LE MAÎTRE DES SONGES

Disclaimer : Tous les personnages appartiennent à l'immense J.K Rowling. Cette histoire n'existe que dans un but ludique.

Chapitre 2 : Puissance et décadence

Encore haletante, Hermione gisait sur les marches, les pieds dans l'eau, la tête posée sur le carrelage. Dans un battement de cils, elle reprit contact avec la réalité et observa le plafond quelques instants. Les oreilles bourdonnantes, elle s'assit puis se releva en constatant que ses jambes avaient dû mal à la supporter. C'était la première fois que sa "communion" était aussi intense et lui apportait autant de plaisir. Etonnée, elle s'interrogea sur un lien éventuel avec son cycle féminin. Elle s'était déjà rendu compte qu'à l'approche de l'ovulation, ses désirs étaient plus puissants et leurs satisfactions plus gratifiantes. Après un rapide calcul qui la laissa perplexe, elle se promit de faire quelques recherches dans la section interdite de la bibliothèque...

Avec un sourire satisfait, elle prit une serviette sur la pile et se sécha. Heureuse et détendue, Hermione était maintenant prête à aller se coucher. Rapidement, elle se rhabilla, éteignit le feu dans la cheminée et quitta la pièce avec un dernier soupir de contentement.

Derrière le paravent, Rogue ose à peine bouger. Pourtant, il sait bien qu'il le faut. En cet instant, il n'éprouve que du dégoût pour son comportement pour le moins primitif, et par-dessus tout, il a honte. Comme tout bon Serpentard qui se respecte, son égo est démesuré. Alors penser qu'il s'est rabaissé au rang d'un adolescent écervelé en proie à ses hormones lui est particulièrement intolérable. Et surtout se rendre compte qu'il a pris son pied en reluquant une élève – une gamine qui plus est – ça, c'est inadmissible pour le professeur Rogue. Surtout que ce n'est pas son genre de faire des fixations sur les enfants.

Mais il y a pire. Avec cette lucidité extraordinaire qui est la sienne, il doit s'avouer qu'il est bouleversé. Et cela le fait souffrir. Jamais encore il n'a désiré quelqu'un au point qu'il en ait eu mal partout. Est-ce le fait qu'aucune femme n'ait partagé sa couche depuis de nombreuses années ? Est-ce le fait qu'il s'interdisât de telles pensées comme une punition que l'on s'inflige ? Il y a certainement de tout cela. Oui, cela fait mal de s'apercevoir que son cœur bat toujours dans la poitrine, alors qu'on a tout fait pour l'étouffer ; d'éprouver des besoins, alors qu'on vit comme un ascète, dans le plus grand dénuement. Mais d'un autre côté, comme c'est revigorant, comme c'est bon de se sentir vivre…

Alors Rogue reste là et il se rappelle. Le sexe est la vie ; le sperme, l'essence de la vie. En rejetant toute sexualité, il rejette toute existence, à commencer par la sienne. En reniant son être, il se condamne au néant. Pour aimer les autres, dit-on, il faut commencer par s'aimer soi-même. L'inverse est aussi vrai : pour se faire haïr des autres, il faut se haïr soi-même…

Personne jamais n'avait compris combien le jeune Rogue, élève doué mais indiscipliné, était démuni face à ses ambitions personnelles et à ses rêves de grandeur. Pas même Dumbledore qui avait pourtant essayé de le protéger contre lui-même et contre les autres. Sans succès. Les ténèbres l'avaient englouti. Et quand il s'était rendu compte de ce qu'il était devenu, il était déjà trop tard. Il fallait qu'il paie pour ses crimes. Mais comme personne ne voulait le condamner pour ce que chacun considérait comme une erreur de jeunesse, il s'était lui-même infligé une punition. Une sentence à vie.

Severus Rogue, je te condamne à la solitude, à l'amertume et aux regrets à perpétuité…

Dès lors, que n'avait il pas fait pour s'enfermer dans sa tour d'airain et ignorer le monde autour de lui ? Il avait notamment renié ce qui faisait de lui un être unique : une sensitivité extraordinaire, un don pour sentir les flux de magie bien au-delà des normes magiques dont ni Dumbledore, ni même Voldemort n'avait soupçonné la puissance.

Maudite sensitivité ! Elle était à l'origine de son orgueil démesuré, de sa fierté et finalement la cause de sa perte. Alors, il s'était amputé d'une partie de lui-même, et par la même, dans un grand élan d'autodestruction, il avait rejeté son humanité. Comme il était un sang pur, la magie ne pouvait lui faire défaut. Mais il ne l'utilisait plus que froidement, de manière minimaliste, sans en retirer de plaisir. Concocter des potions demandait une précision clinique, un contrôle de tous les instants, où la magie était réduite à sa plus simple expression. C'était parfait et suffisant pour lui, qui n'aspirait plus qu'au néant.

Rogue ferme les yeux et tente maintenant d'oublier. Il se concentre sur une seule idée : quitter cet endroit au plus vite. Il se lève avec difficulté et arpente en titubant la salle qui vibre encore des émotions fortes dont elle a été le théâtre, car le Maître des Potions peut à nouveau sentir les énergies primitives qui s'y sont concentrées. La magie agit sur lui comme une drogue dont il aurait été trop longtemps privé et l'enivre. L'overdose menace de l'engloutir. Comme un fou, il sort en courant de la salle et ne s'arrête pour reprendre son souffle qu'après avoir atteint un corridor éloigné.

A suivre…