- Potter, Harry James !

Harry entra en tremblant dans la salle tristounette. Il se demanda si les regards posés sur lui le jaugeaient ou si c'était de la curiosité pour le vainqueur de Voldemort. Il y avait deux femmes, une rousse et une brune plus jeune ainsi deux hommes inconnus de Harry.

- Asseyez-vous, monsieur Potter ! lui dit aimablement la femme blonde au physique athlétique.

Harry remercia en bafouillant et regretta de ne pas avoir plus travaillé son physique : manifestement, une bonne condition physique était indispensable.

- Cet examen est sérieux mais nous ne sommes pas là pour vous casser, continua un homme proche de la retraite aux petites lunettes rondes. Nous commencerons par l'examen de vos résultats d'ASPIC.

L'homme fit circuler des parchemins à ses collègues et pendant une minute, il n'y eut aucun bruit. Une femme releva enfin la tête :

- "Optimal" en Défense contre les Forces du Mal, et ce depuis plusieurs années. Remarquable !

- Il fait dire que ce jeune homme a eu l'occasion de mettre en pratique son apprentissage, fit le quatrième examinateur à la barbe soigneusement tressée.

Le ton sec glaça Harry mais l'homme lui adressa un petit sourire bienveillant et Harry sentit ses muscles se détendre.

- Vous avez obtenu "Effort Exceptionnel" en Métamorphose alors qu'au début de votre scolarité, vous aviez "Acceptable". Ce qui signifie que vous avez su vous mettre au travail. C'est un bon point.

La femme qui avait parlé en premier revint à la charge :

- En Potions, vous avez été toujours mal noté, à l'exception des deux dernières années. C'est une discipline qui exige de la rigueur mais qui est d'une simplicité enfantine quand on applique les consignes à la lettre. Et votre premier professeur note de gros problèmes de discpline. Avez-vous un problème avec la rigueur et la discipline, monsieur Potter ?

Harry sentait le rouge marbrer son visage.

- Rogue était mon premier professeur et chacun sait maintenant pourquoi il me traitait injustement ! dit-il à toute allure, un peu véhément.

La sorcière posa sur lui un regard insondable.

- C'est peut-être ça, oui...

Harry affrontait là les questions qu'il redoutait. Il savait que la discipline et la rigueur n'avaient jamais été ses points forts, sauf dans les matières qu'il aimait. Mais il était déterminé à travailler dur.

- J'apprendrai tout. Si je ne savais pas ce qui m'attend ici, je ne serais pas venu !

Cette répartie sembla appréciée.

Le plus âgé des examinateurs lut à voix haute un commentaire de Minerva McGonagall, commentaire obligatoire sur chaque dernier bulletin de dernière année :

- "Inutile de revenir sur les épreuves affrontées par monsieur Potter lors de sa scolarité : elles ont démontré sa bravoure. Sa loyauté, son esprit de camaraderie et de sacrifice sont supérieurs à ceux d'un élève ordinaire. S'il a montré au début de sa scolarité un peu de légèreté face à certaines discplines, il s'est corrigé et il sera, quelque soit sa branche professionnelle, un étudiant motivé." Plutôt flatteur ! Un bon point pour vous.

L'examen de ses performances scolaires étant fini, il eut à subir une rafale de questions sur son comportement et son mental.

- Avez-vous déjà entendu des voix ?

- Si vous deviez sauver votre meilleur ami ou vous-même de la noyade, que feriez-vous ?

- Aimez-vous qu'on vous complimente ?

- Craignez-vous la solitude ?

- Que feriez-vous si vous découvriez qu'un membre de votre famille est un ennemi dangereux pour notre monde ?

Harry répondit parfois en bafouillant, essayant de donner des réponses claires. Il sentait son front devenir moite et savait que très vite viendrait l'épreuve pratique. Une examinatrice fit apparaître un verre d'eau et le lui tendit.

- Merci madame, lui dit Harry reconnaissant.

- Vous auriez préféré du jus de citrouille ?

Harry ouvrit la bouche, décontenancé.

- Ah, ben... je... Oui, pourquoi pas...

La sorcière s'était reculée et avait posé sa baguette devant elle. Les trois autres Aurors le regardaient avec curiosité. Harry comprit enfin : l'épreuve pratique commençait.

Il se racla la gorge et se saisit de sa baguette. Il la pencha au-dessus du gobelet et prononça :

- Un deux trois, en jus de citrouille tu te transformeras !

Le gobelet disparut de ses mains et un liquide orange éclaboussa ses chaussures. Dépité, il vit les regards navrés de deux examinateurs. Le vieil Auror vint à sa rescousse :

- Nous ne sommes pas des monstres et nous sommes aussi passés par cette épreuve. Vous avez droit à une seconde chance. Mais avant, nettoyez-moi ces chaussures.

Harry baissa la tête, autant pour viser ses chaussures que pour cacher sa bouche tremblante.

- Sekchaussures !

Le liquide disparut. La sorcière blonde agita sa baguette et un nouveau gobelet apparut.

- Prenez-le et recommencez !

Harry fit un pas et s'arrêta, évitant de peu le piège tendu. Il tendit sa baguette et prononça "Accio gobelet ". L'objet atterrit fermement dans sa main gauche et il se racla à nouveau la gorge.

- Un deux trois, en jus de citrouille cette eau se transformera !

Il émit un petit gémissement de satisfaction et il déposa le gobelet rempli de liquide orangé devant les examinateurs. Leurs visages étaient plus satisfaits. Harry avait pris conscience de son erreur : en omettant de préciser que c'était l'eau qu'il devait changer en jus, l'eau et le gobelet avaient été transformés en liquide...

- Bien, fit la sorcière rousse. Vous avez rectifié votre erreur, même si beaucoup de candidats ont réussi du premier coup. Mais d'autres ont cherché plus longtemps que vous où ils s'étaient trompé...

Harry songea avec amertume que jamais Hermione n'aurait commis cette erreur.

- Je note quand même que vous avez porté le gobelet d'eau à vos lèvres sans réfléchir, souligna l'homme à la barbe. Et s'il y avait eu du poison dedans ?

Harry blêmit. Il se rappela sa sixième année en cours de Potion quand Ron avait bu une boisson empoisonnée qui lui était destinée.

- Comment détecter et parer à un éventuel poison ?

Harry connaissait évidemment la réponse : le bézoard, pierre qui lui avait permis de sauver la vie de Ron.

L'homme continua avec un sourire malicieux :

- C'est notre piège habituel. Depuis que je suis examinateur, pas un candidat n'a pensé que le verre pourrait contenir du poison. C'est un peu pervers de notre part mais nous ne vous tiendrons pas rigueur de ce manque de méfiance. C'est un petit jeu entre vieux de la vieille, finit-il en riant.

Harry sourit difficilement.

- Bien, passons aux sortilèges de Défense.

Harry sentit son pouls accélérer mais étrangement, un frisson d'excitation parcourait son corps et il eut moins peur que lors de l'épreuve des sortilèges de base.

Le sorcier aux lunettes agita sa baguette et une armoire s'ouvrit : un énorme chien noir, muscles tendus sous sa peau noire lustrée, yeux injectés de sang en sortit et il grogna méchamment. Il regarda Harry mais ne fit pas mine de l'attaquer. Harry se demandait ce qu'on attendait de lui : un sortilège de Réduction ? Un maléfice du Saucisson pour ligoter le molosse ? Harry regarda les examinateurs en quête d'un encouragement. Trois le regardaient mais la petite sorcière rousse fixait le chien avec effroi. "Mais pourquoi a-t-elle peur ?" se dit-il, complètement perdu dans cette situation inattendue.

"Elle a peur du chien !"

Harry comprit enfin : il s'avança entre les examinateurs et le chien et celui-ci disparut dans un tourbillon. Une forme apparut et Harry sentit sa peau se hérisser : Ginny était étendue sur le sol, inerte, les yeux ouverts et sans vie, comme morte. Harry, souffle coupé, tendit sa baguette et prononça d'une voix la plus ferme possible :

- Ridikkulus !

Ginny disparut.

- Bravo ! fit la sorcière blonde.

Harry se retourna et vit qu'il avait fait bonne impression. La petite sorcière rousse buvait avidemment le gobelet de jus de citrouille.

- Peu d'autres candidats ont compris aussi vite qu'ils avaient affaire à un inoffensif Epouvantard, poursuivit-elle.

Harry hocha la tête et regagna sa chaise. Il s'était attendu à avoir apparaître un Détraqueur, comme au cours de sa troisième année à Poudlard. Son visage devait trahir sa stupéfaction car le vieil Auror lui demanda :

- Cette jeune fille est votre petite amie ?

- Oui.

- Vous vous attendiez à autre chose ?

- Oui. Lors du cours avec le professeur Lupin, c'est autre chose qui était apparu, un Détraqueur.

Les Aurors firent tous la grimace.

- Oui, dit la petite sorcière rousse, remise de sa frayeur. Ils ont de quoi terrifier. C'est bien que vous ayez surmonté cette peur. Comme toute personne normalement constituée, vous craignez pour vos proches.

Harry se sentit un peu mieux.

- Et si vous n'aviez pas décelé l'Epouvantard derrière le chien, quel sort auriez-vous employé ? demanda la sorcière blonde.

- Le Maléfice du Saucisson ? répondit aussitôt Harry.

Il se mordit les lèvres en voyant l'Auror à la barbe éclater de rire : sa réponse manquait manifestement de sérieux.

- Excellent ! Un sort utilisé en cours de récréation à Poudlard ! Les sorts les plus simples sont les meilleurs ( Harry ouvrit de grands yeux ) : beaucoup de sorciers maléfiques sont assez prétentieux et utilisent des sorts compliqués qu'ils ont parfois du mal à maîtriser. La simplicité peut sauver la vie, vous venez de nous le confirmer.

Harry retrouva un peu de sérénité.

- Exécutez-nous un Patronus.

Harry se leva, sûr de lui. Il tendit fermement sa baguette, prononça "Expecto Patronum" et un magnifique cerf argenté apparut et disparut après avoir effectué au galop le tour de la pièce.

Les Aurors commentaient entre eux :

- Excellent !

- Très net, apparu très vite...

- Beaucoup de conviction dans son geste.

- Depuis quand le maîtrisez-vous ?

- Depuis ma troisième année.

Les Aurors fixèrent Harry, stupéfaits.

- Expliquez-nous.

Harry leur narra la scène de Sirius attaqué par les Détraqueurs et comment Harry les avait chassé grâce à l'enseignement secret du professeur Lupin. L'Auror blonde grattait frénétiquement son parchemin avec sa plume et Harry sut qu'il avait fait très forte impression.

- Bien bien, fit l'Auror barbu. Merci monsieur Potter. Veuillez passer dans la pièce à côté : vous trouverez un questionnaire sur différents sujets. C'est la dernière épreuve. Ne la négligez pas, un taux de bonnes réponses inférieur à 75 est éliminatoire. Harry remercia et sortit. Il pensait en toute objectivité avoir été convainquant, laissant ses examinateurs sur une bonne impression. Mais l'épreuve écrite l'angoissait. Il s'installa seul à un bureau. A l'autre bout de la pièce, Roger Banks lui adressa un petit salut. Harry lut quelques questions et soupira.

- Quel ingrédient manque à la potion curative de petites plaies sanglantes s'il y a déjà du jus de banane et de la peau de crapaud ?

- Combien de temps faut-il laisser mijoter une potion de Véritasérum ?

- Quelle est la différence entre un sortilège d'Attraction et un sortilège de Déplacement ?

- Quelle incantation prononcer pour effectuer le changement de couleur d'un petit animal ?

- Quelle attitude adopter pour ne pas devenir ennemi d'un Centaure ?

- Quel objet choisiriez-vous pour Portoloin si vous étiez dans le désert, afin qu'on le remarque le moins possible ?

- Si vous étiez dans l'incapacité d'utiliser la magie, à quel service administratif moldu vous adresseriez-vous ?

Harry sortit lessivé après trois heures d'intense cogitation. Il retrouva les autres candidats, eux aussi passablement éreintés.

- Nous vous communiquerons les résultats après-demain : quelque soit la réponse, nous vous recevrons en entretien individuel pour vous expliquer les raisons de notre choix. Je vous informe que selon le réglement, si vous échouez, vous pourrez vous représenter dans trois ans. Merci mesdames et messieurs.

Harry serra la main de Roger et transplana pour son appartement. Ron était absent, il avait laissé un mot, étant sorti faire des courses ( au Chemin-de-Traverse, ayant quitté en hurlant le supermarché moldu dans lequel Harry l'avait entraîné une fois ). Harry ignorait qu'un échec à l'entrée de la formation n'était pas définitif. Il fut moins pessimiste, et dans le pire des cas, accepterait de devenir joueur professionnel tout en se préparant pour dans trois ans. Il voulait décompresser et transplana Chemin-de-Traverse : il trouva Ron occupé à tester les derniers gadgets dans la boutique de farces et attrapes de ses frères. Bien entendu, il avait oublié de faire les courses...

Le surlendemain matin, les deux garçons étaient à cran. Le petit-déjeuner brûla et Harry fut reconnaissant à Ron de le soutenir.

- Tu y arriveras.

Harry lui sourit faiblement : le petit-déjeuner passait mal.

- Et toi, toujours pas de réponse du Chicaneur ?

- Non.

- Ils ont du recevoir pas mal de courrier. Laisse-leur le temps de répondre.

Ron haussa les épaules.

Un hibou inconnu virevolta devant la fenêtre : Harry lui ouvrit, détacha la lettre et donna un peu de Miamhibou à l'oiseau sous l'oeil noir de Hedwige.

- C'est pour moi.

Il lut fébrilement :

"Monsieur Harry Potter, nous avons attendons aujourd'hui à onze heures, même salle que l'autre jour. Salutations. Le jury des Aurors."

Dans une heure...

- Un autre hibou ! s'exclama Ron.

Il prit la lettre.

- Celle-là est pour moi !

Harry s'approcha et lut en même temps que son ami.

"Monsieur Weasley, nous avons reçu votre demande au poste de commentateur de Quidditch à Radio Chicane. Votre courrier enthousiaste nous incite à vouloir vous rencontrer. Merci de vous présenter demain à dix heures 24 Indian Street. Cordialement, Wilkinson Lovegood."

- J'y crois pas... J'y crois pas...

- Bravo mon vieux ! lui dit Harry en lui donnant une bourrade dans le dos.

- Tu veux que je t'accompagne au Ministère pour tes résultats ?

Harry n'avait jamais autant aimé son meilleur ami.

Anxieux, les garçons se présentèrent au Ministère avec vingt bonnes minutes d'avance. Ils virent de loin Percy, le frère de Ron, et furent soulagés qu'il ne les ait pas vu : Ron pour ne pas être assommé par les "hautes responsabilités" de son frère, Harry parce qu'il n'avait toujours pas digéré les incitations de Percy pour que Ron se détache de lui. Parvenu devant la salle d'examen, Harry retrouva cinq autres candidats. Roger Banks le salua et chuchota :

- Galina Bongenre est sortie il y a dix minutes les yeux rouges...

Harry blêmit : cette ancienne de Poufsouffle avait la réputation d'être une élève sérieuse.

La porte s'ouvrit et la plus âgée des candidates en sortit, la déception sur le visage. Harry regarda le bout de ses chaussures.

- Monsieur Harry Potter !

Les entrailles nouées, il avança en ignorant les regards posés sur lui.

- Bonne chance, vieux ! lui souffla Ron.

La porte se referma et Harry salua les examinateurs. Invité à s'asseoir, Harry s'effondra plus qu'il ne s'assit sur la chaise. L'homme à la barbe s'éclaircit la voix :

- Hum hum... Monsieur Potter, lors de votre examen, il est apparu que votre dossier scolaire n'était en rien supérieur à ceux des autres candidats, si ce n'est vos excellentes notes en Défense contre les Forces du Mal.

Harry se retint pour ne pas chanceler.

- Vous êtes tombé dans quelques pièges élémentaires et cela ne vous a pas servi...

Harry ferma les yeux à-demi.

- Mais ce n'est rien de dire que vos réflexes excellentissimes, j'ose le dire, lors de l'épreuve pratique, nous ont très fortement impressionnés. Quant à l'épreuve écrite, vous avez obtenu un résultat très juste, 77 de bonnes réponses, mais c'est suffisant. Aussi, compte tenu de ces deux derniers éléments, c'est avec plaisir que je vous annonce qu'à trois votes contre un, vous êtes accepté à la formation d'Auror.

Harry resta muet et immobile. La petite sorcière rousse lui dit gentiment :

- Allons, c'est fini, monsieur Potter. Vous pouvez vous détendre.

Il sentait son cerveau sur le point d'exploser.

- Je... euh... Merci ! Je compte me montrer digne de la confiance que vous m'accordez...

- J'espère bien, fit la sorcière blonde. Par honnêteté, je vous avoue que c'est moi qui ai voté contre vous. Je suis très exigeante, et je crains que votre lutte contre Voldemort vous fasse penser que vous êtes invulnérable : c'est dangereux dans notre profession.

Harry la regarda avec étonnement.

- Merci de votre franchise, mais je n'ai jamais cru être invulnérable. Je travaillerai dur.

La sorcière lui sourit :

- J'espère que vous me prouverez que j'ai eu tort.

L'Auror à lunettes prit la parole :

- Le plus dur n'est pas fait. Nous nous reverrons demain. Vous prendrez connaissance de votre emploi du temps. Profitez-bien de la semaine à venir, elle est votre dernière d'insouciance avant longtemps.

Légèrement refroidi, Harry hocha la tête, salua et sortit.

La porte s'ouvrit sur six visages scrutateurs.

- Je suis pris...

Ron poussa un rugissement qui fit sursauter un employé passant par là, les bras chargés de dossiers. Harry vit les visages envieux et même un ou deux un peu jaloux.

- Bonne chance, dit-il à Roger Banks.

L'ancien de Serdaigle lui serra la main :

- Merci, tu mérites ce poste.

Harry et Ron s'éloignèrent. Harry était sur un petit nuage et n'entendait pas grand-chose des commentaires frénétiques de Ron. Il ne retint que la proposition de transplaner immédiatement pour le Terrier prévenir Molly Weasley.