BAD-Royale Deluxe
2024, Avril.
–Bucky, tu peux venir m'aider dehors ?
–Une seconde, répondit le soldat depuis la salle à manger où il était attablé avec son ordinateur portable. Je te rejoins dans une seconde, répéta-t-il distraitement en pianotant sur son clavier à toute vitesse, s'étant habitué aux technologies modernes.
Il n'avait pas quitté son écran des yeux depuis environ une heure mais ne s'en lassait aucunement. Il ne s'était jamais senti autant absorbé par une tâche qu'il exécutait. Dans la salle de séjour Sam entra depuis le jardin, un torchon sali de cambouis sur son épaule gauche. Il se dirigea vers la cuisine et alla se nettoyer les mains tout en observant son acolyte du coin de l'œil.
–Hey Sam ?
–Ouais ? lança l'autre homme penchée au-dessus de l'évier. Un souci ?
–Comment tu t'y prendrais pour disparaitre totalement de la circulation ?
Sam coupa l'eau en fronçant les sourcils et attrapa un essuie afin de se sécher les mains, puis il marcha tranquillement jusqu'à la salle de séjour et vit que son ami n'avait pas levé les yeux de son ordinateur. Dire qu'il avait trouvé sa question étrange était un euphémisme, et même s'il était habitué aux bizarreries depuis qu'il avait rejoint l'équipe des Avengers, poser ce genre de questions n'était pas le genre du brun.
–Pourquoi, tu as prévu de t'évanouir dans la nature ? Préviens-moi de la date de départ, histoire que je mette le champagne au frais, plaisanta son ami en croisant les bras avant de s'appuyer contre le mur du fond, mais voyant que sa remarque ne le fit pas réagir, il comprit que quelque chose de sérieux devait le tourmenter. Qu'est-ce que tu cherches ?
–Ce n'est pas quoi, déclara-t-il. Plutôt qui, précisa Bucky, toujours concentré et il aperçut vaguement Sam venir vers lui pour se servir un café avec la cafetière déposée au centre de la table. Oh, il n'y en a plus, j'ai tout bu ce matin, lui indiqua-t-il en tapant frénétiquement sur son clavier. Désolé, s'excusa-t-il, la tête ailleurs. Je peux en refaire dans une minute. Alors ? Tu sais comment tu ferais si tu devais disparaitre ? répéta-t-il en levant enfin les yeux vers lui, s'écartant un peu de l'écran.
–Hum… Eh bien, je crois que je retournerais au combat, je simulerais ma mort et demanderait à deux trois collègues de me couvrir avant de filer dans un pays du tiers-monde, où je pourrais vivre où personne ne viendrait me chercher, énonça Sam en se chargeant lui-même d'aller refaire du café. Ensuite, je te passerais un coup de fil pour te rappeler que non, je ne suis pas mort, et qu'à tout moment, je peux redébarquer pour mettre la misère dans ta vie, s'exclama-t-il en revenant avec une cafetière pleine, et il leur en versa une tasse à chacun. Pourquoi, au fait ? l'interrogea-t-il au moment où ils trinquèrent.
–Je… C'est compliqué… Admettons que tu ne veuilles que personne ne sache où tu te trouves ? Ni tes collègues, ni tes amis… Ni ta famille ? énuméra-t-il. Qu'est-ce que tu ferais ?
–Ok, temps mort, l'interrompit son acolyte en tirant une chaise vers lui pour s'asseoir. Explique-moi ce qu'il se passe, parce que là, je commence à un peu flipper.
Bucky soupira et se pencha en arrière en se passant une main sur le visage. Il commençait à avoir un peu mal aux yeux à force de rester scotché devant son ordinateur, auquel il n'était pas habitué depuis tant de temps que cela. Il était un peu fatigué, mais suffisamment d'attaque pour commencer à discuter de ce qui le préoccupait avec un ami aussi proche que l'était Sam.
–C'est Madison, soupira finalement Bucky.
–Quoi, elle a des problèmes ? s'inquiéta immédiatement ce dernier.
–Peut-être… Je n'en sais rien, pour être honnête, et c'est ça, le vrai problème.
–Il va falloir que tu m'expliques un peu plus en détails, si tu veux que je t'aide… Et en quoi ça aurait un rapport avec le fait que tu veuilles disparaitre ?
–Pas moi, le corrigea Bucky en tournant son écran vers lui. Elle. Ça fait un moment que je n'ai plus aucune nouvelle, et ça, ça m'inquiète. Elle n'a jamais été du genre à effrayer se proches en jouant la carte du silence.
–Je vois… Et, depuis combien de temps ne l'as-tu pas vue ?
–Depuis l'enterrement, lâcha-t-il de but en blanc.
Sam entrouvrit la bouche, légèrement choqué d'apprendre quelque chose de tel. Il reposa sa tasse sur le bord de la table et la poussa un peu afin qu'elle ne tombe pas, les sourcils froncés. Il fit un rapide calcul dans sa tête et n'en fut que plus étonné lorsqu'il aboutit à un résultat.
–Mais… C'était il y a… Pas loin de huit mois, souffla Sam, un peu perturbé, et son ami acquiesça silencieusement, alors il se concentra au maximum et resta aussi sérieuse que possible. Ok, explique-moi ce que tu sais concernant son départ.
–Pas grand-chose. D'après Nat, elle a laissé une lettre dans la maison des Stark dans laquelle elle disait qu'elle avait besoin d'un peu de temps pour faire le point, et qu'elle et Arthur s'absenteraient pour un moment indéterminé. Dans sa lettre, elle s'excusait pour nous parce qu'elle craignait de nous blesser en partant comme ça, sans vraiment dire au revoir à quiconque. C'était trop dur, apparemment.
–Et quoi, elle n'a contacté personne depuis ? s'étonna Sam. Et Pepper ? Morgan ? Ou bien Nat, justement, s'exclama-t-il en se levant de son siège d'un bond. Elle a forcément dû…
–Personne, le coupa Bucky en secouant la tête de droite à gauche avant de pointer l'écran de son ordinateur. Et malgré toutes les recherches que j'ai pu faire, il n'y a rien. J'ai réussi à tracer ses dépenses grâce à l'aide de Clint, mais il y a un hic. Il n'y en a aucune depuis le lendemain de son départ. Elle n'a pas paris de train ou d'avions pour quitter le pays, elle a juste payé un taxi et ensuite, plus rien pendant huit mois entiers. J'ai essayé de retracer ce taxi, et par miracle, je l'ai retrouvé. J'ai pas mal tchatté avec son chauffeur, qui dit s'être souvenu de Madison parce qu'il l'avait déjà vue dans un journal. Il se rappelle parfaitement les avoir fait monter, elle et un petit garçon, dans son taxi avant de les conduire à une adresse à Manhattan, à l'angle de Lexington et de la quatre-vingt-troisième.
–Et ?
–J'y ai été.
–Et ?
–Et rien, Sam, s'exclama Bucky en haussant les épaules. Il n'y a rien, là-bas, juste un ancien hôtel qui a fermé il y a deux ans, qui ne loue et ne vend aucun local. C'est vide, il… Il n'y a rien, soupira le soldat en fermant son ordinateur, la mine déconfite. J'ai retourné chaque étage, chaque pièce, mais je n'avais même pas besoin de forcer la moindre porte, puisque l'endroit a tout bonnement été laissé à l'abandon. Personne et… Rien, soupira-t-il en posant ses coudes sur la table avant de prendre sa tête entre ses mains.
Sam sentit à quel point son ami se sentait mal, même s'il cachait bien son jeu. Sam n'était pas dupe. Il laissa à son tour échapper un soupir de désarroi face à la situation qui s'offrait à eux. Il se pencha en avant et s'appuya également sur la table, pensif. Son ami ferma un instant les yeux afin de remettre ses idées en place.
–Huit mois… souffla-t-il. Tu dois bien avoir une piste ?
–Juste les e-mails cryptés intraçables que reçois chaque semaine Pepper et signés de la main de Madison. C'est extrêmement minimaliste, car elle se contente juste de lui dire qu'elle et Arthur vont bien et qu'on n'a pas à s'en faire. Va savoir où elle s'est terrée… Je te jure, Sam, ça commence à me rendre dingue. Et ne parlons même pas de Nat.
–Comment elle vit tout ça ?
–Mal, répondit l'ancien soldat de l'hiver. Elle n'a pas arrêté, depuis le départ de Madison. Elle court dans tous les sens, elle remue ciel et terre pour la retrouver, mais elle n'a rien de plus que moi. En dehors de ce fichu taxi, je n'ai pas la moindre piste, et je ne sais plus vers qui me tourner.
–… Je crois que je la comprends.
–Comment ça ?
–Buck, elle venait de perdre son frère. Elle a passé plus de la moitié de sa vie à le chercher, et elle a été forcée de le regarder mourir pour sauver le monde. Je ne pense pas que qui que ce soit puisse la blâmer pour avoir eu envie de s'éloigner de tout ce qui lui rappelait Tony, c'est-à-dire nous également. Il faut juste lui laisser du temps, mais je suis sûre qu'elle reviendra. Il faut juste qu'on soit patient, ou… Qu'on demande à quelqu'un d'autre de nous filer un coup de main, proposa Sam.
–Comme qui ? Nat et Clint sont sur le coup, ne me dit pas que tu connais quelqu'un qui connaisse Madison mieux qu'eux. Le frère de Clint est un génie de l'informatique et n'a pas su retracer les messages envoyés. Même Charles Xavier a tenté sa chance, mais depuis que ce n'est plus une mutante, il n'arrive pas à la localiser.
–Oh, je ne dis pas qu'il la connait mieux… Simplement qu'il pourrait peut-être… Je dis bien peut-être nous aider dans ces recherches.
–Pourquoi ai-je peur, tout à coup ? lança Bucky en plissant les yeux, avant de croiser les bras, néanmoins curieux vis-à-vis de la proposition que son ami s'apprêtait à lui faire. J'espère que tu ne vas pas me demander de t'aider à faire évader un crack de l'informatique de prison, parce que je ne suis clairement pas d'humeur, Sam.
–Ca, c'est l'option numéro deux, fit-il remarquer, rappelle-moi de la noter quelque part… Mais non, ce n'est pas à ceci que je pensais. Plutôt à quelqu'un qui… Disons est doté de pouvoirs surprenants dont nous ne sommes pas certains de connaitre l'étendue et qui a quand même une affinité avec celle que nous recherchons… Le tout est de trouver le moyen de le contacter et le faire venir ici.
–Quoi, il ne vit pas aux Etats-Unis ?
–…
–Sam ?
–Ok, pour être tout à fait honnête, il vient d'une autre planète…
–… Oh, non.
–Ca pourrait le faire, s'exclama le Faucon en tapant du plat de la main sur la table. Il la connait, et je pense que Natasha et Pepper seraient ravies de savoir qu'il nous aide dans nos recherches.
–« Ravies » n'est certainement pas le mot que j'aurais utilisé, Sam. Tu te rends compte qu'en plus de le détester, Madison serait probablement déçue de savoir qu'on lui a demander à lui des informations ? Soyons sérieux une seconde.
–Le détester ? s'étonna son ami. De qui tu parles ?
–Et toi, de qui tu parles ? Tu ne comptes pas contacter Thor ?
–Quoi ? Mais non, pas du tout ! Je pensais à son frère, avec qui, je l'ai appris, Madison s'entendait relativement bien avant… Thanos, et tout ce qui a suivi par la suite, expliqua-t-il, et Bucky poussa un soupir de soulagement. Non, je ne suis pas inconscient au point de contacter Thor… Loki, en revanche, pourrait nous être utile, mais il est retourné sur Jotunheim peu de temps après l'enterrement. Tu as toujours un transmetteur avec toi ? Le mien ne fonctionne plus depuis longtemps.
–Je devrais pouvoir trouver ça. Tu crois qu'il acceptera ?
–Qui sait ? Qui ne tente rien n'a rien, alors… Essayons. Et dans le pire des cas, comme je te l'ai dit, Madison finira probablement par revenir d'elle-même, lorsqu'elle se sentira prête.
–Je le sens mal, Sam.
–Quoi donc ?
–Je ne sais pas, justement. Il y a quelque chose qui cloche, j'ai comme un mauvais présentiment. Comme si… Comme si quelque chose allait se produire, tu comprends ? lui dit-il, ce à quoi son ami acquiesça d'un air grave. Appelons Loki, tu as raison. Je doute qu'il refuse, et si jamais il y a un problème, sa présence sera bénéfique, affirma-t-il au moment où son ami se leva pour aller chercher son téléphone. Hey, Sam ?
–Ouais ?
–Merci de m'aider.
–Je t'en prie. C'est mon amie, et je m'inquiète aussi. J'espère qu'on la retrouvera rapidement.
Malheureusement, ça, Bucky en doutait. Si la brune avait pris la décision de disparaitre, c'était pour une raison qui lui était propre, et ne se contenter que de messages minimalistes faisait partie de sa façon de prendre du temps pour elle. Et la connaissant, il savait que si elle se cachait, ils auraient beaucoup de mal à mettre la main dessus.
