Et un pan de révélations sur le passé bien sombre, sordide et complexe de notre héroïne nous est dévoilé. De quoi réfléchir. En attendant la suite… qui malheureusement n'arrivera pas de si tôt car hélas, mois de janvier rime avec partiels à réviser !
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Titre : L'enfant de la brume.
Auteur : Elizabeth.
Spoilers : les QUATRE premiers tomes seulement.
Disclamer : Tout ce que vous allez lire ne m'appartient pas (sauf peut-être l'histoire, ce qui n'est que peu de choses). Ayant décidé d'écrire sur le monde d'Harry Potter, je tiens à préciser qu'il appartient à l'écrivain J.K Rowlling. Je ne touche donc aucun droit d'auteur et le travail que je fournis n'est pas dans un but lucratif.
Avertissement : PG-13 (pour les idées développées dans l'histoire, les scènes de violences et autres).
Résumé du chapitre précédent : Ayn Hawthorne a tenu sa promesse et m'a appris à voler. Pourtant après l'ivresse procurée par les sensations dans les airs, j'ai pris conscience que tout cela n'était encore en réalité qu'un mensonge et que ce n'est que la magie de mon professeur qui me permet de voler. Aveuglée par la colère, je lui ai demandé pourquoi il refusait de me parler de ma mère. Sa seule réponse a été de me déclarer qu'il valait mieux ne pas trop se poser de questions car je ne connaissais pas tout ce que ma mère avait fait dans le passé. Autant dire que je suis partie aussi sec, la rage au cœur et le désespoir au ventre. J'ai cependant passé l'après-midi à Pré-au-lard où quelqu'un m'attendait : Sand Sparrow, le frère de ma mère qui m'a mise en garde contre les mangemorts. Pourtant, lui était persuadé que ma mère n'est morte que par la faute d'un homme qu'elle fréquentait. Ensuite, il y a eu les épreuves de Quidditch imposées par Norvig, et c'est avec une joie sans pareille que je les ai passées. Autant dire que j'ai fait ce que j'ai pu pour ne pas paraître ridicule. Cela a toutefois dû impressionner Norvig qui m'a nommée au poste. Et je n'ai rien trouvé de mieux que de m'évanouir dans les bras de Will Ashcroft qui venait m'annoncer la nouvelle.
Rappel des personnages évoqués dans ce chapitre :
Cleland
Mark : Mon père mort assassiné par d'étranges
hommes vêtus de noir qui ont détruit notre maison.
Sparrow Esther : Ma mère que je croyais
connaître. Son nom de jeune fille est Sparrow et c'était
une sorcière qui a décidé de fuir sa famille et
son passé attaché au monde de la magie. Elle est morte
assassinée sous mes yeux.
Cleland Matthew :
Mon grand frère qui est mort lors de l'attaque de notre
maison.
Lanchaster Eliza: La sœur de ma mère
qui a accepté de me recueillir.
Hawthorne Ayn: Cet
homme est devenu mon protecteur en se liant avec moi par la magie. Il
est ma flamme et semble étrangement au courant du passé
de ma mère.
Lanchaster
Keith et Nathaniel: Mes cousins. Ce sont deux jumeaux
particulièrement doués pour les farces de mauvais goût
mais ils sont sympathiques. Ils sont en troisième année
à Gryffondor.
Oswald Flavy : Bien qu'elle
soit à Serpentard en troisième année, c'est
une des camarades de notre groupe. Froide et silencieuse, quand elle
dégaine (que ça soit sa baguette ou sa langue), ça
fait mal et elle ne rigole pas. Ceux de sa maison la rejettent à
cause de ses fréquentations mais semblent tout de même
lui témoigner un certain respect qui serait dû à
son nom de famille.
Lanchaster
John: L'aîné des enfants Lanchaster en cinquième
année à Serdaigle. Gentil mais un peu suffisant.
Ashcroft Will : Et bien… C'est un bon ami de John
qui joue comme poursuiveur à Serdaigle. Très gentil
avec moi mais pourquoi ai-je toujours face à lui un sentiment
de malaise qui n'a pourtant rien à voir avec ma situation ?
A moins que ce ne soit parce qu'il est un garçon et moi…
une fille !
Vebel Stanley : Serpentard cynique au ton incisif et apparemment impulsif qui joue au Quidditch. Je ne tiens absolument pas à savoir comment il s'est faite cette atroce cicatrice sur la joue.
Etheridge Alister : Calme, très calme mais surtout trop calme à mon goût ! Il se contente d'observer et de faire partager parfois son point de vue au petit groupe.
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Chapitre 8 : LES MÉANDRES DU PASSÉ.
Il n'y avait pas grand chose autour, seulement le vent qui soufflait avec force au travers des ramages noirs des carcasses d'arbres qui se détachaient sous le ciel pâle. Un beau paysage d'hiver s'offrait à la jeune femme mais elle n'en avait que faire. Assise tout près de la fenêtre au second étage de la petite maison, elle espérait bien passer inaperçue. Le lieu n'était pas très passant, situé au bout de la petite ville. Il fallait après le bâtiment d'une coopérative tourner sur sa droite et arpenter en bon connaisseur la voie, maladroitement pavée, qui menait presque aux abords des champs. Là, à une dizaine de mètres se dressait la forme massive d'une maison pourtant malingre. Elle n'avait plus été habitée depuis dix ans quand cette jeune femme s'était présentée à Miss Beckling. La vieille femme avait d'abord hésité en voyant cette femme, dont on ne savait rien, jaillir ainsi de nulle part avec deux enfants en bas âge. Le petit garçon tenait serré dans sa petite paume un pan de la jupe longue de sa mère entre ses doigts et regardait d'un air inquiet le visage grimaçant de la propriétaire. Pourtant, elle ne savait pourquoi mais Angela Beckling s'était laissé séduire par cette femme aux cheveux d'ébènes malgré le regard fuyant de ses yeux argentés. Elle tenait serré contre sa poitrine une toute petite fille emmaillotée dans un châle de couleur crème. L'inconnue s'était présentée sous un nom un peu étrange et finalement, la vielle n'avait pas cherché à savoir ce qui s'était passé. Avait-elle été jetée dehors par son mari ou était-elle, encore pire, une fille de mauvaise vie ? C'était que les rumeurs allaient bon train dans la toute petite ville d'Aberdeen.
Angela l'avait d'abord toisée d'un regard torve par-dessus ses lunettes poisseuses et voyant la petite valise de cuir bien rembourrée et sanglée pour éviter que son contenu se déverse, elle avait secoué la tête§.
« C'est pour quoi ? »
« J'ai vu que vous louiez une chambre, demanda la jeune femme en repositionnant la petite fille aux cheveux duveteux correctement dans ses bras. »
Le long manteau de l'inconnue dégoulinait sur le pas de la porte, la pluie battant fort les pavés au dehors et déjà le soir tombait et teintait les alentours de couleurs ternes. Un éclair déchira rageusement le ciel sombre gorgé de nuages noirs et encres. Miss Beckling frissonna et rabattit le pan de sa blouse sur sa poitrine. Ses doigts malingres se dirigèrent vers un présentoir en métal rouillé et elle en décrocha une petite clé.
« Ca se pourrait mais il faudra payer le loyer. »
« Ce n'est pas un problème, rétorqua la jeune femme. »
Le petit garçon fourra son pouce dans sa bouche et posa sa tête de fatigue contre la jambe de sa mère. D'une main agile, l'inconnue sortit une bourse en cuir retourné d'une de ses poches et lâcha les cordons qui découvrirent de quoi payer suffisamment. Miss Beckling ravala sa langue en se demandant d'où une vagabonde pouvait tenir tant d'argent. Certainement pas honnêtement gagné, pensa t'elle. Puis elle se dit qu'après tout, elle y avait tout à gagner.
Sa main calleuse referma sèchement la porte et les deux femmes se retrouvèrent sous la marquise dont dégoulinaient de minces filets d'eaux qui maculèrent leurs vêtements. Angela se dirigea en boitillant vers le petit chemin caillouteux et suivie de la jeune femme et de ses deux enfants, elles firent le tour de la petite bicoque qui atenait à une demeure bien plus grande. La silhouette se détachait par moments lorsque les éclairs illuminaient rapidement le visage pâle de l'inconnue. Du lierre vert sombre encadrait le pan de la porte qui grinça en s'ouvrant sinistrement. Angela appuya sur un vieux commutateur caché près de l'entrée et un grésillement électrique retentit lorsque les ampoules se mirent à briller d'une lueur ambrée.
« Voilà ! Il n'y a pas de locataires depuis que les anciens propriétaires ont déménagé. Vous n'avez qu'à vous installer dans les combles, c'est la qu'on est encore le mieux. »
La femme regarda avec un soupir de soulagement les tentures qui couvraient les murs et remarqua enfin que la vieille femme s'était tue, la main bien en avant.
« Oui, bien sûr ! Je vous paye pour deux mois. »
Angela Beckling fourra avec empressement les pièces dans la poche de sa blouse et un sourire malingre passa sur ses lèvres desséchées en sentant la monnaie tressaillir tout le long du chemin. Revenue sur le pas de sa porte, Angela Beckling haussa les épaules en voyant au lointain de la petite rue les réverbères illuminant la grande voie. Une voiture passa fort rapidement et une gerbe d'eau éclaboussa des passants. Elle rit pendant quelques instants et son regard se reporta sur la maison. La jeune femme avait paru hésitante en lui donnant son nom. Ses mains avaient glissé sur le vêtement humide qu'elle accrochait à une patère et finalement après avoir baissé la tête, elle s'était retournée et avait offert son beau visage à la lumière du lustre.
« Voici Matthew et Alysse, déclara t'elle en désignant les deux enfants assis sur les marches de l'escalier. Je me nomme Sparrow, Ester Sparrow. »
Angela Beckling claqua la porte et rejoignit avec humeur le dossier miteux de son fauteuil pour reprendre sa couture.
Esther se redressa en pensant à son arrivée dans ce trou sordide. Elle était sûre qu'un ciel si dégagé à la tombée de la nuit présageait une bonne pluie pour cette nuit en cette saison. Elle se dirigea vers la cheminée qui encadrait un coin de la petite pièce et rajouta une bûche dans les cendres avant de faire rejaillir quelques étincelles à l'aide de sa baguette magique. Cela faisait de longs mois qu'elle s'était terrée ainsi en espérant leur échapper. Matthew, son fils, était assis les coudes appuyés sur la nappe d'une petite table et plongeait son regard sur un livre pour enfants que sa mère lui avait donné. Alysse après avoir joué pendant deux longues heures avec sa poupée, avait laissé le sommeil la gagner et sa petite tête reposait appuyée contre la barre de laiton du lit.
« Matthew, veux-tu bien ranger ton livre et mettre la table, s'il te plait ? Nous allons manger.
Le petit garçon acquiesça et déposa son livre sur la table de nuit en noisetier. La petite chambre de bonnes était tapissée d'un vilain papier à fleurs violettes que le petit garçon avait dénigré dès son arrivée. Esther à force de soupirs avait finit par sortir sa baguette et un nuage de paillettes multicolores avait nimbé le papier qui se décollait par endroit du fait de l'humidité. Maintenant, de petits personnages s'animaient sur le mur et son fils passait des heures le soir avant de s'endormir à contempler ce ballet incessant.
La jeune femme se pencha sur le poêle et d'un rapide moulinet du poignet, fit apparaître un savoureux plat qui rejoignit rapidement les assiettes et les couverts sur la table branlante. Le dîner se passa sans anicroches si ce n'est que la petite fille décida de jouer avec les petits pois. Son frère partit d'un grand rire et même sa mère dont le visage taciturne ne souriait plus que rarement depuis quelques temps parut se réjouir.
Tout s'empila joyeusement près de l'évier et la vaisselle commença à se faire toute seule, les brosses frottant vigoureusement les assiettes dans une envolée de bulles de savon transparentes. La jeune femme prit sa fille dans les bras et s'installa sur le lit au travers de l'épaisse couette. Le petit garçon se saisit de son livre et se mit à lire à voix haute une histoire de puissants sorciers, féroces dragons et gentils chevaliers.
« Alors William de Haux…xe ville détourna le ra…ra…euh… »
« Rayon, mon chéri. »
« Rayon de flammes… du … plat de … son épée… »
Esther Sparrow se laissa aller contre l'oreiller qu'elle roulait en boule entre les barreaux en laiton de son lit et peu à peu, son esprit s'embruma. Seul le faible rugissement du dragon dans l'illustration la tint encore éveillée. Son esprit était tout aussi fatigué que son corps et dans sa tête dansait en permanence les réminiscences sordides de ces longues atroces nuits où elle avait assisté à tant de choses sans pouvoir rien faire. Maintenant, c'était elle qu'ils traquaient telle une bête. Elle n'avait plus personnes pour la soutenir. Ou tout du moins, c'était ce qu'elle pensait. Car même ceux qui l'avaient lancé dans ce cauchemar avaient préféré l'oublier et tout nier. La femme finit par s'endormir sans avoir placé le sort qu'elle lançait chaque soir sur l'ensemble de la maison.
Au dehors, un éclair déchira le ciel et une lourde pluie se mit à tomber, inondant le petit jardin envahi d'herbes sauvages depuis le temps où il n'avait pas vu une tondeuse. Au dehors, une silhouette longea le mur de briques par endroits désemboîtées et sauta pour se retrouver de l'autre côté de la grille en fer forgé. L'homme s'accroupit dans la boue pour vérifier que rien ne l'attendait dans les ténèbres qui rodait aux alentours. Il poussa donc la porte de la maison, la baguette serrée dans son poing crispé au possible. Ses pas maladroits s'appuyaient avec une délicatesse accrue sur les marches grinçantes et il rejoignit enfin l'étage supérieur.
Pourtant, il aurait juré voir une autre silhouette passer devant lui. L'homme se tapit donc contre une porte, la respiration haletante, priant pour ne pas arriver trop tard. Avec détermination, alors que les autres l'avaient renié, abandonné et oublié pour ce qu'elle avait fait, lui venait lui porter secours. Sand Sparrow fit glisser un anneau d'argent à son doigt et aussitôt, il disparut dans la tapisserie fleurie. Son ombre longea le couloir et seul un œil habile aurait pu voir un léger scintillement dans l'air là où il se trouvait.
« Maman, s'il te plait… »
Esther se réveilla en sursaut et serra compulsivement le corps de sa fille contre sa poitrine. Elle agita la tête dans tous les sens pour découvrir Matthew qui était appuyé sur le rebord de la fenêtre. La pluie dégoulinait lentement sur le verre et le petit garçon essuyait avec une patience particulière la buée pour découvrir l'extérieur.
Esther se redressa et blottit Alysse sur son lit ; la petite eut vite fait de se relever et de suivre les pas de sa mère. Esther passa derrière son fils et regarda à son tour par la fenêtre.
« Tu sais, je viens juste d'apercevoir des étincelles, maman. »
« Des étincelles… »
Esther Sparrow blêmit et manqua bien de défaillir. Une peur panique l'envahit mais elle fut rapide à réagir. Sa baguette jaillit de sa manche et aussitôt elle plaça une barrière magique sur la porte. Rassemblant rapidement le nécessaire, elle manqua de déchirer sa cape bleu nuit du porte-manteau. A genoux, la jeune femme fit enfiler le petit manteau à sa fille et Matthew comprit rapidement qu'il ne fallait pas traîner, même si sa mère ne lui disait rien. Ses mains glissèrent dans ses gants et il suivit rapidement sa mère qui rabattit sa capuche élimée sur ses cheveux noirs qui chatouillaient son cou. Son pas se fit rapide sur la plancher.
Elle poussa un cri en voyant de la fumée verdâtre s'illuminer dans les hauteurs du ciel. Matthew sauta sur le rebord de la fenêtre et découvrit avec étonnement une étrange tête de mort dont la langue en forme de serpent s'agiter méchamment. Un bruit retentit en bas dans la demeure et elle eut brusquement peur en entendant monter le martèlement lourd des bottes. Son cœur fit un bond dans sa poitrine et elle enjamba le rebord de bois de la fenêtre. Matthew était passé devant elle et ils glissèrent sur le petit toit de la maison d'Angela Beckling. Esther saisit Alysse et après avoir descendu avec rapidité les tuiles glissantes, elle atterrit dans l'herbe froide et humide.
« Maman, les gens… Ils sont… »
« Oui, mon chéri, très méchant. Tu va maintenant me promettre de rester ici sans bouger. »
Le petit acquiesça et prit avec vigueur la main encore un peu potelée de sa petite sœur. Sa mère prit une grande aspiration et lança un jet de paillette vers les deux enfants. Puis elle releva la tête vers le mur et la fenêtre grande ouverte dont elle s'était enfuie. La jeune femme se mit à courir à grandes enjambées à travers les ajoncs et Matthew fit quelques pas en arrières pour aller se tapir dans un buisson. Il n'avait malheureusement pas de capuche et l'eau glacée dégoulinait dans son cou. Il frissonna à plusieurs reprises quand une voix l'interpella.
« Hé…petit »
Il leva ses yeux gris vers les nuages et vit une silhouette dressée sur le toit de la maison. Sa cape claquait au vent et de longs cheveux blonds volaient derrière lui. Il s'accroupit et sauta sur le parapet de pierre à plusieurs mètres du sol. Son pas se cala avec agilité sur les pierres mais à ce moment, Sand Sparrow apparut dans l'embrasure de la fenêtre. Il envoya un sort violent à l'homme qui chuta de plusieurs mètres au sol.
« Matthew, où est ta mère ? »
Le petit garçon resta sans bouger et ignora son oncle qu'il n'avait vu ou tout du moins dont il ne se souvenait pas. Ses yeux se portèrent sur le corps de l'homme allongé dans la terre noire. Il demanda à sa sœur de ne pas bouger et se faufila jusqu'au cadavre. L'homme était étendu sur le ventre, ses cheveux blonds étalés dans son dos, son uniforme tout déchiré et maculé de boue. Il tendit la main et à ce moment là, le bras de l'homme qu'il pensait mort le saisit à la cheville. Matthew poussa un cri de frayeur et regarda l'homme vêtu d'une cape verte qui l'avait interpellé un peu plus tôt sauter aussitôt sur le toit de la maisonnette de Miss Beckling.
Il frappa l'homme au visage mais celui-ci releva sa tête de la terre et Matthew resta alors sans bouger. Le visage de l'homme lui paraissait extrêmement familier. Il eut un frisson en se souvenant de cette petite photo que sa mère gardait blottie dans la petite valise de cuir entre les vêtements, sa baguette et les deux trois livres qu'elle lui avait donnés. Dessus, il y avait sa mère vêtue d'un uniforme noir identique à celui du jeune homme aux cheveux blonds qui la tenait dans ses bras. Et surtout, il reconnut ses yeux argentés qui le fixait avec désespoir. C'était ses propres yeux !
Il retomba dans l'herbe tandis que l'homme se redressait maladroitement. Apparemment, sa jambe lui faisait atrocement mal car il poussa un gémissement et s'appuya contre un tonneau dans lequel Miss Beckling conservait un tas d'objets rouillés.
Sand Sparrow sauta sur le dos de l'homme et lui décocha un crochet au menton. Alors que le blond vacillait sous le coup, le jeune homme se retourna et s'accroupit. Sand Sparrow saisit Matthew par les épaules et ses yeux verts lui ordonnèrent de retourner auprès de sa sœur. Le petit s'exécuta immédiatement et les deux enfants s'avancèrent avec curiosité vers le combat qui faisait rage devant eux.
« Ainsi, c'est toi qui es responsable de ça, cracha Sand Sparrow en dirigeant sa baguette vers la poitrine de son adversaire. »
« Moi, je pense plutôt que c'est toi qui l'as entraînée là-dedans ! Tu étais sur place pour faire ton rapport, non ? »
« Je n'aurai jamais vendu ma sœur aux mangemorts, si c'est ce que tu prétends. »
« Comme se fait-il alors qu'on l'ait vue en étranges accointances avec certaines personnes, si tu vois ce que je veux dire… »
« Ce que ma sœur a pu faire n'est pas le problème ! Dis plutôt que tu la traques toi aussi sur les ordres du gouvernement mais que tu es fou de rage qu'elle t'ait abandonné ! »
« Pour se rendre complice de telles racailles, c'est sûr ! Mais elle m'a aussi enlevé mon fils ! »
Le jeune Sparrow envoya un sort répulsif au blond qui fit une grimace mais para adroitement le jet d'étincelles bleues pour riposter avec un violent 'expelliarmus'. Sand trébucha et sa tête butta contre le mur. Un filet de sang glissa sur son front jusqu'à ses sourcils. Matthew regarda le jeune homme et le dévisagea avec attention. Son visage fin était presque encore celui d'un jeune adolescent et ses cheveux lustrés coiffés en catogan le faisaient ressembler au gentil chevalier de son livre, William de Hauxeville. Il frissonna en voyant l'homme blond se saisir de la baguette de son adversaire. L'homme blond le chercha du regard avant que ses yeux accrochant le massif de fleurs dans lequel lui et Alysse s'étaient blottis. Le bruit de sussions de ses bottes dans la boue le fit frissonner et il aurait alors souhaité être aussi courageux que William de Hauxeville ou que le jeune homme qui lui ressemblait tant, appuyé contre le mur.
« Tiens, tiens, nous ne sommes pas les premiers ! »
Une silhouette vêtue de noir apparut juste à la gauche de l'homme. Son visage était recouvert d'un masque sombre mais sa voix perçait à travers les ténèbres qui l'entouraient. Deux sorts fusèrent et l'homme blond se tordit de douleur en recevant en pleine poitrine un jet d'étincelles pourpres. Il serra les dents et son regard prit une étincelle de fureur.
« Le ministère vous envoie faire le même boulot que nous, apparemment ! C'est étrange ce que cette jeune femme peut être convoitée ! Comme quoi, jouer pour chaque bord est fort dangereux de nos jours. »
L'homme masqué éclata d'un rire sinistre et Matthew jeta un regard désespéré à sa sœur qui se mit à pleurer.
« Les agents du ministère vont arriver d'un instant à l'autre, murmura l'autre. »
« Et celui-là, qu'en avez vous fait ? »
Le mangemort donna un coup de pied dans le corps de Sand Sparrow qui remuait faiblement sur le sol.
« J'ai vu des mangemorts plus coriaces que lui. Sans doute une jeune recrue, cracha le blond. »
Sand Sparrow rampa lentement sur le sol et le mangemort, d'un coup dans les côtes, le força à se retourner, les yeux vers le ciel. La botte en cuir du mangemort s'écrasa sur la joue pâle du jeune homme.
« Je crois fort que vous faites erreur ! Une telle loque ne fait pas partie de nos rangs. Contrairement à sa chère… »
Sand avait agrippé avec fureur la jambe du mangemort qui manqua de perdre l'équilibre et ne put ainsi terminer sa phrase. A sa grande peur, Matthew vit deux autres silhouettes jaillir de derrière les buissons. Aussitôt, l'homme blond aux longs cheveux fit une pirouette sur lui-même et fit jaillir dans un crissement sourd une lourde lame d'argent. Il fonça sur le premier mangemort alors que Sand Sparrow roula sur lui-même. Des cris sourds retentirent alors de l'intérieur et à sa grande joie, le petit garçon vit sortir une silhouette sur laquelle pendait seulement un lambeau de cape bleue. En dessous, la personne portait une belle robe pourpre. La porte vitrée du petit vestibule vola en éclats et sa mère passa au travers. Son corps s'affala sur l'herbe et son fils se porta immédiatement à sa portée.
« Maman, est ce… tu vas bien ? »
« Oui… Ne t'inquiètes pas ! »
La jeune femme était essoufflée et elle se redressa maladroitement, sa baguette à la main. Sa main se blottit dans celle de son fils et elle courut vers sa fille qui se trouvait entre les deux groupes de belligérants. Un cri déchirant retentit dans la nuit quand un mangemort s'étala, son bras dévoré de flammes. Chacun se retourna vers elle et les visages tout autant anxieux qu'envieux se posèrent sur elle, accroupie auprès de ses deux enfants.
« Esther…, murmura l'homme aux cheveux blonds qui rabaissa son épée dont la lame dégouttait de sang. »
« Tu n'aurais pas dû… Esther… Certaines personnes aimeraient bien récupérer leurs biens… si tu vois de quoi je veux parler. »
« Grande sœur… »
Les trois voix se mélangeaient, la rappelant à son passé. Un homme vêtu de noir apparut derrière elle et manqua fort de l'entourer de ses bras. Cependant elle fut plus rapide et d'un coup de pied ample fit reculer son adversaire. Sa baguette lança un jet d'étincelles vers le mangemort qui se tenait à côté de l'homme à l'épée.
« Tu ne vaux vraiment pas mieux qu'eux, lança t'elle en pleurant. Tu n'as donc rien compris et tu les as crus, n'est ce pas ! »
« C'est toi qui ose me dire ça ! Toi qui… »
Tout à coup, une dizaine de silhouettes surgirent de sur le toit alors qu'une violente lumière illuminait le ciel. Les renforts du ministère étaient arrivés.
« Esther Sparrow, au nom du ministère de la magie britannique, vous êtes en état d'arrestation… »
Esther Sparrow serra sa fille dans ses bras et tendit un bras charitable à son fils avant de disparaître dans un foisonnement d'étincelles dorées.
Je me redressais, la sueur dégoulinant le long de son front. Le cri perçant que j'avais poussé venait de me réveiller. Car c'était bien le regard d'Ayn Hawthorne que j'avais reconnu dans cet abominable cauchemar. Ayn Hawthorne, l'homme à l'épée… Mon corps se souleva dans un soubresaut et je retombais dans ses draps, le visage maculé de larmes amères.
« Tu sais que Ashcroft est venu te voir plusieurs fois alors que tu étais à l'infirmerie ? »
« Le pauvre, tu aurais son visage… Il se sentait tellement coupable alors que tu n'as eu qu'un simple évanouissement ! »
« Très drôle, rétorquais-je. »
J'étais sortie ce matin de l'infirmerie après y avoir passé une journée à dormir et à faire ce cauchemar atroce où tout se mélangeait. Que faisais-je donc ainsi dans cet endroit que je ne pensais pas connaître, avec ma mère ? Et pourquoi bon sang tant de monde en voulait après ma mère ? Même le ministère paraissait la rechercher pour je ne sais quelle raison. Nathaniel me pinça la joue en riant.
« Allez, grand malade, le cours de runes nous appelle ! »
« Au fait, il faudra que tu remercies ton sauveur. Dis, je pourrais venir avec toi… »
Keith se planta devant moi et joignit ses mains pareilles à une prière et ses yeux s'agrandirent avec supplication. Je fis un drôle d'air et Nathaniel se mit à se moquer de sa jumelle.
« Dis dons… Je ne savais que tu avais des vues sur Ashcroft, Keith ! Moi qui pensais que tu détestais les copains de John… »
La remarque mit fin au calme qui régnait car les deux jumeaux plongèrent l'un sur l'autre. Je restais donc à les regarder en soupirant. Un groupe de Poufsouffle nous dépassa en secouant vainement la tête devant l'immanquable spectacle qu'offraient les deux Lanchaster.
« Tu veux que je parle à tout le monde des fameux mots que tu as envoyés à cette crétine de poufssoufle, cracha Keith apparemment furieuse. »
« Mais… Il n'a pas de petite amie, demandais-je. »
« Non et ça désespère la plupart des filles de Poudlard, rétorqua Flavy qui se tenait à mes côtés, les bras croisées sur sa poitrine. »
« Evidement, entre nous et les cinquième année, il y a quand même une différence. Tout du moins au niveau maturité… »
Un fin sourire passa sur ses lèvres et nous échangeâmes un regard plein de sous-entendus. C'était vrai que les deux mois passés avec mes cousins me paraissaient longs et je sentais assez souvent mon regard se diriger vers ceux de mon âge. Pourtant, je n'avais pas vraiment de moyens de m'intégrer avec eux. Mael Lanchaster était un jeune homme tout aussi timide qu'Alysse Cleland. Et je me rendais compte que dès que je voyais une certaine personne, mon corps se mettait à trembler et je sentais les frissons me parcourir.
Fallait-il me l'avouer, mon estomac se contractait violemment à l'idée de revoir Will Ashcroft, surtout depuis que j'avais eu le culot de m'évanouir dans ses bras. La situation était extrêmement troublante et dire que je ne me sentais déjà pas à l'aise avec lui lorsque John me l'avait présenté. C'était pourtant une bonne occasion de côtoyer de gens de mon âge et j'en étais venue à hésiter entre redouter avec une appréhension vaine les entraînements de Quidditch et mon premier match ou me laisser gagner par l'impatience.
C'est ce moment là que choisirent quelques-unes de nos meilleures connaissances pour venir nous rendre visite. Pour une fois que je n'avais rien demandé, cela me tomba sur le coin de la figure sans prêter gare. Depuis le patio du cloître, un groupe de jeunes gens vêtus de vert et argent manqua de nous dépasser mais l'un d'eux se retourna me dévisagea et fit signe aux autres de s'arrêter. Je reconnus Alister Etheridge, le grand blond de serpentard, un balai à la main. Il me désigna d'un vague geste de la main à un garçon presque deux fois plus haut que moi. L'autre acquiesça et se mit à marcher à grandes enjambées dans ma direction. Tous s'écartèrent prudemment sur son chemin. Je m'étais accroupie pour ramasser un livre qui était tombé de mon sac et quand je me relevais, j'eus la surprise de voir le jeune homme à trente centimètres de mon visage. Son regard parut m'observer avec une minutie toute particulière puis il fit un pas en arrière. Je remarquais qu'un extraordinaire calme s'était instauré dans le couloir pourtant relativement peuplé, ce qui n'était pas bon signe. Flavy s'était prudemment mise à l'écart, non par crainte mais je savais pertinemment qu'elle détestait se retrouver en conflit avec les camarades de sa maison. Mes deux cousins s'étaient redressés et Keith lâcha le col de la chemise de son frère qui détourna la tête vers nous.
« Alors, c'est ça, la nouvelle recrue ? »
Il se retourna vers le reste de l'équipe de Quidditch de Serpentard et explosa d'un rire qu'il ne dissimula même pas. Pour une fois, je réagis plus rapidement que les jumeaux qui étaient d'habitude toujours les premiers à rétorquer dès qu'on déclarait quelque chose contre leur personne ou moi-même.
« Oui, et alors… »
Ma voix prit un ton froid, je me sentais relativement agacée et l'arrogance du capitaine de Serpentard rompit le maigre barrage que je m'étais efforcée de dresser face à mes émotions qui depuis quelques temps semblaient réagir à fleur de peau.
Alister Etheridge m'offrit un étrange sourire qui barra furtivement son visage avant de reprendre le masque calme et inflexible que je lui connaissais.
« Je suis le nouveau poursuiveur de Gryffondor, Mael Lanchaster. »
Ce nom que j'avais tant de fois répété dans ma tête, murmuré entre mes dents en me demandant ce qu'il me forçait à traîner avec lui comme considérations toutes faites, ce nom qui m'avait fait renier qui j'étais réellement… Et bien, pour une fois, je décidais de défendre ce nom et de l'exposer fièrement.
« Lanchaster, comme ce crétin de Serdaigle…J'y crois pas ! »
« Je te conseille de ne pas faire de commentaires sur mon cousin. »
Keith et Nathaniel se mirent sur la défensive et je les vis avec connivence se placer chacun d'un côté de ma personne. Personne ne leur prêta attention.
« Doenitz, tu ne devrais pas faire ça… »
La voix froide et coupante de Flavy s'adressait à son aîné qu'elle dévisageait ouvertement sans que son visage ne trahisse un quelconque sentiment (pour ça, je l'admirais). Je vis le jeune homme la fixer et faire une grimace comme pour chasser une idée malvenue. Il se contenta de hausser les épaules à son adresse alors que les serpentards continuaient de fixer la jeune fille avec des mimiques teintées de respect. Les joueurs de Quidditch s'étaient rapprochés et Stanley Vebel eut un sourire mauvais.
« Ce mec là, il ne sait rien d'autre que faire des menaces en l'air… »
Sa cicatrice s'accentua et son regard torve m'effleura lentement avec un plaisir que je sentais irradier de lui. Le capitaine haussa les épaules et parut ne pas prêter attention à ses autres camarades. Il remit cependant rapidement le troisième année à sa place et ce fut la seule chose qu'il fit qui me fit vraiment plaisir. L'emphase qu'il s'exécuta sur le 'je' me fit toutefois comprendre que je ne m'adressais pas à n'importe qui et marqua définitivement son autorité sur les joueurs dont le brouhaha se tut rapidement.
« Vebel, je cause avec lui. Alors, boucle-là si tu ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose. »
L'autre déglutit mais un sixième année répondit au capitaine d'un geste d'humour.
« Allez, Ellas, laisse-le, s'exclama le garçon dont le devant de sa cape était maculé de boue. De toutes façons, tu vas n'en faire qu'une bouché… »
L'étudiant en face de moi était même plus grand que John et remarquant sa carrure saillant sous son uniforme de sport, je me demandais si je n'étais pas un peu trop présomptueuse. Il appuya ses mains bardées de cuir par ses gants sur ses hanches et me dévisagea.
« Ca se pourrait bien…
Sa position avait pour but de me ridiculiser et je le repoussais d'un geste de la paume relativement vigoureux. Je vis un éclair d'incompréhension passer dans son regard et il haussa les sourcils d'un air étonné.
« Tu tiens vraiment à jouer à ça avec moi ! »
Sa poigne se tendit et enserra le col de ma cape. Je sentis mes jambes quitter le sol et ma tête bascula en arrière. Il me secoua brutalement et d'un geste difficile, ma main glissa vers la poche de mon pantalon et effleura le bois de ma baguette.
« Regardez donc comme il gigote ! On dirait presque une fillette ! »
Mon visage devenait un peu plus cramoisi, je le sentais au sang remontant dans mes joues. Je suffoquais pendant un instant et me concentrais à nouveau pour atteindre ma baguette. J'y parvins au moment où la voix aiguë d'une fille retentit dans le dos du jeune homme.
« Dis donc, Doenitz, je peux savoir ce que tu fais ? »
Le dénommé Ellas Doenitz fit un pas de côté et en tournant avec douleur la tête, je vis une jeune fille vêtue de l'uniforme de Serpentard avec le badge de préfet attachée à l'aide d'une épingle sur son pull gris. Elle fit une moue désapprobatrice en me découvrant et je crus que j'étais enfin sauvée.
« Encore un gryffondor ! Tu ne peux pas t'en prendre à des serdaigles ou des poufsouffles ? J'en ai marre de recevoir les récriminations permanentes de McGonnagal sur ton cas. »
Je choisis donc mon moment pour donner un violent coup de pied dans le ventre de mon adversaire qui se plia en deux mais ne me lâcha pas. Mes pieds retrouvèrent avec dureté le sol et je reprenais avec peine mon équilibre qu'il fit une grimace après avoir lancé une grossièreté. Je me retrouvais plaquée contre le mur et ma nuque craqua.
Dans la panique en voyant le poing replié de Doenitz se dresser pour s'abattre sur mon visage, j'eus un sursaut et un jet d'étincelles jaillit de ma baguette alors que je murmurais les quelques mots d'une formule que j'avais revue la veille.
Je ne sus jamais si le sortilège d'entrave fut efficace (je le pense tout de même car le serpentard me relâcha et je me laissais glisser contre le mur) car une main telle une serre de rapace s'abattit sur l'épaule de Ellas Doenitz qui se retourna pour recevoir au visage un magnifique crochet du gauche qu'Ayn Hawthorne lui administra. Il relaissa tomber le jeune homme au sol qui se tordit de douleur et j'effleurais l'esprit de mon professeur pour découvrir la rage et la haine qui emplissaient son aura magique. Il crispa ses poings et mes cousins firent une mine discrète de ranger leurs baguettes. Il se retourna alors lentement vers eux et son ton fut tel que celui qu'il nous offrait en cours : austère, glaçant et rageur.
« Ne rangez pas vos baguettes, Lanchaster. Vous allez pouvoir me suivre dans mon bureau ainsi que votre cher cousin. »
Pendant ce temps là, Flavy s'était accroupie à côté de moi et m'aida à me relever alors que Ellas Doenitz replaçait ses cheveux en arrière d'un geste hautain. Il s'arrêta quelques instants sur la silhouette du professeur puis avisant sa baguette, il reporta son regard assombri vers moi.
« Je te promets que certains entendront parler de toi, Lanchaster ! »
« Doenitz, vous passerez tout à l'heure dans mon bureau. »
Le capitaine détourna le dos au petit groupe et repartit entouré par son équipe lui ouvrant un passage à travers la foule. Je glissais ma main dans ma nuque et soupirais en sentant la petite marque sous mes doigts. Flavy me dévisagea avec étonnement mais je lui offris un grand sourire pour lui assurer que tout aller bien.
« Vous aussi, Oswald. Vous pouvez suivre le petit groupe. »
La jeune fille lança un regard sombre que je ne lui connaissais pas au professeur et la moue furieuse que garda son visage ne fit que s'alterner avec des coups d'œil furtifs vers ma personne, ce qui n'eut pas effet de me rassurer. En effet, je me doutais que Flavy Oswald était bien plus perspicace et déterminée que son allure secrète, calme et paisible le laissait croire.
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Mes doigts s'étaient engourdis depuis les trois longues heures qu'ils avaient courageusement passées, cramponnés à un chiffon bouloché à frotter avec vigueur les vitres. Flavy était agenouillée à quelques mètres de moi et je la vis jeter le torchon sur son épaule avant de passer à la vitrine suivante.
« Je te jure que si je continue encore une minute de plus devant ses récompenses, je lance une malédiction à tous les maudits élèves qui ont reçu ces décorations. »
« Tu es vraiment capable de lancer une malédiction, lui demandais-je, profitant d'une des rares fois où elle m'avait adressée la parole depuis le début de notre punition. »
Hawthorne avait décidé de nous laisser la passionnante tâche d'essuyer les vitrines de la salle des trophées tandis qu'il surveillait mes deux cousins avec une ardeur toute particulière dans son bureau. On pouvait tout à fait comprendre qu'il ait craint de voir les deux Lanchaster sans surveillance faire virer la punition à la rigolade. Il nous avait donc confié moi et la jeune fille au bon soin du concierge qui avait passé dix bonnes minutes à râler sur le bon temps où les punitions étaient d'être accroché par les pieds dans les cachots. Il nous laissa finalement devant la grande porte de bois ouvragée avec pour seule compagnie, deux seaux et chiffons d'une couleur indéterminée.
Mes fesses glissèrent au sol et je m'asseyais un peu plus confortablement en laissant mon dos pencher en arrière. Une grande baie vitrée composée de vitraux incolores laissait transparaître la lueur laiteuse de la lune qui noyait le sol de sa lumière irisée. Je soupirai profondément.
« Bien sûr que j'en suis capable, déclara t'elle en haussant les épaules. Mais je ne me risquerais toutefois pas à la faire. Une erreur est si vite arrivée. »
Je repris mon travail et mouillais un peu le chiffon qui laissa alors une traînée baveuse sur la vitre. J'observais avec une attention négligente les petites plaques de bronze doré gravées de noms ou les coupes scintillantes dans la pénombre que la lanterne posée près de moi offrait aux reflets flamboyants de la vitre. Je scrutais un peu plus un écusson de cuivre et vit apparaître à mon grand étonnement un nom que je connaissais bien. Ainsi, Ayn Hawthorne avait été élève à Gryffondor et avait reçu en 1969 une récompense. Je décidais de ne pas repenser à mon professeur pour vainement tenter de refouler les souvenirs de cette nuit passée en sa compagnie au stade de Quidditch, qui s'était avérée plus que houleuse.
« Dis, est-ce que je peux te poser une question indiscrète, Flavy ? »
Elle pencha la tête et son regard perçant se concentra sur mes traits. Je la vis hésiter et reportais donc mon attention à mon travail car je ne tenais pas à passer la nuit ici. Quelque chose fit basculer l'avis soucieux et indécis de la jeune fille en un hochement de tête.
« Et bien, je comprends que les autres serpentard te rejettent du fait que tu es toujours avec des gens d'autres maisons mais comment se fait-il qu'ils affichent toujours un certain respect envers toi ? Ce matin, c'est comme si Doenitz n'avait pas osé te répondre et les autres te fixaient étrangement. »
« Disons que Doenitz a de quoi faire peur à la plupart des gens étant données les relations qu'il a avec certaines personnes. »
Un silence s'installa avant qu'elle ne reprenne de la même voix neutre avec laquelle elle avait commencé.
« C'est un ardant défenseur de certaines idées et il ne se cache pas de fréquenter des mangemorts. Il paraît même qu'il chercherait à motiver certains élèves… Mais il ne s'adressera pas à moi… à cause de mon nom. Tout comme les autres me respectent à cause de ça ! »
Mes yeux retombèrent à nouveau sur l'écusson au nom d'Hawthorne. Je fis un rapide calcul dans ma tête et me rendis compte qu'il appartenait à la même promotion que ma mère. J'avais passé l'après-midi en cours à repenser à ce cauchemar qui m'avait hantée pendant les heures suivantes où je m'étais réveillée en sueur. J'étais persuadée qu'il ne s'agissait pas d'un simple rêve et que j'avais vécu tout ce que j'avais vu, même si étrangement, je n'en avais aucun souvenir. A bien y réfléchir, je n'avais aucun souvenir précis de ma petite enfance, ce qui ne m'avait jusqu'à ce matin que peu étonnée.
Cela devait être de famille car mon frère avait toujours été incapable de me raconter les années avant ses sept ans. C'est alors que je revis les images qui s'étaient gravées dans mon esprit avec une force indélébile pleine de hargne habile au travers des lambeaux de ma mémoire : Mon frère qui fixait ses yeux brumeux qui ressemblaient tant aux siens et les mots désespérés de l'homme aux cheveux blonds qui n'étaient autre qu'Ayn Hawthorne, ses mots hachés avec amertume face à ce que ma mère lui avait fait. Elle lui avait repris son fils.
« Mais sincèrement, je doute que tu tiennes réellement à en savoir plus, je t'assure. Je décline ma réponse et en échange, je ne te poserai pas la question que j'ai sur les bouts des lèvres. »
Il y eut un silence lancinant et je me retournais maladroitement en plaquant une main sur le sol. Je déglutis bruyamment en me rendant compte où me menaient mes réflexions. Mon estomac se souleva et mon univers s'écroula une nouvelle fois devant la révélation que je venais de comprendre. Ma vie avait donc toujours été un mensonge que ma mère avait soigneusement voilé d'esbroufes et d'artifices, entretenu avec une attention toute particulière pour nous détourner mon frère et moi avec nos questions embrassantes que posent tous les enfants à l'âge où ils se questionnent sur qui ils sont vraiment.
Je mordis ma lèvre inférieure et le goût salé et métallique du sang perla avec dégoût et empressement sur ma langue. Mark Cleland était-il le père que j'avais toujours cru qu'il était, avait-il serré dans ses bras ses enfants à la maternité ou avait-il seulement accepté de voir entrer dans sa vie cette femme qu'était ma mère, accompagnée de ses deux enfants ? Ou bien son père était-il cet homme blond au regard désespéré et flamboyant de défiance vers la mère de ses enfants qu'il avait osé traquer tel une proie, sans répit comme ses assassins ?
« Qui es-tu, Mael Lanchaster ? »
Mes doigts foulèrent le tissu râpeux contre la vitre un peu plus fort et un frisson glacé parcourut mon dos aux muscles contractés. J'imaginais les yeux de la jeune fille braqués sur moi et je me refusais à tourner la tête. Car je me posais la même question au fond de moi.
fin du chapitre 8
