- Eh bien Harry, je crois que je t'ai tiré d'un sacré mauvais pas, dit Draco en reprenant son souffle.

Dès que Rogue eut refermé la porte derrière lui, le serpentard avait en effet été pris d'une incontrôlable envie de courir. Qu'il avait suivi, entraînant derrière lui le gryffondor toujours muet.

C'est ainsi qu'ils se retrouvaient tout les deux dans un sombre couloir du deuxième étage, les joues rouges et les yeux brillants.

- Oui, et euh…je t'en remercie, lui répondit Harry, légèrement haletant et toujours aussi peu sûr de ce que dirait sa langue.

- Puis-je savoir ce qui s'est passé au juste ? Il avait mis quelque chose dans la tisane, c'est ça ? le questionna Draco avec son air le plus innocent.

- Oui, Véritasérum sans doutes.

Harry s'était rapproché d'une fenêtre, et pour être sûr de se contrôler et ne rien dire d'embarrassant, il fixait la forêt interdite que l'on pouvait apercevoir au loin.

- Sacré Séverus, il ne sait pas résister à la tentation, reprit Draco avec une moue ironique en se rapprochant lui aussi de la fenêtre.

- Tentation ? quelle tentation ? C'était horriblement gênant ! j'ai l'impression que ce n'est même plus moi qui parle !

Le gryffondor avait les joues rouges d'avoir couru et les yeux brillants de larmes qu'il se refusait de verser.

Il n'osait même pas imaginer.

La panique qui l'avait saisi quand il s'était mis à parler. Savoir qu'on le contrôlait, contre sa volonté…

Cette situation lui était vaguement familière, avait trouvée un écho en lui.

Mais qui ?… Lui ! si seulement il se souvenait, si seulement il pouvait…

- Harry, ho, Harry ! Tu es là ? Tu m'écoutes ? répéta Draco plusieurs fois, surpris par l'air absent du Vainqueur.

- Désolé. Draco, j'aimerais tellement me souvenir, reprit le brun en fixant un point au loin dans le parc.

- Quoi ? Tu ne te souviens plus pourquoi ces photos étaient là ?

Draco éclata de rire.

- D'ailleurs, j'aimerais bien savoir moi aussi ce que ça signifie, enchaîna le serpentard, se rapprochant dangereusement du Potter de Lumière.

- Je crois que…quand je me suis battu contre lui…

- Contre qui t'es-tu battu Harry ? Rogue ?

Draco était perplexe, contemplant étonné son acolyte. Si c'était bien du véritasérum, il devrait encore faire effet, et Harry lui aurait répondu.

Au lieu de cela, il avait droit à des élucubrations de mauvais genre. Harry était pacifique depuis ce terrible combat, alors qu'est-ce qu'il…sauf si c'était justement de ce combat là qu'il parlait.

La surprise passée, Draco ouvrit grand les oreilles, en digne Malfoy qu'il était.

- …je sais qu'il s'est passé quelque chose. Mais quoi ! quoi bon sang ? Il n'y a rien dans ma tête, mes souvenirs sont vides !

Harry s'échauffait, son esprit se torturant lui-même à chercher quelque chose qui visiblement ne s'y trouvait plus.

- Heu…du calme Harry, ce…c'est pas grave tu sais. Je crois que personne n'aurait aimé vivre ce que tu as pu vivre. Alors on ne t'en veut pas de préférer oublier, tenta de le consoler Draco.

- Comment faites-vous ? pour être sûr qu'il est bien mort…même moi je n'en suis pas sûr… Aaaaahhh ! si seulement cette maudite tête voulait bien fonctionner correctement un instant !

De rage, le gryffon lança son poing contre le mur.

- POTTER ! Mais qu'est-ce que tu me fais là ! Il est mort, tu l'as tué comme tu devais le faire, pourquoi cherches-tu malgré tout les complications ! Hein, à quoi ça t'amène ?

Draco s'était saisi du bras du gryffondor, et serrait son poignet aussi fort qu'il le pouvait, cherchant à le ramener sur terre.

Une simple entrevue avec son parrain, et voilà que ça dégénérait…il avait l'art de la zizanie celui-là ! Il allait avoir deux mots à lui dire.

- Tu ne sais pas ce que c'est de ne pas savoir ! Et de recevoir quand même toutes ces acclamations, pour quelque chose que tu n'es même pas sûr d'avoir fait ! Au fond, il reste toujours le doute ! Toujours, et chaque détail est là pour te le rappeler ! Et il n'y a personne pour te rassurer, parce que personne ne sait ! Pas même toi ! lui répliqua un Harry en furie.

- Certaines choses ne sont pas faîtes pour être su ! Alors cesse de jouer les martyrs Potter, et ressaisit toi par Merlin !

- Draco le Pragmatique, renifla Harry. Draco le Nonchalant ; as-tu déjà pris quelque chose assez à cœur pour en pleurer Draco ? le sentiment d'être trop petit pour le costume qu'on t'enfile ?

Il savait que c'était de la provocation. Pour essayer d'oublier qu'il s'était laisser aller. Mais on ne parle pas ainsi d'un Malfoy.

- Ecoute moi bien mon petit Potty, …

Il allait continuer sur sa lancée quand il se souvint d'un détail.

Mais trop tard. Le Mal était fait.

- Draco…souffla Harry, fasciné par le bout de ses doigts.

- Oh non…pardon, pardon, désolé Harry !

La main droite du Héros n'existait désormais plus. Elle était tombée en poussière…

Sous ces doigts, Draco sentit le poignet de Harry faire de même. Un poudre dorée, brillante, lumineuse flottait désormais autour d'eux.

- On dirait de la poussière de fée…qui aurait cru que j'étais fait de poussière de fée ? éclata de rire le brun, en sentant ses jambes se mettre elles-aussi à disparaître.

- Harry ! Je suis désolé, je m'excuse, pardon ! cria Draco paniqué, voyant les contours du Gryffondor s'estomper.

- Le baiser Draco…

Etrange comment cette même phrase sonnait différemment lorsque c'était Harry qui la prononçait.

Leurs yeux se croisèrent instantanément.

Les jambes du Vainqueur cédèrent sous lui.

Draco le rattrapa, serrant dans ses bras ce qu'il restait du Lion.

- Je suis réellement désolée Harry, je n'aurais pas dû… murmura le serpentard.

Avant de se pencher vers lui, et de poser, avec toute la douceur dont il était capable, ses lèvres sur les siennes.

Harry écarquilla les yeux, et chaque particule dorée qui avait pu le constituer auparavant s'embrasa, aveuglant les deux compagnons pour un instant.

Quand Draco osa ouvrir les yeux à nouveau, il était allongé par terre, tenant dans ses bras un Harry bien entier et aussi rouge que son blason.

Le serpentard le lâcha immédiatement, comme ébouillanté par ce contact trop prolongé.

- Hum, et bien, euh… encore désolé, hein, Harry, tu ne m'en veux pas j'espère ? questionna Draco, se relevant et époussetant ses vêtements.

- Si tu t'es énervé c'est sans doute parce que je l'avais cherché…

- Tout à fait, tu as l'art de me faire sortir de mes gonds. Et tu étais limite hystérique, ce n'est pas très bon pour l'image du marque de l'Ange Sauveur du monde sorcier, conclut Draco tout en détournant le regard.

Harry se leva à son tour, un air songeur au fond des yeux.

- …mais étais-tu obligé de m'embrasser…sur la bouche ? continua-t-il avec malice.

- A situation désespérée, remède désespéré, Potter, répliqua Draco, vexé à son tour.

Le brun éclata de rire.

- Ne te fâche pas ! On n'a qu'à dire que c'est notre petit « secret », avec l'entrevu chez Rogue. Si Hermione apprend qu'on s'est disputé, elle va encore me faire la morale, acheva Harry avec une grimace.

- Pareil pour Pansy, grogna le blond en contemplant à nouveau la fenêtre.

Il s'écoula un moment avant que l'un des deux ne se décide à faire un geste.