C'est étonnant ce que l'humeur de l'auteur influence son travail. Je ne me ferais pas des amis en disant que je déprime car je n'ai toujours pas repris les cours (il me semble, en tout cas). Mes problèmes relationnels vous avantagent cependant car ils me donnent envie de m'investir dans cette histoire un peu sombre où je compatis au malheureux sort de notre héroïne ! Bon, fini de pleurer et lisons donc ses nouvelles découvertes !
J'en profite pour remercier mon très cher bêta-reader qui accepte de me suivre dans cette nouvelle aventure quelque peu tordue ! Pour cependant reconnaître son talent à sa juste valeur, je vous encourage à aller voir ce qu'il écrit (il me semble que tout comme moi, tu sois un peu en manque de reviews; non ) Merci à toi, Bloub !
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Titre : L'enfant de la brume.
Auteur : Elizabeth.
Spoilers : les QUATRE premiers tomes seulement.
Disclamer : Tout ce que vous allez lire ne m'appartient pas (sauf peut-être l'histoire, ce qui n'est que peu de choses). Ayant décidé d'écrire sur le monde d'Harry Potter, je tiens à préciser qu'il appartient à l'écrivain J.K Rowlling. Je ne touche donc aucun droit d'auteur et le travail que je fournis n'est pas dans un but lucratif.
Avertissement : PG-13 (pour les idées développées dans l'histoire, les scènes de violences et autres).
Résumé du chapitre précédent : Je me suis réveillée dans un étrange hôpital où après avoir tenté de m'enfuir, j'ai capitulé au sort qu'on avait décidé pour moi. Un homme nommé Dumbledore m'a expliquée que maman était une sorcière et que de la famille avait accepté de m'accueillir. Cependant, tout ne semble pas très net car on a changé mon identité. Je m'appelle donc Mael Lanchaster, j'ai treize et je suis un garçon à ma grande joie. L'homme qui m'a sauvé la vie, Ayn Hawthorne, est devenu mon protecteur par le biais d'un étrange tatouage sur ma nuque. C'est avec force incompréhension que je me suis jurée de ne cesser de vivre jusqu'après avoir accompli ma vengeance envers ceux qui m'ont dépouillée de moi-même.
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Chapitre 3 : BIENVENUE CHEZ LES LANCHASTER.
Je
lançai un dernier regard à la petite chambre d'hôpital
dans laquelle j'avais eu ses longues heures en proie à la
panique et à l'incompréhension. Après de plus
mûres réflexions, je ne voyais pas en quoi ce qu'on
avait accepté de me révéler pouvait m'aider à
surmonter la douleur grandissante qui habitait mon corps et mon âme.
Je me sentais plus que jamais piétinée, emportée
dans des flots tumultueux sans pouvoir rien faire, ni me raccrocher à
personne. Ma détresse si grande fut-elle ne me donnait pas le
courage d'en finir. Je m'étais fait une promesse que
j'espérais honorer le plus vite. Mais pour l'instant, une
famille inconnue dont je n'avais jamais entendue parler m'attendait
derrière la porte.
Aucune affaire à emporter. Tout
ce qui m'avait appartenu avait disparu, réduit en cendres
blanches et noires dans la nuit. Je me levais donc lentement et
appuyais doucement sur la clenche de la porte qui grinça
sinistrement. Dans le couloir, une infirmière vint aussitôt
vers moi pour savoir qui j'étais et ce que je faisais.
« Je suis Mael Lanchaster, déclarais-je sans vraiment y croire moi-même. Des gens de ma famille doivent m'attendre. »
La jeune femme au regard sévère s'empara d'un calepin coincé sous son bras et fit voleter les feuilles d'un air dubitatif avant de m'observer à nouveau. Je détournai la tête avec maladresse, mal à l'aise dans cette nouvelle identité et dans ce corps transformé qui ne m'appartenait plus vraiment. Elle finit par agiter la tête négativement et je soupirai profondément.
« Pouvez vous regarder s'ils ne sont pas à l'accueil. »
« Jeune homme, je crois qu'il serait bien que vous retourniez dans votre chambre. »
« Mais… »
A ce moment là, un petit groupe arriva derrière elle avec en tête un homme qui ressemblait à un médecin. Sa blouse blanche était sans tache ni anicroche et on aurait pu le prendre pour un médecin tout à fait ordinaire si l'extrémité de sa baguette magique ne sortait pas de sa poche. Il semblait être en grande conversation avec le couple qui le suivait mais prêta toutefois attention à nos bavardages qui devenaient de plus en plus forts.
« Mademoiselle, puis-je savoir ce qui se passe ? »
Sur le coup, je crus qu'il s'adressait à moi mais je dus me retenir de répondre en me souvenant que j'étais maintenant un jeune homme. Ma glotte s'agita tandis que j'avalais avec difficulté.
« Ce patient prétend attendre de la famille mais je ne le trouve pas sur les listes, docteur. »
« Et comment s'appelle t'il ? »
La question ne s'adressait pas à moi, j'étais jugé comme quantité négligeable ou du mois dans l'incapacité de répondre de ma propre identité.
« Lanchaster, il me semble. »
« Parfait, c'est justement ce jeune homme que nous cherchions. Monsieur, je vous présente votre famille qui est venue vous chercher. Il y a juste une petite signature à faire à l'accueil pour faire sortir votre neveu. »
L'homme remercia poliment le médecin puis sa femme me saisit le bras avant de m'entraîner vers un ascenseur aux grilles dorées. Nous descendîmes de trois étages avant de parvenir dans un couloir tapissé de tentures vertes où par endroit des portraits d'hommes célèbres avaient été accrochés. Pour ma part, je n'en connaissais aucun et décidai de prêter un peu plus d'attention au couple qui m'accompagnait. La femme me tenait fermement le bras et son regard se posa avec douceur sur moi. Son visage était un ovale aux contours un peu flou qui avait dû être très beau. Ses traits s'étaient affaissés et de petites rides marquaient le coin de ses yeux qu'elle avait pourtant pétillants. Je remarquai qu'elle mordillait sa lèvre avec anxiété alors que son mari signait un feuillet multicolore puis abandonnait la plume sur le bureau des renseignements. Elle était vêtue d'une longue robe pourpre ornée d'un jabot de dentelles plus pâle au niveau du cou et ses cheveux châtains étaient tirés en un chignon serré. Son mari marchait d'un pas énergique dans le vent froid qui s'engouffrait dans mes maigres vêtements. Je frissonnais et la femme resserra son étreinte autour de moi. Elle interpella son mari.
« Richard, je crois que le petit a froid. Il faudrait se dépêcher de rentrer et lui donner quelque chose de chaud. »
« Bien sûr, Bien sûr ! Le mieux est de trouver un endroit discret où transplaner. »
Mon esprit embrumé par la fatigue, le froid et la faim ne chercha même pas à trouver un sens à ce que le couple racontait.
« Voyons, Richard, il ne peut pas transplaner ! »
« C'est vrai, j'oubliais. Il est tard pour se rendre sur le chemin de Traverse. De plus, il nous faudrait retraverser la moitié de la ville. Ce n'est pas grave, je vais faire un portoloin. »
« Mais… Et l'autorisation ? »
La femme semblait s'inquiéter bien plus que son mari qui prit les choses en mains. Il se saisit d'un journal abandonné sur un banc et sortit sa baguette de sa poche qu'il appliqua sur le quotidien. Le journal s'illumina pendant quelques instants d'une douce lueur bleue puis reprit son aspect originel. L'homme le tendit devant sa femme qui s'en saisit et le serra contre sa poitrine.
« Je vous rejoins à la maison. Je vais passer par le ministère pour arranger cela ! »
L'homme disparut dans un crépitement sonore et sa femme me regarda avec bienveillance. Son mari était bien plus imposant qu'elle avec sa haute taille ; et bien que ses cheveux clairsemés grisonnaient et que ses lunettes cerclées d'argent adoucissaient son regard, le tout lui conférait une allure austère. La femme me regarda intensément tandis que je sentais son bras se glisser sous le mien et me cramponner avec une force étrange.
« Accrochez-vous, mon petit ! Mais ne vous inquiétez pas, cela ne durera pas très longtemps ! »
A peine avait-elle fini de prononcer ces mots que les feuilles du journal bruissèrent dans sa main gantée et un éclat lumineux nous éblouit tous les deux. Comme si une tornade s'était levée, je me sentis happée au ventre et je me tordais de douleur. On m'arrachait à la terre ferme et une myriade de couleurs intenses aveuglait mes yeux avec souffrance. Je tentai vainement de balbutier quelque chose mais le son de ma voix disparut dans le néant que nous traversions. Tout à coup, je tombai brutalement sur les genoux et eu le réflexe de poser mes mains devant moi pour amortir mas chute. Mes paumes foulèrent la mollesse d'un épais tapis et ma tête dodelina sur mes épaules comme un pantin désarticulé qui refuse d'obéir aux injonctions de son maître.
« Allons, Mael, relevez-vous ! »
La main douce de la femme s'approcha de moi et me redressa avec une poigne ferme et énergique que je n'aurai soupçonnée. La pièce dans laquelle nous nous trouvions était plongée dans l'obscurité et seul le teint d'un miroir ancien jouait de ses pâles reflets fugaces dans ces ténèbres. Mes yeux s'habituèrent à la pièce qui devait être un salon aux vues de l'aménagement. Pourtant, une pâle lueur jaune éclaira tout à coup le visage de ma protectrice qui dressa vers moi une lampe à huile dans laquelle brillait une flamme certainement d'origine magique. Les murs tapissés de tentures vermeilles et or offraient un spectacle fastueux que complétait l'ameublement : l'assortiment des fauteuils anciens aux accoudoirs rebondis et râpés, les portraits entourés de majestueux cadres dorés, les bibelots de porcelaine présentés avec talent sur les commodes. Tout s'accordait à merveille mais dégageait en moi un sentiment de nostalgie d'un passé pourtant révolu. Cette pièce avait échappé aux affres du temps, tout semblait intact et je m'attendais presque à voir des serviteurs en livrée nous ouvrir la porte de bois blanc.
Mais mon impression de rêve s'arrêta là quand la clenche bascula pour laisser entrevoir un petit visage rond et curieux dont les grands yeux verts me dévorèrent avec intérêt. Puis la porte s'ouvrit toute grande et la petite fille fila à toute vitesse vers la femme et lui sauta dans les bras, serrant ses bras autour de sa taille.
« Maman ! Tu es enfin revenue, s'exclama t'elle en plongeant sa tête dans les plis de la robe maternelle. »
« Voyons, Ann, cela fait à peine deux heures que nous sommes partis ! »
« Mais Nath' n'a pas arrêté de m'embêter, maman, gémit t'elle de plus belle. »
Il était clair que la nouvelle venue se livrait à un spectacle particulièrement réussi d'apitoiement sur elle-même et malgré cela, sa mère ne parut pas y prêter trop d'attentions. Elle passa une main dans les cheveux châtains qui formaient deux petites couettes sur la tête de la petite fille. Puis une fois que la dénommée Ann eut suffisamment accaparé l'attention maternelle, elle se tourna vers moi et pointa un index accusateur vers ma poitrine.
« Qui c'est, maman ? »
« On ne dit pas 'qui c'est' mais 'qui est-ce', réprima sa mère en faisant une petite moue. De toute façon, nous ferons les présentations au repas. Remontes plutôt dans ta chambre, Ann, jusqu'à ce que la cloche sonne. »
Aussitôt, Ann effectua une pirouette et s'enfuit en courant par la porte entrebâillée. Eliza Lanchaster me prit par la main et m'invita à la suivre après avoir abandonné la lanterne sur un coin de la table. Nous pénétrâmes dans un couloir qui donnait immédiatement sur un large escalier. Sur notre chemin, les chandeliers s'allumaient comme par magie et la lumière s'estompait dans les ténèbres après notre passage. J'entendis plusieurs fois des portes claquer et quelques cris qui devaient appartenir à des enfants. La femme finit par ouvrir une porte et devant moi apparut une vaste chambre meublée. Un feu brûlait dans l'âtre de la cheminée et on avait pris soin de tout arranger pour la venue de quelqu'un. Je pénétrai avec respect dans cette pièce sans réaliser que toutes les attentions qu'on lui avait portées étaient dans le but de ma venue. Je me sentis alors gênée et reculai lentement. La femme me posa alors une main sur l'épaule qui me fit frémir.
« Et bien, Mael, voilà votre chambre. J'espère qu'elle vous conviendra. Je vais vous laisser vous reposer un peu et je vous demande de descendre lorsque la cloche sonnera le dîner. Vous pouvez vous changer si vous le désirez, toutes vos affaires se trouvent dans l'armoire. »
Elle m'abandonna finalement à ma solitude après m'avoir enveloppée d'un regard protecteur. Une fois qu'elle fut sortie de la pièce, je me laissai choir sur le lit malgré son aspect imposant, les bras étendus le long du corps. L'édredon de plume ne soutenait que mollement ma tête qui s'enfonça dedans et je regardai avec complaisance le sommet du lit à baldaquin. Mon corps se sentait tellement fatigué que j'aurai presque manqué de m'endormir dans la torpeur qui me gagnait (la douce chaleur dégagée par le feu y contribuant largement). Toutefois, je me relevai et observai avec curiosité empreinte d'amertume ma nouvelle silhouette dans le miroir. Ainsi, Mael Lanchaster ressemblait à cela ! Ce pauvre petit garçon aux cheveux trop longs, aux yeux trop grands et à la peau trop pâle. Je dénouai du mieux que je le pouvais ma chemise dont la couleur blanche était depuis longtemps passée et tentai avec une certaine crainte de me servir de mon bras droit passé en écharpe. J'eus pleuré lorsqu'il retomba mollement le long de mon flanc si mon visage amer dans la glace ne m'eut redonné foi, une foi rageuse en ce que j'étais devenue. Je me mis donc à la recherche d'un costume présentable pour dîner et tendais toujours l'oreille pour ne pas manquer d'entendre au loin le tintement mat de la cloche. J'explorai le contenu de l'armoire du mieux que je pus et finis par trouver une chemise non trop empesée bien qu'un rabat retombe sur ma gorge. J'attachai les boutons de nacre avec attention et maladresse puis partis en quête de quelque chose, persuadée qu'il manquait quelque chose à cette tenue.
J'avais compris que je venais de pénétrer dans un nouveau monde quelque peu bouleversant et étais bien résolue à y trouver mes marques, même si je n'y appartenais pas. Au fond de moi, j'étais et je resterai Alysse Cleland, quoi qu'on me dise et qu'on m'impose. Je serai docile et respectueuse mais on ne m'obligerait jamais à rester dans le jeu des apparences qu'on m'imposait. J'avais bien compris être dans une maison de bonne famille et j'avais un rôle à y tenir. Je ne savais pourtant pas quoi déclarer à qui que ce soit et bien que les conseils d'Ayn Hawthorne me reviennent en mémoire, je me sentis brusquement un peu désemparée. Qu'allais-je faire ?
'Tente de rester naturel'
La voix me fit sursauter et je laissai tomber à terre le petit coffret qui déversa un contenu de broches scintillantes et colliers brillants sur le sol.
« Qui est là, murmurai-je comme à moi-même, morte de peur ? »
'Ca ne sert à rien d'avoir peur, Mael. Ce
n'est que Ayn Hawthorne.'
« Où
êtes-vous ? »
'Dans tes pensées,
Mael… »
Alors que les mots résonnaient
dans ma tête, je plaquai avec frayeur mes mains contre mes
temps, sûre et certaine de devenir folle.
'Allons,
je ne fais que te transmettre mes pensées. Tu peux me parler
dans ta tête si tu le désires. »
J'ouvris les yeux et fixai avec effroi le tapis recouvert de bijoux. Ma main gauche partit à leur recherche pour tenter de les remettre dans le coffret. J'hésitai puis tentai finalement de parler après m'être mordillée les lèvres pendant une bonne minute.
'Comme ceci ?'
'A peu près mais ne pense pas si fort. C'est
comme si tu hurlais, laisse tes pensées glisser tel un
ruisseau.'
Je plissai les sourcils comme si cela avait pu m'aider et enfournai un collier de perle dans la boîte.
'Voilà qui est beaucoup mieux.'
'Pourquoi voulez-vous me parler ?'
'Je
suis ta flamme, Mael.'
'Ne m'appelez pas comme
ça ! Je suis Alysse Cleland et personne d'autre, quoi
que vous vouliez tous faire de moi.'
'Nous ne
voulons rien faire de toi, Mael, mais seulement te protéger.
Il faut que tu acceptes cette nouvelle identité.'
Je
poussai un soupir et refermai le coffret d'un geste sec et rageur.
'Demain, tu recevras un colis de ma part. Dedans se
trouvera une lettre qui t'en expliquera un peu plus. J'y joindrai
quelque chose qui te sera utile.'
'Merci'
Mon ton narquois ne fit cependant pas réagir l'homme dont les réflexions qui tourbillonnaient avec ardeur me lancinaient le crane. Tout à coup, mes pensées s'embrouillèrent et j'entendis dans le lointain la cloche sonner le dîner. Je me redressai d'un bond et manquai à nouveau de renverser le coffret.
'Il faut que je descende'
Ma pensée était confuse mais Ayn Hawthorne sembla acquiescer avec compréhension.
'Je vous
laisse.'
Alors que ma main était déjà presque posée sur la clenche dorée de la porte, la voix douce susurra quelques mots dans mon esprit avant de disparaître tel un nuage de fumée.
'L'épingle
d'argent avec l'émeraude serait du meilleur effet.
N'oublie pas que tu es Mael Lanchaster, héritier de la
branche cadette et irlandaise d'une très bonne
famille.'
Mon regard se détourna alors comme attiré par un scintillement sur le tapis. Je m'agenouillai et découvris avec surprise une fine épingle argentée surmontée d'une émeraude. Je jetai un vague coup d'œil dans le miroir et la plantai avec application dans mon col. Alors que j'allais refermer la porte de ma chambre, mon reflet agita une main à mon adresse et me fit un clin d'œil. Je mis cela sur le compte de la fatigue, trop éreintée pour donner un sens logique à chaque chose que je voyais.
En bas des escaliers, je remarquai une porte dont s'échappait un mince filet de lumière qui inondait le tapis que j'osais à peine fouler de mes pieds. J'hésitai à pénétrer dans la pièce et restai à me dandiner d'une jambe à l'autre, encore plus mal à l'aise qu'au début. Un murmure de voix chatoyante me parvenait depuis le couloir mais je n'y prêtai que peu d'attention. Mon regard aux aguets attendait avec impatience un signe m'invitant à entrer. On toussota derrière moi et je me retournai, parcourue d'un tremblement de gêne et de frayeur, sûre et certaine que l'on allait me réprimander. Devant moi se dressait une jeune femme vêtue d'un tablier blanc qui reposait sur une robe noire immaculée. Son regard accrocha le mien et nous restâmes quelques instants plongées l'une dans les yeux de l'autre. Puis elle baissa brusquement la tête et me présenta des excuses bafouillées pour avoir osé me dévisager. Elle ouvrit la porte et m'invita à pénétrer dans la salle à manger tandis qu'elle s'effaçait dans la pénombre. J'aurai voulu lui dire qu'il n'y avait pas de raisons de s'excuser mais mon attention fut attirée par bien d'autres choses.
La pièce qui se présenta à mes yeux était des plus étranges que je n'avais vu. Les murmures sous-jacents que j'avais entendus provenaient de tableaux accrochés aux murs et dont les occupants discutaient allégrement. Je supposais qu'il s'agissait de portraits de famille mais ne put m'empêcher de reculer d'un pas maladroit devant cette surprise. Une jeune femme coiffée d'une perruque aux boucles poudrées m'adressa un sourire moqueur puis reprit la conversation qu'elle venait d'engager avec un vieil homme qui possédait un énorme monocle.
« Ha, vous voilà, Mael ! »
La voix chaude de ma protectrice me ragaillardit quelque peu et je me tournai vers elle pour lui présenter un sourire timide. Elle avait changé ses vêtements pour une robe bleue nuit plus simple et confortable et je lui vis un léger air de ressemblance avec la jeune fille coquine du tableau, quelque chose dans le regard.
« J'espère que vous avez eu un peu de temps pour vous reposer, Mael. Le docteur nous a bien recommandé de prendre soin de vous, vous avez besoin de beaucoup de repos. »
Je hochai la tête, ne sachant que répondre. On m'avait dit que ces gens appartenaient à ma famille, enfin, celle de ma mère. Mais qui étaient-ils pour moi et que savaient-ils de mon passé ? Etais-je pour eux Mael Lanchaster ou bien Alysse Cleland ou encore quelque chose entre les deux ? Au moment où je me posai cette question, du bruit retentit et je vis débouler devant moi deux jeunes personnes d'à peu près mon âge. La jeune fille avait remonté ses cheveux des deux côtés de sa tête tandis que son frère les avait en mèches devant les yeux. Leurs visages identiques, jusqu'au grain de beauté sur la joue, ne faisaient qu'attester de leur gémellité. La jeune fille avait attaché ses cheveux en couettes qu'elle avait noués à l'aide d'élastiques tandis que ceux de son frère tombaient avec agilité dans son cou. Ils s'arrêtèrent dans leur course lorsqu'ils se rendirent compte de ma présence et chacun m'adressa un regard étonné qui me mit mal à l'aise. Mme Lanchaster leur lança un regard qui sous-entendait qu'elle avait l'habitude de ce genre d'entrée en la matière, qui ne la satisfaisait que très peu. Elle se contenta cependant de pousser un petit soupir puis ayant croisé les bras sur sa poitrine, elle s'adressa à moi :
« Mael, je vous présente les jumeaux :Nathaniel et Keith. Ils ont votre âge. »
A ses mots, je lui lançai un petit regard pour savoir si elle sous-entendait bien que je n'avais que treize ans (ce qu'on allait m'accorder pour un petit bout de temps). J'aurai voulu qu'elle acquiesce en silence avec entendement au regard interrogateur que je lui adressais, savoir qu'elle savait qui j'étais et qu'elle comprenait mon mal-aise. Mais mes illusions s'envolèrent lorsque le jeune homme m'adressa la parole.
« Moi, c'est Nathaniel mais tout le monde m'appelle Nath'. Elle, c'est Keith ma jumelle. Nous avons treize ans et nous entrons en troisième année à Poudlard. »
Son clin d'œil furtif me déstabilisa mais la douce main d'Eliza Lanchaster se posa sur mon épaule.
« Nous parlerons de tout cela ce soir, après le repars, Mael. Les enfants si vous voulez bien vous asseoir, votre père ne devrait pas tarder à arriver. »
Et en effet, à peine ses mots sortaient-ils de ses lèvres qu'un petit bruit sonore retentit dans l'entrée et on entendit un des serviteurs se précipitaient pour prendre les affaires de Monsieur. Le battant de la porte laissa place au mari d'Eliza Lanchaster dont le regard sombre ne présageait rien de bon. Il passa une main dans ses cheveux gris coiffés pour les rabattre sur le côté puis s'approcha de sa femme qu'il embrassa.
« Le dîner va être servi, Richard. »
« Très bien, passons à table alors. »
Je m'approchais de la table couverte d'une nappe blanche en dentelle recouverte d'assiettes de porcelaine et de plats d'argent recouverts de cloches. Les jumeaux étaient entrain de se chamailler pour savoir qui serait assis à quelle place et Ann, la plus jeune des enfants que j'avais rencontré, boudait, un coude posé sur la table. Le brouhaha se calma peu à peu lorsque les deux parents eurent pris place et que Richard Lanchaster eut soulevé sa baguette vers la table. Je retenai mon souffle, sûre qu'une étrange manifestation allait encore avoir lieu et qu'elle aurait très certainement une conséquence catastrophique ou tout du moins préjudiciable à ma personne. Mes paupières se fermèrent automatiquement et je ne l'ai rouvris qu'avec surprise lorsque les exclamations des enfants se firent entendre. De nombreux plats composés de viandes en sauces appétissantes et de légumes odorants s'offraient à nous. On me servit avec générosité.
La porte grinça alors délicatement et un nouveau venu apparut. Si les jumeaux possédaient le visage de leur mère, ce dernier ressemblait bien plus à Monsieur Lanchaster. Son allure me troubla : j'observais avec attention et curiosité sa coupe de cheveux si classique et ses yeux verts qui luisaient derrière une monture de lunettes. Il s'excusa pour son retard et alla s'asseoir lorsque son père lui lança un regard entendu. Je me rendis alors que la seule place libre se trouvait à ma droite et je sentis mes joues s'empourprer. Richard Lanchaster reposa son verre de vin et attendit que l'attention de tous soit tournée vers lui. Il toussota et son regard sévère me perça.
« Maintenant que nous sommes tous au complet, je tiens à vous présenter quelqu'un qui va rester pour quelques mois avec nous. Voici votre cousin, Mael Lanchaster qui nous vient d'Irlande. Ses parents nous l'ont envoyé pour qu'il puisse poursuivre ses études à Poudlard. J'espère donc que vous lui ferez un bon accueil. »
Aussitôt, Ann se redressa sur ses coudes, les jumeaux se mirent à me poser des questions simultanément. Eliza finit par lancer un petit jet d'étincelles vers les enfants qui se turent. Mes oreilles bourdonnaient du brouhaha que je venais d'entendre et les enfants finirent par reprendre la parole car leurs deux parents paraissaient profondément occupés par leur conversation.
« Tu viens vraiment d'Irlande, Mael ? »
« Je suppose que les châteaux hantés et les kobolds, tu dois connaître. »
« Raconte-moi donc comment était l'école là-bas… »
« Certainement moins drôle qu'à Poudlard ! »
« Dans quelle maison comptes-tu aller ?'
« C'est vrai que les Irlandais sont tous des sauvages ? »
Le flot de questions me noya à nouveau dans un sentiment d'angoisse car je ne savais tout d'abord pas à quelle question répondre en premier et de plus, je ne comprenais pas la moitié de ce dont on me parlait. Le jeune homme assis à mes côtés finit par venir à mon secours.
« Je m'appelle John et je suis l'aîné de la famille. J'ai 15 ans. »
Et lui aussi, finit par me poser des
questions auxquelles je ne comprenais pas tout. Il me parla de sport,
d'équipes, de championnats et Kidich. J'hannonais
vaguement une réponse à chaque fois qu'on s'adressait
à moi et me sentis soulagée quand la fin du repas
arriva. Les enfants remontèrent dans leurs chambres et une
fois seule en la compagnie des deux adultes (après qu'Ann eut
enfin accepté d'être reconduite dans sa chambre pas sa
mère), Richard Lanchaster me fit pénétrer dans
un petit salon aux teintes vertes et or. Un chandelier illuminait
d'une douce ambiance la pièce et l'homme s'assit dans un
élégant fauteuil. Ses doigts sortirent de la pénombre
une pipe qu'il bourra avec application de tabac avant d'en humer
une ou deux bouffées odorantes. Eliza Lanchaster arriva enfin
et prit place derrière le fauteuil de son mari.
Je savais
que c'était l'heure des explications, j'allais enfin
savoir ce qu'ils avaient décidé pour moi.
« Bien Mael, je suis désolé de ce qui est arrivé à vos parents, me déclara l'homme en recrachant un nuage de fumée opaque. C'est Dumbledore, le directeur de Poudlard, qui m'a demandé si je pouvais vous garder pour le moment étant donné l'état de la situation. Le fait que votre mère ait abandonné le monde de la magie n'est pas pour me satisfaire, de plus, votre père était un moldu et vous semblez être donc dépourvu de pouvoirs magiques. Cependant Dumbledore tient à ce que vous rejoigniez Poudlard. »
Il s'arrêta dans sa longue tirade que j'avais suivie avec application et Eliza Lanchaster dut lire l'interrogation dans mon regard puisqu'elle respira profondément avant de poursuivre.
« Poudlard est l'école de magie et de sorcellerie de Grande-Bretagne et son directeur demande à ce que vous y entriez, Mael, pour y étudier et y vivre ses prochains mois. »
« Veuillez m'excuser mais comment puis-je vivre et étudier quelque chose qui m'est totalement inconnu ? »
« Le directeur vous expliquera tout cela, Mael, et je suis sûre que c'est ce qu'il juge de mieux pour vous. »
Un grésillement provenant de la pipe retentit et Richard Lanchaster reprit la parole.
« Il faut cependant que vous compreniez quelque chose, Mael. Votre famille a été assassinée par un groupe de dissidents appartenant au monde de la magie. En acceptant de vous recueillir, je mets la vie de ma famille et de mes proches en danger. C'est pour cela que vous devez rester discret lorsqu'on vous posera des questions. Officiellement, vous êtes le fils d'Esther Sparrow, la sœur de ma femme. Nous sommes donc votre oncle et votre tante. Néanmoins, il est plus prudent de faire disparaître ce nom de la réalité. De toutes façons, plus personne ne le porte maintenant. »
La fin de sa déclaration fut accompagnée d'un haussement d'épaules qu'Eliza parut réprimer car elle voulut chuchoter quelque chose à l'oreille de son mari qui lui fit comprendre de ne pas faire de difficulté.
« Vous êtes donc à partir de maintenant Mael Lanchaster. Vous gardez votre prénom mais vous êtes le fils d'un de mes frères qui s'est installé en Irlande. De cette façon, votre origine pourra expliquer les quelques maladresses qui risquent de vous arriver. »
« J'irai acheter moi-même vos affaires demain, Mael, car la rentrée est dans deux jours. »
Je remerciais ma tante en baissant la tête et l'on me souhaita une bonne soirée. Je compris qu'il était temps pour moi de déguerpir et de regagner ma chambre. En remontant, j'osais regarder autre chose que les marches de l'escalier et je prêtai attention aux portraits qui m'adressaient parfois un regard accueillant ou condescendant. Au tournant d'un corridor avant de remonter par l'escalier en colimaçon, qui m'attirait bien plus que l'imposant escalier recouvert de velours rouge, j'entendis chuchoter. Je m'arrêtais donc et attentive, je fixais la pénombre devant moi.
« Et bien, voici un minois qui ne m'est pas inconnu. »
La voix était douce et fluette et je tendai les mains devant pour trouver le contour d'un vieux cadre de bois. Mes doigts glissèrent avec lenteur sur le rebord travaillé de sculptures et à ma grande surprise, un chandelier muni d'une unique bougie s'alluma alors. Je vis devant moi un vieux portrait dont la peinture écaillée révélait un décor plutôt ancien. Une jeune femme tenait debout, un éventail à ma main et m'adressa un regard plein de compassion.
«Qui êtes-vous, demandais-je en oubliant toutes règles de politesse. »
« Une personne qu'on a oubliée depuis bien longtemps, des siècles peut-être… Et pourtant, tu lui ressembles tant ! »
« A qui est-ce que je ressemble ? »
« A Esther, mon cher. Tu possèdes toute la grâce de son visage. Pourtant ton regard m'est totalement étranger. Tu dois ressembler à ton père pour cela. C'est étonnant, j'aurai toujours cru qu'Esther aurait des enfants qui possèderaient les mêmes cheveux qu'elle ! »
« Que voulez-vous dire ? Je ne comprends pas. »
« On vous a attribué la chambre du second étage, il me semble. Les tiroirs y renferment de nombreuses choses. »
Puis brutalement, le ton de la jeune femme devint tout à fait froid et elle redressa son éventail sur son visage avant de disparaître tel un courant d'air.
« Simplement, jeune homme, que vous feriez mieux de regagner votre chambre. »
Les mots se répercutèrent contre les murs en un chuchotement à peine audible qui s'évanouit dans la torpeur qui envahissait la demeure des Lanchaster. Sur les conseils du portrait, je regagnai ma chambre où un feu de flammes claires brûlait dans la cheminée. J'ôtais avec rapidité ses vêtements qui cachaient celle que j'étais et enfilai avec maladresse mon pyjama. J'aurai encore voulu parler avec Ayn Hawthorne de tout ce qui m'arrivait. Il était le seul avec ce Dumbledore à savoir qui j'étais vraiment et il saurait m'expliquer toutes ces choses étranges. Pourquoi mon oncle et ma tante n'étaient-ils pas au courant que j'étais une fille ? Ils avaient eux-même semblés être en désaccord sur certains sujets. Plus j'y pensais et plus je me posais de questions aux réponses inconnues. Quelqu'un saurait-il m'expliquer ce qui avait poussé ma mère à abandonner ce monde auquel elle appartenait, à abandonner sa famille ainsi, sans raison ? Et ces hommes en noir, aux visages masqués qui semblaient la connaître, que lui voulaient-ils ?
Je fermai les yeux pour tenter de me concentrer et cherchai à parler dans les pensées comme je l'avais fait quelques heures plus tôt. Pourtant, rien ne vint. J'attrapais mon oreiller et enfonçais avec rage ma tête dedans. Mes sanglots soulevèrent ma poitrine et sans la faire exprès, je cognais mon bras douloureux au recoin de la table de nuit. J'étouffais un juron dans l'édredon et me persuadais que cela ne m'avancerait pas à grand chose de rester là à pleurer. Même si cela parfois un soulagement de se laisser aller à sa souffrance.
Je repensais alors aux paroles de la jeune femme du portrait et résolut d'explorer avec un peu plus d'attention les tiroirs. Je relevas les lourdes couvertures et glissai avec précaution le long de mon lit. Mes doigts se mirent à parcourir les poignés de cuivre doré mais je ne découvris rien de très intéressants. Une dizaine de vieux livres poussiéreux et abandonnés au fond d'un tiroir, des objets étranges dont je ne préférais pas approcher mes mains de trop près et finalement un petit carnet de cuir noir.
Je remontai sur mon lit avec ma trouvaille à la main et m'allongeai confortablement entre les couvertures et l'édredon. Il s'agissait d'un album photo qui n'en conservaient que fort peu. De grands carrés pâles indiquaient qu'il avait été à un moment rempli mais les veilles photos sépia qui étaient glissées entre ses pages ne témoignaient que d'un passé oublié de tous. Un soir de Noël, une réunion de famille, une promenade dans un grand parc. Ce qui m'étonna et me fascina fut que chacun se mouvait sur les photos comme si le temps n'avait pas eu de prise sur eux et qu'ils continuaient de vaquer à leurs occupations. Et je tombai alors sur une photo dont on avait découpé un bout. Trois personnes se tenaient bras dessus bras dessous. Celle de gauche avait de longs cheveux bruns qui tombaient en souples anglaises sur ses épaules. Elle souriait avec un peu de gêne mais je finis par reconnaître le visage d'Eliza Lanchaster. Aussitôt, la curiosité me tint en haleine. Je regardais avec attention la personne de droite et découvrit quelque chose qui me bouleversa. Ma mère. Jeune et belle. Avec des cheveux sombres. Pourtant c'était bel et bien elle qui faisait un petit signe au photographe avec un clin d'œil joyeux. Le même regard pétillant de joie et de bonne humeur. Mais ses cheveux étaient noirs de geai et encadraient souplement son visage un peu pointu. Je plaquai la photo contre moi comme pour me convaincre de cette nouvelle réalité que je venais de découvrir. Si ma mère avait teint ses cheveux et changé ainsi de vie, qu'elle avait caché son nom, c'était pour fuir. Mais pour fuir quoi ou qui ? Et quelle était cette personne dont on avait fait disparaître le visage de façon si odieuse et cruelle. Comme pour signifier qu'elle n'avait jamais existée… Un peu comme Alysse Cleland.
fin du chapitre 3
