L'enfant qu'il n'a jamais pu être

'Il paraît qu'il l'a réduit en bouillie!'

'C'est vrai qu'il s'est échappé par une fenêtre sur son Éclair de Feu?'

'Il n'a même pas utilisé sa baguette!'

'Et le serpent? Vous avez vu le serpent? Il l'a attaqué comme il l'avait fait avec Justin!'

Dans les heures qui suivirent l'évasion de Harry, les rumeurs les plus folles se répandirent tel un feu de forêt. À la fin de la journée il était une légende. Personne ne savait pourquoi il était parti et où. Ses camarades de classes effectuèrent un travail tellement bon à relater la correction qu'il avait mis à Ombrage que cela alluma la flamme de la révolte chez les élèves de Poudlard. À part la majorité des Serpentards, encore fidèle à Ombrage, et quelques Serdaigles, se considérant bien au-dessus de ce genre de distractions mesquines, violer les décrets devint une compétition.

Aussi, tous les regards et murmures d'ordinaire réservés à Harry prirent maintenant pour cible Ron et Hermione. Ils le connaissaient si bien qu'ils devaient forcément être dans le coup, non?

Où était-il parti? Finirait-il par revenir?

Était-il parti affronter Vous-Savez-Qui?

Ou au contraire allait-il grossir ses rangs?

McGonagall traversa les couloirs de l'école d'un pas pressé. Elle n'avait jamais vu une telle effervescence à Poudlard de sa vie. Elle aurait pu se réjouir secrètement de l'énergie renouvelée des étudiants à contester les décrets stupides d'Ombrage si l'heure n'était pas aussi grave. Harry s'était échappé de l'école Merlin seul savait où. En ce qui concernait la raison de son départ… elle avait un très mauvais pressentiment.

Elle entra dans le bureau du directeur et le trouva devant une de ses fenêtres, son regard bleu clair fixé sur un point à l'horizon que lui seul semblait capable de voir.

'Vous devez le rattraper!' Dit-elle à l'instant où elle entra dans la pièce.

'Bien le bonjour à vous aussi Minerva,' répondit Dumbledore calmement.

'Vous devez l'aider!' Reprit McGonagall d'une voix sévère. 'Vous devez partir à sa recherche et réparer les dégâts!'

'Les dégâts?' Pouffa Dumbledore. 'En effet j'ai entendu dire qu'elle avait été relativement choquée de sa riposte. Dans des circonstances plus normales je serais descendu à sa rencontre à l'infirmerie pour ouvrir une enquête, mais de ce que j'ai compris, les affaires concernant les étudiants ne font plus partie de ma prérogative.'

'Prérogative… Mais vous pensez que c'est un jeu?' Demanda McGonagall indignée. 'Il est tout seul avec un mage noir sur les talons. Et vous pouvez être sûr qu'il lancera toutes les forces dont il dispose à sa poursuite dès qu'il aura eu vent de cette affaire.'

'Croyez-moi, Minerva, quand je dis que personne ne prend cette affaire plus au sérieux que moi.' Dumbledore se tourna vers sa directrice adjointe. Sa voix était paisible mais son visage avait rarement paru aussi grave. 'J'ai essayé de faire amende auprès du garçon et, dans une certaine mesure, je pense qu'il m'a pardonné. Je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi généreux que lui.' Sa voix vacilla et il se racla la gorge. 'Harry m'a caché quelque chose. Un secret si sombre qu'il a préféré le garder pour lui plutôt que de le partager avec moi.' Il quitta la fenêtre pour s'approcher du phénix qui observait la scène avec attention. 'Je lui ai donné le plus d'informations possible dans le temps qu'il m'a accordé.'

McGonagall fronça ses sourcils. Accordé?

'Il ne s'est pas échappé,' reprit Dumbledore comme s'il avait deviné la question silencieuse. 'Il est allé à la rencontre de son destin. Il a découvert le secret que j'ai tenté de percer depuis la mort de ses parents. Je ne sais pas comment il y est parvenu, mais c'est ce qui lui a donné la confiance nécessaire pour partir.'

'Mais vous ne pouvez pas le laisser livré à lui-même!' Dit McGonagall. Elle commençait à se décourager.

'Nous devons respecter son choix et ne pas alourdir son fardeau plus que le ministère et les forces du mal ne le feront déjà,' répondit doucement Dumbledore. 'Il détourne l'attention de l'Ordre du Phénix, et nous devons prendre cet avantage qu'il nous donne pour développer notre stratégie et poursuivre la consolidation de nos propres forces.'

'Vous parlez de lui comme s'il n'était qu'un pion parmi tant d'autres,' gronda la Directrice de Gryffondor.

'Et pourtant il est bien loin d'en être un,' dit Dumbledore en soutenant son regard perçant. 'Je me suis aveuglé pendant toutes ses années en pensant qu'en lui cachant la vérité, je l'épargnais. Je pensais être capable de trouver un moyen de le protéger de tout cela. Et à dire vrai… j'ai échoué Minerva, c'est aussi simple que ça.'

Est-ce que le directeur était en train… de pleurer? Elle n'avait jamais vu ses yeux aussi brillants.

'Il n'est qu'un enfant,' dit-elle enfin à voix basse.

'Harry Potter n'a jamais été un enfant,' répondit Dumbledore d'une voix dure. 'Trouvez quelqu'un qui a passé ses plus jeunes années loin des siens, maltraité par la même famille à laquelle il avait été confié, et ce sous le nez du sorcier qui avait juré de veiller sur lui quoi qu'il arrive! Trouvez quelqu'un qui n'a jamais connu une seule année tranquille à Poudlard, l'école que je suis censé protéger, et qui a surmonté des épreuves auxquelles la majorité des sorciers et sorcières les plus accomplies n'auraient pas survécu.' Sa voix était presque brisée. 'Trouvez quelqu'un qui a été témoin de la renaissance de Lord Voldemort, du meurtre de son camarade de classe et qui a été traité de menteur pour cela.' Sa voix était maintenant si basse que McGonagall avait du mal à l'entendre. 'Trouvez cette personne et dites-lui qu'elle n'est qu'un enfant, Minerva, elle ne vous croira pas.'

Minerva resta silencieuse. Peut-être que Dumbledore se souciait réellement du garçon en fait.

'Que pouvons nous faire alors?' Demanda-t-elle en retenant ses larmes.

'L'Ordre doit continuer sa mission et redoubler d'efforts. Grâce à lui notre champ d'action s'est élargi,' répondit Dumbledore qui avait regagné sa contenance. 'En ce qui me concerne, je vais continuer à chercher mes réponses.'

Il s'approcha de McGonagall et posa sa main sur son épaule.

'Il aura besoin de nous avant la fin,' murmura-t-il. 'Et nous devront être là pour lui.'

'C'est de vous dont il aura besoin.'

'Je me demande comment Harry à fait pour résister à l'envie de leur jeter un sort à tous!' Dit Ron furieusement en fixant méchamment un groupe de troisième année qui les pointait du doigt, Hermione et lui, en échangeant des messes basses. 'Vous n'avez rien de mieux à faire?' Leur lança-t-il alors qu'ils prenaient leurs jambes à leur cou.

'Ah Ron on se disait bien qu'on t'avait entendu…'

'Une si belle voix…'

'Ce serait dommage de ne pas en faire profiter tout le monde!'

'Laisse là s'exprimer!'

'Qu'est-ce-que vous voulez?' Maugréa Ron en voyant Fred et Georges les rejoindre à la table où ils s'étaient installés pour étudier.

'Eh bien, la demoiselle nous a demandé de venir,' répondit Fred en montrant Hermione d'un mouvement de tête.

'Et comme nous sommes galants, nous nous sommes empressés de répondre à son invitation,' finit Georges d'une voix enjouée.

Hermione jeta un coup d'œil autour d'eux. La bibliothèque était presque vide. Elle sortit le paquet de parchemins que Harry lui avait donné avant de partir et intima aux garçons de se pencher vers elle pour qu'elle puisse parler le plus bas possible.

'J'ai lu tout ce que Harry nous avait laissé,' commença-t-elle t'un ton excité.

'Je m'en doutais,' sourit Ron.

'C'est juste brillant,' reprit-elle avec des yeux étincelant en tapotant le document. 'Je ne sais pas où Harry à apprit tout ça mais c'est exactement ce dont nous avons besoin.'

'Que veux-tu dire?' Demanda Fred avec curiosité.

'Cela fait quelques temps que je me dis qu'on devrait peut-être commencer à faire les choses nous-mêmes.' Ron la regarda d'un air interrogatif. Les yeux de Fred et Georges pétillaient d'impatience. 'Nous devons apprendre la défense contre les forces du Mal par nous-mêmes! Maintenant plus que jamais! C'est plus important que n'importe quoi d'autre.'

En d'autres circonstances, Ron l'aurait taquiné. Plus important que n'importe quoi d'autre? Qu'en était-il des cours? Mais ce n'était pas le moment et il se contenta d'acquiescer.

'Pour être honnête,' ajouta-t-elle, 'j'aurais préféré que Harry soit celui qui nous enseigne tout ça… Mais le contenu de ces parchemins sera bien suffisant pour nous entraîner si nous devons faire face un jour à V-Voldemort.'

Les garçons la regardèrent tous d'un air admiratif.

'Et où suggères-tu que nous nous entraînions?' Demanda Ron. L'idée lui plaisait mais Ombrage avait le château sous étroite surveillance.

'Harry a déjà répondu à cette question pour nous,' répondit-elle avec un sourire. 'La Salle sur Demande. Il en parle dans le document et je suis allée vérifier dans « L'Histoire de Poudlard ». Cet endroit sera parfait!

Elle leur exposa ensuite le fonctionnement de la Salle et lorsqu'elle eut fini, une seule question subsistait.

'Quand est-ce qu'on commence?' Demanda George. Il n'avait jamais été aussi motivé de sa vie d'apprendre quelque chose cela le grisait.

'À dire vrai,' ajouta Hermione d'un air embêté, 'Je pensais que ce serait une bonne chose d'inviter tous ceux qui ait envie de nous rejoindre. Je veux dire, on est en train de parler d'apprendre à se défendre face à V-Voldemort. Oh Ron ça suffit, tu es pathétique. Je pense que ce serait une bonne idée de donner leur chance aux autres élèves.'

'Bon,' dit Ron après quelques secondes de silence, 'Harry nous a averti que V- Vol… Vous-Savez-Qui allait venir à Poudlard. Donc je suis d'accord avec toi. Nous devons s'assurer que le plus d'élèves soient prêt.' Il prit une profonde inspiration et passa sa main dans ses cheveux. 'J'ai l'impression que c'est ce qu'il aurait voulu que l'on fasse de toutes façons.'

Ils décidèrent de parler de leur projet aux personnes en qui ils avaient le plus confiance et de la manière la plus discrète possible. Ils se rencontreraient à un endroit qu'Hermione garderait secret jusqu'au dernier moment. Pour finir, l'objectif était de commencer l'entraînement pas plus tard que la semaine prochaine. Février arrivait à grand pas et le temps ne les attendrait pas.