Quand j'ai écrit le premier chapitre, je ne savais pas si j'allais lui donner une suite, donc je l'ai écrit sans me soucier justement de la suite !
Maintenant, je vois un peu mieux ce qui pourrait se passer avec mes personnages.
J'ai toujours été très choqué par l'attitude de la mère de Sirius, les cris, la condamnation de son fils, surtout une fois celui-ci mort. Cette fic prend donc le contre pied de ce genre d'attitude, j'ai doté Sirius d'une mère aimante, tant pis si je ne respecte pas les conventions ! (ce qui m'oblige aussi, en passant, à me glisser dans la peau d'un personnage féminin - reste à voir si je suis crédible sur ce coup là !)
C'est aussi pour cela que j'ai transformé Black cousinage en Black lignage.
Lecteurs, lectrices, si ce nouveau chapitre vous semble bien éloigné de vos HP de prédilection, ne vous découragez ( ne me laissez pas tomber) , le chapitre suivant sera plus... classique, trajet en Poudlard Express !
Et enfin, merci à ma relectrice pour l'orthographe et certains détails concernant Madame Black !
Ooooooooooooo ooooooooooooo
Un coup frappé à la porte, impatient, pour autant qu'elle puisse en juger. Elle tâtonne à la recherche de son oreiller dans l'intention de se l'installer sur la tête. Mais impossible de le trouver, même en faisant aller sa main sur toute la surface du lit.
Enfin, il lui semble que c'est ce qu'elle est en train de faire, mais peut-être cherche-t-elle autre chose ? Un autre corps à côté d'elle, bien mieux qu'un oreiller, ça, pour se consoler.
" Shaula, êtes-vous réveillée ? "
Ah voilà, son cher époux qui la rappelle à ses devoirs, rentrée des garçons aujourd'hui, l'habituel cirque à Victoria, la perspective peu réjouissante de revoir les autres parents : vous avez vu la tête de Madame Black ?
Et oui, Madame Black boit, aussi peu de dignité qu'une moldue… chacun son truc.
" Shaula, pour la dernière fois, je vous saurais gré de vous lever, dois-je vous rappeler que les garçons ont un train à prendre, et qu'il ne serait pas inconvenant que vous les accompagniez à la gare. "
Fichtremerlin, quand Nigel lui parle sur ce ton, elle a envie de vomir. Mais ça serait inconvenant, surtout sur le quai de Victoria Station, devant la fine fleur de l'aristocratie magique, dont tu fais partie, que tu le veuilles ou non, ma belle.
" Combien de temps ?
– Que dites-vous, je ne comprends pas !
– Eh bien, entrez, auriez-vous peur de votre femme ? "
Elle s'assoit dans son lit, arrange les draps sur ses jambes, fait glisser une bretelle de sa chemise de nuit. Elle a toujours eu de superbes épaules, mais Nigel se souvient-il encore ? Il vient d'entrer, déjà habillé, lui, l'exquise odeur de son eau de toilette se répand dans la pièce. Nigel, Sirius, Regulus, le même superbe modèle décliné trois fois. Ma vie est devenu un gâchis, je n'ai pas compris le moment où tout s'est détraqué. Où plutôt si, je ne le sais que trop bien. Il regarde la bretelle glissée sur le bras, un étroit ruban de dentelle crème.
" Que disiez-vous ?
– Dans combien de temps partent-ils ?
– Partent-ils, je crains que ne m'ayez compris … nous les accompagnions à Victoria Station.
– La famille modèle donc ?
– Cessez vos persiflages et préparez-vous. "
Elle fait glisser la deuxième bretelle, il lui décoche un regard furieux, elle aurait dû s'y attendre. Plus d'humour, ni de tendresse entre eux. Ni de désir. Plus de barrière pour la protéger d'elle.
En s'habillant, des couleurs claires, une veste rayée de teintes douces, une jupe beige doré, pas la peine d'en rajouter dans le tragique, elle se demande une fois de plus si Nigel a une maîtresse. Elle a essayé de le pister, de faire des recoupements, elle a chargé Kreattur de le surveiller, Kreattur, Kreattur, mon affreux, que ferais-je sans toi, dis-moi s'il couche avec une autre.
Mais rien, rien, il doit utiliser des sorts compliqués, pour se protéger. De la magie noire ? prendrait-il autant de risques pour une affaire somme toute si banale … tromper une femme qui vous dégoûte ? et est indigne de vous et de votre prestigieux lignage.
Elle choisit une paire de boucles d'oreille, de longs pendants qui descendent presque sur ses épaules, des pierres fines, aux reflets changeants, un peu racoleur, mais ainsi ce n'est pas sa gueule de bois qui aura la vedette.
Bon, dernière année pour Sirius, Sirius, attention, pas de divagation, reste factuelle, alors cette fois-ci, combien de lettres de la direction de Poudlard
Votre fils, conduite inadmissible … faisons remarquer que c'est la troisième fois qu'il se voit sanctionner à hauteur de deux semaines de détention….
Reste juste à espérer que les Aspics de fin d'année lui mettront un peu de plomb dans la cervelle. Moi, plus qu'assez d'envoyer des beuglantes à tour de hiboux express.
Heureusement qu'il y a l'autre, comment déjà son nom … quelque chose à voir avec l'empire romain, Césarus ? Tibèrus ? enfin, peu importe, un peu plus raisonnable, celui-là, bonne influence sur Sirius. Pourquoi n'a-t-il pas voulu l'inviter pendant les vacances ? Peut-être que certaines choses auraient pu être évitées.
Quant à Regulus, quatrième année, rien à dire, bons résultats, no comment sur celui-là. Le fils modèle, ahah. Je préfère Sirius, une mère ne devrait pas dire cela, mais il faut bien être honnête, parfois. Je l'ai toujours préféré, même avant. Même avant.
Bon sang, je suis déjà épuisée à l'idée de les revoir, ma chère belle-sœur, mes chères nièces, et les Potter, elle surtout, une véritable vente de charité à elle toute seule, ne comprendra jamais que il y a des gens, moi par exemple, qui ne sont aussi bien dans leur peau et heureux qu'elle - bonne humeur et bonheur obligatoires – absolument invraisemblable de raisonner comme cela.
On frappe à nouveau à la porte. Shaula soupire, et laisse tomber "Entrez" d'une voie découragée d'avance à l'idée que ce soit l'un ou l'autre qui vienne voir où elle en est de ses préparatifs. Mais ce n'est que Kreattur, avec un plateau, du thé.
" Maîtresse, Maître a demandé à Kreattur de lui apporter du thé bien fort."
Il reste là, à la regarder, attendant qu'elle parle. Elle pourrait le renvoyer avec le plateau. Elle choisit la conciliation.
" Alors, si c'est mon auguste époux qui ordonne, je ne peux qu'obéir. Sers donc moi une tasse de thé bien fort. Et apporte-moi ma paire d'escarpin, les verts pâles, en babydragon." Par dessus la tasse de thé, Shaula regarde l'elfe lui enfiler les délicates chaussures.
Elle le retrouve tous trois dans le hall, les trois hommes de sa vie, elle hésite entre sarcasme et sanglot. Est-ce que Sirius lui même serait prêt à la défendre ? Elle embrasse rapidement les deux garçons, une parodie de baiser, Regulus est encore un peu plus petit qu'elle, pas pour longtemps. Et déjà tant de mépris dans ses yeux.
" Dépêchons-nous, la voiture nous attend. "
Comme tous les ans, Nigel a commandé une limousine pour leur faire traverser le monde moldu – une question de rang, deluxe limo. Deluxe family.
Les autres Black font pareil, Marcus son beau-frère, Lucrezia sa belle-sœur, et Lucius, le cousin de ses fils, son neveu, tout prêt à aller répandre son venin à Poudlard. Elle sort la première, presqu'en courant. Les trois autres ne réagissent pas tout de suite, elle atteint la longue voiture noire, aussi stupide que longue, elle s'installe, au milieu de la vaste banquette opposée au sens de la marche, les trois autres, après avoir aidé au chargement des malles, s'installent en face d'elle. Elle ferme les yeux. Ils progressent à faible allure, à travers le chaos de la circulation moldue.
" Shaula, tenez, prenez, je crois que vous en avez besoin. "
C'est Sirius, il lui met un mouchoir dans les mains. Elle pleurait donc ? Peut-on être distant de soi, à ce point, pleurer sans s'en apercevoir ?
Elle ouvre les yeux, les larmes déferlent sur ses joues, mouchoir serré sur la bouche qui tremble, bientôt trempé. Deux qui détournent les yeux, le troisième la regarde. Un regard insupportable.
Voiture arrêtée à nouveau, elle attrape son sac, se glisse vers la portière, l'ouvre, elle est dans la rue, au milieu des files de véhicules, piégée. Elle chasse les larmes d'une main impatiente, vision éclaircie, une trouée au milieu de la file, le trottoir est sous ses pieds, bruits de talons qui claquent – échappée – mais pas libérée.
" Shaula, attendez, où allez-vous ? "
C'est à nouveau la voix de Sirius. Sa voix, son bras qui vient enserrer le sien, un peu maladroitement.
– Allez, venez, nous allons marcher jusqu'à Victoria, il y a tellement de circulation de toute façon, nous serons arrivés avant eux. Nous sommes déjà dans Francis Street, il n'y en a plus bien pour longtemps. … Marcher vous fera du bien, de toute façon. Vous avez de très jolies chaussures…
Oui, jolies, très chères, peu pratiques… - Ça va aller quand même ?
– Oui, tu prends bien de la peine pour moi.
– Vous êtes ma mère, non ? Dites-moi, vous n'avez pas oublié ?
– Non. Des pas, sur le même rythme, rapide.
Pourquoi es-tu descendu ?
Vous étiez très belle, en clair, au milieu des voitures noires. Vulnérable aussi, vous auriez pu vous faire renverser. Et j'ai eu … envie de vous prendre dans mes bras. "
Elle se risque à glisser un regard de son côté, pour s'apercevoir qu'il a les yeux fixés ailleurs, strictement devant lui. Mais son bras a oublié toute sa maladresse, ou sa gêne ? près du sien – il la tient souplement, la guidant à travers la foule de cette rue de Londres.
Vous étiez très belle. J'ai eu envie de vous prendre dans mes bras.
Sirius, Sirius, ne m'oublie pas là-bas, ne sois surtout pas sage, agite toi contre eux, afin que j'ai de tes nouvelles, fais moi convoquer là-bas que je revienne te voir. Sirius, Sirius, comment te dire jamais pourquoi je me laisse glisser dans l'alcool ? Je suis plus maudite que les Black que tu traites de maudits.
" Qu'a dit votre père ? de me voir partir comme cela ? Il n'a rien fait pour me retenir…
Non, rien. Fidèle à lui même, Nigel – quand les événements lui échappent, difficile de savoir comment il réagit. Imperturbable, et pourtant je l'ai bien observé… il ne vous a pas suivi des yeux. C'est comme si il n'avait rien remarqué. Vous étiez là, vous n'y étiez plus, quelle importance. Alors, je l'ai laissé tomber, je suis venue avec vous.
– Et Regulus ?
– Regulus, vous voulez me faire rire !
Etait-ce volontaire ou non ? Il s'était un peu rapproché d'elle et subitement l'air lui manqua.
" Aussi imperturbable que Père, bien sûr. Vous auriez aussi bien pu vous noyer sous leurs yeux. "
Me noyer dans l'alcool. Noyer son chagrin. Le lieu commun venait de la rejoindre. Et comme il reprenait le fil de ses pensées, une secrète connexion entre eux deux.
" Shaula, cessez de boire, pour l'amour de Merlin, ne vous détruisez pas. Ne faites pas ça, je..je pense que Nigel ne le supportera pas longtemps. Et je ne vous le demande pas pour l'honneur de leur nom, vous savez que je n'en ai rien à foutre, mais pour vous.
– Sirius, si ton père demandait une séparation, que dirais-tu ? "
Voilà, il la regardait enfin, pendant une fraction de seconde, elle put même s'imaginer que c'était son mari qui la regardait à nouveau – ce serait si simple, si bienvenu. Mais il lui répond d'une voix dure
" Arrêtez de vous comporter comme cela, et il ne le demandera pas.
– Tu crois qu'il m'aime encore ? "
Elle n'aurait pas dû poser cette question, les enfants, même grands, n'ont pas de comptes à rendre à ce sujet. D'ailleurs il ne répond pas et détourne les yeux.
" Voyez, nous sommes déjà arrivés. Et eux sans doute pas encore. Venez, nous allons les attendre près de l'accès au quai.
– Non, je ne préfère pas. Restons plutôt tous les deux, tu veux bien ? nous les surveillerons de loin.
– Comme vous voulez. "
Elle l'entraîne un peu à l'écart derrière un pilier. Pas question de se montrer aux autres sans Nigel et Regulus, Merlin sait quelles conclusions ils pourraient vouloir en tirer.
" Sirius, hé, Sirius !"
Son fils sursaute, se retourne, cherche des yeux celui qui l'interpelle. Un de ses amis, sans doute. Pas une voix qu'elle reconnaisse, en tout cas. Elle le voit faire un pas dans la direction d'un jeune homme qui s'approche et dont le visage lui dit quelque chose, obstinément.
" Remus, je … salut, comment vas-tu ? "
Le jeune la regardait, rougissant un peu.
" Je pense que c'est à toi de faire les présentations, Sirius. "
Il n'avait pas l'air bien du tout, cet ami, les joues creuses et les yeux fiévreux. Pas de parents aux alentours, non plus.
" Ah, oui, bien sûr. Shaula, je vous présente Remus Lupin, mais je pense que vous l'aviez déjà vu."
Le jeune homme la regarde intensément, ce sont ses boucles d'oreille ? ou est-ce pour se souvenir de la dernière fois où ils se sont vus ? En juin dernier, ici même, le début des vacances, elle avait à moitié suggéré que Sirius l'invite au mois d'août. Peut-être cette présence aurait-elle évité que certaines choses n'arrivent. Mais elle s'était déjà faite cette réflexion ce matin en s'habillant …
" Je vous laisse, vous avez sans doute des quantités de choses à vous dire. " Elle fait quelques pas, en direction d'un stand de journaux.
Qu'est-ce que tu fiches là ? t'es pas déjà sur le quai, avec les autres ?
Je t'attendais, j'ai failli te manquer d'ailleurs, je m'étais planqué près de l'accès au quai … Je voulais te voir pour te prévenir – je ne rentre pas aujourd'hui à Poudlard, la pleine lune se lève à 19 heures, en plein la cérémonie d'affectation, ça ferait un peu désordre de devoir me casser au beau milieu. Dumbledore est au courant, en fait, je lui en avais parlé au mois de juin.
Toujours le calendrier dans la tête, alors ?
Bien obligé, non !
Et tu viendras comment ?
Transplanation, quoi d'autre ?
Et les paris ?
Les paris ? Ah oui. Bof, vous vous passerez de moi…. De toute façon, dix dans chaque, aucune raison que ça change. Ton père et ton frère ne sont pas là ? "
Il se trompait ou Remus le regardait vraiment d'un drôle d'air ? Peut-être à cause de ses joues qu'il sentait rougir à toute allure – longtemps que ç'avait dû lui arriver, ça. Qu'est-ce que ça pouvait lui foutre à Remus, est-ce qu'il l'emmerdait avec ses parents lui ?
Non, mes parents se sont partagés le boulot, chacun le sien. Tu sais bien que les Black demandent une étroite surveillance, on ne sait jamais ce qui risque de leur passer par la tête."
Et qu'est-ce qu'il avait dans la tête lui , à cet instant précis ?
Shaula si claire au milieu de tout ce noir. Son bras le long du sien. Le rythme vif de ses chaussures sur le trottoir.
Il aurait dû la prendre par la main, et se mettre à courir, il l'aurait entraînée, elle l'aurait suivi. Une course ensemble, une course à deux, son premier souvenir d'eux, dans la fraîcheur de l'été lituanien. Le parc de la maison de ses grands-parents Sontchaff, l'herbe haute et abondante, humide encore de la pluie qui venait juste de s'arrêter, Shaula soudain prenant son envol, se mettant à courir, le laissant sur place et lui criant vers elle Mama, Shaula riant aux éclats, l'attendant, lui tendant les deux mains tenues au bout de ses bras nus, ses cheveux encadrant sa gaîté.
Il avait couru à son tour vers elle, arrivé à elle, il avait trébuché, elle l'avait attrapé, adroitement, comme toujours et soulevé au dessus du sol en criant, il se savait plus quoi, mais il avait ajouté ses cris aux siens, et lorsqu'elle l'avait reposé sur l'herbe, elle était un peu essoufflée.
Mais lui n'avait pas lâché ses mains, et ils s'étaient remis à courir, elle à reculons et doucement, afin que ses jambes d'à peine trois ans puisse suivre. Ensuite, le ventre de Saule s'était mis à grossir et Regulus était né, et pendant longtemps, Sirius avait été persuadé que ce petit frère était arrivé à cause de leur course à deux, que c'était eux deux qui avaient déclenché cela.
" Tu.. tu diras que tu ne sais pas où je suis, OK, j'ai pas envie de refaire le coup du je suis malade, un problème de famille ou toutes les conneries habituelles. J'en ai marre des mensonges, je crois que le mieux est de ne rien dire, on verra bien quand je reviendrai. De toute façon, James et Peter sauront à quoi s'en tenir. Et les autres, quelle importance. "
Elle les regardait parler, s'amusant à les comparer. Sirius un peu plus grand que … comment déjà ? ah oui, Remus, elle avait raison, l'empire romain. Plus large d'épaule, aussi, plus musclé. Regulus serait-il plus grand encore ? Elle ne le souhaitait pas. Remus, donc, quel prénom étrange ! plus mince, sans doute plus intellectuel. Et quelle mine, doux Merlin, elle avait de la peine à croire qu'il sortait de deux mois de vacances. Etait-il toujours comme cela ? Sirius lui parlait si peu de sa vie à Poudlard, elle vivait ce temps comme une déchirure et lui comme une liberté.
Elle n'en recevait qu'un vague écho – les notes et les lettres d'avertissement, voire les convocations. Ses yeux étaient revenus sur le visage de son fils, il se présentait à elle de trois quarts, il écoutait parler son ami, et soudain quelque chose passa sur son visage, qui vint accélérer son cœur à elle.
Un moment où il lui ressembla parfaitement, la blackitude, comme il le disait en se moquant, avait fait place à d'autres traits, habituellement cachés, et là parfaitement révélés. Bonheur et douleur mêlés… ce qu'elle lui avait donnée, cette fêlure, pour le moment, il ne faisait que la pressentir, mais elle, elle savait maintenant où était la sienne.
Elle se mit en marche vers lui – il ne fallait pas que cela dure trop longtemps. Elle afficha un sourire passe-partout sur son visage, elle remarqua quand même comment Remus la regardait marcher vers eux. Sirius aussi le voyait.
" Je viens d'apercevoir ton père et ton frère, il faut que nous allions les retrouver. "
Sirius avait-il expliqué à son ami pourquoi ils étaient arrivés en deux groupes ? Quelle importance, de toute façon !
" Vous venez avec nous, Remus ? "
Il rougit. Elle sentit ses pendants d'oreilles venir doucement cogner contre son cou.
" Euh, non, je dois encore aller chercher ma malle. Bon et bien au revoir Madame, Sirius… à tout à l'heure."
Il hésitait encore, comme s'il attendait qu'elle parle.
" Veillez bien sur Sirius, je lui ai fait promettre de se tenir correctement, pour cette dernière année et de ne pas perdre de vue qu'il avait, enfin comme vous tous, des examens à passer à la fin de l'année."
La maman modèle, vraiment ! Qui aurait dit qu'elle avait passé la soirée précédente, seule, à avaler des larmes perdues au milieu d'innombrables verres d'alcool. Qui ? mais c'était évident voyons ! Nigel, Regulus et Remus – donc ça faisait déjà trois. Sirius avait l'air excédé par ce qu'elle venait de dire, il tapa sur l'épaule de son ami, fort.
" A plus, Remus… on se retrouve dans le train. Et se tournant vers elle – Allez venez, ils vont se demander où nous sommes. "
Ils finirent par rejoindre le groupe familial, qui avait investi sa place de prédilection, une dizaine de mètres après le début du quai, une sorte d'estrade, tout le monde se demandait à quoi elle pouvait bien servir quand la plate-forme était désertée, mais les jours de rentrée, sa fonction devenait évidente – une tribune de parade pour les familles chics, qui les préservait de la bousculade tout en les exposant aux regards envieux – ou indifférents.
Et j'ai beau être moi aussi juchée sur ce piédestal imbécile, c'était comme si j'étais effondrée au fond de moi, un sac tout mou, c'est à peine si j'entends ce qu'ils disent, vacances, été, Seychelles, invitation tout le monde a l'air de me regarder, je les vois trouble, pourtant je suis certaine que je ne pleure pas, qu'ils pensent donc que je suis ivre, mais c'est faux, j'ai plutôt l'impression que je n'aurais plus jamais besoin de boire une goutte d'alcool, depuis qu'il me l'a demandé, ah invitation j'y suis samedi prochain, soir, maison, la famille de Nigel, les vieux débris maléfiques, je sors la tête de mon sac, je vais leur répondre, ou alors je disparais, mais Nigel me surveille, pas de seconde chance aujourd'hui.
" Oui, tout à fait, nos beaux-parents respectifs, samedi soir.
– Oh, nous aurons donc le plaisir de voir vos parents, Shaula ? "
Nigel et sa voix froide, sarcastique – elle a dit une bêtise, et il lui fait savoir.
" Et vos parents vont venir de Lettonie ? – Lituanie, Lituanie, je suis lituanienne, enfin mon père, ma mère est anglaise. "
Quel besoin de préciser ? comme si elle rencontrait ces gens pour la première fois… ou alors juste pour jeter un pavé dans leur mare. The Black pond. Non, deux pavés plutôt.
" Une très ancienne famille magique, des racines plongeant très profond, jusqu'au début de l'ère magique, le domaine perse."
Nigel la regardait d'un air de froide colère, les autres avec une curiosité détachée. Les jeunes gens s'étaient regroupés, un peu plus loin, en bas, et discutaient avec animation, Narcissa serrée contre Lucius, Regulus, tiens Bellatrix aussi, je croyais qu'elle partait en Grèce, et Sirius, non, lui un peu à l'écart.
Lucrezia venait de lui prendre le bras.
" Allons, Shaula, mais c'est l'avenir qui nous intéresse – celui de nos enfants. Savez-vous donc que Narcissa et Lucius vont se fiancer, au printemps prochain ? Une merveilleuse nouvelle pour nous deux familles, n'est-ce pas ? "
Elle avait sans doute réussi à acquiescer, après, elle suppose que Lucrezia lui avait parlé de bague, car elle avait gardé le mot diamant dans sa tête. Et sans doute sa belle-sœur s'était-elle demandé pourquoi la femme du frère de son époux ne portait plus ses propres diamants.
Les diamants Black comme on les appelait, une couleur exceptionnelle, noire, profonde, des pierres d'une taille ancienne, une technique magique, qui mettait en valeur tous leurs éclats, sombres et parfois aveuglants, transmises de générations en générations, démontées et remontées pour s'adapter au goût des nouvelles fiancées.
Narcissa, elle, aurait droit à quelque chose de moins sinistre.
Puis un vaste brouhaha, des voix, des rires,des appels qui surgissent de partout en même temps, le discours martial de Nigel à ses fils, il s'adressait aux deux, mais bien sûr il ne songeait qu'à Sirius, les adieux, Regulus d'abord, Sirius, ensuite, au milieu d'une intense bousculade, quelqu'un avait fait tomber son sac, son fils aîné l'avait ramassé et l'avait réinstallé sur son épaule, prenant son temps afin de remettre à plat la bandoulière qui s'était retournée.
Elle l'avait vu disparaître, non, les avait vus disparaître, est-ce qu'elle pleurait déjà ? Tout le monde s'était dispersé rapidement, seule cette garce de Bellatrix continuait à la dévisager, au point qu'elle avait été obligée de se demander si… mais Nigel lui avait pris le bras, le contact était violent, mais pour les autres courtois, courtois seulement – rien à voir avec Sirius. Oui, là, elle en était sûre elle pleurait. Une autre certitude, pourquoi la refuser ?
Quand ils atteignirent le square Grimmault, elle n'avait pas dû cesser de pleurer et Nigel n'avait pas cessé de se taire et de regarder devant lui, les mâchoires serrées. Tout juste lui rappela-t-elle,alors qu'ils étaient dans le hall, cette sorte de no man's land dans la maison, qu'ils sortaient ce soir, une représentation d'un opéra magique, la Harpe Désenchantée, et qu'il attendait d'elle qu'elle n'arbore plus ces affreux yeux rouges.
« N'abusez donc ni de l'alcool, ni d'un chagrin factice ». Elle lui avait répondu
« L'abus de Black aussi, cela m'est néfaste ».
A nouveau la fureur dans ses yeux, et de l'indifférence aussi - curieux mélange, mais Nigel était-il un homme normal ?
« Eh bien, si ce sont les Black qui vous importunent, vous voilà débarrassée de deux d'entre eux. J'ose espérer que vous saurez supporter celui qui reste, au risque de l'obliger à se lasser de vous ».
Le premier coup de semonce, il avait été patient… mais peu importaient ses menaces, elle avait simplement mal qu'il intègre Sirius dans le clan des Black, alors qu'elle lui lançant son abus de Black au visage, elle ne pensait qu'à lui, Nigel, et à Regulus. Il était passé devant elle, montant l'escalier quatre à quatre, elle avait entendu claquer la porte de son bureau, elle était restée seule un long moment, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien à sentir de son eau de toilette. Elle s'était imaginée que c' était Sirius..
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