Derek s'était fait rouler. Stiles avait eu un coup d'avance sur lui, encore. Après avoir longuement profité du corps de l'autre, les deux jeunes hommes s'étaient posés tranquillement sous la couette et Stiles s'était tout naturellement endormi. Derek, complètement amorphe, s'était également laissé aller à somnoler un peu, l'hyperactif contre lui. Il fallait l'avouer, le bêta aimait l'avoir près de lui, entre ses bras, la sensation était fort agréable. C'était presque… Normal. Derek avait toujours été du genre tactile et avait un petit côté câlin qu'on ne lui connaissait pas vraiment.
Et Stiles en avait profité, inconsciemment. Par contre, ce qu'il avait sûrement prévu, c'était son endormissement. Dans une certaine mesure, l'hyperactif repoussait la discussion et ça, ce n'était pas forcément bon signe. Derek faillit soupirer, mais se retint. Cette conversation… Elle ne devait pas attendre. Le loup avait eu beau ne pas sembler concerné auparavant, il commençait à l'être sérieusement. Partager le lit de l'adolescent lui conférait certaines obligations et il continuait de penser qu'il n'allait réellement pas bien. C'était un fait qui ne faisait que se confirmer et Derek n'était pas un mauvais bougre. Soulager ses pulsions lupines était une chose mais il avait à cœur le bien-être de son partenaire. Si Stiles semblait plutôt bien se porter durant leurs ébats, son odeur devenait très pesante lorsque la fin arrivait, signifiant le retour à la vie normale.
- Stupide hyperactif, murmura-t-il, plus pour lui-même qu'autre chose.
Parce que oui, c'était stupide de cacher ses malheurs de la sorte. Stiles n'était pas seul dans sa vie, il avait des amis et les meilleurs, Scott et Lydia, étaient toujours à son écoute. Pourquoi ne leur parlait-il pas ? Il était évident qu'il gardait chacun de ses problèmes pour lui. Si tel en était autrement, son odeur serait beaucoup moins marquée par ces émotions négatives qui ne le quittaient que rarement.
- Merci du compliment, maugréa une pâteuse voix contre lui. Que me vaut l'honneur de t'entendre m'insulter de bon matin ?
Derek aurait pu se sentir gêné, honteux d'avoir été surpris au seul moment où il le critiquait ouvertement – tout en pensant qu'il dormait. Il n'avait pas fait attention aux battements de cœur du plus jeune et au fond… Quelle importance ? Il rit doucement et ce son grave fit frissonner Stiles.
- Tu es idiot et tu le sais, dit Derek en esquissant un rictus que Stiles ne pouvait toutefois pas voir à cause de la pénombre de la pièce.
Mais lui, en tant que loup, vit bien son expression confuse. Stiles avait les yeux ouverts et son visage non loin du sien, quoiqu'un peu plus bas.
- Si tu crois que j'ai oublié ce que tu m'as dit avant qu'on baise, tu te trompes complètement, l'éclaira-t-il.
Stiles prit cette fois-ci un air boudeur et soupira bruyamment avant de tirer la couette sur lui, de sorte à ce que seul son cou soit visible, cachant le haut de son torse si tentateur et cette épaule nue qui n'avait de cesse de l'attirer. Comment Stiles faisait-il pour avoir une peau aussi parfaite ? Derek n'avait de cesse de lutter contre son loup qui voulait passer tout son temps à embrasser, caresser, toucher, mordiller cet épiderme unique. C'était sans doute pour cette raison qu'il resserra son bras sur l'hyperactif, comme s'il avait peur qu'il fuie. Son contact était trop agréable pour qu'il le laisse partir maintenant.
- T'as vraiment un don pour casser l'ambiance. Non mais, sérieusement ? Me sortir ça au réveil ? Râla l'hyperactif.
- Stiles, il est quatorze heures, rétorqua Derek en apercevant le réveil de l'hyperactif sur sa table de chevet.
L'adolescent soupira bruyamment mais ne changea pas de position. La contrariété se peignit constamment sur ses traits.
- T'es pas facile à berner, grommela-t-il.
- Je suis un loup, dit Derek, comme une évidence.
- Ouais, Scott aussi. Et pourtant, je peux te dire que c'est très facile de lui faire oublier quelque chose qu'il peut vouloir savoir. Tu as dit que j'étais stupide ? Alors lui c'est encore pire.
Malgré les mots, Stiles parlait avec un mélange d'affection évidente et de… Déception. Il était clair qu'il aimait vraiment beaucoup son meilleur ami mais que quelque chose le dérangeait. Était-ce à cause de cette fois-là où Scott avait voulu l'emmener de force en sport pour faire natation ? Tout de même, cela paraissait un peu léger à Derek qui fronça légèrement les sourcils. Stiles était-il du genre rancunier ? A ce point ? Non, bien sûr, il y avait forcément autre chose. L'hyperactif avait beau être particulier, il avait forcément ses raisons. Peut-être cachait-il des tas de choses tout en espérant qu'un jour, son meilleur ami y ferait attention. Sa main caressant distraitement la hanche de Stiles, Derek réfléchit et se dit que cette hypothèse était la plus plausible. En tous les cas, il était certain qu'il le ferait parler. Le lycéen avait repoussé l'échéance autant qu'il avait pu et ce petit manège avait assez duré. Derek adorait coucher avec lui et s'il devait être honnête, il pouvait avouer sans problème que Stiles était le meilleur amant qu'il ait jamais eu. Plus qu'un plan cul, il devenait graduellement son ami et Derek trouvait important qu'il lui parle quand ça n'allait pas. Pour qu'une relation marche, même si elle n'était que de nature sexuelle, il fallait qu'il y ait de la communication. C'était vital. Il était hors de question que le loup laisse pourrir l'adolescent dans son coin, en tête à tête avec ses malheurs. Il était bien trop jeune pour se laisser aller à la déprime de la sorte – s'il s'agissait seulement d'une déprime !
- Stiles, je veux que tu me répondes et que tu sois honnête.
A ces paroles, l'hyperactif retint son souffle un instant et Derek le sentit se tendre contre lui. Ça y est, le moment était finalement arrivé. Par chance, la pénombre dominait encore majoritairement la chambre – l'on pouvait remercier les rideaux semi-occultants gris foncé – et permettait à Stiles de ne pas être complètement tendu. Au moins, pensait-il, Derek ne verrait pas son corps, c'était déjà ça.
- Tu n'as aucune échappatoire, cette fois.
- Je sais, râla-t-il, je suis pas con.
Non, mais tu es stressé. C'était clair et net, son odeur ne permettait aucune hésitation. Pour essayer de le détendre un peu, Derek abaissa sa main et malaxa l'une de ses fesses nues. Stiles n'avait pas pris la peine de renfiler un seul vêtement et c'était également le cas du loup. Bien loin de le déranger, ce fait permis à Derek de toucher directement la peau de l'humain, cette peau qu'il aimait tant. Rêvait-il ou ses fesses semblaient-elles encore plus douces que le reste de son corps ? Quand il repensait à tous ces grains de beauté qu'il avait remarqué sur ces deux globes de chair… Le lycan réprima certaines pulsions naissantes.
- Tu ne verras donc aucun inconvénient à me dire ce que tu as, dit Derek de but en blanc, sa main profitant de cette fesse fort agréable au toucher.
Stiles se tendit, encore, mais ne s'écarta toujours pas du loup, restant contre lui. A vrai dire, il se cambra légèrement, comme pour pousser d'autant plus sa fesse dans la main de son amant. Son apollon d'amant. Bordel, pourquoi avait-il fallu que son partenaire soit aussi différent de lui ? Pas que ça augmentait ses complexes mais un peu…
- Tu peux pas comprendre, lâcha simplement l'hyperactif d'un ton mesuré.
- Et si je le pouvais ? Rétorqua le loup.
- Tu peux pas, parce que toi, t'as pas ce genre de problèmes.
Serrant son poing sur le torse du loup, Stiles fit une pause et sembla réfléchir. Pesait-il le pour et le contre sur ce qu'il devait faire ? Derek ne le pressa pas, cela ne ferait que braquer l'hyperactif qui n'était pas des plus coopératifs. Ce qui le rongeait semblait profond et difficilement prononçable. Nul doute qu'il arriverait à en parler, néanmoins. Derek sentait qu'il avait ouvert une porte et que Stiles n'était pas aussi fermé à la discussion qu'il n'en avait l'air.
- Qui te dit que je n'ai pas eu le genre de problèmes dont tu parles ? Tenta le loup.
- Arrête, Derek. T'es un apollon, t'as le physique d'un mannequin, d'un dieu vivant. N'essaie pas de me faire croire qu'avant t'étais laid comme un pou parce que je te le dis tout de suite, je te croirais pas.
Derek esquissa un léger rictus de vainqueur qui aurait outré Stiles si un peu plus de lumière traversait les rideaux. Cependant, la réalité que cette vérité – lâchée par erreur – mettait en lumière, fit disparaître de son visage ce semblant de sourire. Stiles n'avait même pas dix-huit ans et il complexait déjà ? Non, c'était bien plus qu'un complexe et il en était conscient.
- Donc tu as bien un problème avec ton corps, énonça-t-il, neutre.
Stiles se tendit complètement et finit par soupirer.
- … Et en plus de ça, tu obtiens toujours ce que tu veux, maugréa-t-il en le pinçant au niveau du torse, comme pour se venger.
Bien évidemment, Derek n'y fit absolument pas attention et continua de malaxer sa fesse distraitement. S'ils n'avaient pas cette discussion, nul doute qu'il serait passé à l'étape supérieure. Néanmoins, il n'était plus affamé par le manque et savait qu'il devait mettre certaines choses au clair avec l'hyperactif.
- Qu'est-ce qui te gêne avec ton corps ? Demanda-t-il, ignorant sa remarque.
Stiles soupira et ferma les yeux, comme si ses paupières pouvaient le protéger de cette conversation qu'il ne voulait pas vraiment avoir. Au fond de lui, il avait cette envie de se confier, de profiter de cette perche qu'on lui tendait pour la première fois. Merde, pourquoi avait-il fallu que ce soit Derek Hale, son amant, ce loup mal léché qui ait découvert son secret ? Enfin, secret… Stiles ne cachait rien, il omettait de parler de certaines choses, là était la nuance. Pourquoi ce n'était pas Scott qui faisait attention à son odeur ? Pourquoi n'était-ce pas son meilleur ami qui cherchait actuellement à le comprendre ? Au moins, l'hyperactif avait une preuve de plus quant au fait que Derek ne s'intéressait pas à lui dans l'unique but de le sauter. Il semblait accorder une réelle importance à son ressenti ainsi qu'à son avis.
- Tout, souffla-t-il instinctivement.
Un détail mis à part, il adorait sentir cette grande main pétrir sa fesse et passer à l'autre de temps en temps. Être dans ce lit, avec Derek, sans aucun vêtement pour les séparer, c'était quelque chose dont il n'aurait jamais osé rêver auparavant. Comment avait-il fait pour intéresser cet apollon pour que celui-ci veuille bien coucher avec lui ? Surtout qu'il en redemandait et que leur éloignement mutuel durant une semaine n'avait pas apaisé ses ardeurs, au vu de la manière dont il l'avait pris toute la nuit, puis ce matin… Bordel, il avait respecté leur pacte ! Et en plus de cela, il semblait s'intéresser sincèrement à lui.
- Pourquoi ?
Il aimait la voix de Derek, vraiment. Elle était aussi sensuelle que le reste de son corps et restait étrangement douce. Pas douce dans le genre soyeux et niais. Elle caressait autant ses pensées que sa peau et lui donnait envie de l'écouter pendant des heures. Elle avait ce pouvoir de lui donner envie de parler sans trop avoir peur d'être jugé. Après tout, Derek couchait avec lui… Et à défaut de voir son corps, il l'avait touché, retourné, embrassé, caressé. Ah, toutes ces imperfections qu'il n'avait pas remarquées ! Pour un loup, il était bien aveugle.
- Je sais pas, juste… Il me dégoûte.
Et le mot était faible. Stiles ne se rappelait même plus de la dernière fois où il s'était regardé dans le miroir sans avoir envie de vomir à la vue de son enveloppe charnelle. Cette fois-là chez Derek n'y avait pas fait exception. Que lui avait-il trouvé ? La tournure que prit ses pensées l'obligea à réfléchir autrement. Toutefois, il se força à ne pas penser au fait qu'il pouvait n'être qu'un vide-couilles pour le loup, qui s'évertuait à essayer de lui prouver le contraire. Il est toujours là, au lit, avec toi. Il t'écoute, Stiles. L'hyperactif se raccrochait à ce genre de pensées pour espérer ne pas sombrer et envoyer le lycanthrope bouler par peur de la critique. Par peur de l'entendre le descendre. Si Derek était autrefois un connard de première, il avait bien changé et s'était assagi avec le temps. Il restait brut de pomme mais il n'avait pas un mauvais fond, loin de là.
- Je veux pas le voir, je veux pas le sentir, savoir qu'il est là, que c'est moi, je… Je le supporte pas, avoua-t-il d'une voix douloureuse. Je me dégoûte, je… Je ne veux pas de cette horreur que je suis. Mais on a pas toujours ce qu'on veut dans la vie alors… Faut faire avec, hein ?
Et il se mit à rire d'un rire sans joie, sans voir l'expression du visage de Derek.
