Il y a des jours où après une éternité passée sous ce ciel couvert de bas nuages gris, un petit rayon de soleil apparaît, signe d'une amélioration, avant d'être désagréablement gâché par une lourde pluie. C'est ce qui attend Alysse…
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Titre : L'enfant de la brume.
Auteur : Elizabeth.
Spoilers : les QUATRE premiers tomes seulement.
Disclamer : Tout ce que vous allez lire ne m'appartient pas (sauf peut-être l'histoire, ce qui n'est que peu de choses). Ayant décidé d'écrire sur le monde d'Harry Potter, je tiens à préciser qu'il appartient à l'écrivain J.K Rowlling. Je ne touche donc aucun droit d'auteur et le travail que je fournis n'est pas dans un but lucratif.
Avertissement : PG-13 (pour les idées développées dans l'histoire, les scènes de violences et autres).
Résumé du chapitre précédent : Je ne sais pas pourquoi mais j'ai l'impression que quelqu'un complote dans mon dos. Mon premier matche de Quidditch a eu lieu, contre Serdaigle, et j'ai magnifiquement perdu le contrôle de mon balai avant de chuter à terre. Neil Ringler, qui semble bien apprécier le spectacle, regrette fortement de s'être moqué de moi car je n'hésite pas et lui saute à la gorge dans une gerbe de sang. Le réveil à l'infirmerie est douloureux malgré la sympathique compagnie que m'offrent mes cousins. Toutefois, Scott Sullivan vient discrètement me voir et m'avoue avoir découvert les raisons de mon accident : quelqu'un a saboté mon balai ! Si lui sent qu'il y a hippogriffe sous roche et que je lui mens, Flavy réussit à me faire avouer la vérité. Je lui révèle donc toute l'histoire et elle se décide à m'aider en me proposant d'aller tout d'abord explorer les appartements d'Ayn Hawthorne.
Rappel des personnages évoqués dans ce chapitre :
Cleland
Mark : Mon père mort assassiné par d'étranges
hommes vêtus de noir qui ont détruit notre maison.
Sparrow Esther : Ma mère que je croyais
connaître. Son nom de jeune fille est Sparrow et c'était
une sorcière qui a décidé de fuir sa famille et
son passé attaché au monde de la magie. Elle est morte
assassinée sous mes yeux.
Cleland Matthew :
Mon grand frère qui est mort lors de l'attaque de notre
maison.
Lanchaster Eliza: La sœur de ma mère
qui a accepté de me recueillir.
Hawthorne Ayn: Cet
homme est devenu mon protecteur en se liant avec moi par la magie. Il
est ma flamme et semble étrangement au courant du passé
de ma mère.
Sparrow Sand : Le frère
cadet de ma mère. On l'a accusé d'être un
mangemort et d'avoir entraîné ma mère
là-dedans, ce qu'il réfute avec vigueur. Lui sait
qu'elle n'est pas coupable de ce dont on l'accuse et m'a mis
en garde contre un homme blond qui, pour moi, ne peut être
personne d'autre qu'Hawthorne. On l'a fait disparaître
des archives familiales et je crois bien que le ministère ne
serait pas mécontent de lui mettre la main dessus.
Norvig Hugo : Capitaine de Gryffondor.
Welch Nersei : Pousuiveuse de Gryffondor et élève de troisième année. Petite peste, elle ignore royalement tout le monde et ne laisse pas Scott indifférent.
Lanchaster
Keith et Nathaniel: Mes cousins. Ce sont deux jumeaux
particulièrement doués pour les farces de mauvais goût
mais ils sont sympathiques. Ils sont en troisième année
à Gryffondor.
Cooper Chass : Serdaigle de
troisième année. Toujours le nez dans un bouquin, il
remet les pieds sur terre du petit groupe et donne des conseils fort
avisés que je ferais mieux de suivre.
Sullivan Scott: Gryffondor de troisième année. Ami de mes cousins, c'est un timide souvent gêné.
Stern Denis : Un camarade que nous croisons de temps en temps. Grand passionné de Quidditch, il joue pour poufsouffle. Plutôt bon vivant, il n'est jamais à court de blagues.
Lanchaster
John: L'aîné des enfants Lanchaster en cinquième
année à Serdaigle. Gentil mais un peu suffisant.
Tallow Edward : C'est le préfet de
Serdaigle, paraît-il. Il traîne toujours dans la petite
bande de John et semble très arrogant et distant.
Ashcroft Will : Et bien… C'est un bon ami de John qui joue comme poursuiveur à Serdaigle. Très gentil avec moi mais pourquoi ai-je toujours face à lui un sentiment de malaise qui n'a pourtant rien à voir avec ma situation ? A moins que ce ne soit parce qu'il est un garçon et moi… une fille !
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Chapitre 11 : BOULE DE NEIGE.
« Tu crois vraiment que c'est une bonne idée, murmurais-je dans un souffle quasi inaudible. »
Flavy ne me répondit pas et ses doigts effleurèrent avec minutie la serrure en argent qui se trouvait devant nous. Nous nous étions faufilées en catimini jusqu'au quatrième étage et avions passés dix bonnes minutes camouflées dans un sombre recoin du couloir, espérant pour ma part ne pas découvrir la silhouette de mon protecteur. Le souffle glacé des courants d'air léchait avec une désagréable manie mes épaules et soulevait les cheveux de mon cou. Mes mains se faufilèrent rapidement pour plaquer les mèches contre la petite marque que je sentis sous mes doigts.
La jeune fille m'avait entraînée dans cette angoissante chasse au trésor et à mon grand étonnement, elle semblait parfaitement savoir où aller et quoi faire. Pour ma part, je serais très certainement restée à errer de couloirs en couloirs, admirant les tapisseries et les tableaux enchantés sans jamais prêter attention à ce passage.
Alors que je continuais à réfléchir, un sourd grincement retentit et la lourde porte de chêne gravé de scènes pastorales s'ouvrit, inondant d'un rai de lumière aveugle l'obscurité moite du couloir. Une fois faufilées à l'intérieur, je poussais un profond soupir et observais avec attention les objets de la pièce. La chambre était simplement aménagée et rien ne semblait traîner, comme si un simple voyageur avait posé ses bagages sans prendre la peine de s'y installer. Une grande fenêtre donnait sur un balcon aux pierres recouvertes de mousses et nous offrait une luminosité appréciable bien que le triste ciel d'hiver ait envahi depuis quelques semaines déjà l'Ecosse et ses Highlands.
« C'est étonnant, lança Flavy en laissant sa main glisser sur le dessus ciré d'un écritoire. »
« Quoi donc, demandais-je candidement. »
« On a l'impression que personne ne vit vraiment dans cette pièce… Tout semble nu et dépourvu de personnalité… »
Un large cadre doré était suspendu au-dessus de la cheminée et sa toile vide me rassura. Son occupant étant pour l'instant absent, cela nous accordait une dizaine de minutes pour trouver ce que nous cherchions. Mais après tout, que cherchions-nous vraiment ? La serpentard m'avait entraînée presque sans réfléchir dans cette excursion improvisée et maintenant que mes pieds foulaient l'épais tapis de cachemire, je me demandais pourquoi j'étais venue.
« On aurait peut-être eu plus de chance dans son bureau, répondis-je en replaçant une lourde cape de voyage jeté négligemment sur le dossier d'un fauteuil ancien. »
« Pas sûr… De toutes façons, si c'est aussi dépourvu qu'ici… »
« Et bien, ajoutais-je en m'avançant un peu rapidement, son bureau ressemble plutôt à un sacré capharnaüm. »
« Je vois que tu l'as déjà visité ! »
Je hochais la tête en me rappelant les mauvais souvenirs de cette soirée là. Le visage inquiet de Will me revint en mémoire et je me demandais comment j'allais pouvoir encore lui échapper. Car depuis cette ridicule entrevue, je m'étais bien arrangée pour disparaître de la vue d'autrui, autant que me le permettait mes idées saugrenues prétextant une urgente visite à la bibliothèque. De plus, les remarques acides de certains élèves au vu de ma prestation de Quidditch m'invitaient fort à préférer les hauteurs gelées des tours de Poudlard que la chaleur de la grande salle.
Je finis par m'asseoir sur le lit qui s'affaissa doucement sous mon poids. Basculant mon corps en arrière, je croisais les mains sous ma nuque et mon regard se perdit dans les moulures de plâtre du plafond. La torpeur m'aurait rapidement gagné si Flavy n'était passée à côté de moi, me fustigeant au passage d'une claque sur la jambe.
« Lève-toi ! On ne va pas rester indéfiniment là ! »
« Si tu as peur qu'il revienne à l'improviste, je te rassure tout de suite ! Il est encore assez loin… »
Mes yeux se voilèrent et mon esprit partit en tâtonnant vers celui d'Ayn Hawthorne par des chemins détournés, de peur d'être pris en flagrant délit d'espionnage. Si depuis la catastrophe du match de Quidditch Hawthorne ne m'avait pas contactée, j'avais fini par passer la plupart de mes cours à laisser mon esprit vagabonder. L'habitude m'avait enseigné la prudence et si au début, je craignais qu'à chaque plongeon que j'effectuais, d'entendre cette voix sourde me réprimander, il n'en fut cependant rien. Soit Hawthorne s'était totalement détourné de moi et n'en avait que faire, soit il cachait bien son jeu.
« A mon avis, on ferait mieux d'abandonner. Je ne vois pas ce que tu espères trouver ici. Tout semble si rangé… »
« Justement ! C'est bien trop rangé à mon goût. Il y forcément quelque chose quelque part ! »
Debout à ses côtés, je vis sa baguette poindre de sa main pour effleurer les plis d'un rideau au bleu marine un peu passé.
« Ecoute, Alysse… J'ai réfléchi à tout ce que tu m'as dit et il me semble étrange qu'Hawthorne ait agi juste par bon sentiment et culpabilité. »
Au fond de moi, ses mots me blessèrent. J'avais toujours espéré trouver une consolation, ne pas être la seule à pleurer sur ma famille en vain et partager cette douleur prenante qui me taraudait en permanence et sans répits. L'homme blond qui m'était apparu, le regard songeur avec cette bouche si triste, comme s'il avait perdu une partie de son âme… Sans l'accepter, j'espérais encore qu'il puisse me comprendre et m'aider. Ce qui était un vain espoir.
Je m'agenouillais par terre et contemplais avec lassitude les veinures du bois qui composait la commode. Tout à coup, quelque chose attira mon regard blasé. L'excitation me gagna et avec précipitation, mes doigts glissèrent sur la poigné en cuivre. Au-dessous était gravée une minuscule rune.
« Hé, Flavy…je crois que j'ai trouvé quelque chose ! »
La jeune fille se pencha à mes côtés, appuyant un genou à terre et ses yeux se plissèrent pour se transformer en deux minces fentes à l'implacable éclat vert. Je l'entendis murmurer quelques mots mais sans succès. Un 'alohomora' n'y fit rien non plus. Je poussais un soupir et m'accroupis par terre. Mes derniers espoirs s'envolaient. Si notre professeur avait pris tant de soin à rendre inaccessible ce tiroir, c'était que son contenu devait être sacrément intéressant… ou compromettant.
« Si on ne peut pas l'ouvrir, on peut peut-être simplement essayer de voir ce qu'il contient, non ? »
« Mouais, et tu penses à quoi ? »
La moue de la jeune fille ne m'invitait pas à continuer sur cette voix là mais je lui proposais d'utiliser un sort de transparence. Elle haussa les épaules puis finit par s'exécuter. L'opacité du bois disparut peu à peu et nous découvrîmes dans l'obscurité du tiroir quelques livres poussiéreux, un tissu duveteux adroitement plié et enfin un objet de petite dimension. Malgré sa forme ronde, ce fut un reflet chatoyant qui m'intrigua et je me penchais en avant pour découvrir une paire d'yeux qui me dévoraient avec avidité.
Le cri que je poussais fit lâcher sa baguette à Flavy et nous nous retrouvâmes vautrées sur le tapis. La serpentard poussa un grognement peu élégant et se redressa sveltement en arrangeant sa tenue. Je me redressais péniblement et réarrangeais l'agencement du tapis de la pointe de ma chaussure.
« Qu'est ce que c'était ? »
Je décrivis à Flavy la paire d'yeux écarquillés et impatients de me sauter dessus ainsi que l'objet aux reflets chatoyants qui avait happé mon regard. C'est alors que je la vis découvrir ses dents blanches et éclatais d'un franc rire. Je restais bouche bée de surprise : depuis mes quelques mois passés à Poudlard, je n'avais jamais eu l'occasion de voir la jeune fille ne serait-ce qu'esquisser un timide sourire, et encore rire de si bon cœur.
« Filons d'ici ! Je ne pense pas qu'on découvre grand chose d'autre… Et puis les autres nous attendent pour le repas ! »
Dans les escaliers en colimaçon, j'accablai de questions ma camarade pour en savoir plus. Elle se retourna et finit par m'avouer le fin mot de l'histoire.
« Ces yeux qui t'épiaient avec avidité n'étaient autre que les tiens, Alysse. »
« Comment ça, m'exclamai-je sans rien comprendre. »
« Cet objet est un miroir, tout simplement ! »
« Un miroir ! Mais pourquoi enfermer avec tant d'acharnement un miroir ? »
« Tu luttes pour le droit d'expression des miroirs maintenant, me demanda la jeune fille. »
Je haussais les épaules et ma bouche se tordit désagréablement en écoutant les moqueries de Flavy.
« N'importe quoi ! Comme si un miroir pouvait parler… »
« Mais je suis sûre et certaine que celui-là aurait eu pleins de choses à nous raconter, susurra Flavy en arrangeant ses soyeux cheveux qui glissaient sur son visage pâle. Enfin, pas vraiment le miroir lui-même mais la personne qui possède l'autre exemplaire… »
« L'autre exemplaire… je ne te suis plus, là ! »
« C'est pourtant fort simple ! Il n'y a pas de doute que ce miroir sert à Hawthorne à communiquer avec l'extérieur. »
« Mais ça, il peut le faire par la poudre de cheminette, non ? »
« En effet, sauf s'il tient à garder sa discrétion. Tous les réseaux de poudre de cheminette sont sévèrement surveillés. »
Nous traversâmes le grand hall et plongeâmes dans le bruyant effluve d'élèves vêtus de noir qui allaient déjeuner.
« Mael, je crois bien qu'il travaille toujours pour… »
« Le ministère ? »
Flavy acquiesça de la tête et s'empressa d'ajouter quelques mots avant de devoir rejoindre la table des serpentards qui se trouvaient à l'opposé de la grande salle.
« Tu sais, on ne change jamais vraiment sa baguette de main… Si tu vois ce que je veux dire ! »
A table, Nathaniel m'attendait avec impatience pour me raconter ses exploits de la matinée et je vis que la préfète lui lançait un regard lourd de soupçons en voyant le plat de viande léviter en l'air. L'atmosphère était à la bonne humeur étant donné que les derniers cours avaient eu lieu ce matin pour certains et que nous étions enfin en vacances. Noël approchait à grands pas et la plupart des élèves étaient impatients de profiter de l'après-midi à Pré-au-lard.
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Je goûtais avec une appréhension grandissante la sortie à Pré-au-lard. Toutes les hautes silhouettes drapées dans de longues et sombres capes attiraient irrémédiablement mon regard et je m'attendais à tout moment à voir l'une d'elles me faire signe à l'abri dans une ruelle peu passante. L'entrevue que je devais avoir avec Sand Sparrow m'angoissait plus que tout. Keith était pendu à mon bras et papotait à haute voix, lançant des commentaires sur tous ce qu'elle admirait dans les vitrines. Flavy avait disparu en compagnie de Chass Cooper dans une librairie bondée de sorciers et j'avais finalement accepté avec soulagement cette promenade dans les rues du petit village. De gros flocons de neige commençaient à tournoyer dans le ciel et mangeaient peu à peu toutes couleurs. Les toits d'ardoise se couvraient avec lenteur d'un épais manteau duveteux et immaculé. A ma grande surprise, de nombreuses personnes arpentaient les rues mal pavées et échangeaient quelques mots poliment, les hommes ôtant avec cérémonie leur chapeau au passage des dames. Keith se mit à glousser en voyant une jeune fille vêtue aux couleurs de Serdaigle sortir de la boutique de friandise, une paire de cache-oreille poilu et bleu cloué que la tête.
« Ridicule, pouffa t'elle en masquant son rire dans mon épaule. »
« Pas plus que cette jolie robe que ta mère t'a envoyée pour le bal, lui répondis-je du tac au tac. »
Pourtant, en reportant un regard un peu plus attentif à la jeune fille, je reconnus qu'il y avait vraiment de quoi rire. Mais ma gaieté m'abandonna en voyant John sortir à la suite de la jeune fille, les bras chargés de paquets. A leur suite, vinrent Edward Tallow (toujours avec ce nez plissé de dédain qui marquait parfaitement sa suffisance) et Will Ashcroft. Keith commençait à lever le bras en l'air pour attirer l'attention de son frère et du petit groupe mais je fus assez rapide pour l'entraîner en arrière, tous deux cachées par la haute devanture d'une boutique de potions.
« Ca va pas, Mael ? Pourquoi tu as fait ça ? »
Je restais sans bouger, le souffle court, admirant le visage aux joues rougies par le froid de ma cousine. Son regard brun d'habitude si pétillant se noyait dans une vaine interrogation et une fossette entama sa joue.
« Non… ne me dis pas que… Alors, c'est vrai cette ridicule histoire avec Ashcroft ? »
« Quelle histoire, déclarai-je en me redressant et fourrant mes mains dans les poches de ma cape. »
« Celle qui raconte que toi et Ashcroft… »
« Quoi moi et Ashcroft ? »
Mon ton un peu rude fit déraper ma voix et Keith fit un petit pas en arrière pour m'observer, la tête penchée sur le côté. Je regrettai aussi tôt de m'être emportée : après tout, je ne pouvais rien y faire si des bruits courraient sur ma personne. Mais attirer ainsi l'attention de tant de personnes m'était désagréable !
« Excuse-moi, Keith… Je n'aurais pas du… »
« Non, ce n'est pas grave. Tu as le droit d'avoir tes raisons. »
« Sincèrement, je voudrais pouvoir t'expliquer tout cela ! C'est tellement ridicule comme histoire… »
« Pas plus que ce ravissant cache-oreille de la petite copine de John ! »
Keith perdit aussitôt le sérieux qui avait figé ses traits quelques minutes auparavant et je lui offris un grand sourire pour me faire pardonner. Une boule de neige vint la frapper à l'arrière de la tête et elle se retourna rapidement pour découvrir celui qui avait osé s'attaquer à elle. Nathaniel victorieux fit une superbe grimace puis alla lâchement se cacher derrière la silhouette tremblotante de Scott Sullivan qui reçut la violente contre-attaque de ma cousine dans la figure. Dégageant ses cheveux couverts de neige, il alla se mettre à l'abri derrière un réverbère et eut la malchance de se faire prendre en embuscade par la large silhouette de Denis Stern. Poussant un cri retentissant, il vint en courant dans ma direction et me supplia de prendre son parti. Je m'abaissais donc pour prendre une poignée de neige fluide et légère et la tassais dans le creux de mes gants avant d'en administrer le résultat au poufsouffle.
« Prendre garde à toi, Lanchaster ! »
Chacun de nous trois se retourna et Keith en profita pour se jeter furieusement et sournoisement sur son jumeau. Une fois plaqué à terre, elle se fit une joie maligne de fourrer de la neige fraîche dans son col. Les récriminations de Nathaniel perçaient dans le brouhaha de la rue mais ne parvinrent par à couvrir le cri de frayeur que poussa Scott Sullivan qui s'accrocha à mon bras et me fit basculer en arrière. La neige avait amorti ma chute et je me redressais avec maladresse quand Chass Cooper apparut à mes côtés et me tendit une main secourable. Je le remerciais et époussetais ma cape rendue humide par la neige. C'était Flavy qui nous avait sournoisement attaqués et elle s'apprêtait à lancer une nouvelle boule de neige vers ma cousine quand quelque chose attira mon regard. Une silhouette vêtue d'une lourde cape noire leva un bras et me fit un signe. Je m'éloignai en arrière en prétextant chercher mes gants que j'avais dû perdre dans la chute et profitais de l'inattention générale pour enjamber les masses de neige qui ralentissaient ma course effrénée et irrégulière. Un grand nuage de vapeur jaillit de ma bouche alors que j'appuyai mon bras contre un poteau indicateur. La personne avait disparu. Je pestai. Pourquoi donc Sand avait-il ainsi disparu tel un souffle d'air glacé, me laissant toujours essoufflée, le cœur palpitant en me demandant quand la haute silhouette allait jaillir d'un carrefour isolé et solitaire ? Le croassement sinistre d'un corbeau attira mon attention et je levai les yeux vers ce bas ciel d'argent hanté de lourds nuages de plomb.
« Mael… »
Le chuchotement s'échappa tel un souffle des lèvres de l'homme et je me redressai très roidement pour l'observer avec minutie. Une cape verte sombre mitée par le temps couvrait les épaules de Sand Sparrow alors qu'une besace en cuir usagé pendait à sa taille.
« Sand ! Voilà enfin ! Je ne savais pas quand… »
« Chut, je n'ai que peu de temps devant moi ! »
D'un geste malhabile, il dégagea la sangle de son sac des plis de sa cape et en extraie avec délicatesse quelque chose emballée dans un tissu pourpre. L'objet devait être absolument précieux car il me le tendit d'un geste lent alors que son regard s'agitait dans mon dos. Le velours était fin mais glissait sous mes doigts et pour ne pas faire tomber l'objet, je le maintins quelques instants contre ma poitrine avant de le glisser dans ma veste, niché sur mon abdomen.
Tout à coup, le regard de mon oncle brilla intensément et un cri déchira l'air. La voix me fit frémir lorsque je découvris la silhouette souple et svelte de Will apparaître à quelques mètres de nous. Sa bouche voulut articuler puis ses yeux virevoltèrent entre moi et Sand, remarquant avec fort étonnement que l'homme tenait mes paumes serrées dans ses mains.
« Mael… Qu'est ce que… »
Son regard vert nous observa avec minutie et je le vis détailler le visage de mon oncle qui fit un pas en arrière et commençait à remonter son capuchon pour voiler son faciès quand le jeune serdaigle se porta à sa hauteur.
« Vous … Mael, recule-toi ! Cet homme est dangereux ! Il est recherché par le ministère. »
Puis il y eut un grand fracas derrière nous et un lourd nuage de poussière de neige vint gifler nos visages. Je fléchis les jambes et tentais de voir au travers de mes gants ce qui se passait. Quelques passants qui venaient de s'engager dans la rue paraissaient pris de panique et criaient en tout sens. Je me retournai souplement pour découvrir une dizaine de personnes aux silhouettes longilignes, vêtues de ces lourdes capes noires flottant dans la tempête qu'ils avaient déclenchée, leur masque cachant leur visage. Bien que je fus trop loin, je devinais leurs regards aiguisés qui scrutaient les alentours. L'un d'entre eux cria et le groupe nous entoura avant qu'on ait pu faire un simple mouvement. Nous pataugions dans les restes de neige salie par la tourmente et je finis par me retrouver presque dos à dos avec mon oncle.
« Qu'est ce qu'on fait, demandais-je. »
« Commence par sortir ta baguette, grogna t'il d'un air inquiet. »
Will, quant à lui, nous contemplait tous les deux, d'un air presque horrifié. Je supposais qu'il devait connaître les dires du ministère sur Sand. Finalement, je vis qu'il hésitait avant de sortir sa baguette et de se diriger vers nous. Ses cheveux mangeaient son front et battaient ses tempes mais c'est les dents serrées qu'il nous aborda.
« Vous, lâchez-le ! »
« Ecoute, jeune homme ! Je crois que le moment est fort mal choisi pour ça, commença mon oncle. »
« Will, s'il te plait, implorai-je. »
Je le voyais qui tournait naïvement le dos aux mangemorts et j'avais bien peur qu'un d'entre eux ouvre l'attaque sans qu'il ait le temps de riposter.
« Alors, Sparrow, toujours sûr de ne pas vouloir nous rejoindre, lança en persiflant le plus grand des mangemorts. »
« Vous pouvez toujours crever, bande de s… »
« Tsss, je serai toi, je me contenterai bien gentiment de nous refiler le gamin. »
Je déglutis et vis le regard horrifié que me portait Will en comprenant les paroles amères. C'est alors qu'un sort fusa, manquant l'épaule de Sand. Il détacha son étreinte et le serdaigle en profita pour agripper ma manche avec rudesse.
Une voix de femme retentit avec agacement en voyant la précipitation de son voisin mais Sand n'attendit pas que les mangemorts se décident. Il redressa sa fine baguette devant son visage et lança aux alentours un brusque sort qui repoussa les mangemorts dans une vague enflammée. Même Will parut surpris de l'incroyable capacité de l'homme aux traits tirés et dont les joues se couvraient de cette teinte bleutée, annonçant un début de barbe naissante. L'affrontement explosa en gerbes d'étincelles.
Malheureusement pour nous, le cercle se scinda en deux parties dont l'une nous sépara de Sand avec détermination. Le bras de Will était presque passé autour de ma gorge et je sentais que ma respiration commençait à devenir palpitante. Son odeur me bouleversait et je suivais avec maladresse ses piétinements dans la boue.
« Qu'est ce qu'on fait, demanda t'il d'une voix enrouée. »
« Lance un sort, m'exclamais-je en voyant les silhouettes encagoulées s'avancer lentement mais inexorablement vers nous. »
« Avec toi alors, on aura plus de puissance ! »
Je ne répondis d'abord pas à son cri et regardais avec un désespoir latent les silhouettes se détourner vers la gauche pour nous bloquer contre le mur d'une maison.
« Comment ça, tu ne peux pas ? »
« Euh… je t'expliquerai plus tard ! »
« Allez, jeune homme, lâche ton petit camarade et laisse-le nous rejoindre. Si tu fais tout ce qu'on te dit, tu ne souffriras pas. »
Les sourcils de Will s'arquèrent méchamment et je le vis prendre une grande inspiration avant d'envoyer un sort de répulsion au mangemort un peu trop avenant sur notre droite.
« Allez vous faire voir ! »
« Tu ne devrais pas nous parler sur ce ton, petit ! »
Il grogna et je ne pus m'empêcher de sortir ma baguette de ma poche en sentant au passage le don de Sand collé contre ma peau. Il y eut une violente explosion dans notre dos et je vis seulement un des mangemorts se retrouver à terre, déporté par le souffle dévastateur du sort. Celui qui paraissait être le chef haussa les épaules en contemplant le spectacle de Sand Sparrow se débattant vainement tandis que les sorciers tentaient de l'acculer. Il poussa un cri strident quand l'un des mangemorts lança quelque chose vers lui. Ses mains se portèrent à sa poitrine et je vis l'éclat d'une lame à moitié enfouie dans son chandail. Ses longs cheveux suivaient ses mouvements avec lenteur et laissaient derrière le soupçon d'une ombre couleur d'encre. Quelqu'un s'approcha de lui alors qu'il titubait et lui envoya un violent coup de pied dans le menton. Il tomba au sol dans la neige qui se couvrait de taches pourpres.
« Il est aussi coriace que sa chère sœur, soupira le chef. Mais toi… »
Il pointa un doigt ganté de cuir noir vers la poitrine de Will et ricana.
« Tu ferais mieux de t'exécuter. »
Pour toute réponse, Will brandit sa baguette et projeta un jet de flammes qui vint lécher les capes de deux mangemorts. Je plaquai ma baguette presque contre mon front, entre mes deux sourcils et fermai les yeux. Le cahot autour de nous me paraissait durer depuis toujours. Mon instant de concentration me fut fatal car j'entendis Will pousser un juron alors qu'un des mangemorts se saisissait de lui et le soulevait de terre.
« Bien, maintenant, sale gamine, tu vas venir avec nous si tu ne veux pas qu'on arrange ton petit camarade… »
Will se débattait de toutes ses forces et lorsqu'il parvint à projeter un coup de coude dans le visage de son adversaire, ce fut pour recevoir un coup à la base du cou qui le fit chanceler. Tout se passa alors très vite, la lame sortit en un éclair de la manche du mangemort et se porta au visage pâle du jeune homme. Mon cri n'empêcha rien mais je sentis quelque chose en moi éclater avec une rage furibonde. Tout perdit sa couleur et les mouvements se firent saccadés. La femme parmi les mangemorts me lança un sort et je chutai à terre pour l'éviter. Dans mon esprit, la tourmente se levait à crescendo et une douleur me parcourait la nuque, irradiant mon dos. Des larmes poisseuses m'empêchèrent de distinguer quoique ce soit et finalement, je serrai ma baguette contre moi alors qu'une main se portait sur mon épaule. Le cri qui déchira ma poitrine emplit le vide qui m'envahissait depuis toujours et je sentis le déferlement de la magie me traverser. Le sort jaillit avec violence et projeta mon opposant dans un vol sanglant qu'il termina dans la vitrine la plus proche, parmi des gâteaux de Noël.
Je me redressai en titubant et m'aperçus de la panique qui régnait parmi les mangemorts. Le chef lançait des ordres sans dessus dessous et finit par ordonner un repli stratégique. Mais ce n'était pas du à ce que je venais de vivre.
Au bout de la rue, des sorciers avaient rejeté leurs lourdes capes aux rebords fourrés pour se lancer contre les mangemorts. Je reconnus même un homme à la fine moustache qui m'avait demandé l'heure dans l'après-midi. Will gisait devant un mangemort qui se dégagea de lui en le bourrant de coups de pieds avant de s'avancer pour disparaître dans un 'pop' sonore. Je me jetai à terre et cherchai à soulever sa tête pour l'obliger à ouvrir les yeux. Du sang chaud et humide coulait de sa gorge sans que je ne puisse rien faire. Mes mains coururent le long de sa peau pour venir placer un pan de tissu arraché sur la plaie. Le visage de Will était éclaboussé de sang et d'une identique pâleur à la neige qui affleurait sur ses cheveux. Je caressais avec délicatesse son front puis redressais à moitié son corps pour le serrer contre ma poitrine et tenter de lui faire reprendre connaissance.
La confusion autour de nous était sans limites et finalement, de lourds pas martelant le sol vinrent à notre rencontre. Mes yeux courraient sur ce visage qui prenait peu à peu la pâleur de la cire et la raideur de la mort. Quelqu'un se pencha et on se saisit de moi par le bras. Je poussais un hurlement de souffrance au contact de ses mains rudes sur mon épaule et manquais de porter un coup à l'agent du ministère. Les sourcils de l'homme s'arquèrent alors qu'il fixait mon visage maculé de larmes et cette bouche tordue par la souffrance. Je me détournai de lui et vis la silhouette de mon oncle qui se tenait dos contre le mur malgré que les mangemorts aient disparu depuis déjà quelques minutes. Pourtant, les agents du ministère le tenaient tel un animal pris au piège qui jetait des regards effarouchés, sentant que la curée ne saurait tarder. Je me mis à courir dans sa direction sans même réfléchir en voyant ces hommes aux mines patibulaires et déterminées pointer vers la poitrine de Sand Sparrow, leur baguette, ces instruments de mort. Tout se passa très vite, je sentis quelque chose frapper mon dos et je chutais durement sur le sol, mélange de neige fondue et de caillas.
« Sand Sparrow, au nom du ministère britannique de la magie, je vous arrête pour meurtres et association de magie noire. Vous avez… »
Les mots se perdirent dans le brouillard sonore qui m'attaqua et je vis seulement le regard vert perçant de mon oncle se poser avec désespoir sur mon corps cloué au sol puis détourner la tête. Un jet d'étincelles apparut et mon oncle se retrouva avec les poignets fermement maintenus dans le dos par deux ronds de lumière bleue. La dernière image que je garde de lui, ce sont ses cheveux noirs flottant dans la brise glacée de l'hiver sans fin qui s'annonçait.
Le sort prit fin et je me retournai douloureusement sur le dos, mes vêtements trempés collant lourdement à mes membres engourdis. J'entendis dans la confusion des éclats de voix, celles de mes cousins qui poussaient de hauts cris alors qu'on refusait de les laisser avancer vers le lieu du désastre. Des ordres furent donnés alors que Keith apparaissait en courant dans mon champ de vision. Elle avait troqué les escarpins de l'uniforme contre une lourde paire de bottes qui rendaient sa démarche quelque peu bancale. Je poussais un cri en voyant une femme lancer un sort vers elle et ma cousine plongea, les mains devant, pour me rejoindre dans la boue. Ses cheveux mi-longs pendaient tristement sur ses tempes, très certainement une conséquence de la bataille de neige. Sa voix résonna à mes oreilles comme un écho lointain, dans un fluide éthéré.
« Mael, ça va, Mael ? Tu es blessé quelque part, non ? Il faut absolument quelqu'un ! »
Elle se détourna pour appeler à l'aide (' Un médicomage, vite, s'il vous plait') et constatant que les agents ministériels l'ignoraient royalement (à part deux d'entre eux qui s'empoignaient apparemment avec un de nos professeurs), la jeune fille se mit à les insulter. Cela n'eut pas l'effet escompté car elle manqua bien de se prendre plusieurs sorts alors que les sorciers balisaient le périmètre et dressaient le bilan de l'affrontement.
Je tendis mon bras à son cou pour tenter de me redresser et balbutiais doucement quelques mots inquiets.
« Keith…Sais-tu… où est… Will ? Il était avec … moi quand ça s'est… passé… »
Mais ma question resta sans réponse. Enfin, on me redressa doucement en passant deux souples bras autour de mes épaules mais je ne pus m'empêcher de pousser un petit gémissement. Le visage d'Ayn Hawthorne apparut et je clignai plusieurs fois des yeux pour vérifier que je ne divaguais pas. Le professeur mordait férocement ses lèvres privées de sang par l'angoisse et ses yeux gris me sondèrent avec application.
« Professeur… Ils sont… revenus, soufflais-je douloureusement en sentant une des mes côtes. »
« Je sais, Mael. J'aurais du rester sur mes gardes… Tout est ma faute, je suis responsable de vous, pourtant. »
« Non, c'est moi qu'il faut remettre en cause. Depuis ce soir où…je n'aurais pas dû vous dire tout cela ! »
« Voyons, ce n'est rien… »
« Mais de quoi vous parlez, bon sang ? »
L'exclamation hargneuse de Keith nous rappela que nous n'étions pas seuls. Ayn Hawthorne me souleva de terre et je sentis mon corps, telle une marionnette désarticulée, se ballotter doucement dans ses bras. Nous allions franchir le cercle des policiers qui encadraient la ruelle et repoussaient les curieux quand un sorcier assez petit, des lunettes anciennes sur son nez, fit signe de nous empêcher de passer. Ses lunettes manquaient de tomber de son nez étant donné sa fureur et il postillonna sur Ayn.
« Vous n'avez aucun droit de vous occuper de ce jeune homme, monsieur. Il est témoin dans cette affaire ! »
« Peut-être mais vous ne comptez pas le laisser agoniser dans la boue, tout de même ? Et son camarade ? »
« On s'en occupe, répondit le petit homme aux cheveux blonds et dégarnis. »
Puis s'apercevant qu'il parlait comme un subalterne, il eut un petit sursaut et fronça méchamment les sourcils.
« Veuillez le laisser entre les mains de nos agents, s'il vous plait, demanda hargneusement Howix en replaçant une fois de plus ses lunettes sur son nez. »
« Non, je ne crois pas, entonna Ayn, sans desserrer les dents. »
« Ce garçon va servir de témoin… et même plus d'ailleurs ! »
Je regardais l'excitation gagner le petit homme et sentis les muscles des bras de mon professeur se tendre brutalement.
« Qu'est ce que vous entendez par-là ! »
« Simplement que le procès du mangemort que nous venons d'arrêter aura lieu sous peu et que ce jeune homme sera appelé à expliquer ce qu'il faisait en compagnie de l'interpellé. »
J'allais me mettre à crier d'indignation et les mots commençaient à peine à franchir mes lèvres que le regard inquiet d'Hawthorne se posa sur moi, croisa celui avide de révélations du dénommé Howix et j'entendis dans ma tête qu'on prononçait une formule magique qui me fit plonger dans un sommeil obscur et sans rêves.
fin du chapitre 11
15 mars 2006
