Le seul en qui il ait jamais eu entièrement confiance
Ils transplanèrent au milieu d'un cimetière. La lune était encore suffisamment haute pour éclairer l'endroit et Harry reprit son souffle en jetant un coup d'œil autour de lui en même temps. Le cimetière n'était pas du tout lugubre. Bien au contraire il diffusait une impression de paix et de sérénité. L'endroit lui semblait étrangement familier bien qu'Harry était sûr de n'y avoir jamais mis les pieds.
'Ceci, Harry, est le village dans lequel je t'ai emmené après ta rencontre avec les Aurors,' dit Dumbledore à voix basse. 'Mais tu es déjà venu ici auparavant.'
Harry observa l'endroit une nouvelle fois réalisant où il se trouvait.
'C'est Godric's Hollow,' murmura-t-il. 'Mes parents sont ici!'
Frénétiquement, il scruta les tombes qui les entouraient, cherchant celle de ses parents, jusqu'à ce que son regard tombe sur une pierre blanche. Hypnotisé, il laissa ses pieds le guider jusqu'à une pierre tombale sur laquelle étaient gravés les noms de ses parents au-dessus d'une étrange épitaphe.
« Le dernier ennemi qui sera détruit est la Mort »
Il se tint immobile devant la pierre, méditant les mots qui dansaient devant ses yeux. Il entendit un pas léger derrière lui et devina que Dumbledore venait de le rejoindre. Mais le directeur resta silencieux, respectant la paix du cimetière.
'Merci,' murmura enfin Harry. 'De m'avoir emmené ici.'
Il s'agenouilla devant la tombe et effleura les noms qui brillaient doucement sous la lune. Quand il se leva, sa voix était plus ferme.
'Mais j'imagine que nous ne sommes pas venus là seulement pour ça.'
Dumbledore acquiesça et se dirigea vers une autre tombe qui se tenait quelques rangées plus loin. Harry le suivi et bientôt il se trouva devant une autre pierre tombale portant le nom « Ariana Dumbledore » sous lequel était gravé une autre épitaphe. « Là où est ton trésor sera aussi ton cœur ».
Harry jeta un coup d'œil à Dumbledore qui regardait fixement la tombe, le regard plein de regret. Le garçon n'osa pas troubler la quiétude du vieux sorcier et attendit patiemment. La voix profonde d'Albus Dumbledore s'éleva enfin dans la nuit.
'Ariana était ma sœur,' commença-t-il. 'Alors qu'elle encore très jeune, elle fut surprise par trois Moldus en train de pratiquer la magie et ils l'agressèrent violemment à cause de cela. Mon père, fou de rage, les tua tout les trois et fut envoyé à Azkaban. Il ne restait plus que mon frère, dont tu as déjà entendu parler, ma mère, Kendra Dumbledore, ma sœur et moi. Ma sœur aurait pu être une sorcière puissante si des adultes avaient pu correctement la conseiller. Je suis ensuite aller étudier à Poudlard et, je dois dire, j'ai beaucoup apprécié le temps que j'y ai passé. Après avoir reçu mon diplôme, je voulais voyager.' Les yeux de Dumbledore étincelèrent à la mention de ses rêves d'autrefois. 'Je m'étais fais un ami qui était prêt à m'accompagner dans cette aventure. Mais, hélas, ma sœur, qui avait encore du mal à contrôler sa magie, subit un tragique accident qui provoqua la mort de ma mère. Je me retrouvais avec la responsabilité d'une sœur détruite et d'un frère en colère contre moi de n'avoir pas été suffisamment présent. J'ai dû rentrer chez moi et abandonner mes rêves de puissance et de grandeur.
J'ai ensuite fait la rencontre d'un jeune homme qui partageait ces rêves et qui était, comme moi, brillant et talentueux. J'étais fasciné par lui et ses idées au sujet du monde des Sorciers. À cause de cela, je négligeais d'autant plus ma famille et mon frère m'en voulu pour ça. La réalité est revenue, en la personne de mon frère, fruste, illettré et infiniment plus admirable que moi. Je ne voulais pas entendre les vérités qu'il me lançait à la figure. Nous nous sommes disputés et, dans un accès de rage, Grindelwald à lancé le Sortilège de Douleur contre lui. En le défendant, nous nous sommes retrouvés dans un duel nous opposant tous les trois et Ariana a tenté de s'interposer… Je suppose que j'aurais dû être un meilleur frère qu'un ami. C'était un chaos sans nom. Un sort perdu la frappa de plein fouet et elle mourut sur le coup.'
Dumbledore se tut quelques instants et Harry pu voir une larme couler le long de sa joue.
'S'agissait-il de Grindelwald?' Demanda Harry en se souvenant d'une certaine carte de Chocogrenouille.
Dumbledore acquiesça.
'J'ai fermé les yeux sur ses noirs desseins et lorsque je les ai rouverts, il était trop tard,' dit-il gravement. 'Et cela m'a coûté ce que j'avais de plus cher.'
Un autre silence tomba sur le cimetière et Harry tourna son regard sur la pierre tombale. Le pouvoir était le pire poison de ce monde. Les amis, la famille étaient si précieux aux yeux de Harry qu'il ne comprenait pas pourquoi tant de personne, Moldus inclus, étaient prêt à tout risquer pour l'obtenir.
'Quand je l'ai enfin vaincu, sauvant par la même occasion le monde des Sorciers de sa tyrannie, je me suis réfugié à Poudlard. S'il y avait des jeunes gens, comme ma sœur, que je pouvais aider au lieu de les laisser ignorés par le monde des Sorciers… J'imagine qu'une partie de moi pensait pouvoir se racheter de cette manière,' ricana amèrement Dumbledore. 'Mais après tout ça, je n'ai plus jamais réussi à faire entièrement confiance à qui que ce soit. Jusqu'à ce que je te rencontre.'
Harry leva ses yeux vers lui et vit que Dumbledore le regardait fixement.
'À cause de moi, tu as grandi sans tes parents et sans amour, inconscient du monde auquel tu appartenais vraiment. Et pourtant, tu n'as jamais laissé cette souffrance corrompre ton cœur. Année après année, tu as affronté à Poudlard des défis que bien des adultes n'auraient pas su relever, mais tu n'as jamais cessé d'être loyal et fidèle envers tes amis et ton école.'
'Mais ce n'était pas assez, c'est ça?' Demanda sombrement Harry.
'C'était bien plus qu'assez!' Répondit Dumbledore d'une voix forte. 'Tu es bien plus qu'assez, Harry,' répéta-t-il lentement. 'Je n'avais jamais pensé rencontrer une personne telle que toi et je l'ai réalisé si tardivement que j'ai failli la perdre. Une fois de plus,' ajouta-t-il en faisant un geste en direction de la tombe d'Ariana.
Les mots de Dumbledore touchèrent profondément Harry. Ce sorcier légendaire avait, comme tout le monde, une part d'ombre et une part de lumière. Mais il avait été capable de reconnaitre la tentation que représentait le pouvoir pour lui et de s'y soustraire. Harry respectait ça. Mais surtout, il était maintenant en mesure de mieux comprendre les choix que le directeur avait fait au cours des années précédentes. Il avait voulu protéger Harry des erreurs que lui-même avait commise.
'Vous avez dû vous sentir si seul,' dit enfin le garçon avec une voix grave.
Dumbledore le regarda comme s'il voulait dire quelque chose. Mais aucun mot ne lui vint et il resta sans voix. Cela bouleversa, ce qui n'était pas peu dire, car cela ne lui était encore jamais arrivé.
'Il semblerait,' parvint-il enfin à dire, 'que même à mon âge on a encore beaucoup à apprendre.'
Harry laissa échapper un petit rire. Il était reconnaissant que son directeur se soit enfin ouvert à lui. Le vieux sorcier était prêt à reconstruire leur relation sur des bases plus solides qui ne contiendrait plus aucun secret.
'Mon objectif en te disant tout ça n'est pas de te fournir de vagues excuses,' ajouta Dumbledore, 'mais simplement des explications. Je veux que tu sache que je suis faillible, peu importe ce qu'en pense les gens, et que je tiens beaucoup trop à toi pour te laisser placer ta confiance dans un homme que tu connaîtrais à peine.'
Harry acquiesça et dévisagea l'homme qui n'avait jamais été capable de se pardonner pour la mort de sa sœur. Un homme inconscient de l'héritage qu'il avait réussi à construire. Un sorcier hanté par ses secrets qui n'avait jamais vraiment réalisé la reconnaissance de générations d'élèves pour les moments passés à Poudlard. L'endroit le plus sûr au monde.
'Alors je suppose que votre première leçon sera donc d'apprendre à vous pardonner,' dit Harry avec un sourire.
Dumbledore leva un sourcil et ne put réprimer un petit sourire.
'Et je crois que je peux vous aider là-dessus,' finit Harry en lui tendant sa main.
Dumbledore la serra doucement, scellant leur promesse silencieuse de réparer le lien qui les avait autrefois uni.
'Ai-je donc raison de penser que tu vas rester à Poudlard?' Demanda Dumbledore alors qu'ils se dirigeaient vers la sortie du cimetière.
'Et j'obtiendrai même mon diplôme,' répondit Harry énergiquement. 'La vraie question est qu'est-ce que je ferai après l'école?'
'Tu n'as plus envie de devenir Auror?'
'Non… pas vraiment. En plus je ne suis pas sûr qu'ils seraient ravis de me voir rejoindre leurs rangs,' s'esclaffa Harry.
Dumbledore ouvrit la grille du cimetière et guida Harry au travers des rues sombres de Godric's Hollow jusqu'à ce qu'il arrive devant un vieux cottage dont l'étage semblait avoir subit une violente explosion. Harry n'avait pas besoin de demander pour deviner à qui avait appartenu le cottage et les horreurs dont il avait été témoin.
'Je pensais partir à la découverte du Monde,' dit enfin Harry. 'J'emmènerai Supra avec moi.'
'Supra?'
'Mon Basilic.'
'Tu peux donc encore parler le Fourchelangue?'
'Ah oui, moi aussi ça m'a surpris au début,' répondit Harry. 'Quand l'Horcruxe a été détruit, toute trace de Voldemort en moi aurait dû disparaître.' Il remonta sa manche et découvrit le bracelet d'argent. 'Mais cette fois je crois que je dois le Fourchelangue à quelqu'un d'autre.'
Dumbledore resta silencieux et sourit. Il était impressionné par la puissance du jeune homme bien qu'il ne l'eût jamais recherché et ne le ferait probablement jamais. Le même jeune homme qui était en ce moment même détenteur de deux Reliques de la Mort à son insu. Le directeur avait réfléchi à informer Harry de la nature de ces artefacts mais avait décidé que ce n'était pas le moment. Ils avaient encore deux ans devant eux pour en discuter et Dumbledore était déterminé à donner la meilleure formation possible à Harry avant son départ de l'école. Les Reliques de la Mort en feraient partie.
'Découvrir le Monde est une bonne idée,' dit-il paisiblement. 'J'aurais mis en garde, voire dissuader, tous mes élèves contre ce genre de voyage car il comportera son lot de dangers, mais je ne m'adresse pas à n'importe quel élève.'
'Oh, ce ne sera pas facile tous les jours, j'y compte bien!' Répondit Harry. Il jeta un dernier coup d'œil à la maison de ses parents et tourna son regard vers Dumbledore. Le regard serein était de retour et Harry sourit. 'Mais ce sera bien plus simple que de retourner à Poudlard maintenant et d'affronter les célébrations.'
'C'est vraiment ce que tu veux faire?'
'Je suis fatigué d'en vouloir à la Terre entière,' dit Harry. 'Et je ne suis pas contre un peu de normalité pour l'instant.'
'Eh bien dans ce cas,' dit Dumbledore en lui tendant son bras, 'allons-y.'
