où Severus arrive à distinguer le garçon aux cheveux noirs ébouriffés et aux yeux verts qui lui pincent toujours le cœur, même maintenant. Il reste immobile, l'air ennuyé, alors que l'enfant s'avance et soulève le Choixpeau.

Un moment passe, et Severus incline la tête. Il se souvient avoir entendu dire que le garçon avait à peine assez de magie pour entrer à Poudlard. Ce qui pourrait vouloir dire…

- POUFSOUFFLE !

Les applaudissements et acclamations traditionnels retentissent de la part des Blaireaux de Pomona, comme pour tous les élèves Répartis dans leur Maison. Un Poufsouffle n'a aucune mesure de valeur relative, estime Severus de façon clinique, tandis qu'une partie de lui est toujours sous le choc. Bien sûr qu'ils seraient tout aussi heureux d'accueillir un presque Krakmol qu'un gamin d'une famille éminente ou d'une forte intelligence.

Potter s'avance et s'assied à côté de Cédric Diggory, qui lui tape amicalement l'épaule et commence à l'introduire auprès des autres. Severus les observe quelques minutes, jusqu'au Serpentard suivant. Potter garde les yeux baissés et répond suffisamment doucement pour qu'il soit difficile de distinguer les mots. Pas du tout le fils de son arrogant de père que Severus imaginait.

Mais, bien sûr, il y a plusieurs types d'arrogance. Potter s'estime probablement trop bien pour cette Maison. Estime qu'il aurait dû être un Gryffondor.

J'ai hâte d'apprendre sa place à ce garçon, songe Severus, avant de se tourner pour saluer de la tête la fille Selwyn arrivant à Serpentard.

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Travailler Dur.

La Maison de Harry ne le surprend pas. Déjà, il n'est pas assez bon pour être un Gryffondor. Mère et Père ont été clairs là-dessus. Ou du moins, ils ne le considèrent pas comme un Gryffondor. Et il ne voudrait jamais être un Serpentard. Il n'est pas rusé. Il invente des plans simples. Pas assez intelligent pour Serdaigle, non plus.

LeChoixpeauluiadit:

- Tu es tenace. Tu peux faire tout ce que tu veux avec une telle éthique de travail. Mais ton ambition est si forte que je te placerais bien à Serpentard. Laisse-moi regarder de nouveau.

Harry est resté assis et a repassé patiemment les souvenirs des fois où les gens l'ont ignoré. Pour le moment, il avait besoin que les gens continuent à l'ignorer. Il changerait ça bien assez tôt, mais il n'y avait aucun intérêt à changer ça tout de suite. Il n'était pas encore assez bon en magie pour perpétrer la révélation dramatique de sa présence à cet instant. Qu'il soit ignoré. Il pourrait juste…

- Tu vas t'améliorer parce que tu vas y travailler. Et ensuite tous les éblouir avec toute la magie que tu pourras leur montrer ?

- Exactement, lui avait répondu Harry, et le Choixpeau l'avait mis dans sa Maison.

La seule chose dont il s'inquiète, c'est que ses camarades de Poufsouffle ne l'ignorent pas suffisamment, l'empêchant de s'esquiver et aller pratiquer la magie de son côté, mais cela s'avère injustifié. Il n'est pas assez puissant ou assez intelligent ou assez amical pour attirer un intérêt extraordinaire. Et lorsqu'il écoute les autres, il ne lance pas les bonnes exclamations qui les convaincrait qu'il veut les adorer. Les gens parlent d'eux-mêmes et parfois l'utilisent comme un public pratique. Puis ils s'éloignent.

Comme ils l'ont toujours fait.

Comme il les ferait arrêter de le faire, dans quelques années. Mais seulement à ce moment.

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Le premier cours de Potions est un désastre. Mais en fait, Harry s'y attendait.

Le professeur Snape rôde alentours, persiflant de sombres promesses sur ce qui se passerait s'ils osaient sortir leur baguette dans sa classe. Harry garde la sienne fermement dans sa manche, mais ça n'empêche pas le professeur de se tourner vers lui et aboyer une question à propos d'asphodèle et d'armoise.

Harry pense connaître la réponse à celle-ci. Il a lu tous ses livres avant de commencer Poudlard. Il sait qu'il sera obligé de lire des livres pour devenir bon en magie, parce qu'il doit comprendre la théorie avant de pouvoir commencer à pratiquer les sorts. Les autres gens, qui ne sont pas presque des Krakmol, ne sont pas obligés, mais lui si.

Mais il ne voit pas non plus l'intérêt de donner la bonne réponse. Il connait le professeur Snape et sa haine des Potter, et son amitié brisée avec Mère. Harry ne l'impressionnera pas quoi qu'il fasse.

Et il a seulement du temps pour travailler et parvenir au moment où il pourra les impressionner.

- Une sorte de potion pour dormir ? demande-t-il, en s'assurant que sa voix est tremblante et haut perché, la voix typique d'un Poufsouffle.

Apparemment, le professeur ne s'attendait pas à autant, car il s'arrête et fixe Harry avant de ricaner.

- Et où trouveriez-vous un bézoar ?

Celle-là, il connait la réponse sans aucun doute possible. Mais il baisse les yeux sur sa table et bredouille :

- D.. dans un kit à p… potions ?

- Je ne tolère pas l'insolence, Potter. Dernière question. Quelle est la différence entre le napel et le tue-loup ?

C'est la même plante. Harry se mord la langue et rend son visage impassible, et rougit lorsque le regard de Snape se fait plus sévère.

- Je ne s… sais pas, monsieur !

De nouveau, Snape hésite, comme s'il ne comprenait pas, ce qui est plus bizarre que le reste. Pourquoi s'attendrait-il à autre chose que de l'arrogance de la part d'un des enfants de James Potter ? Mais il finit par se détourner et commencer à cracher les réponses.

Harry avait raison à propos de la potion avec l'asphodèle et l'armoise, qui est le Filtre du Mort-Vivant, et la provenance du bézoar. Mais il attrape précipitamment sa plume et écrit les réponses, et ne fait pas de son mieux pour la potion qui suit. Les Potions sont une chose à laquelle même les presque Krakmol peuvent faire bien. Et Mère en fait parfois pour son travail, mais Père ne serait pas impressionné par sa réussite dans la classe de Snape.

Harry va réussir à produire la magie vraiment impressionnante qu'ils ne s'attendent pas à le voir pouvoir faire. C'est justement le but.

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Le garçon a menti, il savait ce qu'étaient le napel et le tue-loup.

Severus adresse un regard noir à la pile des devoirs d'été qu'il est en train de noter. Un verre de Whisky Pur Feu luit doucement à portée de main, un feu encore plus doux danse dans le foyer devant lui, et l'égo des élèves attend d'être détruit, mais il a du mal à s'atteler à la tâche.

Être un Legilimens signifie qu'il peut sentir les mensonges de n'importe qui sauf un autre Legilimens. Et le fils Potter a menti.

Il n'avait aucune raison de le faire. Severus se serait plutôt attendu à ce que le rejeton de James Potter affiche un sourire narquois et se repose sur ses lauriers, s'attendant à impressionner son graisseux professeur de Potions avec quelques réponses simples.

Mais Potter n'est pas comme ça. Severus pense toujours qu'il est arrogant, s'attendant à réchapper à mentir à un Legilimens, mais il ne semble pas attirer l'attention. C'est presque troublant, cette façon qu'a le garçon de s'effacer en classe de Potions, sans même demander d'aide à ses camarades Poufsouffle. Il travaillait seul avant que Severus ne songe à lui assigner quelqu'un pour le faire.

Il se souvient d'une remarque négligente de Minerva l'autre jour. Elle était surprise, le premier soir, que le gamin ne soit pas un Gryffondor, mais à la Grande Table, elle avait dit :

- Je n'aurais pas dû être surprise. Ma Maison ne lui correspondrait pas. Il est très humble.

Est-ce que ça pourrait être parce qu'on lui a dit toute sa vie qu'il n'avait pas beaucoup de magie... ?

Cependant, Severus chasse cette notion avec un grognement. Non. Il avait raison sur le fait que c'est simplement un type d'arrogance différent. Potter s'attend toujours à ne pas être puni pour ses mensonges. Severus allait lui apprendre.

Ce n'est que lorsqu'il établit cette résolution qu'il peut enfin retourner à la destruction d'autres égos.

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Classes Vides.

Harry découvre qu'il se moque des retenues. C'est vrai, il n'en reçoit que du professeur Snape et c'est surtout parce que son nom de famille est Potter plus qu'autre chose, mais ça réduit quand même sur son temps privé qu'il veut passer à lire des livrer et pratiquer des sorts.

Il y a un bon point, cela dit. Le professeur Snape favorise les travaux manuels plutôt de faire des lignes ou des révisions forcées que certains autres enseignants font faire. Harry peut laisser son esprit vagabonder pendant que ses mains se donnent du mal avec les éponges et l'eau et le savon.

La théorie des Charmes est un sujet qu'il veut exercer dans sa tête à cet instant. Il vise la maîtrise complète du Charme du Bouclier et du Charme de Désillusion avant la fin du semestre. Il doute qu'il impressionnera ses parents juste avec ces deux-là, mais c'est un bon début.

- Encore à rêvasser, Potter ?

Harry ne sursaute pas, même si la voix a surgi de derrière lui. Une des choses que lui a apporté son entraînement rigoureux, c'est plus de contrôle sur son corps, réduisant les crispations involontaires et autres. Il incline la tête et murmure :

- J'ai presque fini, Professeur Snape.

- Je veux savoir ce à quoi vous pensiez, exige l'enseignant en se plantant devant lui.

Harry ne le regarde pas directement dans les yeux, à cause de sa Légilimencie, mais plutôt son nez. Ce qui est une cible plutôt grande.

- Je pensais aux Charmes, Professeur.

Il y a un silence pendant lequel Snape lutte pour trouver quelque chose digne d'une retenue dans ses mots. Harry reste simplement debout, immobile. Ses mains continuent de bouger, attaquant une tache qui s'obstine le long du chaudron, peu importe à quel point elle veut y rester.

- N'y pensez pas dans ma salle de classe ! claque finalement Snape avant de sortir de façon très théâtrale.

Harry ne pointe même pas du doigt qu'ils sont dans son bureau et non dans sa salle de classe. C'est l'étendue de sa noblesse. Il retourne à ses considérations sur les façons d'améliorer ses mouvements de baguette et la prononciation de ses incantations. Il suppose qu'il pourrait prêter attention à cette Granger de Serdaigle pour avoir des astuces, mais elle fait toujours suivre ces astuces par une demi-heure d'explications sur des choses que Harry connait déjà.

Il a de meilleures façons d'occuper son temps.

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Harry se tient debout, immobile, et s'étudie dans le grand miroir qu'il a trouvé dans une salle de classe vide et traîné ici, dans son espace de pratique, une autre salle de classe vide. En premier lieu, le miroir insistait pour lui montrer des images de lui-même avec Mère et Père pendant que ses frères et sa sœur le contemplaient avec admiration. Mais Harry l'a menacé de le briser, et le miroir prouva qu'en plus d'être enchanté il était intelligent. Maintenant, il le reflète juste lui et la salle de classe.

Et il ne le reflètera plus dans un instant, si tout se passe bien.

Harry inspire profondément, comme tous les livres disent de le faire, se calmant et se centrant. Puis il tapote sa baguette sur sa tête et énonce l'incantation du Charme de Désillusion, sans tarder.

Rien ne se passe.

Harry cligne des yeux un instant. Puis il expire et hoche la tête. D'accord. Il n'a pas encore travaillé assez dur. Ou il n'a pas fait suffisamment plier le peu de magie qu'il a, qu'il peut sentir parfois brûler dans sa poitrine. Il va continuer à y travailler. C'est un muscle. Il va y retourner et pratiquer et faire que ça marche.

Bien sûr, il se sent déçu alors qu'il se repositionne devant le miroir. Mais il ne se sent pas d'abandonner.

Il n'abandonnera jamais.

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Severus regarde fixement la lettre sur son bureau. Honnêtement, il l'attendait il y a un mois, lorsqu'il avait commencé à donner toutes ces retenues à Potter. Sûrement que le garçon aurait écrit à ses parents pour se plaindre, et James Potter aurait envoyé une Beuglante pour hurler sur Severus et lui dire qu'il ne devrait pas écraser les rêves d'un pauvre Krakmol.

Mais c'est la première qu'il a reçue. Et c'est une note ordinaire, de Lily. Il l'a ouverte à l'instant où il l'a vue. Il ne la fixe pas à cause de ses sentiments pour leur vieille amitié. Il la fixe parce que c'est la chose la plus perturbante qu'il ait reçu d'elle.

Cher Severus,

Je déteste d'avoir à t'écrire comme ça, parce que j'ai l'impression de profiter de l'amitié qui nous liait autrefois. Mais j'ai aussi l'impression de ne pas avoir le choix. Harry ne nous a pas écrit une seule ligne depuis son arrivée à Poudlard. Nous espérions que tu avais une idée de comment il se débrouille en classe. Je veux dire, au moins en classe de Potions. Nous savons qu'il n'est pas à Serpentard, mais seulement parce que Sirius s'est arrêté pour discuter avec Dumbledore et a aperçu Harry avec les couleurs de Poufsouffle sur ses robes.

Nous ne savons pas pourquoi il ne nous écrit pas. Mais nous avons tous les deux peur qu'il trouve peut-être le travail scolaire trop difficile et qu'il pense que nous allons le retirer de l'école. Ce n'est pas vrai ! Nous voulons qu'il reste à Poudlard aussi longtemps qu'il le peut.

Je sais que tu ne nous apprécies pas, James et moi, la plupart du temps, mais nous pensions... Je pensais que Harry pourrait établir un lien avec toi parce que les Potions sont une branche de la magie que les gens presque Krakmols peuvent pratiquer facilement. S'il te plaît, peux-tu juste nous écrire et nous dire comment il va ? Même quelques mots signifieraient beaucoup.

Merci à toi.

Lily.

Severus fixe la lettre, et tapote des doigts sur la table. Il se lève pour aller chercher un verre de son whisky favori, et pourtant les choses n'en sont pas plus claires.

Potter n'est pas du genre à raconter des histoires, apparemment. Ni à propos de ses retenues, ni à propos des remarques cinglantes que Severus lui adresse en classe, ni à propos du fait que Severus a entendu dire qu'il lutte dans la majorité de ses cours avec tout ce qui n'est pas de la pure théorie. Ni à propos de quoi que ce soit.

Severus en serait presque à se demander si ce n'est pas le même genre de pas-racontage-d'histoire qui a hanté sa propre enfance.

Mais il se secoue abruptement. Il connait Lily –il la connait toujours, même après toutes ces années d'éloignement gisant entre eux. Il sait qu'elle ne maltraiterait jamais son enfant.

Il y a d'autres genres de travers qui s'immiscent dans l'âme d'un enfant et la déforment, cependant. Et si ce n'était pas de la maltraitance, mais juste entendre dire encore et encore qu'il était presque un Krakmol, et devrait être reconnaissant d'aller à Poudlard ? Severus sait que les autres enfants Potter sont de puissants sorciers et sorcière. Lupin et Black s'assurent d'en parler à très haute voix à chaque fois qu'ils passent à Poudlard et voient Severus au détour d'un couloir.

Potter était peut-être en train de surcompenser. Mais alors comment est-ce possible lorsqu'il réussit à peine en Potions et est en difficulté dans les autres classes, Severus l'ignore. Peut-être tout simplement en adoptant le stoïcisme adopté, lui aurait-on dit, par les autres Krakmols ?

Severus secoue la tête. Il répondra à Lily pour confirmer que le gamin est bien à Poufsouffle. Il dira qu'il n'est pas très bon en Potions. Il lui dira à propos des retenues qu'il lui donne et que le garçon récolte comme un Maître de Potions récolte des kakis en nuit de pleine lune.

Mais il ne lui en dira pas plus. Peu importe ce que recèle l'âme de Potter, il mérite de le découvrir lui-même.

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La Magie du Travail.

L'incantation résonne dans la salle de classe. Harry sait que le mouvement de sa baguette est parfait. Il observe le miroir avec la concentration intense, inébranlable qu'il a développée, du genre qui ne peut être déçue même s'il sait...

Et là il disparaît.

Harry reste là, bouche bée, et laisse tomber sa baguette. Elle roule et s'éloigne de lui sur le sol, soudainement visible, mais le reste de lui-même n'apparaît pas. Il l'a fait. Il a maîtrisé le Charme de Désillusion.

Il danse de joie devant le miroir, et le scintillement qui cache sa silhouette saute avec lui. Harry sourit jusqu'aux oreilles et agite son bras. Il arrive juste à discerner la forme de son geste dans l'espace déterminé par le Charme.

Il récupère sa baguette et lance un autre sort. Cette fois-ci, il coule aisément de sa baguette, et la petite spirale de magie au centre de sa poitrine semble s'échauffer et s'étendre.

Il y est arrivé. Il l'a maîtrisé à temps pour Noël.

Il travaille toujours sur le Charme du Bouclier. Mais il peut rentrer à la maison et jouer avec ses frères et sa sœur et écouter leurs histoires de magie et se satisfaire en sachant que, un jour, il aura une histoire plus grandiose encore qu'aucune des leurs à leur raconter.

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- Vous vous débrouillez bien mieux en Métamorphose qu'avant, M. Potter.

- Merci, Professeur McGonagall.

Severus marque une pause avant de dépasser le coin du couloir, même si, honnêtement, il ne sait pas pourquoi. De ce que ça en a l'air, Minerva et Potter sont en train de parler de ses performances en cours –pas de secret ici, vu comme Minerva aime se vanter ou se plaindre des élèves à la table du petit-déjeuner, et du déjeuner, et du dîner. Mais il y a une nouvelle intonation dans la voix de Potter lorsqu'il répond, peut-être.

- Avez-vous trouvé un livre qui vous a aidé, M. Potter ?

- Oh, pas vraiment, Professeur McGonagall. J'ai juste lu tous les livres sur la Métamorphose que je pouvais trouver à la bibliothèque. C'était plutôt... vraiment tous. Pas juste un seul.

Severus étrécit les yeux. Et ceci était un mensonge, comme ceux que Potter a raconté lors de son premier cours en disant ne pas savoir la différence entre le napel et le tue-loup. Severus ne serait pas vraiment surpris si certaines de ses autres déclarations étaient aussi des mensonges. C'est juste que, parfois, la façon de formuler permet d'esquiver l'attention d'un Legilimens.

Il ne pense pas qu'il y ait un livre spécial et secret, cependant. Minerva serait au moins à même de suggérer un nom, et la réaction de Potter dévoilerait à Severus plus qu'il ne pourrait s'en douter, sans savoir que Severus était en train d'écouter la conversation à ce moment même. Non, il est plus probable que Potter fasse autre chose qui mène à son succès en classe.

Copier sur Granger ? Les Poufsouffle partagent effectivement la Métamorphose avec les Serdaigle, d'après les souvenirs de Severus. Et à cet instant Severus réalise qu'il ne voudrait rien de plus que contourner ce coin, regarder dans les yeux du garçon, et savoir. Sa passion pour les secrets, déjoué, endormi depuis la guerre, est maintenant ravivé.

Minerva semble presque déterminée à exaucer son désir, bien qu'elle ne sache pas, évidemment, que Severus est là. A écouter, elle tapote presque la tête de Potter.

- Bien entendu, M. Potter. C'est ce que je dirais aux autres élèves lorsqu'ils me demanderont quel est votre secret.

- Ils croiront toujours qu'il y a forcément un secret, n'est-ce pas, Professeur ?

Potter a l'air presque... méprisant. Severus n'a jamais entendu une telle intonation dans la voix du garçon. Cela dit, il reste si silencieux la plupart du temps qu'il est difficile de discerner ce qu'il ressent. Severus a l'impression qu'il a maintenant les oreilles pointues et des moustaches, cherchant à atteindre le secret de Potter.

- Oui, c'est souvent le cas. Et tout ce dont vous avez besoin c'est...

- Travailler dur.

Minerva rit et abonde dans ce qu'elle voit probablement comme une réponse typique d'un Poufsouffle, mais Severus est celui qui écoute. Severus est celui qui peut comprendre que Potter le pense vraiment, parce que sa voix est tellement plus fervente qu'auparavant.

Mais travailler dur à quoi ? Il le découvrira, c'est une certitude.

Minerva retourne enfin dans sa salle de classe, et Potter commence à descendre le corridor. Celui qui mène vers la Tour de Serdaigle, remarque Severus, pas la Salle Commune de Poufsouffle ou la bibliothèque. Il se hâte de suivre Potter, et appelle doucement son nom alors qu'il est sur le point de tourner à un autre coin.

Potter se retourne, mais, de façon exaspérante, il garde les yeux rivés au sol.

- Oui, Professeur Snape ?

- Regardez-moi, s'il vous plait, M. Potter.

Severus garde sa voix calme grâce à de longues années de pratique. Qu'a donc fait Potter ? D'ordinaire, seuls les élèves suspectant une retenue en vue évitent son regard avec autant de diligence.

Mais Potter se concentre sur son front et son nez lorsqu'il obéit, il ne le regarde pas dans les yeux. Severus le dévisage. Le désir de comprendre s'efface sous son étonnement et sa fureur, carbonisé. Comment est-ce que ce garçon peut... ?

Cela dit, James Potter sait pour sa Légilimencie. Severus l'a utilisée quelques fois sur lui lorsque l'Ordre du Phénix était toujours actif, avant la bataille grandiose durant laquelle il a vaincu le Seigneur des Ténèbres.

- Mes yeux, M. Potter, enjoint-il. Regardez-moi dans les yeux.

- Je suis désolé, Professeur, murmure Potter. Mais j'ai un terrible mal de tête lorsque je le fais. Je pense juste que votre magie est tellement plus puissante que la mienne qu'elle submerge la mienne et me donne la migraine, vous comprenez ?

C'est effectivement un phénomène documenté lorsque les sorciers puissants interagissent avec ceux à la faible magie. Pas très commun, et pas quelque chose dont Lily et James Potter auraient parlé à leur fils, mais cela existe. Severus le fixe de nouveau.

Pendant ce temps, Potter baisse le regard et reste là, debout, selon toute apparence un petite Poufsouffle pathétique attendant les ordres.

S'il est vraiment si intelligent et cache tous les secrets comme je le suspecte, comment a-t-il fait pour éviter d'être Réparti à Serpentard ?

Severus a entendu des rumeurs indiquant que les élèves pouvaient marchander avec le Choixpeau, mais il n'y croit pas. Autrement, le Choixpeau aurait écouté ses prières désespérées, il y a si longtemps, pour aller à Gryffondor avec Lily.

- Dix points en moins à Poufsouffle pour ne pas faire ce que vous est demandé, crache-t-il avant de s'éloigner d'un pas altier.

Il ne pense pas que cela affectera beaucoup Potter. Ce sale morveux exaspérant agit comme s'il se moquait complètement des points pour sa Maison. Ou de sa Maison. Il ne semble pas avoir d'amis là-bas.

Mais de quoi ne se moque-t-il pas, alors ?

Le désir de savoir est de retour, mais au moment où Severus se retourne, Potter est parti.