5 Il a changé.

Pour elle, grâce à elle, elle dont il n'a que le souvenir et un collier avec une pierre noire en pendentif, il est devenu un guerrier. Il va se battre. Il gagnera. Il est parti en reprenant son nom, son flambeau, son ardeur dans le combat de la vie. Désormais elle sera partout avec lui, et elle le guidera.

Il est le dernier des Dragons, et dans son cœur il gagnera la dignité qui lui manquait pour être son mari. Parce qu'il l'aime, même s'il ne l'a réalisé qu'en la perdant. Il se montrera digne d'elle, parce qu'elle l'a changé.

4 Il a tout.

Pourtant il n'a d'elle qu'un collier avec une pierre jaune en pendentif. Elle est partie en ne lui laissant que ça, alors il y tient plus qu'à sa vie. Il est entouré, choyé, et pourrait être heureux, mais il y a l'Appel. Il n'y a que lui qui puisse le faire, le sent, le sait. Il en a les moyens. Il sait que la fin du temps de l'amour approche, et que le temps de la guerre arrive. Il l'a toujours su, mais personne ne l'écoutait. Sauf « lui », qui lui a donné de quoi répondre à l'Appel si pressant de son cœur.

A travers lui, c'est peut-être la guerre qui l'appelle, cette soif de sang. Alors il accepte la proposition, et il devient le Petit Prince, et apprend à se battre, à parler de la manière qu'il faut. Parce que la guerre l'appelle, et qu'il doit y répondre.

3 Il a oublié.

Il n'a qu'un collier avec une pierre verte en pendentif. C'est un souvenir. De qui, de quoi, il ne sait pas. Mais il le garde précieusement, au cas où ça lui reviendrait. Il n'a plus de nom. Il marche, il est seul. Il est parti. Il chercher autre chose. Il trouve, et oublie d'où et pourquoi il est parti. Il a l'habitude d'oublier. Il s'en fiche un peu, parce qu'il a l'habitude.

Il a un nom qui veut dire qu'il n'a pas de nom. Il a accepté « son » aide. Il ne veut que vivre sur un champ de bataille. Alors il apprend, grâce à « lui », comment passer inaperçu, comment se faire oublier aussi bien que lui oublie. Et il n'oublie pas comment faire après l'avoir appris. Il devient le Clown triste, mais il s'en fiche un peu. Il a l'habitude.

2 Il a tout perdu.

Sauf un collier avec une pierre violette en pendentif. C'est tout. Il ne sait plus d'où elle lui vient, mais c'est son seul bien. « Ils » l'ont recueilli, nourri, lui ont appris à se battre, à tuer sans se faire repérer, à entrer partout. Il apprend, assimile, mais sans envie, parce qu'il sait qu'il perdra tout un jour.

Il est maigre, se faufile dans tous les trous, on le surnomme Passe-murailles. Il laisse couler, parce que c'est sans importance. Il rie sans rire vraiment, mais ne pleure pas. Jamais. Il court, se cache, mais ne ment pas. Jamais. Il a promis, et ne pense qu'à ça. Il ne pense pas à ailleurs, parce qu'il n'en connaît pas. Il laisse le reste, obéit, joue le jeu. Il n'est que le Joker, et derrière le masque, il n'y a qu'une chose. Une promesse.

1 Il n'a rien à lui.

Sauf un collier avec une pierre bleue en pendentif. C'est tout. Il ne sait même pas pourquoi il l'a, ni pourquoi il la cache. Son corps, son esprit, son âme si tant est qu'il en ai une, sont à « eux ». Ce sont « eux » qui l'ont créé, qui lui ont enseigné à se battre, à tuer, à obéir. Il n'a pas de nom, il n'est qu'un numéro. Il ne voit pas leurs visages, il n'en a pas le droit. Il n'a rien. Il n'est rien.

Il ne pense pas à ce qu'il pourrait trouver ailleurs que dans cette chambre et dans ce hangar où il apprend. Il ne pense pas qu'on se sert de lui, parce qu'il ne le sait pas, et parce que ce n'est pas une idée à laquelle il pourrait penser. Il obéit, il est le Soldat Parfait. Il ne pense pas tout simplement, parce qu'une arme, ça ne pense pas, ça obéit.

0 Ils sont ensemble.

Peu importe qu'on soit une arme, un jouet, un clown, un prince ou un guerrier. Ensemble, les erreurs et les peurs s'effacent, et la vie peut commencer.