Severus parcourut le papier des yeux avec frustration. Sa mère était-elle allé à Serpentard elle aussi ? Elle avait confirmé avoir été une Prince, vaguement évoqué une fuite et la rupture de tout contact avec sa Famille sans développer plus avant la question, puis elle lui avait dis qu'il ne trouverait rien de ce côté là, qu'en tant que son fils et celui d'un moldu il était aussi renié qu'elle. Elle avait du comprendre directement ce qui l'intéressait dans cette question. Elle avait conclu sa lettre en lui interdisant formellement de lui renvoyer un hibou. Il aurait aimé des détails sur cette interdiction, son père avait-il frôlé la crise cardiaque en voyant le hibou taper au carreau ? Le Serpentard sourit à cette délicieuse pensée. Il s'en était plus probablement pris à sa mère réalisa t-il soudain avec une once de culpabilité. Il fourra cette réponse laconique dans sa poche avec contrariété et entra dans son dortoir.

— ...Bile de tatou imbécile ! S'écria Mulciber.

Severus se figea et observa Avery arracher le livre des mains de Mulciber et griffonner sur son parchemin avec une telle férocité que la plume crissait douloureusement sur le vélin.

— Ça peut arriver à tout le monde de se tromper de page râla Avery en fusillant son voisin de table des yeux.

— C'est pas en s'hurlant dessus qu'on y arrivera mieux tempéra Rosier qui était couché sur son lit, un livre calé sur les genoux en guise de pupitre pour son devoir. Il avait une plume qui gouttait sur sa couverture à la main.

Il aperçut Severus à cet instant et le couva du même regard dénué d'hostilité qu'il avait toujours pour lui. C'était le seul Sang-Pur qui ne le regardait pas comme un Veracrasse à Serpentard. Repensant à la promesse qu'il avait faite à Lily pour faire des efforts de sociabilité, Severus résista à l'envie de faire demi-tour qui l'avait saisi en s'apercevant de la présence des trois Sang-purs.

— Si vous voulez proposa t-il timidement, je peux vous donner un coup de main j'ai déjà fini le devoir de potion…

Mulciber le dévisagea agressivement.

— On a pas besoin de l'aide d'un Sang-de…

— Tu as des bonnes notes en Potion je crois ? l'interrompit Rosier.

Il savait que oui, après tout il avait pu le constater par lui-même lors des quelques cours particuliers qu'il lui avait déjà donné, mais Severus voyait ce qu'il essayait de faire... Il resentit un brusque élan de reconnaissance pour le Sang-pur.

— J'ai une moyenne d'Optimal répondit-il calmement.

Rosier sourit et se releva souplement, il s'installa à table à côté des deux autres et tira la quatrième chaise en faisant signe à Severus de les rejoindre.

Severus hésita quelques secondes puis s'installa avec eux.

— Vous voulez le finir ce devoir ou non ? Demanda Rosier aux deux autres qui restaient hostilement figés et mutiques.

Ils acquiescèrent silencieusement et Severus récita les propriétés de la Potion d'Aiguise-Méninge, sans se donner la peine d'utiliser son cours. Il leur expliqua l'histoire de la potion et leur conseilla de trouver des exemples anecdotiques pour illustrer le devoir. Il avait remarqué que Slughorn adorait ça et il était sûr qu'avec cette astuce les Sang-purs auraient de bonnes notes, peut-être qu'ils lui en seraient reconnaissant... Sitôt le dernier point posé sur leur parchemin Mulciber et Avery s'éclipsèrent sans un merci. Rosier lui, rangea précautionneusement son devoir dans son sac et étudia Severus d'un regard curieux. "Quelque chose a changé" dit-il en souriant.

— Comment ça ? S'étonna Severus sans comprendre.

— Tu te comportes différemment depuis quelques mois…

Une lueur de compréhension traversa les yeux noirs. Depuis qu'il savait qu'il était un Prince, Severus rechignait à se laisser marcher sur les pieds et il arborait une attitude plus fière, pâle copie de l'air que prenaient les Sang-purs à chaque instant. Il savait pertinemment qu'il n'aurait jamais osé s'adresser de lui-même à ses camarades de dortoir avant de savoir qu'il était presque leur égal. Promesse ou pas.

Rosier pencha la tête sur le côté dans une interrogation muette.

— Je ne suis pas un Sang-de-Bourbe lâcha Severus d'un ton catégorique.

— Je sais. Tu es le fils d'Eileen Prince nan ?

Severus le dévisagea avec stupéfaction. Comment tu sais ça ?

— Pourquoi tu te comportes en Sang-de-Bourbe depuis le début alors ?

— Mon… Mon père est moldu. Mais c'est fini ça.

— Ah oui ? Lâcha Rosier avec une nonchalance sceptique.

Severus quitta la table pour s'éloigner de l'irritante condescendance du Sang-Pur et se laissa tomber sur son lit, décidé à ne plus lui répondre. Nullement perturbé, le Sang-Pur sortit de sa poche quelques dragées surprises, il en mit une sur la table, déplia une lame et écrasa prudemment la dragée du plat de la lame pour voir la couleur du bonbon sous l'enrobage blanc. Severus l'observa faire avec intérêt et un éclat fasciné traversa brièvement ses yeux noirs. Quand il eut identifié le parfum du bonbon, Rosier le mangea et se retourna pour le regarder, posant un bras désinvolte sur son dossier, il sourit de nouveau.

— C'est pas aussi simple que tu crois d'échapper à son Sang dit-il.

Severus entra dans son laboratoire. Il fallait qu'il vérifie mais il était sûr que son idée marcherait, il sentait une sorte d'instinct naître en lui à mesure qu'il s'améliorait dans l'élaboration des potions. Il posa la fève sopophorique devant lui sur le plan de travail et il pressa l'ingrédient du plat de la lame de son couteau d'argent. La fêve s'écrasa facilement créant une petite flaque de jus noirâtre. « Merci Rosier » pensa t-il en se remémorant la prudence du Sang-pur face à ses dragées surprises. Un sourire moqueur glissa sur ses lèvres. Le Serpentard s'empressa de préparer le reste des ingrédients et suivit scrupuleusement la recette, il ajouta le jus de la fève, remua la potion à la façon plus efficace qu'il avait réussi à trouver, un tour dans un sens sept tour dans l'autre.

Severus s'épongea le front avec la manche de sa robe et se laissa tomber sur sa chaise avec un petit soupir satisfait. Le chaudron bouillonait paresseusement sur la table de travail. Viscosité parfaite. Couleur parfaite. Et il avait mis moins de temps que la recette devait prendre dans la version d'origine, il prit sa plume, ouvrit son livre, entoura d'un cercle ample le « découper » et annota « écraser avec le plat de la lame libère mieux le jus ». Il avait déjà corrigé la façon de remuer la potion. La recette lui semblait optimale comme ça, il allait pouvoir passer à la suite et laisser enfin cette maudite potion derrière lui. En tournant la page il tomba sur la formule de son premier sort griffonné en bas d'une page et un vague sentiment d'ennui voila son regard. Il accrocha des yeux la fenêtre en face de lui dont le bleu pur du ciel innondait la pièce de lumière fraîche. Que pouvait bien faire Potter en ce moment ? Peut-être était-il en train de briser le règlement ? Ça ne ferait pas de mal de vérifier, au pire il trouverait bien quelques informations utiles pour la suite…

Severus se glissa dans l'ombre du couloir sans faire de bruit, les sens en alerte. Il jeta un coup d'oeil au trois élèves qui bavardaient assis par terre autours d'un parchemin froissé. Trop loin. Il fallait qu'il se rapproche pour entendre ce qu'ils disaient. Il avança un peu plus et se glissa dans une alcôve voisine.

— … de la chance que ce soit ça Pitt disait Potter une main réconfortante posé sur l'épaule de Pettigrow.

— C'est sûr répliqua Sirius en agitant le parchemin froissé, on aurait pas pu faire mieux. Tu vas pouvoir te faufiler partout sans être vu, on va enfin pouvoir finir la carte grâce à toi.

— Mais… Je pourrais pas vous suivre pour… Pour Rémus balbutia Pettigrow, je suis trop petit. Et je crois pas que je vais réussir à aller jusqu'au bout… Vous… Vous avez mis longtemps déjà, alors moi…

— Arrête un peu de pleurnicher Peter c'est gonflant grogna Sirius.

James lui lança un regard mécontent et Black soupira avec agacement mais se tût.

— Il suffit d'être patient et de persévérer assura t-il.

Severus crispa la mâchoire et tenta de ravaler la haine qui lui montait dans la gorge. Potter était un sale hypocryte. Il se coula dans l'ombre du couloir et s'éloigna des trois lions. Lily ne disait rien mais il savait que Potter s'acharnait à le traiter de mage noir pour le décrédibiliser auprès d'elle. Le Serpentard avait subis plusieurs croquenjambe gratuit ces derniers jours, généralement dans des couloirs bondés où tout le monde pouvait admirer le spectacle. Et après ce salopard jouait les justiciers défenseurs des faibles du genre de Pettigrow... Severus descendit vers les cachots.

Pour se défouler il travaillait sur un nouveau sortilège, encore un sortilège concernant le corporel… Quelque chose d'un peu plus complexe que l'Ungulcrement et qui serait sans nul doute bien plus utile et… Appliquable, d'un point de vue défensif. Severus traversa la salle commune verte d'un pas vif et à peine arrivé dans sa chambre, il s'étala rapidement sur son lit. Il sortit son Manuel Avancé de Potion de sa poche et couva d'un regard concentré les innombrables ratures qu'il avait déjà faite sur la formule du sort.

Aucun des préfixes qu'il avait tenté jusque là ne fonctionnait...


Severus observa Rosier et Falley qui travaillaient tous les deux en silence à sa table. C'était assez étrange de voir les deux Sang-purs le traiter comme un égal après tant d'années d'insultes et de mépris. En quelques semaines de coopération avec eux ils avaient réussi à nouer une relation courtoise.

Falley releva la tête de son parchemin.

— T'es sûr pour le protego horribilis ? S'enquit-elle.

— Certain.

— Si ça bloque la magie noire reprit-elle, ça veut dire que ça bloquerait un Avada aussi ?

Rosier releva le nez de son propre parchemin avec curiosité.

— Bonne question répondit Severus avec intérêt.

Les deux Sang-purs échangèrent un coup d'oeil discret alors que Severus feuilletait son livre de magie noire pour y chercher la réponse. Il parcourut rapidement l'ouvrage, ses yeux bondissant sur les pages avec frénésie. Après quelques minutes, il fronça finalement les sourcils.

— Il faudrait que je cherche ailleurs, je ne me suis pas encore renseigné sur les Impardonnables…

Falley l'observait maintenant d'un œil calculateur.

— C'est considéré comme de la magie noire dit-elle en détachant chaque syllabe.

Severus se figea. Peut-être que les Sang-purs aussi étaient moralisateurs ? Peut-être qu'il avait fait une erreur d'indiscrétion ?

— Y a rien de mal à se renseigner répondit-il prudemment.

Il examina le sourire qui fleurissait sur les lèvres de Rosier avec circonspection.

— Parfaitement d'accord rétorqua ce dernier avec un clin d'oeil, il lança un coup d'oeil victorieux à Falley. « Je t'avais dis que Severus n'était pas aussi coincé que les autres. Il a du Sang de Prince ça se voit… »

— Peut-être bien oui accorda la blonde en continuant de l'observer froidement.

Elle ajouta quelques mots à son parchemin et rangea soigneusement ses affaires puis elle tira un livre sur les créatures magiques de son sac.

— Encore tes bestioles grimaça Rosier en reportant son attention sur son propre parchemin.

— Ce ne sont pas des bestioles.

Severus leva le nez de son livre de magie noire. Il observa la photographie d'un Détraqueur en train de baisser sa capuche, l'image cessait de s'animer juste avant que l'on ne découvre ce qui s'y cachait, recommençant son geste encore et encore. En dessous de l'image mouvante une petite écriture pointue et serrée couvrait la large page jaunie.

— Les Détraqueurs ? Demanda t-il.

— Oui répondit Falley, des créatures fascinantes. Je t'ai déjà dis que j'avais un faible pour les créatures magiques la semaine dernière. T'as une mémoire de strangulot ma parole…

Severus haussa les sourcils.

— Je croyais que tu aimais les licornes moi !

Rosier éclata de rire et Falley le dévisagea d'un œil froidement méprisant.

— Les licornes ? Moi ? Tsss… Je ne m'intéresse qu'aux non-êtres, les autres sont médiocres et ennuyeux.

— Et… Qu'est-ce que tu leur trouves au juste ?

— Ils sont puissant affirma t-elle avec une véhémence avide, ils peuvent transformer complètement la personnalité d'un sorcier, sentir et se nourrir de ses plus sombres émotions… C'est comme s'ils te donnaient accès aux âmes des autres.

Severus sentit un frisson lui dévaler le dos.

— Ouais mais… Si tu te retrouvais en face d'un Détraqueur…

— Il suffit de savoir les gérer affirma t-elle d'un ton d'évidence.

— T'as pas réussi le Patronus que je sache coupa Rosier.

Falley tourna son regard de glace vers lui.

— Pas besoin de Patronus quand on a le bon état d'esprit.

Severus déglutit tandis que Falley replongeait dans son livre. Quel état d'esprit devait-on adopter pour gérer un Détraqueur ? Il avait lu quelque part qu'il n'y avait que la colère, la haine et le désespoir qui leur survivaient. Il repoussa cette idée et se promit de continuer à travailler sur ce maudit sort de Patronus.

Severus abandonna le reste de son dîner, le sortilège sur lequel il travaillait monopolisait ses pensées, chaque soir il imaginait ce que ça donnerait… Il se voyait s'en servir contre Potter, que les rires et les moqueries changent de cible. Il sortit de la Grande Salle. Ils verraient tous de quoi il était capable comme ça et plus personne n'oserait jamais l'humilier… Mais le sort ne fonctionnait pas encore, mauvais préfixe… Il se figea de stupeur en voyant Lily se relever du banc de pierre qui longeait le mur en face de la Grande Salle.

— Tu m'attendais ? Demanda t-il en l'observant avec incertitude.

— On s'est pas vu de la journée bredouilla Lily avec une moue triste.

Il sentit son coeur bondir furieusement.

— Euh ouais… C'est vrai bulbutia t-il.

— Ça te dis qu'on fasse un petit tour ?

— Avec plaisir répondit-il en sentant un élan de joie lui pétiller dans les veines, t'as passé une bonne journée ?

Elle haussa les épaules et ils commencèrent à marcher côte à côte. Elle lui raconta un peu sa journée, il sentait qu'elle avait un truc précis à lui dire. Elle avait cet air fragile qui perçait derrière son expression enjouée, le même que lorsqu'elle lui parlait de Tunie ou qu'elle lui reprochait ses lectures. Il l'écoutait en silence, détachant difficilement les yeux de son joli visage et de ses yeux envoûtant. Elle s'arrêta près du portrait qui menait à la salle commune des lions et se rapprochant de lui, elle joua avec le cordon de sa cape d'un air distrait.

— Sev…

Cette promiscuité le rendait très mal à l'aise, il avait l'impression d'être au bord de la crise cardiaque.

— Hmm ? Fit-il nerveusement.

Elle garda les yeux rivés sur le cordon de sa cape.

— Je sais que je t'avais dis de te faire des amis mais… C'est vrai que tu traînes avec Falley ?

Elle releva les yeux vers lui.

— Euh… On se parle de temps en temps mais euh… On traîne pas vraiment ensemble. Enfin pas comme nous deux quoi…

Elle se tortilla le nez.

— Ok tant mieux murmura t-elle avec un petit sourire, renouant le cordon de sa cape avec lequel elle avait joué.

Il s'aperçut qu'elle rougissait. Leur regards se croisèrent et il eut l'impression que le temps s'arrêtait quelques instants. Un éclat étrangement magnétique brillait dans le regard émeraude et il sentit son propre regard dériver vers les lèvres de la rousse. Et si...

— Lily ?

Ils sursautèrent et Lily recula brusquement. Alice venait de sortir de la salle commune de Gryffondor, elle fit aller son regard de l'un à l'autre avec hésitation.

— Désolé… Je euh…

— J'arrive coupa Lily en remettant une de ses mèches derrière son oreille, à demain Sev ! Ajouta t-elle en emboîtant fébrilement le pas à son amie.

Severus arriva devant le mur qui menait à la salle commune de Serpentard sans trop comprendre comment il avait fait le chemin, totalement dérouté. Il prononça le mot de passe et le mur se décala pour le laisser passer. Alors qu'il entrait, une boule de poil grisâtre se glissa entre ses pieds. Il eût un mouvement de recul et se heurta au mur en voyant l'énorme rat trottiner dans le couloir. Severus observa le rat s'arrêter, se mettre sur ses pattes arrières et lui faire un geste de la main en écarquillant les yeux. Le rat disparu brusquement en arrivant à une alcôve un peu plus loin, comme s'il s'était glissé derrière un voile invisible. Severus trébucha en entrant dans la salle commune et laissa le mur se refermer derrière lui d'un air hébété. Il avança vivement vers sa chambre. « Très étrange soirée » pensa t-il, il se demanda vaguement s'il n'avait pas malencontreusement ingéré un hallucinogène…


Severus soupira en fermant la porte de la salle derrière lui. Il n'avait pas cessé de s'entraîner à faire son Patronus. Trois fois par semaines pendant que Lily était avec ses copines il répétait le sort pendant plus ou moins longtemps en fonction de sa patience du jour. La dernière fois il avait fini par lancer des expulso si violent aux chaises et aux tables d'élèves qu'il avait dévasté la salle. Il lui avait fallu plus d'une heure pour tout réparer et il en était sorti plus déprimé que jamais. Un souvenir heureux c'était facile en théorie... Mais en fait le Serpentard commençait à se demander si sa vie n'était pas trop déprimante pour qu'il puisse réussir ce maudit sortilège de pacotille. Il repensa au cerf argenté de Potter et refusa de baisser les bras.

Il lança le sort pendant près d'une heure, obtenant la même brume légère qu'il réussissait à produire depuis deux semaines et se laissa tomber sur une chaise, il enfouit son visage dans ses mains avec fatalisme. Il venait d'atteindre les limites de sa volonté. Quand il en arrivait là il sombrait généralement dans un élan de détresse qui lui donnait l'impression d'être absorbé par un puits de ténèbres poisseuses.

Comme à chaque fois qu'il ressentait cette émotion-là, il pensa à Lily. Il soupira et les yeux clos, il pensa à la seule chose qui parvenait à le rendre heureux... Il pensa à la seule personne qui lui souriait… Comment pouvait-on lui sourire à lui ? Il déglutit et son visage se détendit alors qu'il visualisait la chevelure flamboyante de Lily, qu'il entendait son rire cristallin et qu'il voyait dans son esprit aussi clairement que si elle était en face de lui ses yeux émeraudes emplis de cette douceur compréhensive qu'elle était la seule à lui adresser. Il murmura le sort en effectuant le geste sans conviction. Il sentit la magie frémir et une lueur éclaira la pièce assombrie par le soir, si étincelante qu'il la perçut derrière ses paupières closes. Il ouvrit les yeux et une impression de chute vertigineuse lui tomba dessus alors qu'il contemplait avec stupeur la biche argentée, réplique parfaite du Patronus de Lily. Le Serpentard se tourna pour vérifier que la lionne n'était pas entré sans qu'il ne s'en rende compte, mais il était toujours seul.

Il contempla la biche en pâlissant, ce n'était pas de la joie. L'émotion qui avait forgé l'écureuil du Professeur c'était de la joie. L'émotion qui avait forgé le cerf arrogant c'était de la joie...

Severus tendit la main alors que la biche s'approchait gracieusement de la chaise sur lequel il s'était assis, il croisa le regard confiant de la biche et en sentant la texture étrange sous ses doigts il sentit deux larmes glisser sur ses joues. Une sensation de défaite absolue le vida du peu de volonté qui lui restait. Il continua de pleurer en silence devant la biche argentée. La profonde détresse qu'il ressentait maintenant c'était… C'était trop. Après tout ce travail, ces crises de colère… Après des semaines et des semaines à passer des heures à rêver de son Sombral en lançant le sortilège, à frôler le malaise parce qu'il avait fait trop d'épuisantes tentatives, il en venait à obtenir… Ça.

La Biche irradiait d'une émotion méprisable. Severus pleurait avec la conviction d'être désespérémment irrécupérable. Il prit brutalement conscience, et avec autant d'horreur que s'il s'était agis d'une maladie mortelle, que penser à Lily lui avait fait produire un Patronus qui irradiait d'Amour.