C'était quelque chose d'étrange de se retrouver dans un monde que vous aurez juré avoir un jour connu, sans pouvoir être réellement capable de le reconnaitre. Il avait l'impression de se retrouver dans un mirage. Un mirage qui évoluait de plus en plus vers un purgatoire.
Ce village lui était comme un souvenir venant d'un autre ou d'une autre vie. Pourtant, il reconnaissait ses bâtiments, ces rues, comme s'il les avait parcourus dans tous ces souvenirs les plus chers aux côtés de ceux qu'il avait aimés.
Du coin de l'œil, il entraperçut à nouveau l'éclair rouge qui semblait s'être décidé à le poursuivre depuis qu'il avait fait ces premiers pas ici. Cette fois-ci, incrédule, il se décida de se retourner. Sans grande surprise, il était seul avec le bruit du vent pour seule compagnie.
Les sourcils froncés, il se demanda si ce rouge si particulier lui avait été, un jour, quelque de chose de familier. Quelque chose qu'il avait pu aimer.
Quand il croisa finalement le regard d'un marchand qui l'observait depuis son étale, il réajusta d'un geste sa capuche avant de reprendre sa marche dans un rythme à plus pressant. Ce n'était pas le premier qui l'observait et ce ne serait probablement pas le dernier. Il aurait aimé pouvoir leur demander qui ils semblaient tous pouvoir reconnaitre sur son visage mais il savait que cette simple question n'apporterait rien de bon. Que ce soit pour eux. Ou même pour lui.
Il approcha finalement d'une maison. Il la connaissait et ça il ne pouvait le nier. Elle éblouissait encore de cette énergie protectrice et féroce d'un père envers son fils qu'il avait un jour chéri de tout son être. Elle n'avait pas été oubliée. Il ne l'avait pas oublié.
Il aurait seulement voulu pouvoir se souvenir de qui ils s'agissaient.
Il posa un premier pas dans le domaine. Ce dernier ne le rejetait pas, il semblait presque même l'accueillir avec les bras ouverts. Comme un vieil ami qu'il n'avait plus vu depuis des années.
Plusieurs minutes se passèrent avant qu'il ne se décide à tourner la poignée de la porte d'entrée. Il savait que ce qu'il faisait ici n'était que de la pure intrusion et que si un seul de ces marchands l'avait suivi jusqu'ici, il serait rapidement dans de beaux draps. Pourtant, il savait également que cet endroit était un des rares qui pouvaient lui fournir des indices sur son identité et qui pouvaient également lui expliquer pourquoi son visage était ancré dans la falaise qui surplombait ce village.
Il s'avançait à pas de velours même s'il sentait que personne ne l'attendait caché parmi les ombres de cette maison. Sur le chemin, ses yeux se posèrent sur les multiples étagères où des livres étaient rangés d'une façon étrangement méthodique. Parfois, il put même observer un léger dégradé bleu dans l'étagère qui se trouvait dans la pièce de vie.
Le bureau qu'il recherchait se retrouva soudainement devant lui, éclairé par les rares rayons de la matinée. La seconde suivante, sa main ouvrit d'elle-même le seul tiroir de ce dernier.
Il y trouva, tout d'abord, des documents qu'il retira d'une traite sans leur porter la moindre attention, puis quelques dessins et photos de divers chiens qu'il aurait juré avoir connus dans une autre vie. Ce fut la dernière photo qui l'arrêta dans sa lancée.
Sur cette dernière, un homme à la chevelure argentée tenait dans ses bras, un sourire heureux sur les lèvres, un enfant arborant déjà quelques rares cheveux de la même couleur si particulière qu'arborait son père. Ils avaient l'air tous les deux insouciants. Ils semblaient prêts à conquérir le monde, l'un à côté de l'autre.
Pourtant, quelque part au fond de lui, il savait que ce ne fut jamais le cas. L'enfant s'était brutalement retrouvé seul face à ses pires cauchemars.
La photo encore dans la main, il releva les yeux et prit enfin conscience des deux autres photos encadrées qui se trouvaient sur le bureau.
Sur la première, il s'y retrouva, debout derrière trois enfants qui arboraient chacun une expression différente. Parmi ces trois, il reconnut l'enfant aux cheveux argentés.
Les Hatake. Sakumo. Kakashi. Son inconscience lui murmura les noms comme une douce mélodie. Et puis le ton se fit soudainement mélancolique. Rin. Obito. Il n'avait pas réussi à protéger ces derniers. Il n'avait pas été capable de tenir le rôle qu'on lui avait donné.
Sur la deuxième photo, il reconnut un Kakashi plus âgé qui se retrouvait dans la même position que lui des années auparavant. Il avait beau ne pas reconnaitre aucun de ses enfants, il était tout de même capable de reconnaitre ses propres traits sur le garçon qui se tenait à droite.
C'était ses yeux bleus. Sa chevelure. Mais le caractère qui irradiait de la photo était celui de la femme qu'il avait aimé un jour avec une dévotion sans nom.
Son inconscience se fit silencieuse pendant un court instant comme si elle tenait à réfléchir avant de prendre sa décision sur le fait de lui redonner son histoire. De le faire revenir à la vie.
À l'extérieur, un oiseau chantonna dans un ton joyeux et au même moment, l'éclair rouge réapparut dans son champ de vision. Surpris, il en lâcha la photo du tiroir qu'il tenait encore dans sa main. Ce fut quand il se baissa pour la récupérer que le chant de son inconscient repris.
Kushina. Son étoile. Sa lumière divine.
On lui murmura l'amour qu'ils s'étaient portés. Leurs rêves. Leurs sacrifices.
De l'enfant qu'ils auraient aimé pouvoir choyer, connaitre.
Leur petit soleil.
Naruto.
Il reposa les yeux sur la photo encadrée, le cœur au bord des lèvres. Il était si grand sur cette dernière, mais elle semblait quelque peu âgée. Il devait être un adolescent maintenant. Il espérait seulement qu'il avait été heureux.
Son regard dévia par la suite vers un meuble à sa droite. Les vestiges d'une arme y était exhibé et vénéré. Il la reconnut comme celle qui avait fait autrefois la légende de Sakumo Hatake et celle que Kakashi avait également pu autrefois utiliser avant qu'elle ne soit brisée.
Il entreposa à nouveau la photo dans le tiroir où il avait pu la trouver avant de se diriger dans la direction de la lame brisée. Il y avança sa main pour toucher le métal comme pour s'assurer qu'elle était bien réelle, qu'elle n'était pas un songe. Elle était froide et propre. Kakashi prenait encore soin d'elle visiblement.
À côté de la lame, d'autres photos étaient entreposées en une seule pile. Il se décida à les perturber quand il aperçut derrière elles, un kunai entouré de papiers portant tous une même marque familière.
Quelque chose en lui, lui indiquait que cette arme avait été un jour à lui. Qu'elle avait été un de ces cadeaux pour Kakashi. Un lien qui lui permettrait de le rejoindre dans n'importe lesquelles des situations. S'il avait un jour besoin de lui.
Lui. L'ancien quatrième Hokage. Son ancien sensei.
Minato ferma les yeux avant de coller son front contre le meuble.
Il ne comprenait pas comment tout ça était possible. Il était mort cette nuit-là. Comment pouvait-il être parmi les vivants des années après ? Ça ne pouvait pas être de l'Endo Tensei, il avait vu son reflet et son cœur battait trop dans ses oreilles pour qu'il soit une réanimation.
Quelqu'un se jouait de lui. C'était sa seule théorie.
Pour l'instant.
Un part en lui osait cependant théoriser sur un autre point. Si lui était vivant, était-il possible que tous les autres Hokage le soient aussi ?
Il se mordit l'intérieur de la joue pour détourner son attention de cette théorie farfelue avant de rouvrir les yeux.
Son regard se reposa sur ce qu'il avait légué. Kakashi ne devrait pas lui en vouloir s'il empruntait tout ça rien que pour un court instant. Il lui redonnerait tout avant que tout ça ne se termine. Il devait juste le retrouver et un étrange pressentiment chuchotait à ses oreilles qu'il devrait se dépêcher. Avant que le pire n'arrive.
Malgré tout, un certain sentiment de honte monta en lui quand il mit dans une poche son ancien kunai et les papiers qui se tenaient non loin. Ce ne fut qu'après seulement quelques minutes de recherche qu'il se retrouva finalement armé et prêt à partir. Il s'en voudrait un autre jour pour son intrusion et pour les divers vols d'armes et de veste propre.
Quand il se retrouva à nouveau au pied de la porte, il s'autorisa un dernier regard comme pour dire ces adieux à un monde qu'il avait connu. Il repensa également à nouveau à des souvenirs qui lui paraissait maintenant si lointain.
Quelqu'un semblait vouloir avoir son aide même si ça revenait à lui offrir une seconde chance.
À son départ, quelque part dans un des coins sombres de la maison, un Ninken sortit enfin de sa cachette.
L'air hagard, il observa pendant de nombreuses minutes l'endroit que venait de quitter un fantôme de son passé. Son nez ne l'avait donc vraiment pas trompé.
C'était bien leur Minato. Il était vivant.
Mais il semblait si perdu.
Il lui fallut quelques minutes pour apercevoir l'énergie de l'autre moitié de Kurama. À l'intérieur de lui, l'autre partie se réveilla dans un râle comme pour répondre à la première, ce qui le stoppa net dans sa course.
Quand il rouvrit les yeux, il jura.
La situation était beaucoup plus compliquée qu'il n'aurait pu penser. Le seul point positif était que Kurama lui jurait qu'ils n'étaient pas seuls. Que des personnes les attendaient non loin et que ces derniers pourraient lui fournir quelques réponses. Probablement.
Le point négatif, quant à lui, était une autre affaire. Le chakra imposant de Madara Uchiha embrasait progressivement tout ce qu'il rencontrait dans son chemin. Comme un véritable tsunami.
Une autre présence, tout aussi remplie d'une haine profonde, se tenait non loin de la première. Malheureusement familière. Le même fantôme qui leur avaient ôté la vie cette nuit-là et par conséquent, bouleversé celle de Naruto.
Minato reprit la route avec toute nouvelle énergie. Il sera là cette fois-ci. À temps.
Au milieu du chemin, il prit conscience qu'on le poursuivait avec un entrain presque maladif. Il ne connaissait pas ce chakra mais ce dernier semblait étrangement le connaitre lui. Il pouvait presque même toucher du bout des doigts la haine qu'émettait ce dernier envers la familiarité qu'il semblait reconnaitre en lui. Caché timidement derrière, il reconnaissait cependant de l'amour inconditionnel.
Intrigué par cette dualité, il ralentit le pas tout en d'attrapant son raijin. Derrière cette présence, il reconnut d'autres signatures mais elles lui semblaient plus amicales envers lui et ne semblaient pas vouloir le voir à terre.
Il entendit tout à coup les premiers prémices du Chidori. Un chant tragique. Un présage funeste venant de la Mort elle-même.
Mais Minato connaissait ce chant et le destin tragique qu'il apportait à ceux qui pouvait l'entendre.
Alors, quand cette mélodie sordide se fit plus pressante dans son dos, il lança son raijin en direction de l'arbre le plus proche et embrassa à nouveau son ancien titre dans un éclair lumineux. Esquivant pour la énième fois le baiser de la Mort en plein combat.
En sécurité sur une branche, il prit le temps d'observer son adversaire qui le dévisageait, un air venimeux sur le visage. Un adolescent. Un jeune Uchiha qui portait un semblant de ressemblance au Fukagu Uchiha qu'il avait un jour connu.
Les pupilles rouges ne le quittèrent pas une seule seconde quand il reposa un pied-à-terre, le raijin toujours dans sa main cependant. Il avait beau avoir le pressentiment qu'ils n'étaient pas ennemis que ce soit ici ou dans un futur proche, ils restaient cependant des inconnus l'un pour l'autre. Des parfaits ennemis aux techniques totalement opposées.
Autour d'eux, le monde se fit silencieux comment s'il attendait qui ferait le premier geste.
Minato fut pris de court quand l'adolescent le fit avant lui, en rangeant les pupilles qui ont participé à la légende de sa lignée. Au même moment, pendant un très court instant, il put contempler un bref moment où un sentiment de sérénité, de sécurité même, traversa le visage du jeune Uchiha. Ils étaient sur la même page.
Mais, il pouvait voir que sa présence était en train de tirailler grandement l'esprit de l'adolescent. Il ne lui fallut pas un long moment de réflexion pour comprendre que ce dernier et ces compagnons qui approchaient n'étaient pas ceux qui étaient capables de lui donner des réponses à ses questions. Eux semblaient être lointain sans pour autant l'être.
- Vous devriez être mort, l'interpella le garçon.
Minato échappa un rire sans joie. Ça, il le savait.
- Pour quelle raison on vous a ramené ?
Ça, il ne le savait pas. Il ne savait même pas qui était derrière tout ça.
Il s'apprêta à lui répondre mais il fut arrêté par l'arrivée d'une ancienne connaissance, qui l'observait avec une incrédulité sans nom. Il reconnut sur les yeux et traits de ce dernier les effets de l'Endo Tensei. Minato jura intérieurement.
- Pour la même raison que vous avez ramené Sandaime-sama. Aider, je suppose, répondit-il finalement en regardant un à un les nouveaux arrivants.
Il se mordit la joue en voyant Orochimaru qui le scrutait, heureux. Quand il reposa ses yeux sur l'Uchiha celui-ci arborait également un sourire mais ce dernier était plus sincère comme provoqué par de vieux souvenirs heureux.
- Aider ? l'interrogea ce dernier à nouveau après quelques secondes, dubitatif.
Son regard était de nouveau dur. Il cherchait une promesse de sa part. Pour lui. Ou pour un autre. Il lui tendait la main, lui offrait sa confiance même si ce petit geste semblait le torturer grandement.
Minato tendit sa main en retour.
- Autant que je le pourrais.
Ces simples mots ont eu l'air suffisant pour le garçon.
Sasuke avait couru sans réfléchir après le fantôme malgré les dires de son équipe. Il n'avait, tout bonnement, pas pu le laisser filer sans savoir si c'était bien celui à qu'il pensait.
Alors, quand il fut enfin proche, il l'attaqua en sachant que ce dernier l'avait déjà repéré depuis plusieurs minutes. Sans surprise, il s'était échappé de son champ de vision en un clignement pour réapparaitre un peu plus loin.
Naruto était véritablement le portrait craché de son père. La même chevelure. Les mêmes yeux bleus océan. Il semblait comme lui entourer d'un halo lumineux presque perpétuelle qui dégageait une chaleur solaire chaleureuse.
L'autre idiot allait être heureux de le revoir.
Comme il avait pu l'être avec Itachi.
Mais, plus le temps passait, plus Sasuke se demandait si ces divers cadeaux venus sans explications n'entrainèrent pas un prix à payer au final. Quelqu'un leur offrait des soldats expérimentés pour les aider à gagner une guerre qui leur semblait déjà perdue d'avance. Et ce quelqu'un ne s'était toujours pas montré.
Les yeux d'Itachi ne voulaient étrangement pas lui montrer qui l'avait ramené d'entre les morts, comme s'il cherchait à le protéger lui et ses secrets.
Et visiblement, le père de Naruto semblait tout autant perdu tout autant qu'eux.
Et ça, ça le rassurait quelque peu.
Sasuke prit soudainement conscience qu'il ne l'avait pas quitté des yeux depuis plusieurs minutes déjà, quand ce dernier coupa court sa conversation avec l'autre Hokage pour croiser son regard.
C'est exactement les mêmes, se dit-il. Les mêmes regards remplis de promesses d'une vie heureuse.
L'atmosphère changea brusquement. L'onde de détresse qui en suivi se répercuta sur ses os et le laissa sans voix.
Quand Hashirama posa enfin les yeux sur lui, Tobirama s'inquiéta.
Il avait toujours su reconnaitre son frère les yeux fermés, même si la distance les séparait. Ce dernier avait toujours été un aimant pour la vie autour de lui.
Maintenant, il n'en était plus aussi sûr. Une part en lui était devenue indéchiffrable.
Tobirama avait l'impression que Hashirama était devenu la Vie même. Celle qui contrôlait qui avait le droit de nicher auprès de lui et qui ne le pouvait pas.
Et que cette Vie n'avait qu'un seul amour, la Mort.
Naruto avait horreur de se sentir aussi impuissant.
Il avait vu les fantômes de Kakashi se tenir derrière lui. Il avait également vu ces derniers lui tendre la main l'invitant à le rejoindre. Kakashi avait été tenté pendant un court instant mais il avait serré les dents et s'était relevé.
Une tristesse sans nom se reflétait cependant dans ses yeux.
