Puissé-je me le pardonner un jour.

En cherchant le manoir de Lestrange, Harry découvrit une caractéristique de sa Cape d'invisibilité qu'il n'avait jamais remarqué jusqu'alors. Elle ne le rendait pas seulement invisible aux yeux des autres, fussent-ils créatures ou humains, mais aussi à tous les enchantements de protection et sort de répulsion. Il avait exploré l'endroit où Tom se souvenait que le manoir était, mais en vain. C'est seulement lorsqu'il avait mis sa cape après avoir entendu des voix une nuit, qui s'avérèrent provenir d'un groupe de randonneurs Moldus, qu'il aperçut au loin des lumières qu'il n'avait pas encore remarquées. Il laissa passer les randonneurs et se dirigea vers les mystérieuses illuminations.

Bientôt il se trouva devant une gigantesque demeure au style victorien. Les lumières étaient émises par des rangées de torches qui éclairaient un chemin de gravier traversant un parc jusqu'à des escaliers de pierre. Il s'approcha du manoir silencieusement sous sa cape. Passer par la porte principale serait une mauvaise idée. Mais il ne pouvait pas attendre dans le parc. Il fit le tour du manoir en agitant sa baguette régulièrement.

'Revelio!'

Alors qu'il était sur le point de commencer son second tour, il découvrit une porte dissimulée derrière un buisson un peu à droite des escaliers. Il s'en approcha et posa sa main sur la poignée en pensant au Sortilège de Déverrouillage. Peut-être une magie protectrice, comme le Charme de Miaulement, avait été déployée. Mais la Cape d'Invisibilité était d'une magie encore plus vieille et puissante et elle en préserva Harry alors qu'il pénétrait dans le manoir.

Il arriva dans une pièce sombre avec une forte odeur de chêne. Le parquet avait été ciré il y a peu. Ce qui lui confirma que Bellatrix était bien là. Elle avait dû demander que son manoir soit rutilant au cas où Voldemort ne lui rende visite. Harry sentit son estomac faire un bond. Et si Voldemort était là? Il avait complètement oublié de réfléchir à cette éventualité.

Il serra sa cape autour de lui et avança doucement. Ce n'était pas le moment de faiblir. Il poussa la porte menant à un corridor et chercha des escaliers. La nuit était déjà bien avancée et l'endroit le plus probable où il pourrait la trouver serait sans doute dans les chambres. En grimpant les marches, il ne pu s'empêcher de se faire la réflexion qu'il n'avait jamais vue une rampe aussi… compliquée. Sa décoration formait une sorte de fresque le long des escaliers qui n'avait pas été réalisé par des moyens magiques. Quelqu'un avait dû passer sa vie à la créer.

Il arriva au premier étage. Bon, par ou aller maintenant?

'Revelio Hominem,' pensa-t-il.

Il sentit une légère pulsation magique provenir de sa droite, et il s'y dirigea précautionneusement. Il n'avait jamais fait autant attention de sa vie. Le couloir faisait un angle au bout de l'aile et il pu apercevoir une fine raie de lumière sortir du dessous de l'une des portes. Agrippant sa baguette, il s'approcha et tendit l'oreille.

Au début, il n'entendit rien. Puis une respiration lente et sifflante lui parvint aux oreilles. Quelqu'un dormait. Il tendit sa main vers la poignée de la porte mais la retint au dernier moment. Et s'il y avait un piège? Il opta pour une différente approche. Il était si proche du but qu'il voulait juste entrer dans la chambre et lancer son sortilège, mais c'était trop risqué. Il devait être patient. Il se retira dans les ténèbres au fond du couloir et s'accroupit. Il attendrait qu'elle se réveille. Elle aurait forcément besoin de quitter sa chambre et c'est à ce moment qu'il frapperait.

Il resta ainsi jusqu'à l'aube, conscient de tous les petits craquements et autres bruits qui provenaient du manoir. Il se concentra sur sa respiration pour qu'il soit le plus serein possible. Il n'aurait qu'une seule chance et elle serait mince car il aurait besoin de formuler son sort. Il pouvait manipuler la magie informulée, mais pour un tel sort et face à une adversaire si puissante, il faisait plus confiance à la manière traditionnelle.

Avant que le premier rayon du soleil ne traverse la maison, Harry entendit la respiration se faire plus irrégulière et soudainement le plancher craqua. Elle s'était levée.

Il l'entendit bouger dans sa chambre et enfin les pas se dirigèrent vers la porte. Il dû se retenir de toutes ses forces de ne pas envoyer le sort dès que la porte s'ouvrit. Patience, il devait attendre que sa ligne de visée soit la plus claire possible.

Harry n'avait jamais vu cette femme ailleurs que sur des photos, mais la réalité fut bien plus terrifiante. Ses yeux globuleux semblaient remplis de folie. Elle devait avoir été jolie dans sa jeunesse, mais une vie de sadisme et de cruauté se reflétait maintenant sur son visage. Elle passa sa tête au travers de la porte et scruta le couloir avec méfiance. Pendant un court instant, Harry cru qu'il était repéré. Elle renifla l'air bruyamment en direction de Harry et ce dernier remercia silencieusement Tom de lui avoir conseillé de s'appliquer un enchantement pour atténuer le bruit de ses pas et supprimer son odeur corporelle. Une fois que son inspection fut terminée, elle prit un air satisfait et ouvrit grand la porte. Son dos se tourna vers Harry tandis qu'elle se dirigeait vers les escaliers. La scène était tellement surréaliste, que lorsqu'Harry leva sa baguette, il eut l'impression de la voir de l'extérieur.

'Imperio!'

C'était comme si une partie de son esprit avait été projetée contre un mur. Mais il était si déterminé qu'il fracassa ce mur et passa au travers. Il avait le cœur au bord des lèvres. Lorsque ses sens lui revinrent, Bellatrix Lestrange s'était tournée, son regard rivé sur lui. Au début, il cru qu'il avait raté son sort et qu'elle était sur le point de le tuer ou pire. Mais elle resta immobile, incapable de bouger. Il avait réussi un Sortilège Impardonnable et l'adrénaline commença à pulser dans ses veines. Il fallait pourtant qu'il garde la tête froide. Il respira profondément et enleva sa Cape.

'Potter,' cracha-t-elle d'une voix remplie de haine.

'Lestrange,' répondit-il du ton le plus dégagé possible. 'Vous et moi allons faire une petite balade ensemble, et j'espère que vous saurez vous comporter convenablement.'

Il ne savait où il avait trouvé cette audace pour parler ainsi, mais, étrangement, cela lui plaisait.

'D'accord' répondit-elle avec une horrible grimace.

Il pouvait sentir qu'elle se débattait. Il se souvint que Rogue lui avait dit que s'il pouvait résister au Sortilège de l'Imperium, alors il pourrait de la même manière résister à la légilimancie. Le puzzle s'emboîta dans la tête de Harry. Tout ceci n'était qu'une bataille mentale. Et malheureusement pour elle, il commençait à être relativement compétent dans ce domaine. Il renforça son emprise sur son esprit et envahit tous les endroits qu'il trouva derrière le mur, détruisant toute résistance sur son passage. Une fois que les traits de son visage se détendirent, il estima qu'il était allé assez loin et s'arrêta.

'Nous allons tous les deux à Gringgots et à votre coffre. Si cela ne vous gêne pas, il y a là-bas un artefact que j'apprécierais beaucoup récupérer.'

Sans un mot, elle alla dans sa chambre et Harry attendit patiemment qu'elle se prépare. Il était dans son esprit, et espionnait chacune de ses actions. Il ne le la laisserait pas avertir qui que ce soit. Elle le rejoignit aves ses habits de voyage et Harry se demanda si les riches avaient des tenues différentes pour chacune de leurs activités.

'Je vous suggère de ne pas tenter quoi que ce soit, Lestrange,' continua-t-il de cette voix inhabituellement douce et menaçante. 'Je veux que vous transplaniez à l'entrée de Gringotts réservée aux clients spéciaux.'

Tom lui avait expliquer en quoi consistait cette entrée. Apparemment il y avait des clients spéciaux qui pouvaient bénéficier d'un traitement de faveur à la banque Gringotts. Si vous étiez suffisamment riche et d'un certain rang, vous pouviez vous faire servir sans qu'aucune question ne soit posée, peu importe votre statut. Harry avait réalisé que c'est de cette manière que Sirius avait sans doute pu récupérer l'argent, malgré le fait qu'il soit considéré comme un meurtrier et activement recherché, pour lui acheter son Éclair de Feu en troisième année.

Elle acquiesça d'un air absent et lui tendit son bras. Il s'enveloppa dans sa Cape d'invisibilité et bientôt, il sentit la sensation aussi bizarre que dérangeante derrière son nombril.


Ils transplanèrent dans un salon aux décors riches et chaleureux doté de chaises confortables. Bellatrix Lestrange s'assit sur l'un d'entre eux. Son regard était lointain comme si elle n'était pas totalement elle-même, et Harry réalisa que si les Gobelins la voyait ainsi, ils se douteraient de quelque chose. Il n'était pas encore suffisamment compétent dans le sortilège de l'Imperium pour changer cela.

'Cachez votre visage,' murmura-t-il. 'Mettez votre capuchon.'

D'un geste brusque, elle rabattue sa capuche et se redressa sur sa chaise. De l'autre côté de la pièce se trouvait un buffet rempli de mets qui avaient tous l'air excellent. Harry n'avait pas mangé depuis deux jours et dû faire appel à toutes ses forces pour y résister. Heureusement pour lui, si on pouvait le dire, il avait l'habitude de subir des périodes de famine et, de fait, cela affectait peu sa capacité à manipuler sa magie. Cependant, il songea, en arrachant son regard du buffet, qu'il devrait trouver une solution pour remédier à sa faim dès que possible.

Un Gobelin arriva et salua Bellatrix de son ton le plus charmant. Harry réfléchissait à toute vitesse. Bellatrix était du côté de Voldemort et une fervente croyante de la supériorité naturelle des sorciers et sorcières de sang pur. Les Gobelins étaient des êtres inférieurs. Il lui commanda donc de répondre le plus froidement possible avec tout le mépris dont elle était capable. Elle s'exécuta avec un tel naturel qu'il sut qu'il avait eu la bonne intuition.

Bientôt ils arrivèrent dans son coffre. La quantité d'or n'impressionna pas Harry qui n'en possédait pas moins. En revanche il n'avait jamais vu une telle collection d'objets précieux.

Le Gobelin ferma la porte, le tirant de sa contemplation. Grâce à son rang, Bellatrix avait droit à une certaine confidentialité dans la gestion de ses biens. Parfait!

'Donnez-moi la Coupe d'Helga Poufsouffle,' murmura-t-il en pointant sa baguette sur elle. 'Et pas d'entourloupe!'

Elle acquiesça et se dirigea vers une pile d'objets dont elle retira une petite coupe d'or. Le cœur de Harry battait si fort dans sa poitrine qu'il cru que le Gobelin l'entendrait au travers de la porte.

'Je vous remercie,' dit-il d'un ton sarcastique. 'Maintenant nous allons gentiment sortir de cet endroit et rentrer à votre manoir.'


Ils transplanèrent au même endroit qu'ils avaient quitté quelques minutes auparavant. Harry enleva sa Cape et la rangea dans son sac. Il tendit sa main vers Bellatrix qui lui donna la coupe avec réticence.

'Très bien, Lestrange,' dit-il en mettant la Coupe dans son sac après l'avoir inspecté. Son ventre émis un gargouillis sonore. 'Je ne souhaite pas m'attarder ici plus que de raison, mais je me demandais si vous auriez quelque chose de comestible dans cette maison?' Il aurait pu éclater de rire en s'entendant prononcer ces mots. Elle aussi avait l'air relativement choquée. Cependant, elle prit la direction des escaliers sans un mot et il la suivit jusqu'à ce qu'ils arrivent dans la cuisine. Elle l'observa avec dégoût se précipiter vers son garde-manger pour se servir de tout ce qu'il pouvait attraper, pour enfin s'asseoir à la longue table de chêne et manger.

'Tu n'es pas ce qu'il nous avait dit que tu serais,' dit-elle enfin d'un air consterné.

'Ah? Et qu'avait-il dit au juste?' Demanda-t-il entre deux bouchées.

'Que tu serais faible!'

'Je suppose que je ne le suis pas du coup?' Demanda-t-il encore avec un sourire provoquant.

'Tu m'as jeté un Sortilège Impardonnable après m'avoir tendu un piège dans mon propre manoir. Tu as volé un artefact que je cachais dans mon coffre au nez et à la barbe de ces Gobelins, et maintenant tu manges dans ma cuisine comme si de rien n'était.' Elle avait l'air décontenancée. 'Il nous avait dit que ce serait facile de t'atteindre! Tu es beaucoup plus fort que ce à quoi je m'attendais!'

'Fort?' Répéta Harry. Il ne souriait plus. Il contempla le reste des victuailles dispersées sur la table et les enveloppa dans une serviette qu'il plaça délicatement dans son sac. 'Tu te trompes, je ne suis pas fort.' Il leva ses yeux sur elle. 'Je suis désespéré.'

'C'est si étrange,' murmura-t-elle. 'Tu as le même regard que…'

'Ma mère, je sais,' dit Harry impatiemment. 'On me l'a déjà dit suffisamment de fois, merci.'

'Ta mère? Non,' sourit-elle. 'Tu as son regard. Celui de Tom.'

Harry lui jeta un coup d'œil. Elle était debout dans sa cuisine, mais son esprit semblait ailleurs.

'Bon, c'était un plaisir de parler avec vous,' dit-il en se levant, 'mais je pense que vous comprendrez que je dois partir. Ah… j'oubliais.' Il sorti sa baguette de sa poche avec réticence. Il détestait ce qu'il était sur le point de faire encore plus que le Sortilège de l'Imperium.

'Qu'est ce que tu fais Potter?'

'Je me prépare à effacer votre mémoire,' répondit-il un peu honteux.

'Comment est-ce possible…' Murmura-t-elle.

'Heu… avec une baguette…'

'Ne fais pas l'idiot Potter, je sais comment cela fonctionne!' Son visage s'étira en un sourire diabolique. 'Même si j'ai trouvé une manière autrement plus efficace de faire oublier aux gens jusqu'à leur propre nom,' ajouta-t-elle sournoisement. 'Ah, tu ne comprendrais pas,' soupira-t-elle. 'Bon, vas-y.'

Harry était pour le moins surpris de sa réaction, mais il n'avait pas le temps de poser des questions. Il leva sa baguette.

'Obliviate!'

Elle fut propulsée en arrière sous l'impact du sort, et Harry eut tout juste le temps de faire un geste avec sa main pour déplacer une chaise derrière elle afin qu'elle ne tombe pas. Il n'attendit pas son réveil et partit immédiatement.

À ce moment précis, il se haïssait et eut l'envie immonde de vomir tout ce qu'il venait d'avaler.