Inattendu mais vrai, Sibylle Trelawney avait survécu à son accident.

Elle reprit connaissance à l'hôpital moldu de Stuttgart plusieurs heures, au beau milieu de la nuit et après plusieurs minutes passées à délirer et faire de la magie sans le vouloir, sans s'en rendre compte... et surtout sans arriver à le contrôler.

La situation n'aurait pas pu être plus dramatique songea t-elle immédiatement après avoir repris ses esprits, à la vue des gerbes d'étincelles qui volaient un peu partout dans la pièce. D'ailleurs il était étonnant que les moldus ne soient pas encore totalement en proie à la panique à cause du phénomène.

Mais cela ne tarderait sans doute pas et il y avait fort à parier qu'elle aurait de graves ennuis dès que les autorités magiques allemandes auraient vent de la chose.

Déjà que sa médiocre prestation devait en avoir amusé plus d'un, voilà donc encore un moyen de faire parler d'elle, et en mal !

Si elle avait été en état de le faire, Sibylle se serait arrachée de son brancard pour s'enfuir et retourner en Écosse au plus vite, tout en priant Merlin pour ne pas que cette affaire s'ébruite trop.

Mais pour le moment la chose restait impossible, en effet tout tintait autour de Sibylle dans un bruit d'écho déformé et elle se sentait comme si on l'avait enroulée dans du coton, mis-à-part le fait qu'elle avait mal partout évidemment. Le contraire aurait été trop beau.

Lorsqu'elle reprit totalement conscience, elle n'eut d'abord aucune idée de l'endroit où elle se trouvait. Mais, une chose de sûre, cet endroit n'était pas ordinaire et toutes ces lueurs bondissantes qu'elle apercevait autour d'elle étaient loin d'être anodines puisqu'elles émanaient d'elle-même.

D'un geste vif et précipité, elle les arrêta avant d'observer les lieux un peu plus attentivement.

Cela suffit à boucler la boucle dans son esprit encore un peu sonné et elle comprit. Les murs d'une couleur unie ne pouvaient tromper sur le lieu où elle se trouvait, de même que l'odeur si particulière des hôpitaux moldus.

Il faut dire que Sibylle y avait fait quelques séjours durant sa jeunesse, passée en grande partie à la dérive lorsqu'elle s'était pendant plusieurs années retirée du monde magique et avait choisi de passer sous les radars du ministère, vivant une vie de bohème et s'efforçant d'oublier les tourments de son enfance.

Jusqu'au jour où le sentiment impérieux de devoir rencontrer Dumbledore s'était révélé à elle, la forçant à retourner à ses racines bien qu'elle eut préféré tout oublier de sa vie d'avant, quitte à devoir errer dans le monde des moldus jusqu'à la fin de ses jours.

Il fallait croire qu'aujourd'hui, dans une triste ironie, le passé se rappelait à ses bons souvenirs.

Mais à présent qu'elle observait un peu mieux la salle dans laquelle elle se trouvait, elle devait bien avouer que le décors des hôpitaux moldus avait beaucoup changé depuis cette époque.

Pour le reste, elle avait la nausée, ses souvenirs étaient flous et elle ne parvenait pas à déterminer si elle s'était d'abord fait percuter par ce gros objet bleu visiblement métallique, une voiture sans doute, ou si c'était le discours d'Ikenokos à son encontre qui l'avait mise dans cet l'état où elle se trouvait.

Mais ce dont Sibylle n'avait pas conscience, car elle était encore plus ou moins dans un état second, c'est qu'une autre personne se trouvait dans la pièce. Ses manifestations avaient en effet intrigué un jeune agent d'entretien de l'hôpital qui s'approcha d'elle et resta un long moment pensif et troublé face au phénomène.

Il se nommait Uhud Tug.

S'il n'avait jamais vu qui que ce soit capable de produire naturellement des gerbes d'étincelles, et s'il avait tout d'abord cru à un défaut électrique des appareils de la chambre, force lui était de constater que ce qu'il avait devant les yeux relevait du prodige.

Aussi, il était fasciné et s'était bien gardé d'appeler à l'aide.

Uhud Tug, il faut le dire, n'était pas un garçon aussi ordinaire qu'il le semblait, et le surnaturel tout comme les légendes l'avaient toujours attiré.

Lorsqu'il s'était aperçu qu'une lueur étrange émanait de la malade dont il faisait la chambre, il s'était donc approché avec précaution, partagé entre l'inquiétude et la fascination.

Il avait bien bondi en arrière dès les premières gerbes d'étincelles, mais pas au point de prendre peur et de quitter la pièce en courant. Au contraire, il avait immédiatement fermé la porte derrière lui pour éviter que d'autres personnes soient témoins de la scène, avant de s'approcher avec précaution.

- Qui êtes-vous ? Demanda Sibylle décontenancée, en s'apercevant soudain de sa présence.

- Hum… Je m'appelle Uhud… Je suis chargé du ménage…

Sybille avait parlé en anglais, l'obligeant à manier une langue qui n'était que la quatrième dans celles qu'il pratiquait le plus couramment. Uhud en effet était d'origine turque, il avait grandi en Allemagne où il avait eu la chance de fréquenter le gymnasium et de faire une très bonne scolarité, s'ouvrant ainsi la voie pour de longues études. Il avait également appris le français puis l'anglais.

- Vous… Faîtes le ménage ? Demanda Sibylle, pas tout à fait sûre d'avoir bien compris.

Elle se sentait assez confuse à présent que quelques souvenirs s'ordonnaient dans son esprit. Pour l'heure, elle ne se souvenait que des phares du véhicule qui l'avait percutée :

- La voiture… Souffla t-elle. La voiture bleue…

Uhud reprit aussitôt ses esprits et lui répondit :

- Hum… il s'agissait en fait d'une bicyclette à guidon haut, lancée à pleine vitesse. Son conducteur a pris la fuite… Enfin c'est ce que disaient les pompiers parce que d'autres témoins affirment avoir vu un camion.

- Les oubliators ont du passer… Souffla Sibylle.

- Qu'est-ce que vous dîtes ? S'étonna Uhud.

- Hum… Rien d'important, s'empressa t-elle de répondre, prenant soudain conscience qu'elle parlait à un moldu.

Uhud hocha la tête :

- Vous devez être un peu secoué, fit-il gentiment remarquer.

Sibylle remarqua alors qu'il parlait avec un fort accent oriental mais que son anglais était plutôt bon. Si l'on se rapportait au règlement de l'école, il aurait eu le niveau suffisant pour étudier à Poudlard.

- Pourquoi faîtes-vous le ménage ici ? Demanda t-elle très intriguée. Vous semblez intelligent et cultivé, beaucoup pour faire un tel métier...

- Oh, répondit Uhud en rosissant. Je travaille ici pour payer mes études. Je suis étudiant en littérature classique et en histoire dans le but de devenir professeur…

Il hésita un peu et ajouta :

- En fait, je me suis approché parce que je vous ai entendu parler de mythologie pendant que vous étiez inconsciente. De Delphes... Après, il y a eu les étincelles et j'ai eu un peu la trouille…

Perdue, Sibylle en laissa échapper d'autres sans le vouloir :

- D'ailleurs, est-ce que vous pouvez arrêter ? Demanda Uhud. Si les médecins débarquent, vous risquez d'avoir des ennuis…

Troublée, Sibylle obéit. Elle n'était pas bien sûre de comprendre qui était ce type, mais elle ne tenait pas à avoir de problèmes en effet.