Dans un petit appartement londonien, Harry Potter, exaspéré, interpella Hermione :

- Hermione, s'il-te-plaît, aide-moi à trouver un sortilège qui empêche tous ces hiboux d'approcher !

Hermione et Ron étouffèrent leurs rires.

- D'accord, je demanderai à McGonagall comment elle a fait.

Depuis qu'il avait affronté et anéanti Voldemort l'an passé, Harry était retourné à Poudlard faire sa septième année, avec succès. Mais McGonagall, la nouvelle directrice, avait du faire face à un problème de taille : le courrier adressé à Harry Potter par des milliers de sorciers qui le remerciaient. D'abord euphoriques, ses camarades s'étaient lassés des dizaines de rapaces envahissant la Grande Salle et des désagréments occasionnés, le moindre n'étant pas les fientes lâchées dans le porridge matinal. A grand-peine, la directrice avait trouvé un sortilège permettant de trier les courriers familiaux des autres. Et Harry avait vu s'écouler l'année trop vite, aux côtés de Ginny. Quitter Poudlard lui fendit le coeur et il eut du mal à retenir une larme. La question de son logement se posa vite et comme il s'y attendait, Molly Weasley lui offrit l'hospitalité. Harry et un Ron enthousiaste s'y retrouvèrent. Ils avaient été séparés le temps de l'année scolaire, Ron étant retourné avec Hermione finir sa scolarité à Poudlard avec quelques autres rares élèves pendant que Harry, terré à Godric's Hollow, cherchait comment anéantir Voldemort. Ron ne s'était pas décidé pour une carrière en particulier et le nombre trop faible d'ASPIC obtenus lui avait fermé des portes. Il avait été embauché pour aider à ouvrir la succursale du magasin de ses frères à Pré-au-Lard et ça l'avait occupé quelques mois. Mais vendeur ne lui plaisait pas particulièrement et il avait fait le tour des boutiques de Pré-au-Lard et du Chemin-de-Traverse en louant ses muscles à la journée. Particulièrement à l'aise dans ces espaces entièrement dédiés à la magie, il n'avait quand même pas négligé de réfléchir sérieusement à sa carrière professionnelle.

A la fin de l'été au Terrier, Harry avait parlé à Ron de partager un appartement à Londres. Les parents Weasley approuvèrent : Harry avait un projet professionnel sérieux - devenir Auror - et ils pensaient que cet exemple motiverait Ron. Harry, sans en parler à quiconque, avait songé à demander à Ginny de vivre avec eux, mais même s'il savait que Molly et Arthur Weasley approuvaient sa relation avec leur benjamine, ils ne verraient sans doute pas cette installation précoce d'un bon oeil. Du reste, Ginny voulait devenir guérisseuse à Ste-Mangouste et les étudiants étaient invités à résider dans un bâtiment prévu à cet effet à côté de l'hôpital, pour des raisons liées aux urgences médicales. Bien heureusement, le Transplanage leur permettait de se voir aussi souvent qu'ils le voulaient. Quant à Hermione, ce n'est pas sans gêne qu'elle leur expliqua l'an passé qu'elle irait étudier dans une Université moldue, souhaitant devenir enseignante. Ron, de mauvaise humeur, lui avait ri au nez et la conversation qui s'ensuivit - en présence d'un Harry très gêné - fut pénible. Hermione eut du mal à faire accepter à Ron qu'il n'y a pas de déshonneur pour une sorcière à enseigner aux petits moldus, et que oui, elle aimerait, une fois l'expérience acquise, enseigner à Poudlard. Cette conclusion avait ramené Ron au calme et Harry songea qu'il fallait être aveugle pour ne pas se rendre compte que son meilleur ami était fou amoureux de Hermione. Il n'avait d'ailleurs rien relevé qui prouvait l'existence d'une relation plus "physique" entre eux : leur timidité respective les empêchait peut-être de sauter le pas, se disait-il.

Grâce à la fortune hérité de ses parents, Harry avait pu louer un petit mais confortable duplex au coeur d'un quartier animé de Londres, à deux pas du Chemin-de-Traverse afin de ne pas trop déstabiliser Ron. Comme tous les logements londoniens, le loyer était exorbitant et Harry savait que son ami n'aurait jamais les moyens de payer la moitié du loyer. Ron n'étant absolument pas familiarisé avec l'argent moldu, il avait été facile à Harry de mal convertir le montant du loyer en gallions et Ron fut agréablement surpris. Ce petit mensonge coûta à Harry mais il oubliait tout quand il rentrait le soir et retrouvait son ami. Quant à Hermione, elle vivait sur le campus de son université moldue, et une visite des deux garçons en début d'année avait été une grande source d'incrédulité pour Ron.

- Alors, raconte ! s'exclama Hermione toute excitée.

Harry s'exécuta :

- Eh bien, nous sommes huit candidats. Il y aussi Roger Banks, de Serdaigle, plus une femme plus âgée qui souhaite se reconvertir dans cette carrière. Le moins que l'on puisse dire, c'est que les Aurors présents ne nous ont pas encouragés... Ils nous ont déjà mis en garde sur le caractère extrêmement dangereux de cette profession et les contraintes : on peut être prévenu à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit et partir en mission à l'autre bout de la planète pour des semaines, voire des mois, dans des conditions souvent difficiles : solitude, enfermement... Et si on est accepté à l'issue de tests d'aptitude rigoureux, la formation n'est pas de tout repos : ce qu'on a appris à Poudlard n'est que le b.a-ba... Et l'obtention de l'aptitude à la profession d'Auror est sanctionnée par un examen très difficile en fin d'études. Quatre longues années... soupira Harry. Plus des stages, à Ste-Mangouste, au Ministère, dans des officines de potions, et cetera...

- Je sais que tu travailleras dur, affirma Hermione d'un ton sans réplique.

Harry retint un sourire. S'il échouait, il avait résolu de se tourner vers une carrière de joueur professionnel de Quidditch. Lors de tests passés cet été, pas moins de huit équipes avaient souhaité le voir rejoindre leurs rangs. Ce souvenir lui arracha des pensées amères. Une fois de plus sermonné par sa mère, Ron avait parlé de devenir joueur professionnel. Mais sa dernière année à Poudlard, dans des conditions difficiles, n'avait pas permis à Ron de confirmer l'assurance qu'il avait prise en sixième année. Faute d'élèves en nombre suffisant, la Coupe de Quidditch n'avait pas eu lieu. Harry et Ron étaient partis bras-dessus bras-dessous à la journée de recrutement des équipes professionnelles. Le nombre de postulants était si élevé que les deux amis avaient cru se retrouver un samedi après-midi sur le terrain de Quidditch de Poudlard, tant les visages leur étaient familiers. Il y eut des cris de joie et Harry retrouva avec plaisir Angélina Johnson et Olivier Dubois, tous deux joueurs professionnels, qui assurèrent Harry qu'ils seraient ravis de l'avoir pour co-équipier. Des dizaines de candidats effectuèrent des tests sur plusieurs terrains ; répartis selon l'ordre alphabétique; Harry et Ron furent séparés et il fut impossible à Harry de suivre les performances de son ami. A la fin de la journée, Harry fut assailli par des entraîneurs qui lui offrirent des ponts d'or. Des exclamations indignées accueillirent sa réponse : il voulait devenir Auror, mais s'il échouait, il considérerait avec attention les propositions faites. Retrouvant Ron, il devina à son visage que son ami n'avait pas eu le succès escompté. Feignant la gaiété, Ron affirma qu'il avait eu un contact intéressant avec les Licornes du Sussex, modeste équipe de troisième division, mais qu'il préférait réfléchir. Harry fit mine de le croire et répondit embarrassé qu'il avait eu une proposition pour devenir remplaçant dans une équipe qui venait d'entrer en première division. Ron avait apparemment accepté cette explication sans réclamer plus de détails. Revenu à Londres, Harry reçut un hibou l'informant qu'il était membre de droit de l'AAG, Amicale des Anciens de Gryffondor. Moyennant une cotisation annuelle d'un gallion symbolique, il aurait accès à tous les services et installations de l'association. Ron avait reçu la même proposition l'an passé, mais en l'absence de Harry et Hermione occupée dans son université moldue, il n'avait jamais donné suite. Les deux amis s'y rendirent le premier week-end de septembre et découvrirent, sous le déguisement d'un terrain vague nauséabond ( l'entrée était dans une vieille benne puante ), un spacieux local tendu d'or et de rouge. Ils croisèrent des visages familiers d'anciens élèves et Harry fut assailli de compliments admiratifs sous l'oeil boudeur de Ron. Gêné, Harry détourna l'attention de Ron en s'approchant d'une affiche qui indiquait les formalités à suivre pour s'inscrire dans l'équipe de Quidditch de l'Amicale. Les deux garçons s'inscrirent avec enthousiasme et apprirent que des entraînements et des rencontres amicales avaient lieu régulièrement. Le terrain étant disponible, ils s'envolèrent et jouèrent deux heures. Harry constata avec un pincement au coeur qu'effectivement, Ron n'avait pas le niveau requis chez les professionnels. Mais leur joute aérienne le ravit et quand les membres suivants leur crièrent de leur laisser la place, ils regagnèrent le sol les cheveux en bataille et les yeux brillants.