Mélina entra et referma la porte. Dans une quasi-obscurité, elle sortit sa baguette et murmura "Lumos !". Un couloir sans lumière, très long, était ponctué d'une dizaine de portes. Mélina étouffa un cri. A quelques mètres d'elle, un corps gisait au sol. Mélina s'approcha prudemment et tâta le pouls d'un grand sorcier en uniforme de surveillant. Il battait faiblement, semblant avoir subi un sortilège plus puissant que le "Stupéfix". Mélina ne savait pas comment le réanimer. Tremblante, elle se releva, ne sachant que faire. Terrorisée, elle songea qu'August pouvait être à quelques mètres d'elle, l'observant sous la cape d'invisibilté. Elle s'immobilisa et tendit sa baguette, le coeur battant la chamade.

- Accio CapedinvisibilitédeHarryPotter !

Elle entendit un cri rageur, effrayant, une porte au bout du couloir s'ouvrit et la cape atterrit aux pieds de Mélina. Tremblante, elle tendit sa baguette et August Quenton apparut dans l'encadrement de la porte, baguette tendue. Il vit Mélina et poussa un rugissement. Par réflexe, Mélina plongea sur le côté et évita un sortilège de stupéfixion. Elle heurta le corps du garde et s'empêtra dans les pans de sa robe de sorcier. Elle entendit avec horreur August lancer le sortilège d'Avada Kédavra. Son cafouillage dans le tissu de sa robe lui sauva la vie quand elle trébucha. Elle se saisit de sa baguette tandis qu'August se rapprochait dangeureusement en courant.

- STUPEFIX ! hurla-t-elle. Mais elle avait récupéré sa baguette de la main gauche et elle était droitière.

Le sortilège évita de peu August qui ricanait, baguette tendue, prêt à jeter un nouveau sort. Tâchant de se relever, Mélina sentit sous sa main droite le couteau magique tombé de sa poche. Elle s'en saisit et le lança au visage d'August. Surpris de cette attaque imprévue, sa tête chancela sous le choc et un peu de sang apparut sur sa joue. Mélina, qui avait repris sa baguette dans la main droite, lança un nouveau sortilège de stupéfixion. Il heurta de plein fouet August qui s'immobilisa et tomba à la renverse, raide. Mélina chancela et se tenant aux murs, contourna le corps d'August et s'approcha de la pièce dont il était sorti. Elle entra lentement et la lumière apparut dans la pièce sans que Mélina y soit pour quelque chose. Un bassin en pierre monumental trônait au milieu de la pièce aux murs nus. Un livre d'incantations et quelques fioles étaient au sol. Des volutes de fumée grisâtre s'élevaient du bassin et on pouvait y distinguer le plus effrayant visage que Mélina ait jamais vu. Mélina sortit de la pièce en courant et rouvrit la grande porte.

- Au-secours, aidez-moi !

Des visages ébahis apparurent des trois bureaux et Mélina s'évanouit.

- Elle ouvre les yeux !

Mélina, nauséeuse, distingua des visages penchés sur elle. Elle n'avait pas fait de cauchemar. Elle s'était battue contre August Quenton.

- Papa... murmura-t-elle.

Elle sentit la main chaleureuse de son père sur sa joue.

- Je suis là ma chérie. Ta mère est à côté avec tante Hermione et des gens du Ministère.

- Erzébeth !

- Du calme, du calme ! Elle va mieux... Quand des employés du Ministère t'ont trouvée et nous ont prévenus, j'ai envoyé quelqu'un chez nous pour savoir ce qu'il lui était arrivé. Elle a été soumise à l'Impérium et au Stupéfix.

- Je m'en doutais pour l'Impérium.

Mélina se redressa.

- Où suis-je ?

- A l'infirmerie du Ministère. Tu as provoqué une belle panique... plaisanta son père.

Une infirmière lui prit le pouls :

- Tout va bien, elle pourra s'en aller dès qu'elle aura bu ce tonique.

Entre deux gorgées, Mélina confessa que c'est elle qui avait stupéfixié Erzébeth. Devant le regard étonné de son père, Mélina lui conta tout. Quelques minutes plus tard, son père la serra contre lui.

- Tu as été courageuse. Ton grand-père aurait été fier de toi.

Mélina sourit. Elle n'avait jamais reçu de compliment aussi flatteur.

Le soir-même, Mélina, les genoux sous le menton, lovée dans le confortable fauteuil du salon de ses parents, écoutait sa grand-tante Hermione lui fournir des explications. Ses parents, assis sur le divan, écoutaient la directrice de Poudlard tout en jetant des regards protecteurs à leur fille. Le visage ridé d'Hermione trahissait une grande fatigue.

- Ma chérie, tu as affronté une épreuve redoutable dont tu t'es sortie avec les honneurs. J'ai convoqué Antonina Coeurdefiel, la directrice de Serpentard, pour lui demander des renseignements sur August Quenton. Je ne connaissais pas bien cet élève : Antonina m'a appris qu'August était un brillant élève, bien qu'assez renfermé, très doué en Sortilèges et en Potions. Elle a fouillé ses affaires et trouvé des formules, des incantations anciennes et interdites car très dangeureuses, de la magie noire. L'une d'elles permettrait la réincarnation d'une âme en suspens dans le corps de celui qui la prononce. Nul n'a jamais vérifié si cette formule marchait. Le souvenir de Voldemort dans la Pensine aurait peut-être été réincarné dans August. Nous n'en saurons jamais rien. Des sépcialistes du Ministère ont refermé le bassin de Pensine en estimant que l'incantation n'ayant pas été prononcée entièrement, il n'y a aucun risque. D'ailleurs, d'après ce que tu nous as dit, les volutes de fumée disparaissaient quand ils sont intervenus.

- Pourquoi a-t-il fait ça ?

Hermione soupira :

- Nous l'ignorons. Il y a eu quelques adolescents fragiles et inconscients pour afficher une certaine admiration pour Voldemort mais nous avons toujours su canaliser ces élans. Mais August a échappé à notre vigilance.

- Erzébeth et moi faisions partie du plan d'August, mais pourquoi n'a-t-il pas essayé de sortir directement avec moi, l'unique petite-fille de Harry Potter ?

- Il savait que sa seule chance de soutirer des renseignements à la petite-fille de Harry Potter était de passer par Erzébeth. Il est suffisamment intelligent pour savoir que s'adresser directement à toi aurait éveillé les soupçons. Il a habilement manoeuvré. Depuis la mort de Voldemort, peu de personnes ont pratiqué l'Impérium, ce qui dans le cas présent a eu un avantage et un inconvénient pour lui. L'avantage est que, hormi quelques personnes âgées comme moi ou Ginny, personne à Poudlard ou dans leur famille n'a connu de personne soumise à l'Impérium. Un esprit exercé peut déceler quelques symptômes. L'inconvénient est qu'il n'avait de ce sortilège qu'une connaissance théorique : il ignorait que pratiquer régulièrement l'Impérium augmente à la longue le risque qu'on le découvre. En effet, celui qui y a été soumis une seule fois éprouvera la sensation d'avoir été fatigué, d'avoir eu des pertes de mémoire. Il mettra tout ça sur le compte du surmenage. Celui qui y est soumis plusieurs fois commencera à comprendre que quelque chose cloche et malgré son impuissance à faire disparaître le sortilège, il luttera à sa façon. Un esprit très fort essaiera de prévenir son entourage, un autre, plus jeune par exemple, sombrera dans un état dépressif qui l'amènera un jour ou l'autre à la confidence. C'est ce qui c'est passé pour Erzébeth. Sous son emprise, elle a suggéré de nous retrouver à noël chez tes parents afin de subtiliser tranquillement la cape d'invisibilité dans l'armoire de ta mère. Et si quelqu'un lui avait demandé pourquoi elle fouillait dans l'armoire d'Ophélia et Colin, elle n'aurait eu qu'à répondre qu'elle cherchait un pull ou un manteau...

- Comment est-il entré dans le couloir secret ?

- Il a compulsé depuis des années tous les ouvrages qui lui permettent d'arriver à ces fins. Il a réussi à fabriquer lui aussi un couteau magique. Il a pratiqué un sortilège ancien sur le malheureux garde du couloir secret, un sortilège dont je n'ai jamais entendu parler.

- Que va-t-il lui arriver ?

- Il est majeur, il est donc passible de l'enfermement à vie. Ce ne relève plus de ma compétence. Pour le reste de l'école, il a déménagé à l'étranger avec sa famille. Ce qui est d'ailleurs vrai en partie. Ses parents ne nous ont pas cru au début mais bien que cela leur coûte, ils ont fini par admettre la vérité en écoutant leur fils crier qu'il fallait réssuciter Voldemort. Ils acceptent de déménager au pays de Galles sous un nouveau nom et seront surveillés. Inutile de te dire de garder le secret, même pour tes cousins.

- Et Erzébeth ?

- Nous avons choisi de ne révéler à quiconque ces dramatiques évènements. Seuls quelques membres du Ministère sont au courant et ils ont juré de garder le secret. Erzébeth aurait du être amenée à Ste-Mangouste mais la nouvelle se serait vite propagée. Ta mère a fait venir de l'hôpital un ami médecin qui a soigné Erzébeth chez elle. Elle est choquée et reviendra peut-être pour le mois de juin. Nous dirons à ses camarades qu'elle a eu la RubéTroll, qui est très contagieuse. Je lui donnerais des cours de rattrapage cet été. Elle aura besoin de ton soutien, ma chérie. Elle culpabilise beaucoup. Elle passera la moitié de l'été chez elle et l'autre chez toi. Votre amitié sera sans doute la meilleure potion de guérison.

Quelques minutes plus tard, Mélina reposa dans la vitrine le couteau magique de son grand-père. Hermione, appuyée sur sa canne, la rejoignit.

- Que de souvenirs... soupira la directrice. Songe que ton grand-père en a connu autant, et même pire, chaque année. Et il y a eu des morts... Tu as été courageuse. Je me demande pourquoi cet affreux Choixpeau ne t'a pas envoyée à Gryffondor.

Mélina rit doucement :

- J'ai eu très peur. Si c'était à refaire, je recommencerais. Mais je préfère la tranquillité de la bibliothèque de Poudlard.

Riant avec sa grand-tante, elles quittèrent la pièce sans voir que dans un cadre, une photo animée de Harry Potter souriait malicieusement.