Cher Harry,

Y'a des mots que l'on peut regretter de tout notre cœur, mais il y a des non-dits qui font plus de mal encore. Y'a des choses que l'on peut dire et d'autres que l'on doit. Si je te dis tout ça, c'est que je me rends compte au fil des heures qu'un mensonge de ta part ferait vaciller toute la confiance que j'ai à ton égard. Je sais que l'homme n'est pas disposé à tout dire, mais voilà toute la limite du mensonge. Comment comprendre un non-dit ?

J'ai lu ta dernière lettre avec beaucoup d'attention, et plus je lisais, plus j'arrivais à me dire que tout cela était réellement bizarre. Finalement, à chercher les failles, je me confortais dans cette idée du mensonge. Comment pourrais-je maintenant accepter qu'il en soit autrement. Avant d'aller plus loin, j'aimerais juste t'expliquer ce que j'ai cru déceler entre les lignes de tes lettres.

Tu me relates une vie qui paraît tellement banale que cela en semble très bizarre, tu me dévoiles un manque d'émotions tel qu'il me paraît impossible que tu sois à la recherche du plus grand meurtrier de cette planète, et tu sembles tellement peu étonné des faits les plus soupçonneux qu'il m'apparaît que ta vie doit être un mensonge à lui tout seul.

Alors pourquoi me caches tu tant de choses ? Si tu savais la confiance que je porte en toi… Pourtant, j'arrive encore à t'en vouloir. Pourquoi ? Je n'en sais rien. Je n'ai pas le fin mot de l'histoire et te connaissant parfaitement, je sais que je ne l'aurais sans doute pas… Pour le moment. Je sais également que tu prendras ces mots pour un affront, et pourtant, c'est plus fort que moi, je ne peux plus te cacher cet état d'esprit qui est le mien en ce moment.

Difficilement, j'essaye de me mettre hors de cet état d'esprit et enfin finir cette lettre comme il se le doit. Ici, il n'y a rien de réellement changé. Enfin, quand je dis rien… Nous venons d'apprendre que Poudlard rouvrira finalement ses portes l'année prochaine. Je doute qu'il y ait beaucoup d'élèves pour suivre ses enseignements. Je suis certaine que même certains de nos professeurs se porteront pâles. Mais pourquoi te dire ça ? Tu dois t'en moquer… Ton formidable courage gryffondorien te pousse à fuir une moralité qui, que tu le veuilles ou pas, a son importance.

Je te le répète encore et encore Harry, reviens. Après tout, tu le dis toi-même, tu es le seul à pouvoir réellement mettre fin à ce calvaire. Alors autant mettre toutes les chances de ton côté non ? Où alors, ose me dire que tu te sens réellement près à faire ça !

Réponds-moi vite je t'en pris,

Ginny Weasley.

Chère Ginny,

Tu me demandes de te répondre vite, je m'exécute sans la moindre envie de le faire. Tu as raison, encore une fois, j'ai bien pris ces quelques mots pour un affront. Tu dis porter en moi une confiance aveugle… alors pourquoi chercher la faille dans ce que je te dévoile ? Qui ment ? Bien sûr que j'ai confiance en toi. Alors peux-tu me dire pourquoi je pèse chacun des mots que je couche sur le papier ?

Pour répondre à ta question, le non dit est à mes yeux un mensonge à soi même plus qu'aux autres. Je n'ai pas l'intention de te blesser, juste de répondre à ta demande. Ginny, lève les yeux un instant et regarde autour de toi. Est-ce que selon toi ce monde est parfait ? Réponds oui et je penserais que tu mens. Réponds non et je saurais avec certitude qu'une partie de toi espère le contraire.

Alors tu affirmes que ma vie est un mensonge à lui tout seul ? Je le confirmes haut et fort ! La vie est une unité de mensonges plus ou moins conséquents, ce que j'appelle de la modération, tout simplement. Si l'homme ne prenait pas garde à rendre sa vie plus agréable, ce n'est pas un homme que nous aurions à craindre… mais le peuple tout entier.

Je suis content que Poudlard rouvre ses portes pour la prochaine rentrée. Je suis toujours persuadé que cet endroit est le plus sûr que le monde sorcier n'ait jamais construit. Mais je suis également sûr qu'il pourra devenir l'endroit le plus agréable de ce même monde une fois que tout danger sera mis à l'écart et anéantis. Encore une fois, tu as raison, je perds mon courage face à l'idée d'un retour en ce lieu. Simplement parce que j'aurais cette impression tenace de fuir ce que l'on attend de moi. Mon devoir n'est pas de mener ma vie le plus normalement possible, mais d'accepter ce qu'elle est et ce que cet homme en a fait. Et si en effet je ne sais toujours pas si je serais capable de le faire, je travaille pour.

Tu sais Ginny, je suis toujours sûr que l'on ne doit pas donner d'importance à la chance. On ne doit pas faire d'elle sa trame de vie et son espoir. Elle n'existe pas… peut-être, je l'avoue, m'est-il plus supportable de penser ça. Ca m'évite ainsi de me rendre à l'évidence… La chance ne serait pas équitable… La vie ne le serait pas non plus.

Puisses-tu croire à la sincérité prochaine de mes mots, sans en douter plus que maintenant. Je te laisse pour aujourd'hui, attendant impatiemment de pouvoir toucher des doigts ta prochaine lettre et en apprécier chacun des mots.

H.P.

P.S : Présente à Ron mes plus plates excuses et dis lui qu'il ne sert à rien de me renvoyer mes propres lettres, et qu'il maîtrise très mal le sort de recollage…