Platypus, mes zoziaux ! Comment allez-vous ? Oui je sais, je suis légèrement en retard. On va arrêter d'espérer, hein !

Je me rend compte que n'ayant pas posté depuis près d'un an, beaucoup de choses ont changé. Mais surtout deux, alors je vais faire un bilan rapide. Premièrement, j'ai repris mes études. Enfin ; j'ai repris une formation diplomante de huit mois, de juin à janvier. J'approche donc de la fin, et d'ailleurs mercredi je passe mon avant-avant-dernier examen du contrôle continu. Jusqu'ici, ça se passe plutôt bien, mais c'est très prenant et le rush de la fin se combinant aux fêtes, c'est pas bon pour ce que j'ai. D'où ma faible disponibilité.

Mais qu'est-ce que j'ai, au juste ? Hé bien nous voilà au second point. Après des mois (voire des années) de recherches et d'autodiagnostic en tâtonnant, j'ai finalement trouvé. Puis, à l'aide de mes médecins, j'ai pu obtenir un diagnostic formel, et enfin une reconnaissance de handicap (RQTH pour dix ans). Je suis atteint d'encéphalomyélite myalgique. Aussi connue sous le nom assez trompeur (et très réducteur) de syndrôme de "fatigue chronique", il s'agit en fait d'une maladie neurologique invalidante, lentement dégénérative, qui affecte tout mon organisme. Toutes mes fonctions biochimiques fonctionnent en sous-régime. Le symptôme le plus flagrant est que je suis tout le temps épuisé, parce que le sommeil ne me repose pas. Je suis également anémique, polycarencé, perclu de douleurs et crampes, des spasmes, des palpitations cardiaques le soir… J'ai également des problèmes de mémoire à court terme (je ne perds pas la mémoire à long terme, mais j'ai des difficultés à créer de nouveaux souvenirs), de concentration, et d'endurance mentale. Oui, c'est idéal pour étudier, effectivement. Sinon à part tout ça ma santé va paradoxalement mieux. Le problème s'assimilation fait que j'ai perdu beaucoup de poids, et j'ai commencé à le compenser avec des compléments alimentaires. Le fait de savoir ce qui m'affecte combiné à la supplémentation en magnésium (et quelques gouttes de CBD à l'occasion) m'aide beaucoup contre la dépression qui, au final, n'est peut-être qu'un symptôme de l'EM.

Enfin, voilà.

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Dans le chapitre précédent, Mathis Devaux et Morgana Lefay ont négocié les termes d'une collaboration pour faire évader les otages de La Giraglia, dont Nilüfer Azerbas. Ensuite, une équipe s'est rendue dans la prison des sorciers pour faire évader les prisonniers des prisonniers sous leur nez. Ou presque. Dans le processus, Étienne "Azraël" Duncan y est resté pour de bon, payant enfin de sa vie le prix de tous ses crimes. Zomiel, doublement décédée également, a été simplement rendue à sa propriétaire Morgana. Pour les autres, pas de victime à déplorer. Même le père de Camille, Léonas Hastier, a pu être sauvé. Nilüfer a pu être sauvée. La trahison de Chaigidel a été révélée. L'espoir pointe encore, au milieu du charnier.

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Réponses aux reviews :

Hello Tiph ! T'as tout compris, Mathis n'a aucun instinct de préservation, mais il commence à atteindre ses limites et à devoir faire face aux conséquences de ses actes.
Loki porte bien son surnom, tout comme il en a porté tant d'autres. C'est un illusionniste certes, mais aussi un maître de la manipulation. Duncan et Lupin sont des guère plus que des inferis. "Nico" semble avoir des objectifs communs avec Morgana. Mais personne, pas même cette dernière, ne sait ce que veut Loki. Sauf une personne… qui l'ignore.
Toi, d'ailleurs, tu as une piste. Ironiquement, Allan en a une toute autre.

Chalut Allan ! Alors en fait ce que je voulais dire, c'est que la fille d'une dryade et d'un humain sera toujours une dryade, mais la fille d'une dryade et d'une humaine sera avant tout une hybride. Ensuite, elle peut choisir de rester une hybride, vivant sa vie de mortelle comme une humaine, ou de renaître sous forme de dryade en liant son âme à un arbre… et en mourant. L'esprit des dryades est virtuellement immortel tant que leur arbre survit, mais leur corps fane régulièrement. C'est un peu l'équivalent humanoïde des phénix (sauf que personne n'a encore trouvé comment tuer un phénix définitivement, alors qu'ironiquement le feu d'un phénix tuera une dryade).
C'est pas les criminels qui prennent ces noms à la base, c'est leurs noms de code pour l'administration carcérale. Ça permet d'indiquer leur particularité magique, et leur niveau de dangerosité. Par exemple pour Loki, on est sur un niveau de dangerosité maximum.
En fait il est canon dans HP4 que la mortalité du Avada Kedavra dépend de la puissance du sorcier, et de la volonté de nuire qu'il y insuffle. Il est également canon dans Renouveau qu'une créature magique ou du moins résistante à la magie peut survivre à un sortilège de mort. c.f. L'Écorcheur qui survit à un Avada Kedavra de Demetria Malefoy, pourtant puissante et extrêmement en colère à cet instant. Tout ce qu'on sait avec certitude à propos du prisonnier Apocalypse, outre son classement de n°2, c'est qu'il est plus vieux que La Giraglia, donc il a plusieurs siècles, et qu'il peut plier la réalité à sa volonté simplement en parlant. Tu te doutes bien qu'un quelconque sbire terrorisé n'a pas la puissance d'atomiser une telle âme. Et ce, sans même compter ce qu'il est vraiment.
Morgana cherche à accumuler du pouvoir, c'est assez simple en fait. Les prisonniers de La Giraglia sont parmi les personnes les plus puissantes d'Europe et les moins scrupuleuses également. C'est tout bénéf.

Salut Jack ! Oui ça faisait un bail, et voilà un bail de plus. C'est ma faute. Désolé de vous imposer, à toi et aux autres, des relectures constantes. J'aimerais pouvoir faire mieux.

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Dans ce chapitre, on retourne enfin à Beauxbâtons ! Avec un petit plot twist… ou pas ?

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7) Retour à la vie, euh… normale ?

Après la rencontre fatidique, Mathis, Visperi et Nilüfer retrouvèrent Rogan qui les ramena à la boutique Brisebois. Tandis que Nilüfer se jetait dans les bras d'Émeraude, Mathis ne prit même pas le peine de rester discuter, et se précipita à l'étage. Il ouvrit la porte de la chambre d'Enora, et faillit percuter Jeanine Chevallier qui l'avait entendu monter et venait ouvrir la porte.

– Oh là, du calme mon bonhomme !

– Comment va-t-elle ?!

– Justine se remet doucement mais elle a besoin de repos, assura l'infirmière. Le Dr Beauxbatons m'a aidé à préparer une version concentrée de son médicament, pour rattraper le lamentable traitement auquel elle a eu droit à Notre-Dame… Dès qu'elle sera assez stable, nous pourrons la transférer à l'Académie.

Mathis semblait pensif, observant le visage pâle de la blonde endormie.

– Tu as eu raison de l'en sortir, assura l'infirmière. Tu as eu de la chance, mais tu as eu raison.

– J'avais peur d'avoir commis une erreur.

– Tu en as probablement commis plusieurs, mais elle survivra, grâce à toi. Du moins… pour le temps qu'il lui reste. J'ai peur que les séquelles de cette absence de traitement ne soient terribles, et qu'elle ne termine pas l'année scolaire…

– Une solution est prévue, assura Mathis.

– Quel genre de solution ?

Mathis ne répondit pas tout de suite, contournant l'infirmière pour aller s'agenouiller au chevet de Justine. Il passa la main dans ses cheveux avec tendresse.

– Je connais son avenir. Je sais qu'elle en a un.

Le reste des vacances fut très étrange. Les parents de Nilüfer vinrent la voir à la boutique, et décidèrent que c'était plus sûr pour elle de rester ici jusqu'à la rentrée, à la grande joie d'Émi. Les Glazkov repartirent, tandis qu'Enora et Ahmet rendirent visite à leurs sœurs. Enora râla que sa chambre avait été sollicitée sans son consentement, mais le regard que Mathis lui jeta lui cloua le bec.

N'ayant aucune nouvelle de sa famille, il appela Miss Citrus avec le portable de la mère d'Émi. Sa voisine cracmole lui révéla que son frère avait toujours disparu, et qu'elle craignait que les oubliators aient brisé l'esprit de sa mère. Marianne avait du mal à se situer dans le temps, et était persuadée que l'année scolaire avait déjà commencé, ce qui expliquait l'absence de Mathis. De colère, Mathis pulvérisa le téléphone contre le mur.

Puis il s'excusa platement.

Et puis septembre arriva, et la rentrée approcha. Dans deux semaines, l'école reprenait. C'était tellement bizarre de retourner à Beauxbâtons, après tout ce qu'ils avaient vécu.

Les deux premières semaines de septembre furent étonnamment calmes. Justine fut enfin transférée à Beauxbâtons, et Mathis s'inquiéta de ne pas avoir eu de nouvelles d'Angela. Il lui avait écrit afin de lui poser des questions, et éventuellement rencontrer sa mère pour lui parler de la situation de Justine. Mais rien ni personne ne se manifesta.

Jusqu'à la veille de la rentrée, lorsqu'alors qu'il s'endormait, Mathis sentit soudain une violente brûlure au visage.

C'était l'endroit où le verre du néon, projeté par le charme de vent de Joséphine, lui avait lacéré la joue. Les runes de sang, une forme très sombre de magie rouge, entraient dans la classe des sorts que la magie blanche ne pouvait contrer, et aucune magie ne semblait pouvoir cicatriser la balafre qui lui laisserait une cicatrice nette sur le visage.

Elle ne lui faisait plus mal depuis que Rogan y avait appliqué un cataplasme de druide, mais la douleur le reprit soudain. Il se leva donc brutalement, pour aller à la salle de bain y passer de l'eau fraîche. Il trébucha, tandis que la chaine qui retenait sa cheville cliquetait.

La lumière l'éblouit soudain, et il se protégea les yeux. Quand sa vue s'adapta, il vit qu'il était à nouveau dans l'immense bureau de la Directrice, une pièce qui n'avait jamais eu ces proportions. En face de lui, Gamaliël sourit.

– Bien joué, Mathis. Un coup d'éclat épique, je dois dire.

Mathis sourit.

– Nous ne te laisserons pas gagner, Emrys.

Le démon grimaça à l'évocation de son vrai nom.

– Cette gamine m'agace, mais elle ne représente pas un danger.

– Nilüfer ? s'étonna Mathis. Mais la prophécie…

– Non, Morgana, râla Emrys. J'avais ordonné à Myrddin de me l'envoyer au lieu de la piéger, mais il ne me faisait pas confiance… Enfin, peu importe que tu connaisses mon nom, ça ne te donne aucun pouvoir sur moi. Tu ne peux pas m'invoquer alors que je suis déjà sur Terre.

– Je peux continuer à saboter tes plans comme je l'ai fait cet été.

– Non, je suis content que tu aies libéré Nilüfer Azerbas, c'est dans l'ordre des choses. Ce traître de Chaigidel la mettait en danger.

Mathis ne savait plus quoi répondre, ce qui accentua le sourire du démon blanc aux yeux noirs.

– Tu croyais vraiment que je n'étais pas au courant pour la prophécie, petit louveteau ? Tu as oublié en quelle année nous sommes ? La prophécie a déjà été réalisée, et vous avez déjà perdu, il va falloir l'accepter.

– C'est faux ! s'énerva Mathis.

– Réfléchis, insista Emrys. La fille du désert est la clef. Nous essayons d'ouvrir une porte, pourquoi chercherions-nous à faire du mal à la clé ?

– Tout ceci est faux, insista Mathis en balayant la salle d'un geste. C'est juste un cauchemar absurde !

– Si ça peut te permettre de dormir la nuit, ricana Emrys. Tu saisis l'ironie ? "Dormir la nuit". D'ailleurs, qu'entends-je ? Mais oui, c'est ton réveil ! Allez, c'est l'heure d'aller à l'école, mon jeune ami ! Oh mais suis-je bête, tu sais que tu ne peux te réveiller que d'une seule manière, alors…

– Non non NON N…

D'un geste d'une précision redoutable, Emrys décapita Mathis exactement de la même manière que la fois précédente.

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Quand Mathis se réveilla en sursaut et alla contempler son cou dans le miroir il n'avait toujours qu'une seule marque, à peine plus rouge qu'avant. Emrys avait réussi à le décapiter deux fois à la même hauteur, avec le même angle. C'était douloureux, mais il n'y avait rien à y faire de plus : c'était vraisemblablement psychosomatique.

Mathis passa une sale journée. Ce qu'Emrys/Gamaliël lui avait dit lui trottait dans la tête. Avait-t-il vraiment risqué sa vie pour rien ? Non, bien sûr, il avait sauvé Nil, son amie. Mais tout ce qu'il faisait était vraiment voué à l'échec ? Ou pire, aidait-il activement Gamaliël et les autres Ducs sans le savoir ?

Émi et Nil passèrent la journée ensemble à faire leurs emplettes de dernière minutes, tandis que leur ami broyait du noir. Il dût aller faire des courses, et y alla donc seul, avant de se rendre à la gare. Dans la foule d'uniformes bleu et blanc, il retrouva ses amies qui avaient été rejointes par Sertorius et Camille. Cette dernière était en train de raconter son séjour à Brocéliande.

– … Non non, mon père est resté à l'UD. Suchii aurait bien voulu l'inviter, mais aucun homme n'est toléré dans la communauté, et Sylphide a été intransigeante.

– En tout cas je suis étonnée que ton père s'entende aussi bien avec elle ! commenta Émi.

– Elles sont adorables. Roussalka dit que ma mère regrettait bien plus d'avoir trompé mon père que mon père ne lui en voulait de l'avoir faire. Et du coup, c'est normal qu'il accepte plus facilement que Suchii veuille faire partie de ma vie. Il reste mon père, mais les liens du sang sont très importants chez les sorciers.

– C'est peut-être un peu macho de ma part de penser ça, mais je pense surtout qu'il ne se sent pas menacé en tant que père justement parce que c'est une femme, suggéra Mathis en guise de salutations.

– Oh, bonjour Mathis ! sourit Camille. Hum, c'est pas si bête en fait… En tout cas, c'était super sympa de rencontrer mes tantes. Elles sont visiblement plus à l'aise avec la situation que Suchii…

– Toi tu as l'air de le prendre super bien, en tout cas ! remarqua Nil.

– C'est toujours cool de voir la famille s'élargir, confirma Camille. Et puis… (elle soupira de lassitude) les dryades sont des alliées puissantes, certaines assez anciennes pour avoir combattu des vrais démons dans leurs cycles antérieurs. Elles peuvent encore sauver ma mère.

Il y eu un silence gêné. Sertorius finit par le briser :

– Vipère nous fait signe, la file avance.

Leur aînée, qui était dans la même classe que son frère à cause de son retard scolaire qu'elle rattrapait à grande vitesse, faisait la queue pour eux au tunnel de Transportation direct vers Beauxbâtons. Les cinq adolescents la rejoignirent, avant que la file ne s'allonge trop derrière Visperi et que les protestations envers les resquilleurs ne se fassent trop vives.

En fait, il n'y avait guère lieu de se plaindre, parce que le passage se faisait rapidement. Chaque personne posait une pièce dans le premier panier, prenait un jeton dans le deuxième, et le jetait dans le tunnel en prononçant le nom de son Ordre. En quelque pas, ils apparaissaient directement dans le hall de leur pavillon respectif, comme s'ils venaient d'en franchir la porte. Devant lui, Mathis entendait Camille et Sertorius se taquiner gentiment. La fille poussa son ami, et cria "Aloysia" un peu trop fort avant de se précipiter dans le tunnel. Sertorius ricana, et passa à son tour pour Urtica. Puis Émeraude, Nilüfer… Vint son tour, et Mathis se souvint de ce qu'il avait dit, là-bas. Où plutôt de ce qu'il dira ? Il hésita, bloquant la file.

– Bah alors gamin, tu ne sais plus ou tu vas ? se moqua l'opérateur. Un indice : ton foulard est rouge Aloysia.

– Je…

Mathis se renfrogna. Il paya, prit son jeton, et le jeta dans le tunnel.

Beauxbâtons.

Passant l'arche en faisant rouler sa malle qu'Andrea Brisebois avait récupéré discrètement pour lui, il se retrouva dans les graviers du jardin frontal. Il fit de grosses traces en essayant de la trainer dans le concassé blanc, et la laissa là où les malles des 1ère Année seraient laissées.

Il rentra dans l'Académie en passant la porte d'entrée, comme il l'avait fait quatre ans auparavant, et se dirigea vers la salle du Sondeur. Les entrées à l'Académie se faisant dans un ordre dégressif, les 5ème Année étaient arrivés bien avant les 1ère Année, donc la salle était vide. Il se dirigea vers le Sondeur et entra sans avoir été invité.

– Bonsoir, Th'aleem.

Bonsoir, Mathis. Ton entrée à l'Académie a été bien inhabituelle, remarqua la voix éthérée du Sondeur.

– Pas plus que la prochaine fois, marmonna l'adolescent.

Plaît-il ?

– Rien, rien… Je me posais des questions…

Tu te demandes si tu prends les bonnes décisions.

Ce n'était pas une question. Mathis avait tendance à oublier qu'à l'intérieur des cabines, le Sondeur avait la capacité de lire dans les pensées. Ou peut-être le pouvait-il dans tout le château ? Difficile à dire. En tout cas, on ne pouvait l'entendre qu'ici.

– J'ai peur que tout ce que je fais met en danger mes amis. Si c'est de mon fait, alors je dois les protéger.

Tu penses sincèrement qu'en les éloignant de toi, tu auras la force de résoudre tout ce qui t'arrives. Assez vite pour ne pas perdre leur amitié ?

– Leur amitié m'importe peu, seule leur sécurité prévaut. À quoi bon être aimé par des morts ?

Tu as beaucoup gagné en patience, jeune sorcier. Et visiblement… perdu une part de ton humanité ?

– Je crois au contraire que c'est mon humanité qui me fait voir les choses de cette façon. Je perds de mon individualité pour le bien de tous.

C'est une qualité indéniable, chez les Aloysia.

– Peut-être. Mais si les autres comptent sur moi, ça implique que je peux compter sur les autres. Et donc les mettre en danger.

Je vois ce que tu veux dire. Et bien, si telle est ta décision…

– Tu as le droit de faire ça ? Il ne faut pas attendre la cérémonie ?

La "cérémonie" n'a aucune valeur administrative, s'amusa le Sondeur. C'est moi seul qui décide de la Répartition. Et puisque ton cœur est en accord avec ton esprit, tu seras désormais élève de l'Ordre de Lonicera.

Mathis ressortit du Sondeur, et s'approcha de la chandelle murale pour observer son nouveau foulard bleu.

– Qu'est-ce que tu fais ici, toi ? demanda une voix derrière lui.

Mathis se tourna, et croisa le regard de Miss Brindargent, la directrice-adjointe et référente de l'Ordre d'Aloysia.

– Oh, bonsoir, professeure ! Je…

Il se tut, parce que c'était évident. La prof reconnut son ancien "disciple", et avisa son foulard bleu. Elle hocha la tête.

– Je vois. Je suppose que la malle abandonnée devant est la tienne. Je la fait envoyer à Lonicera dès la fin de la répartition, et j'avertirai Miss Pluiedeglace de ton transfert. Elle te trouvera une chambre.

Mathis hocha la tête.

– Je peux y aller, Miss Brindargent ?

– Tout à fait ! Tu es en quelle année, déjà ?

– 5ème Année.

– Je vois… Pas de réunion d'information pour vous. Votre premier professeur de la journée vous donnera les informations nécessaires. Pour les Lonicera, il s'agira du professeur… Delambrosía, Lundi à huit heures. Bien je ne te dis pas à ce soir, alors.

Mathis hocha la tête, et fut obligé de se diriger droit sur elle pour quitter la pièce. Elle le vit alors de près, et l'arrêta :

– Par Merlin ! Qu'est-ce qui est arrivé à ta joue ?!

Mathis passa les doigts sous sa balafre, encore trop sensible pour la toucher directement.

– Oh, c'est rien. Un petit incident de rien du tout.

– Ça a l'air profond, remarqua Miss Brindargent, inquiète. Tu devrais aller voir le Dr Beauxbatons, il mettra de l'essence de dictame dessus.

– Mouih.

Ça ne marcherait probablement pas. Et puis quelque part, Mathis se disait qu'il préférait la garder. Il sentait qu'il avait mérité cette marque, comme les Chasseurs qui arboraient leurs balafres comme des trophées. Hé, il avait quand même braqué la prison la plus sécurisé d'Europe, avec succès ! Bon d'accord, aidé de deux mages noirs morts-vivants très puissants, d'une septère sociopathe et d'une créature semblant sortir d'un autre Monde, mais tout de même. Lui, dans le lot, n'était qu'un adolescent malin mais un peu gauche, dénué de tout instinct de préservation, et apparemment de tout scrupule d'après le Sondeur.

Mathis traîna dans les environs, ne sachant pas trop comment faire face à ses amis après le coup en douce qu'il venait de faire. Il passa devant l'infirmerie sans s'arrêter, et ses pas le menèrent assez facilement jusqu'à la bibliothèque, qu'il fut surpris de trouver fermée. Le vieil Abraxar Lampion vivait littéralement dans la bibliothèque, s'étant parait-il aménagé des quartiers privés très confortables dans la réserve. Certes nous étions dimanche, mais il était à peine 17h30. Mais après réflexion, Mathis se dit qu'il n'avait jamais essayé de s'y rendre le soir de la rentrée. Peut-être qu'il n'ouvrait simplement pas ce jour-là.

Il hésita encore. Il n'y avait vraiment personne à cette heure… Finalement, il poussa la porte de l'infirmerie. L'infirmière Miss Hégie le salua d'un sourire.

– Bonsoir jeune homme ! Oh, c'est une bien belle balafre que tu as là ! Je t'en prie installe-toi, je vais juste chercher de l'essence de dictame et nous effacerons cette vilaine trace…

– Non ! s'exclama Mathis.

– Comment ?

– Je veux dire, non merci, Madame. Je ne suis pas là pour ça.

– Ah ? Mais il faut soigner cette plaie.

– Ça ira, merci.

– Ah, hum… Comme tu voudras. Que puis-je pour toi alors ?

– Justine Levallier s'est réveillé, depuis son transfert ?

L'infirmière fit la moue.

– Même dans une infirmerie scolaire, le secret médical s'applique…

– Je dois la voir ! insista Mathis.

– Hum, je vais voir avec Miss Chevallier. Elle saura te dire si Justine peut recevoir une visite.

Miss Hégie l'invita à s'asseoir en attendant, mais Mathis secoua la tête. Il attendit de longues minutes, faisant les cents pas dans la minuscule zone d'attente, avant que Jeanine Chevallier ne franchisse le rideau blanc.

– Oh c'est toi, Mathis ! Justine est réveillée, tu peux aller la voir mais elle a toujours besoin de repos. Ne la brusque pas.

– Merci beaucoup.

Malgré son empressement, Mathis hésita.

Il prit une grande respiration, et franchit le rideau. Il alla jusqu'au fond de l'infirmerie, où Justine était installée de manière permanente, et s'avança d'un pas prudent.

L'adolescente redressa la tête en entendant du bruit, et reconnut Mathis qui s'arrêta presque au pied du lit. Mais Justine tendit la main, et son sourire lui fit oublier toute hésitation. Il combla l'espace entre eux, attrapa la main glacée, et la serra avant de s'asseoir à côté d'elle.

– Coucou toi.

– Coucou, toi.

– T'as l'air en forme, ironisa Mathis.

– C'est ça, moque-toi. Je…

Justine s'arrêta, et plissa les yeux. Elle se pencha, et posa la main sur le visage de Mathis, qui se raidit. Elle passa très délicatement le doigt sous la plaie, en suivant son tracé courbe.

– Tu l'avais déjà, celle-là.

– Je l'aurai déjà eu, corrigea Mathis. C'est comme si le futur était écrit.

– Une part de ce futur me donne envie, avoua Justine. C'est égoïste, mais…

– Mais tu vivras, confirma le garçon. Je te promet que cette partie se réalisera.

– Je suis humaine, souligna Justine. Et toujours malade.

– Simple point de détail ! On s'occupera de ça. Pour l'instant ce qui m'intéresse c'est… Étais-tu là-bas ?

– Là-bas ici, confirma Justine.

Cette phrase n'aurait aucun sens pour toute oreille indiscrète espionnant leur conversation, par exemple celles de Th'aleem ou d'une des infirmières, mais eux se comprenaient parfaitement. Mathis parlait du cauchemar, là-bas, et l'ici était l'Académie du futur. Celle qui aura servi de bastion à Emrys, et qui aura eu renfermé un anti-nexus de magie qui aura permis au démon de maintenir son illusion. S'il s'agissait bien de ça…

– Après l'effondrement, nous qui étions dans les étages nous sommes retrouvés coincés dans l'aile Gauche. Il fallait grimper, et franchir le vide entre l'entrée du Pavillon de Chasse et l'Observatoire, afin de nous enfuir par la verrière. J'ai pensé que de là, il nous serait possible de redescendre et d'atteindre l'aile administrative par les fenêtres, en espérant pouvoir vous y en sortir.

– Tu as donc survécu ? en déduit Mathis. Comment tu t'étais réveillée, alors ?

– J'ai été attaquée par un volant, mais quand j'y suis retourné chez les Brisebois, il était mort écrasé sous une pierre.

– Je crois que Gamaliël manipule l'issue du cauchemar pour en poursuivre l'histoire. Je me réveille systématiquement après ma mort, qui ne semble pas avoir eu lieu, si ce n'est…

Mathis réalisa, et tira la manche de sa chemise, pour en révéler la marque où Gamaliël lui avait tranché la main. Il tira ensuite son foulard bleu pour montrer à nouveau la marque de décapitation, plus sombre.

– Tu as des marques comme ça ?

Justine sembla hésiter, et rougit. Elle tira sa couverture, retira une bretelle de sa robe d'uniforme, et défit les boutons de sa chemise. Elle retira ensuite l'épaule, pour révéler sa peau. De larges sillons rouges irréguliers convergaient vers un point situé sous sa brassière médicale, à gauche. Bien que quelque peu perturbé par ce qu'il voyait, Mathis se concentra sur ce qu'elle lui montrait vraiment.

– Il t'as lacéré la poitrine ?

– Le démon volant m'a arraché le cœur, expliqua Justine avant de rapidement se rhabiller.

– Et cette fois-ci ?

– J'ai reçu une pierre sur la tête. Je dois avoir la trace quelque part sous les cheveux… Mais toi, tu n'y es pas retourné, depuis ?

– En fait j'y étais ce matin, avoua Mathis. J'étais à nouveau prisonnier dans le bureau, et Gamaliël… Gamaliël m'a dit que tout ce qu'on faisait s'était déjà produit, et que nos actions étaient donc en train de mener au futur qu'il nous a montré. Ce n'est même pas tant que nos actions ne servent à rien : il a clairement dit que nous précipitions activement ce futur. Enfin je paraphrase, mais l'idée est là.

– Il faudrait donc que nous arrêtions tout ?

– Il faudrait déjà que nous sachions quelles erreurs il ne faut pas commettre à nouveau.

– Mais… et si ma survie était une erreur ?

– Il est hors de question que je te laisse mourir ! s'écria Mathis.

– Qu'est-ce qui se passe ? demanda l'infirmière. Mathis, je t'ai dit qu'elle avait besoin de calme, je vais te demander de partir maintenant.

– Laisse-nous juste cinq minutes, s'il te plaît Jeanine.

– Deux minutes, répliqua l'infirmière. Pas une de plus.

Justine roula les yeux au ciel.

– Elle est pire qu'une Maman Poule, parfois.

– C'est presque ta mère, c'est normal ! ricana Mathis.

– Qu'est-ce que tu veux dire ?

– Bah par rapport à vos noms de famille. Chevallier, Levallier… C'est super proche.

– Ah ! Effectivement… Et nous sommes super proches en plus.

– Et tes parents, d'ailleurs ? On n'en a jamais parlé.

– Parce qu'ils ont honte d'avoir une fille malade, cracha Justine. C'est indigne d'une sorcière, d'être plus faible qu'une moldue.

– … Pardon ?!

– Je ne veux plus en parler, s'énerva Justine. Et puis d'abord, tu ne m'as pas répondu. Tu comptes faire quoi, si tu découvres que ma survie mène à ce désastre ?

– Tu es une porteuse de sceau, répliqua Mathis. Ta mort serait un désastre. Ça ne doit pas arriver, même si je l'acceptais. Si je suis cohérent avec mon plan, tu dois survivre à tout prix, même contre ta propre volonté.

– C'est malsain, dit comme ça…

– C'est nécessaire.

– … Mais c'est gentil, considérant que je n'ai pas envie de mourir non plus.

– Je t'aime Justine, je ne te laisserai pas mourir, lâcha Mathis d'une voix douce.

Puis il réalisa ce qu'il venait de dire. Ses yeux s'écarquillèrent, sa bouche s'ouvrit et se referma, et il se mit à bafouiller :

– Je veux dire… C'est-à-dire… Je…

Justine se moqua :

– Allez fiche le camp, avant que Jeanine ne te mette dehors à coups de pied.

– J'y vais, couina Mathis, en s'acharnant sur le rideau blanc pour fuir.

– Hé banane ! le rappela Justine.

– Hmm ?

– Moi aussi.

Mathis quitta l'infirmerie en souriant bêtement. Il croisa les 1ère Année qui étaient en train de ressortir de la salle du Sondeur, ce qui voulait dire que leurs affaires et les siennes allaient être apportées aux pavillons. Il s'ajouta au groupe de petits nouveaux, qui le regardèrent bizarrement, et il rejoignirent Miss Pluiedeglace et Mister Goizane au niveau du pont centrale de la rivière aux sirènes. De là, les Aloysia partirent à gauche avec la directrice-adjointe Miss Brindargent, les Urtica partirent à droite en amont de la rivière, et les Lonicera franchirent le pont le plus proche pour se rendre au Pavillon Bleu.

De l'extérieur, il était identique au Pavillon Rouge si ce n'était sa couleur et l'emblème sur ses bannières, mais de près Mathis put voir le chèvrefeuille qui grimpait un peu partout et se concentrait autour de la porte. Miss Pluiedeglace expliqua que tout élève n'étant pas Lonicera qui tenterait de franchir l'arche serait saucissonné par les chèvrefeuilles étrangleurs, puis les élèves purent faire leur entrée.

À l'intérieur, hormis encore une fois la couleur, Mathis nota que la salle commune était beaucoup plus grande. Il n'y avait pas de tables de jeu, et pas de pièces privées pour les Chasseurs. Juste une immense pièce, prenant presque tout le rez-de-chaussée, toute aménagée de petits coins à la fois confortables et adaptés au travail scolaire. Mathis pensa à une bibliothèque sans étagères de livres.

Les nouveaux arrivants attiraient des regards curieux, mais aucun autant que Mathis. Plusieurs élèves plus âgés le connaissaient, et le dévisageait, mais personne n'avait l'impolitesse de l'approcher tandis que leur référente expliquait l'organisation aux 1ère Année.

– À nous deux ! l'interpella enfin Miss Pluiedeglace. Pour ce qui est du fonctionnement global, il n'y aura pas beaucoup de différence avec Aloysia. J'attends de mes élèves un calme global dans la salle commune, mais je tolère bien sûr l'amusement. Si des élèves ont l'intention d'être un peu bruyants, par exemple en jouant à un jeu de société amusant, je leur demande juste d'aller s'installer sur une des tables périphériques, de ce côté de la pièce, qui sont équipées de bulles de silence : le bruit n'en sort pas. À l'inverse, les élèves qui ont besoin de calme pour un travail de groupe qu'ils ne peuvent pas exécuter dans leur chambre, les tables à l'opposée sont équipées bulles de mutisme : le bruit n'y entre pas.

– C'est génial ! commenta sincèrement Mathis.

– Ravi que ça te plaise ! Alors pour ta chambre, parmi les garçons de 5ème Année, il y a la chambre de Haroun Shabib… Ah non attends, Pierre-Antoine Thirion a demandé à changer de chambre, du coup sa place se libère… avec Aventino Bellini. Ça te va ? Vous vous connaissez un peu ?

– Un peu, confirma Mathis. Je suis ami avec sa sœur.

– Parfait, alors ! sourit la prof. Locomotor Barda !

Elle jeta le sort sans même regarder, et derrière elle Mathis vit sa propre malle décoller, et se diriger vers les escaliers.

– Suis-là, elle t'indiqueras le chemin.

– Merci Miss !

Mathis emboîta donc le "pas" à sa valise, jusqu'au couloir des 5ème Année. Il allait tourner dans la partie des garçons quand quelqu'un venant de l'autre direction le percuta de plein fouet. Il trébucha, entendit jurer en anglais, puis une voix familière le harangua :

– Tu ne peux pas regarder où tu vas ?!

Mathis se redressa, intrigué, et reconnut Ophélia Haley. C'était une des élèves qui avait participé au Projet Rosa l'an passé, et qui venait de Poudlard.

– Qu'est-ce que tu fiches ici ?! s'écria l'anglaise.

– Toi, qu'est-ce que tu fiches ici ? répliqua le français.

– J'ai posé la question d'abord.

– J'ai demandé mon transfert ici, et toi ?

– Hé bien pareil, je suppose.

Ophélia ramassa la chemise qu'elle avait fait tomber, et tendit une main à Mathis pour l'aider à se relever.

– Merci.

En guise de réponse, Ophélia leva la chemise.

– Il me manque un bouton. Il a dû s'accrocher quelque part dans ma valise.

– La prof peut te réparer ça facilement, assura Mathis.

– Tu crois que je vais la voir pourquoi, grand génie ?

– Certes. Bon bah, bonne soirée alors…

– C'est ça !

– …

– …

– …

– Bon tu te pousses ? Les couloirs sont étroits, ici.

– Ah oui, pardon.

Mathis recula dans le couloir des garçons, pour qu'Ophélia puissa passer. Avec elle, il ne savait jamais si elle le détestait poliment ou si elle le taquinait bizarrement.

Il s'apprêtait à repartir, voyant que sa valise s'était arrêté devant une porte, quand il en entendit une autre s'ouvrir derrière lui.

– Tu vois, j'avais pas rêvé, c'est bien lui ! s'exclama une autre voix féminine qu'il reconnut.

Il se retourna, et manqua de s'écraser au sol encore une fois tandis que Raven Luschek se jetait dans ses bras. Sortant de leur chambre à sa suite, Angela esquissa un sourire carnassier. Si c'était possible, l'immense demi-vampiresse avait encore grandi. Elle dût se pencher pour faire la bise à son petit camarade, et exagéra volontairement en voûtant son dos.

– T'abuses, je suis pas si petit, râla Mathis.

– Je t'assure que si ! Je suis sûre que tu es passé inaperçu, dans le groupe des 1ère Année, se moqua Angela. Mais la vraie question c'est qu'est-ce que tu fiches ici ?!

– On vient de me poser exactement la même question, indiqua Mathis. J'ai demandé mon transfert ici.

– Mais pourquoi tu as fait ça ?! s'étonna Raven. T'étais pas bien à Aloysia avec les autres ?

– Hé dites-le si je vous embête, je m'en irai…

La réplique lui attira une paire de regards agacés. Les deux adolescentes avaient exactement les mêmes mimiques.

– C'est stratégique, éluda Mathis.

– Mouais, si tu le dit.

À ce moment-là, la discussion fut interrompu par un bruit de chute. Mathis se tourna et vit qu'Aventino, en voulant sortir de leur chambre, s'était pris les pieds dans sa valise et était étalé de tout son long dans le couloir.

Chi è lo fotutto scemo qui a laissé sa valise au milieu du passage ?! jura l'italien.

– Euh, c'est moi, désolé ! avoua Mathis. Je suis ton nouveau compagnon de chambre…

– Bravo pour la première impression, se moqua Angela en applaudissant.

– Va chier, répliqua l'adolescent en allant aider son camarade de chambre à se relever.

– Tu m'as manqué aussi, petit con.

Mathis sourit. Ça ne se passerait peut-être pas si mal, après tout.

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Bien sûr, il n'allait pas s'en rendre compte de lui-même, mais l'instinct d'habitude infaillible de Mathis semblait l'abandonner. La soirée fut une catastrophe.

Après avoir rangé ses affaires dans sa nouvelle chambre, entrevoyant dès le premier jour la raison qui avait pu pousser Pierre-Antoine à vouloir changer de compagnon de dortoir, Mathis flâna un peu, avant de se rendre au Grand Réfectoire pour le dîner. Là-bas, il retrouva ses amis, qui lui demandèrent d'abord où il était passé, avant que Nilüfer ne fasse remarquer son foulard bleu. Alors le ton changea aussi radicalement que la couleur des cheveux d'Émeraude, qui virèrent au noir. Une couleur qu'elle n'avait jusqu'alors réservé qu'à son ex, Sertorius.

– Euh, tu nous expliques ? demanda Émi d'un ton sec.

Mathis grimaça :

– Alors, vous allez rire…

Émi remonta ses lunettes teintées dans ses cheveux, et croisa les bras. Ses yeux avaient viré au rouge.

– Je ne crois pas, non.

– Bon d'accord, peut-être pas. En fait, j'en ai discuté avec le Sondeur, et je lui ai expliqué je sentais que les cours d'Aloysia ne me permettaient pas de réaliser mon plein potentiel. Après nos… vacances, j'ai réalisé que j'étais fait pour concevoir des plans, pour diriger les groupes d'action. Pas pour le terrain.

– Et avec nous, tu as pensé à en discuter ?!

– Je n'ai plus vraiment l'esprit d'équipe, justifia Mathis.

– Bah tu m'étonnes ! cracha Nilüfer, amère. Je te rappelle que j'étais là-bas, je ne vois pas en quoi c'est une excuse acceptable pour nous abandonner.

Le regard de Mathis se durcit.

– Parce que tu n'aurais pas dû être là-bas.

– Toi non plus, répliqua Émi.

– … Laissez tomber, lâcha Mathis en tournant les talons.

– Mathis, attends ! le héla Nil.

Mais Mathis s'éloigna de la table sans se retourner. Il croisa Angela et Raven qui rejoignait leurs amies. Mathis retint Angela par le bras, et souffla d'un air désespéré :

– Viens avec moi !

Angela fit un signe de tête à Raven, qui acquiesça et les laissa. Mathis l'attira vers une table encore vide, au fond du Grand Réf.

– Qu'est-ce que tu…

– Comment on transforme un humain en vampire ? demanda Mathis sans préambule.

– Je… hein ? bafouilla Angela. T'as trop regardé de films moldus pendant les vacances ? Ce n'est pas comme ça que ça marche !

– J'ai passé une partie des vacances mentalement prisonnier d'un démon, et l'autre partie à planifier une évasion avant de la mettre effectivement en application, répliqua sèchement Mathis. Je ne regardais pas de films.

– Certes. Mais…

– Mais je sais que ce que je te demande est possible. Alors si tu ne sais pas, je veux que tu demandes à ta mère, ta tante, l'Empereur des Vampires s'il le faut. Je me moque de qui me fournit cette information, mais je veux savoir comment on fait.

– Euh, d'accord… Mais pourquoi tu voudrais devenir un vampire ?

– Ce n'est pas pour moi, répliqua sèchement Mathis. Je t'ai déjà tout expliqué dans mes foutues lettres, auxquelles tu n'as pas daigné répondre.

Angela ne s'en formalisa pas. La demi-vampiresse n'était pas du genre à se vexer pour si peu.

– Je demanderai, mais je ne te garantis rien. Et je n'ai reçu aucune lettre, t'as dû te tromper d'adresse.

Quelques minutes avant le début du banquet de rentrée, leur tablée fut abordée par des 1ère Année qui ne trouvaient pas de place. Les premiers hésitèrent puis firent demi-tour devant la gothique à crocs et le balafré grincheux qui l'accompagnait, mais quelques jeunes téméraires finirent pas s'asseoir avec eux. Mathis écouta d'une oreille distraite le discours de la directrice, et ne releva la tête que lorsqu'elle annonça le décès du bibliothécaire Abraxas Lampion.

– Toutes nos condoléances vont vers sa famille. Reprendre le poste de bibliothécaire de notre académie est un défi immense, mais heureusement, nous avons pu trouver une personnes prête à relever le défi. Mr Cook ?

Un homme qui ressemblait plus à un soldat moldu qu'à un bibliothécaire sorcier se leva. Il avait les cheveux et la barbe tondus mais pas rasés. On lui donnait la trentaine, mais il avait déjà les tempes grisonnantes. Ses grandes oreilles tombantes et ses traits féroces lui donnaient des airs de loup-garou de fiction.

– Bonjour à tous, je suis Jefferson Cook, et je serai votre nouveau bibliothécaire. Je travaille à mi-temps pour le Bureau des Chasseurs, aussi j'ai le regret de vous informer que la bibliothèque ne sera pas ouverte tous les jours. Mes horaires définitifs de présence seront adapté aux emplois du temps de chacun, et un assistant sera recruté dès que l'année universitaire aura débuté, afin d'assurer les horaires de journée lorsque je serai absent. Ceci mis à part, aucun autre changement ne sera à attendre. Vous pourrez toujours emprunter des livres, ou travailler dans la bibliothèque aux heures d'ouverture. Si vous venez en quête d'informations sur les créatures magiques ou sur la diplomatie sorcière, n'hésitez pas à me questionner. Merci à tous !

Les élèves applaudirent poliment. Jefferson Cook s'exprimait avec un accent étrange, difficile à identifier car très subtil. Peut-être anglais ou allemand, de seconde génération. Néerlandais ? Mais ce qui intriga d'autant plus Mathis, ce fut le fait que Malwen Carter fixait le bibliothécaire avec un air choqué, presque effrayé.

Nous estions ignorants, nous le serons moins d'ici l'an ! clamèrent tous les élèves, avant que les plats n'apparaissent.

Après le banquet, Mathis alla directement se coucher. Aventino Bellini était extrêmement bordélique, mais il semblait plutôt discret, et ne lui adressa pas la parole. Exactement ce que Mathis attendait de lui.

Le matin de la rentrée, Mathis assista à la réunion de rentrée au début du cours de Biologie Magique. Le professeur Delambrosía leur révéla qu'ils pouvaient décider d'abandonner une option au profit d'un club à la condition expresse qu'une évaluation individuelle puisse être menée pour l'élève (ce qui excluait les deux clubs de sport collectif). Ce club serait alors évalué comme option mineure, même si l'élève choisissait d'abandonner son option majeure.

Mathis réfléchit sérieusement à la question. Il voulait faire un métier de terrain, et pour cela son choix initial des options de Zoomagicologie et (T)DCFM semblait idéal. Cependant, malgré la réforme que Mr Carter était parvenu à faire adopter pour introduire de la pratique dans son cours de DCFM, cela restait encore trop nébuleux. Une option diplômante de Duel lui serait fort utile s'il voulait devenir un jour Gendarmage. Il pouvait aussi envisager d'abandonner l'option Zoomagicologie, mais ça voulait dire renoncer à la possibilité de rejoindre le Bureau des Chasseurs. Mathis se promit d'en discuter avec Carter. Peut-être même qu'il lui demanderait d'être son professeur référent.

Après l'avoir interrogé sur le nouveau bibliothécaire, bien sûr.

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Voilà voilà ! Deux longues journées, dites donc, il m'aura fallu presque un an pour les raconter… Heh.