Kunou no naka ni noboseru
Prologue : Ikken', la rencontre…
Un bruit …Un crissement…Des roues sur du gravier.
Ma vie ici-bas ne m'intéresse plus, mais je ne veux pas me laisser mourir de faim. La maladie m'emportera bien assez tôt. Alors pourquoi ne pas manger un peu ? Ces gens doivent être serviables…Assez pour ne pas laisser un pauvre chat mourir parmi les cadavres d'humains.
Je me glisse dehors, de sous ces cadavres puants. Le village où j'ai trouvé refuge n'a jamais été très riche. Les gens n'ont rien, et ne peuvent même pas enterrer leurs morts dignement. Alors ils les jettent dans le fleuve Kamo, et la crue et la décrue les laisse pourrir sur les rives. Le cadavre d'un de ces malheureux est devenu mon refuge.
J'entends des voix à présent. C'est sûr, il y a des gens.
Je me glisse dehors, faisant bouger les os du squelette. Des cris. Pourquoi ces cris ? Deux hommes qui se tiennent l'un l'autre. Effrayés par ma présence ? Pauvres fous. Si ces os les effrayent, ils ne vivront pas longtemps. Je me retourne et passe mon chemin. Aucun d'eux ne pourra m'aider.
De nouveau, des cris. Les deux hommes ont sortit des sabres et se ruent sur moi. Bientôt la fin ? De toute façon, qu'est ce qui me retient ici ? J'ai perdu ma famille. Mes sept frères et sœurs, mes parents. Tous sont morts, de maladie ou par la folie des hommes. Les deux hommes s'approchent. Je ne fuis pas. Pourquoi fuirais-je ? La mort ne m'effraie pas. Je les regarde, ces deux humains méprisables. Juste assez de courage pour s'en prendre à un chat, mais pas assez pour ne pas hurler lorsqu'un cadavre bouge, même un tout petit peu.
« -Cette saleté de chat a osé nous faire peur !
- Je vais le tuer ! Cette bête dort dans les squelettes ! »
Les sabres se lèvent, prêts à s'abattre. La fin de cette misérable vie. L'épidémie n'aura pas gagné finalement.
« -Arrêtez ! »
Quelle est cette voix ? De quel droit décide-t-elle de ma vie ou de ma mort ?
« -Ce n'est qu'un petit animal. Vous ne devez pas le tuer sans raison. »
La voix est dure et douce à la fois. Elle chante à mes oreilles. Comment est-ce possible ?
« -Mais c'est une sale bête ! »
Un des deux hommes hurle. Sa voix, elle, est une nuisance sans fin pour mes oreilles. Ne sait-il donc rien faire d'autre que crier ?
« -Quelle importance ? »
De nouveau la voix douce. Je continue de m'éloigner, mais j'ai ralenti, comme enchanté par sa mélodie. A qui peut elle bien appartenir ? Elle me semble être la première chose vivante qui traverse cet endroit dévasté. Pourquoi me redonne-t-elle goût, même un tout petit peu, à cette vie que j'étais prêt à quitter ? Peut-être parce que j'y perçois une certaine tristesse, similaire à la mienne. La solitude…
« -Il vit seul dans ce monde infesté de démons. Il vit sans la moindre peur. »
Je me retourne, surpris, mais pas effrayé. Je n'ai pas peur. Comme il vient de le dire...
Un homme, grand et imposant, vêtu d'habits amples, vient de sortir de la calèche. Ses longs cheveux d'un noir de jais flottent autour de son visage paisible, comme si l'énergie phénoménale qui émane de sa présence animait chacune de ses mèches. Les étoiles percent les nuages et scintillent au-dessus de lui. Comment a-t-il pu sortir si vite de ce véhicule ?
« -Cette bête a été abandonnée par ses parents et a perdu ses sept frères et sœurs. Il est atteint par l'épidémie et il sait qu'il n'a plus beaucoup de temps à vivre. »
Les deux hommes semblent abasourdis, mais pas autant que moi. Comment cet homme, que je n'ai jamais vu, peut-il connaître les tréfonds de ma mémoire et de mon cœur ? Qui est-il donc ?
« -Mais son âme est courageuse. Il n'a pas peur du démon qui possède des pouvoirs. Nous ne pouvons pas l'abandonner. »
Il marque une pause. Sa voix m'invite à l'approcher. Inconsciemment, je me rapproche.
« -Je pense que tu les vois, n'est ce pas ? Viens. Viens auprès de moi. »
L'homme est à présent entouré d'étranges créatures, petites ou grandes, toutes imposantes, presque effrayantes. Mais je n'ai plus peur. Pourquoi aurais-je peur ? Je saute dans ses bras et m'y love doucement. Qui est cet homme ? Je ne sais pas.
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