Moi qui sur la pointe des pieds, viens le plus discrètement possible déposer ce petit chapitre (qui ne l'est d'ailleurs pas tant que ça). Je m'excuse de cette désertion, mais j'ai attrapé ce truc, qui fait qu'on arrive plus à aligner une ligne... Le confinement avec mes deux monstres ne m'a certainement pas aidé, et cette semaine de vacances que nous nous sommes octroyés sur la cote d'azur à user et abuser des terrasses non plus. Ceci dit me revoilà... et je vous annonce que dans ce chapitre j'ai donné un bon coup de coup de pied à ces deux handicapés des relations sociale et amoureuse ;)

Vos impressions sont attendues... oui oui je quémande des reviews ... Je fait le pied de grue en attendant, dépêchez-vous j'ai une crampe.


L'astre des vérités

Suggestion musicale : « Creep » RadioHead

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L'impressionnant déploiement des ailes d'Hermione au-dessus des ressacs du lac noir se matérialisa en une bourrasque vigoureuse, puis au fur et à mesure de son voyage en une légère brise qui vint finalement caresser le visage de la nouvelle Directrice en un doux effleurement. Postée derrière la lucarne entrebâillée, cette dernière ne manqua pas la scène d'une miette. C'est une main sur le cœur, complétement mortifiée à la vue de la chute de sa protégée qu'elle relâcha finalement enfin son expiration lorsqu'elle l'aperçut au loin flotter et baigner dans une aura de force.

Recouvrant la parole après son angoisse, celle-ci articula encore difficilement :

- Croyez-vous qu'il était nécessaire d'en arriver jusque-là? Albus ? ... Nous aurions pu la perdre définitivement, quelle inconscience ! La main posée sur le vitrail du bureau éditorial, son regard toujours dirigé à l'endroit même où Hermione venait de se sauver, la Directrice questionna encore pleine de regret. Peut-être aurions-nous pu, je ne sais pas intervenir avant qu'elle fasse toutes ces choses contre elle ?

- Nous l'avions déjà perdue, Minerva, il nous fallait seulement compter sur Severus pour la sauver au risque de les perdre définitivement tous les deux. Vous savez comme il est nécessaire parfois d'atteindre l'obscurité la plus totale afin de se souvenir et d'enfin allumer la lumière. Répondit le portrait d'Albus qui fixait d'un regard luisant de soulagement son successeur.

Cette dernière, qui reprit sa sévérité reconnue, se tourna vivement vers lui.

- Hoo non, pas avec moi Albus, épargnez-moi vos formules fantasques qui ne fonctionnent qu'avec les innocents et crédules de ce château. Répondit-elle sèchement tout en le pointant du doigt. Cependant, je dois reconnaître que pour cette fois, c'est assez éloquent… Il a réussi, Severus nous l'a ramenée… Admit-elle lassée, la hanche appuyée dorénavant sur le rebord du bureau.

- Je n'avais aucun doute là-dessus, Severus a toujours su faire ce qu'il fallait même dans les pires circonstances qui soit.

- J'ai bien peur que pour certaines choses, il s'en veuille toute sa vie, lui demander de vous tuer ne l'a franchement pas aidé… Pauvre garçon…Il a tellement perdu lui aussi.

- C'est Miss Granger qui a besoin de toute notre confiance dorénavant, Minerva, elle seule à le pouvoir de l'apaiser. Ajouta-t-il d'un regard pétillant de savoir.

- À ce propos, comment saviez-vous qu'ils…

- Il y a des magies qui ne s'expliquent pas Minerva. Suggéra Albus dans un large sourire, le regard tout aussi étincelant que sa robe de sorcier étoilée.

- Même fait de peinture à l'huile magique, vous restez ce vieux fou. Termina-t-elle agacée juste avant qu'il ne lui fasse un clin d'œil qu'elle ne loupa pas.

L'obscurité environnante se perça en une ligne fine par l'ouverture de ses paupières. Aussi lourdes que deux gros sacs de sable emplis par la fatigue de ses dernières semaines, Hermione les força dans un dernier effort à travers son sommeil. Pestant intérieurement contre son horloge biologique qui la fit émerger, Hermione s'étonna de s'éveiller comme à l'accoutumée sans émettre le hurlement habituel. Aucune ombre, aucune peur… Juste cette étincelle qui l'arrache du monde endormi parce qu'il en avait toujours été ainsi au beau milieu de la nuit.

Les braises encore rougeoyantes éclairaient à demi la pièce, détaillant les contours de tout ce qui se trouvait autour d'elle. Elle regretta l'absence de fenêtre, qui, baigné par la lumière lunaire lui aurait sans aucun doute permis d'y voir plus clair. Encore embrumée, Hermione appuya son regard sur les murs sombres presque toujours aussi vierges qu'au début de son arrivée ici, avec cependant dorénavant par-ci par-là des piles organisées de ses affaires qui s'y appuyaient. Son regard bifurqua plus loin, là, dans le coin, sur le cabinet de potions fermé par un sortilège puissant qui la captiva un instant, tant l'ondoiement de magie se matérialisait délicatement à la faible lueur présente. Les fines particules présentes dans ce tortillement, mélange de poussière, de cendre et possiblement de magie palpable, étincelèrent presque en une danse abstraite et indescriptible. C'était si beau, qu'un sublime sourire se dessina sur ses lèvres…. La magie restait belle malgré le mal qu'elle avait pu lui causer par le passé.

Un raclement de gorge la surprit dans son observation. De l'autre côté, se tenait la silhouette de celui pour qui elle était encore de ce monde. Dans une posture droite et maîtrisée comme à l'accoutumée son ange se tenait assis dans un des fauteuils, si proche d'elle, qu'elle s'étonna de ne pas l'avoir aperçu bien avant. Hermione déstabilisée cligna des yeux jusqu'à s'accrocher à son regard rutilant, qui perçant la pénombre semblait la détailler depuis des heures, peut-être était-ce d'ailleurs la raison de ce sommeil réparateur. L'idée même de croire que sa présence puisse lui faire passer des nuits sereines et agréables… la fit frissonner. Une chaleur suave longea de part en part son corps peu couvert, animant ses pensées jusqu'à faire resurgir des morceaux de rêves et d'échanges passionnés, puis déglutit lorsque ce même regard qui la scruta alors se confondait à ses réminiscences.

Hermione se redressa quelque peu, déstabilisée par l'instant et sa présence imposante puis tapota l'édredon sur ses cuisses. Embarrassée, qu'il ait veillé son sommeil, elle lui fit la remarque :

- Vous savez que scruter de cette façon une personne durant son sommeil n'a rien de rassurant ?! Bien au contraire…

- De toute évidence, cela ne semble pas vous concerner puisque vous dormiez comme un bébé. La contra-t-il plein de satisfaction.

Il avait raison, il y a bien longtemps qu'une nuit si paisible ne lui avait pas été accordée… grâce à lui d'ailleurs… Possiblement…

Elle se secoua et bifurqua ses pensées avant de se laisser envahir une seconde fois par cette chose qu'elle ne maîtrisait pas. Finalement préoccupée par le fait qu'il ait pu l'apercevoir durant ce moment de totale vulnérabilité, l'inquiéta. Cela pourrait sembler dérisoire alors qu'il avait déjà été spectateur de ses pires états, mais… Avait-elle gardé la bouche ouverte en dormant ? Bavé ? Quelle horreur !… Ho non, pire, ronflé ? « Par Merlin ! » , Hermione se frotta le coin de la bouche encore pâteuse d'un coup de poignet, puis réajusta la bretelle de son top qui s'évertuait à glisser de son épaule à chacun de ses mouvements.

- Avez-vous dormi ? Demanda-t-elle afin de se rassurer sur la possibilité qu'il ait pu passer à côté des gestes disgracieux supposés.

Il arqua un sourcil et accoudé sur le bras du fauteuil, reposa le menton sur son poing ce qui affaissa totalement sa posture. La fatigue apparue en un claquement de doigts le trahissant en tout point jusqu'à se matérialiser sous ses yeux en deux grosses poches violacées.

- Non… Évidemment que non. Devina-t-elle.

- Votre perspicacité m'avait presque manqué Miss Granger. Railla-t-il tout en se levant avant de lui demander. « Une tasse de thé ? »

Hermione opina pour toute réponse et replaça cette bretelle pour la… Elle ne sait plus combien de fois.

Du thé au beau milieu de la nuit n'était franchement pas raisonnable, nul doute qu'il souhaitait les maintenir éveillés un temps, peut-être même jusqu'aux premières timides lueurs du matin. Lorsque la tasse fumante apparue sous son nez, Hermione l'attrapa, le remercia d'un hochement de tête et inspira les doux effluves fleuris qui lui chatouillèrent les narines. Elle l'observa, regagner d'une enjambée son fauteuil avant de s'y installer puis scruta , sans pouvoir s'en empêcher , ses lèvres prendre une gorgée de sa boisson.

Il ne l'avait pas quitté des yeux lui non plus. Son regard était d'ailleurs si insistant que même la brume d'évaporation ondulant hors de sa tasse ne minimisa pas l'intensité de ses iris noirs.

- Dois-je m'habituer à vous trouver ainsi à chacun de mes réveils et à poursuivre mes nuits à boire du thé en votre compagnie ? Osa-t-elle malgré l'examen dont elle était sujette.

- N'est-ce pas vous qui pas plus tard qu'hier avez fait le choix de ne plus me quitter d'une semelle sous prétexte que je sois celui sur qui vous avez décidé de veiller ?

- Peut-être ne fallait-il pas commencer avec moi, en me proposant vos séances d'entraînement, vos soins et votre hospitalité ?!

- Idiote. Bredouilla-t-il dans sa gorgée. Comme si j'avais pu vous laisser ainsi ... Ajouta-t-il ensuite.

- C'est si aimable de votre part. Se gaussa-t-elle de lui.

Hermione cacha son amusement en soufflant sur sa boisson avant d'en boire elle aussi une gorgée.

Elle l'observa amusée se renfrogner, quelle idée avait-elle eu à imposer sa présence future et permanente à celui qui depuis des années s'évertuait à repousser quiconque tentait de pénétrer son intimité. La facilité avec laquelle elle avait pu lui imposer cette fatalité soit qu'il fût le premier à s'imposer à elle, pour elle ne sait quelle raison d'ailleurs. Jamais il ne s'était tant préoccupé de qui que ce soit, du moins aussi ouvertement. Elle le savait protecteur d'une certaine manière, oui, comme lorsqu'il veillait sur Harry et ses années maudites, le faisant survivre plus que la première année. Mais cette bienveillance qu'il lui manifestait, jamais elle ne l'aurait envisagé, le plus déroutant étant finalement ce qu'elle vivait depuis des semaines à ses côtés, cette intimité déconcertante. Ces jours en sa compagnie, lui permirent d'entrapercevoir l'homme qu'il pouvait être lorsqu'il… S'inquiétait ?... Se laissait atteindre … S'attachait à quelqu'un...

- J'aimerais savoir ce qui vous pousse à vouloir perdre votre temps pour moi ? Ai-je perdu le mien en vous imaginant plus ambitieuse ? L'interrompit-il dans ses pensées, tout en se redressant quelque peu sur son fauteuil.

Hermione l'observa avec aplomb, après tout, lui ne s'embarrassait jamais pour le faire. Il semblait atteint, aux premiers abords en objection avec sa décision… Presque en colère, mais dans ses pupilles, les portes de son âme, elle y perçut le soulagement, la reconnaissance de lui offrir cette perspective de ne plus être seul. Il était étrange d'inverser les rôles, Hermione si forte de le vivre ainsi , dominait l'instant , ébranlant quelque peu son homonyme malgré l'apparence qu'il se donnait , puis jubila en découvrant qu'il était si bon de vivre pour celui à qui elle vouerait dorénavant sa vie. Déterminée, elle lui donna une réponse qui pour elle résumait tout le pourquoi :

- Parce que nous sommes pareils.

Il se leva brusquement heurté par ses quelques mots. Voilà des heures qu'il luttait contre la fatigue et se gavait de théine afin de ne pas rompre la vision enchanteresse que cette nuit irréelle lui offrait. Seulement, là, maintenant, c'est la colère qui implosa en lui, le faisant presque regretter ces heures de veillée où la réalité et les rêves s'étaient mêlés.

Embarqué dans les cent pas qu'il s'était mis à faire dans cette pièce subitement trop petite, Severus tenta de calmer le maelström de sentiments qui battait dans sa poitrine en un vacarme incessant, en vain. C'est alors qu'il l'observa intensément lui aussi, comme elle le faisait, mais en y ajoutant tant de fureur, qu'il put reprendre cette place de dominant qu'il ne laissait jamais, surtout pas à une idiote.

Ho oui pour sûr idiote elle l'était! Idiote ! Impossible de ne pas l'être pour déblatérer une telle ineptie… Et cette foutue bretelle qui semblait s'évertuer à vouloir lui en montrer plus qu'il ne le faut, n'arrangeait strictement rien. Bien au contraire, il en martela bien plus intensément le parquet grinçant de ses talonnettes. Le cœur battant des rythmes oscillant et instable, il se stoppa finalement face à elle, se pencha la faisant se reculer d'inquiétude et matérialisa toute sa fureur dans ses mains qui , rageuses , agrippèrent le drap de chaque côté des cuisses d'Hermione.

- Vous ne savez pas ce que vous dites. Siffla-t-il si bas que même les plus petits colocataires de cette pièce regagnèrent tremblants de toutes leurs pattes leur nid de toile.

- Je sais exactement ce que je viens de dire. Rétorqua Hermione de façon neutre, esquivant son regard, peu rassurée de déceler tant de colère pour si peu de mots.

C'est alors que d'un mouvement vif de la main, il attrapa son menton, la faisant haleter de panique et releva son visage afin qu'elle ne loupe rien de ce qu'il avait à lui répondre :

- Pour votre bien Miss Granger, je ne vous souhaite pas d'être comme moi. Ne me qualifiez pas de bon ou de, que sais-je, après ces quelques semaines, elles ne veulent rien dire, elles ne révèlent en rien ce que je suis vraiment. Sachez que je ne suis pas de ceux qu'on côtoie, et encore moins celui à qui on s'attache. On ne me fuit pas comme la peste sans aucune raison. J'ai choisi de devenir ce que je suis devenu, un Mangemort Miss Granger, ni plus ni moins, j'ai enlevé, torturé et tué, principalement des gens comme vous, au début sans remords jusqu'à le faire par habitude…

- Par soumission ! Trancha Hermione, balayant toute crainte et enveloppant la main sous son menton de la sienne. Vous négligez vos meilleures actions, elles n'effacent pas les plus sombres de votre passé, mais elles ne doivent pas être bafouées.

- Foutaises ! Ragea-t-il

- Je vous ai vu participer activement aux missions de l'ordre parfois au péril de votre vie, vous avez protégé bien plus d'innocent, que les vies qu'on vous a obligé à prendre sans parler de votre aide inestimable lorsque nous étions à la recherche des horcruxes et je n'énumérerais pas vos actions en sous-marin, celles dont personne n'est au courant.

- Je n'étais rien qu'un pion, un de ceux qu'on déplace, qu'on missionne, la moitié de mes bonnes actions comme vous dites, je ne les aie pas faites de gaieté de cœur.

- L'autre moitié compte double ! Et dois-je aborder votre plus grand sacrifice ? Le questionna-t-elle finalement, son souffle mêler au sien avant de continuer. Votre vie… Vous avez donné votre vie à Dumbledore et à son plan que vous saviez pourtant bancale…

- POUR LA LUI PRENDRE EN RETOUR MISS GRANGER ! Vociféra-t-il en une expiration avant de reprendre difficilement une goulée d'air emplie de la saveur tentatrice de celle qui lui tenait tête. Ne faites pas de ma pire erreur un acte de bravoure, Par Merlin… Jura-t-il la voix étrangement vacillante alors qu'il percevait les scintillements de compassions dans les noisettes qui le happait.

- Par obligation, une fois encore… Vous n'aviez pas à vivre ce fardeau seul et je remercie mille fois Harry de m'avoir laissé voir vos souvenirs afin que je puisse aujourd'hui vivre ce fardeau et le partager avec vous. Souffla-t-elle délicatement, lui partageant tant, que toutes choses se bousculèrent en elle.

La fatigue de Severus l'emporta, il ne tenait plus, ses blessures s'insinuèrent à travers ses failles et firent surface une fois encore ravageante ses traits d'une mélancolie et d'un désespoir intense. Il détestait Hermione d'appuyer là où c'était douloureux… Mais l'appréciait pour ces mêmes raisons. Elle était la seule à viser juste avec lui… La seule. Sa main, enveloppant son poignet quant à elle, avait l'effet du réconfort. C'était bon, tendre… Si, sincère qu'il n'enleva pas la sienne non plus de son visage, s'abandonnant totalement à la caresse si délicate qu'il lui sembla ne jamais avoir perçu de douceur si pure de toute sa misérable vie. Finalement, las, il se laissa glisser au sol et ploya le genou devant elle comme on le fait aux pieds d'une Reine, avant de murmurer, cacher derrière ses longues mèches noir de jais :

- Pardonnez-moi…

Hermione terrassée, l'observa interdite… Comment devait elle réagir envers cet homme brisé ? … Bien trop brisé… Comme elle…

C'est lorsqu'elle perçut le contact de sa tête reposant sur ses genoux, qu'elle se laissa aller, elle aussi, emportée par l'instant bouleversant… et plongea à corps perdu dans ce lâcher prise. D'une main légère, elle vint caresser chaque angle de ce visage abattu, balayant du bout des doigts quelques mèches qu'elle lui plaça derrière l'oreille pour l'observer avec minutie. Un contact délicat qu'elle savait rare, son ange était intouchable, au grand jamais il ne lui était arrivé de partager ne serait-ce qu'une poignée de main avec quiconque, elle se sentait si privilégiée qu'elle usa l'instant jusqu'à être certaine d'en garder le moindre souvenir.

Il semblait si fragile en cet instant, qu'elle en accommoda l'appui de ses caresses sur sa peau éreintée par bien des années. Un pardon encore, il s'en voulait de s'être emporté, seulement, elle refusait d'être de ceux pour qui il voulait se faire pardonner, la liste était déjà bien assez longue qu'il était inconcevable de l'allonger de son nom. Tandis qu'elle s'attelait à le cajoler comme on le ferait pour un ami… Proche, Hermione susurra les raisons de ses mots, mesurant chaque syllabe afin de ne pas brusquer l'instant reposant :

- Nous sommes pareil Severus, parce que nous avons tellement de particularité en commun que je ne les compte même plus. Vous… Moi, sommes de ceux détruits par la vie, par nos choix… Nos vies devenues des périples si tortueux que nous avons été amenés à commettre le pire acte contre soi, vous si tôt qu'il m'est inconcevable de m'en imaginer la raison, moi plus tard alors qu'on venait de m'arracher ceux pour qui je vivais. Vous êtes comme ça vous aussi, vous vivez pour les autres. Je le sais parce que les gens comme nous, font ainsi, si introvertis, si socialement différents que nous bataillons bien plus pour nous faire accepter, faisant passer le bien être de ceux que l'on souhaite auprès de nous avant le nôtre. Les sacrifices, c'est notre quotidien…. Mais les voir heureux n'a pas de prix, jusqu'à ce qu'on nous les enlève et que nous nous évertuons à dire, pardon… Termina-t-elle, fermant les yeux évitant ainsi de se laisser aller à des sanglots aux souvenirs de ceux perdus.

- Étonnant que vous énumériez les plus subtiles de nos points communs sans même pointer le flagrant d'entre eux. Nos ailes Hermione ! N'oubliez pas nos ailes. Ajouta-t-il afin d'alléger l'instant et la détendre tout en quittant le doux contact de ses jambes.

Il contempla les lèvres d'Hermione ébaucher un sourire les yeux fermés et resta là, à genoux devant elle, l'observant comme on observerait un coucher de soleil au-dessus d'un océan ou encore une aurore boréale allongé dans les neiges d'Islande. Elle était autant merveilleuse que toutes ces choses-là et il n'en fut que plus chanceux de la savoir auprès de lui, maintenant et après comme elle lui avait dit.

Elle avait raison, ils étaient pareils, bien plus qu'elle ne le croyait d'ailleurs. Nombreuses sont les fois où lorsqu'elle était élève, il s'était vu en elle, s'évertuant au-dessus d'un chaudron à concocter la perfection, recroquevillée dans un coin de la bibliothèque avec pour seule compagnie une pile de livre, assise seule dans la grande salle déjeunant sur le pouce le nez plongé dans les fiches d'arithmancie.

Vingt ans avant, c'était lui…

Une douée en tout, du fait de ses capacités et son acharnement, comme lui… La différence, cependant étant qu'elle ne s'en cachait pas, ravie de démontrer aux autres ce qu'elle savait jusqu'à agacer son monde. Un rictus se dessina aux souvenirs d'avoir eu plus d'une fois l'envie de lui arracher son bras tendu vers les étoiles les plus éloignées du système solaire, agrémenté de son sourire suffisant… mais finalement n'aurait-il pas été pareil s'il avait eu des parents soudés et fiers de lui, comme elle avait pu avoir, l'enivrant de confiance jusqu'à l'en faire déborder. Sans doute…

L'instant dura, trop longtemps… Tant qu'il aurait pu se laisser aller à l'entraîner se recoucher tout en la couvrant de lui pour sans aucun doute ne pas la faire dormir. Mais il ne devait pas lâcher, ne pas succomber… Il devait garder pour lui ce qu'elle lui faisait, là au creux du ventre. Cette force, qui émanait d'elle, était la même qu'elle projetait lorsqu'au front, elle s'était battue en véritable guerrière. Il l'admirait pour ça, une admiration qu'il n'aurait jamais cru possible, mais qui était bien née cette année-là.

Son Patronus l'avait observé plus qu'il ne fallait alors qu'il veillât au bon déroulement des événements lorsque, elle, Harry et leur comparse étaient en quête des horcruxes. De temps à autre, sa biche lâchait des yeux Harry pour suivre cette Lionne enragée qui par moment s'isolait, pour lire principalement, s'entrainer au combat aussi… Où s'adonner à quelques brasses après sa toilette dans les étendues d'eau qu'elle trouvait à l'abri des regards indiscrets… sauf le sien, de toute évidence… Ho, il n'en était pas fier et comptait bien garder ce détail pour lui seul à tout jamais, seulement lorsque le quotidien s'apparente à l'enfer, on s'accroche de toutes nos forces à ce qui nous évade.

Évidemment, tout s'était emballé à son retour, il l'avait scrutée sombrer, sa déchéance n'avait rien amélioré, mais il était si ravagé lui aussi, qu'il avait été plus simple de continuer à faire comme il avait toujours fait, rester cet impitoyable et exécrable professeur, en retrait, loin d'elle.

Jusqu'à cette soirée sombre et silencieuse qui encore aujourd'hui le hante, le sifflement de son corps frêle fendant l'atmosphère pour se frayer un chemin jusqu'au sol boueux et sale de son histoire résonne encore en lui comme une véritable litanie. Il avait balayé cette soirée-là, en une fraction de seconde, tout ses principes, se promettant de la faire redevenir cette jeune femme impitoyable bravant les épreuves avec fougue et ingéniosité, quitte à souffrir de ce qui implosait en lui. L'apparition étonnante des mêmes ailes qu'il portait avait aidé, lui accordant plus de temps pour son changement mais n'avait rien arrangé quant à ce qu'elle devenait un peu plus chaque jour à ses côtés. Et aujourd'hui elle était là, redevenue celle qu'il avait admirée tant de fois en secret, presqu'entre ses bras, presque contre lui…. Presque sous ses lèvres…

Il l'observa, elle gardait ses yeux curieusement clos comme si l'abri fait de ses paupières protégeait l'instant d'une quelconque interruption, les battements de son cœur cavalant à tout rompre l'encourageaient. Alors il s'avança, curieux de savoir jusqu'où il pourrait aller, il franchit les premières limites, puis prit inspiration dans son expiration. Il fixa ses lèvres, prêt à y déposer les siennes, elles semblaient délicieuses… Si prêtes à être dégustées que le visage de leur propriétaire s'inclina comme pour le tenter d'avantage… Mais il résista. Suspendu à sa bouche, il préféra ne pas succomber malgré le doux halètement qu'il percevait. Il se redressa, un peu, suffisamment pour sentir la cambrure de son corps contre le sien, ainsi, il percevait presque la rondeur de sa poitrine à travers l'étoffe épaisse de sa redingote qu'il ne quittait jamais.

Plus fort qu'il ne lui avait jamais été donné d'être, il détourna son visage et vint finalement délicatement se nicher dans sa nuque comme un refuge. En suspens à quelques millimètres de la fine peau sous le lobe de son oreille qui pulsait la douce mélodie du désir, ce ne fut pourtant pas plus simple.

L'effort qu'il décupla amenuisa sa retenue lui faisant presque mal, néanmoins et parce qu'habitué à souffrir, il ne déposa pas non plus ses lèvres à cet endroit tout autant tentateur. Mais y laissa simplement la trace de son souffle, une marque invisible qui avait pour but de l'obséder, tout autant qu'elle l'obsédait, l'enivrer jusqu'à que, soûl de lui, elle devienne sa dépendance. Il imagina sans mal son inconscience concernant ce qu'elle provoquait en lui, ce que ses mains avaient creusé comme sillons à chacune de ses caresses, ce que ces mots avaient bousculé dans sa tête et à quel point ils avaient fait chavirer son cœur.

Il l'avait oublié celui-là… Son cœur.

Severus se délecta encore un peu de ses dernières secondes en flirt avec les limites qu'il s'était lui-même imposées. D'une part, parce qu'il était bien plus savoureux de ne pas les franchir surtout lorsque celle pour qui vous vouez cette envie semble réceptive. L'autre part étant qu'elle restait Hermione Granger, son ancienne élève surdouée, Lionne des Gryffondor, seul membre du trio d'or encore en vie, vénérée pour cela et pour finir cette jeune femme de vingt ans sa cadette. Alors, après ces minutes salvatrices, il frôla du nez quelques-unes de ses boucles brunes, inspira ses chauds effluves au doux parfum de prairie sous le soleil d'été pour en mémoriser cet égard à tout jamais, puis lui susurra à l'oreille :

- Je suis discipliné, Hermione et pour le moment, je préfère le rester.

Sans attendre une quelconque réponse et profitant de ses yeux toujours clos, il se redressa en un bond, imprima ce visage empourpré et quémandeurs, ne loupa pas la vision délicieuse de cette bouche entrouverte, mais ne s'y risqua plus ... les limites… Le firent regagner sa chambre aussi vite qu'il le put.

Hermione s'autorisa à émerger lorsque le claquement de porte résonna jusqu'à elle avec coincé au fin fond de sa gorge un mot ... « restez » ... Qu'elle garda pour elle.

Dans le noir, tout fut plus simple, comme s'il avait suffi de ne pas voir pour croire que ce ne soit pas encore un de ses rêves qui s'achèvent. Aveugle tout était réel, l'empreinte de son souffle était encore là, sur ses lèvres avec encore les saveurs de son thé aux plantes alléchantes. Son corps si prêt, que chacune de ses cellules fondaient à son presque contact, où son souffle, encore, effleurant son cou lui provoquant des frissons partant de ses cervicales aux lombaires touchant toutes les synapses entre ces deux endroits.

Même privé d'un sens cet homme avait réussi à éveiller tous les autres si intensément qu'elle n'en était pas infirme bien au contraire, chaque zone qui la constituait, chaque récepteur cognitif qui la faisait s'étaient animés jusqu'à la consumer de tout son être. Son départ n'y changea d'ailleurs rien, Hermione brûlait sur place si bien que la pièce qui lui servait de refuge depuis des semaines, l'étouffât. Ses effluves de mélange d'herbe et plantes, mixés à une odeur plus masculine encore, chaud comme l'ambre… Flottaient dans la pièce avec insistance, rejouant et accompagnant les notes de sa voix grave jusqu'à son oreille.

« Je suis discipliné, Hermione et pour le moment, je préfère le rester »… Comme un ardent avertissement…

Hermione enfila ce qui lui passa sous la main, rien de bien attrayant, il fallait que ce soit seulement confortable, puis décampa aussi vite qu'avait pu l'être Severus.

Des mois qu'elle n'avait pas franchi les grandes portes de Poudlard, mais dans la précipitation elle ne se laissa pas submerger par l'angoisse que les jardins, l'ancien champ de bataille et l'étendue du monde avaient depuis sur elle. De l'air, il lui fallait seulement respirer un oxygène neutre, sans trace de Severus, sans trace de ses sensations qu'il avait éveillées en elle.

Là, au milieu du parc, elle déploya ses ailes qui vrombissaient comme impatiente elles aussi d'évacuer la tension. Une fraction de seconde plus tard du bout de leurs plumes, elles frappèrent le sol et propulsèrent Hermione dans le ciel. Elle se laissa guider par l'appel lumineux de la lune étonnamment belle cette nuit tout le long de son excursion improvisée, et ce, jusqu'à épuisement, jusqu'à n'avoir plus aucune notion du temps. Puis décida finalement qu'il était temps de fouler de nouveau la terre ferme après s'être vidée l'esprit.

Du ciel, elle avait aperçu une petite clairière à l'Est de la forêt interdite, une zone pleine de verdure parsemée du blanc des fleurs, un endroit sans danger apparent, parfait pour s'y reposer un instant avant de rebrousser chemin.

Lorsqu'elle posa pied entre les pâquerettes, Hermione dégaina instinctivement sa baguette car au même instant, elle perçut la présence de nombreuses silhouettes cachées dans la forêt qui bordait l'endroit. Sur ses gardes, dans une posture prête à se défendre, Hermione pivota sur elle-même, les sens en éveil, afin d'évaluer le danger. Bien trop sombre pour y percevoir quoi que ce soit, elle déploya ses ailes qui depuis sa panique s'étaient rangées d'elles même. Chaque plume s'écarta les unes des autres comme on déplierait un éventail, puis elles se préparèrent à claquer le sol pour s'envoler, lorsque finalement les présences s'avancèrent.

Hermione vit alors les ombres à quatre pattes s'avancer jusqu'à se découvrir totalement et l'entourer.

- Des Sombrals… Souffla-t-elle ahurie d'en apercevoir pour la première fois et en si grand nombre.

Ces bêtes inoffensives, qui n'étaient vues que par ceux qui avaient vu la mort déplièrent à leur tour, leurs ailes comme un salut à celle qui venait d'atterrir parmi eux. Hermione les contempla alors plus encore, c'était vrai, leur robe noire dépourvue de poil et leur silhouette émaciée ne les rendait pas agréables à regarder, cependant leurs ailes aux allures de celles d'une chauve-souris, déployées ainsi les rendaient majestueux.

Sa contemplation fut interrompue lorsque le croassement des corbeaux qui s'étaient rassemblés en une nuée en bordure de clairière, l'entourèrent eux aussi.

Cernée Hermione se demanda ce qu'il était en train de se passer, lorsque le silence se fit d'un coup, laissant seulement la brise de la nuit faire frissonner les feuilles des arbres en un doux murmure. En revanche, les croassements des corbeaux n'étaient plus, les hennissements de Sombrals non plus et alors qu'Hermione pointait de nouveau, du bout de sa baguette un potentiel danger, les sinistres chevaux ailés inclinèrent leur museau jusqu'à frotter la terre et les corbeaux firent de même du bec en équilibre sur leurs branches.

Hermione encore plus étonnée pivota et observa ces animaux prosternés pour elle. Ses ailes vrombirent une fois de plus sans que ce ne soit de son fait, et s'érigèrent du plus haut qu'elles le pouvaient donnant à Hermione au centre de cette clairière l'apparence d'une souveraine.

Souveraine parmi les emblèmes de la mort…

A suivre …

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