Chapitre 20
La fin d'une ère pour les Delombre
Un rayon de soleil filtrait à travers la fenêtre de la chambre. Il était encore tôt, à peine sept heures. Dans son lit, Míriel remuait vaguement la tête depuis quelques minutes. La lumière l'atteignait au visage, lui donnant mal aux yeux. Après un moment, elle réussit à battre faiblement des paupières. La clarté était vive, mais elle s'y accoutuma peu à peu. Graduellement, elle arriva à distinguer une fenêtre ensoleillée devant elle, des murs blancs tout autour et un plafond jaune canari au-dessus. Sa tête semblait être remplie de ouate et elle n'arrivait pas à replacer cet endroit dans ses souvenirs. Elle vit ensuite, près de la porte, un vieux fauteuil vert où un homme s'était endormi.
« Remus », songea-t-elle en le reconnaissant.
Le loup-garou semblait encore plus fatigué que la dernière fois où elle l'avait vu et d'autres mèches blanches s'étaient rajoutées parmi ses cheveux châtains. C'est alors qu'elle prit conscience d'une seconde présence, caractérisée par un poids à la hauteur de son ventre. Elle baissa les yeux pour apercevoir Harry qui dormait, la tête appuyée sur son lit, les lunettes de travers et la bouche légèrement entrouverte. À cette vision, elle ne put s'empêcher d'étirer les lèvres en un pâle sourire. Les membres encore engourdis, elle étira avec difficulté une main pour venir caresser la joue de son petit ami.
Elle ne savait toujours pas où elle était ni combien de temps elle était restée sans connaissance, mais peu importait. Elle avait maintenant la certitude que tout irait bien.
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On était en début juin. Míriel était restée plus d'un mois dans le coma. Grâce aux enchantements des Guérisseurs, elle n'en avait gardé aucune séquelle, mais cela lui avait tout de même prit deux semaines avant d'être en état de quitter Ste-Mangouste. De retour à Poudlard, des rumeurs à son sujet avaient largement eu le temps de se répandre et elle ne pouvait plus maintenant se promener sans entendre des élèves murmurer sur son passage. Parmi les suppositions les plus populaires sur la raison de son absence prolongée, on trouvait un voyage aux îles Marshall pour aller voir son père criminel en fuite, un kidnapping par des vampires qu'elle aurait rencontrés en Transylvanie et une mission top secrète confiée par le Ministre de la magie en personne.
Mais Míriel ne se souciait pas de tout cela. Elle laissait courir les rumeurs, car elle ne tenait pas particulièrement que l'école entière soit au courant de son hospitalisation. Elle ne voulait pas avoir à raconter ce qui lui était arrivé. Elle souhaitait seulement qu'on la laisse tranquille à présent.
Les évènements qui étaient survenus durant les dernières semaines l'avaient véritablement transformée. Elle était beaucoup plus « calme » maintenant. Elle passait le plus clair de son temps à faire ses devoirs, ayant plus d'un mois de cours à rattraper en plus des examens qui approchaient. Elle parlait moins, riant à peine. Son sourire avait quelque chose de nostalgique, comme si, à chaque fois, elle songeait à la manière dont elle aurait réagi si rien ne s'était passé. Pourtant, lorsqu'on lui demandait si elle allait bien, elle répondait d'une voix paisible que tout allait pour le mieux.
Parmi ses amis, il était clairement convenu qu'on ne devait pas faire la moindre allusion à son enlèvement ou à tout autre évènement s'y rattachant. Mais, chez les rares personnes qui étaient au courant de la vraie histoire, certaines n'étaient pas d'accord pour appliquer cette règle, notamment Malfoy.
C'était l'heure du déjeuner, un mercredi, environ une semaine après le retour de Míriel. Lorsque les quatre Gryffondor étaient descendus dans le hall, ils étaient tombés sans le vouloir sur le blondinet et ses deux acolytes. Dès qu'il les vit, celui-ci entreprit de mimer quelqu'un se jetant sur un mur en gémissant.
« Alors, ça te rappelle des souvenirs Delombre ? » demanda-t-il d'un ton narquois. « Oh, je vous en supplie, épargnez-moi et je ferai tout ce que vous voudrez… » fit-il ensuite en reprenant son imitation.
« Ferme-là Malfoy ! » s'écria Harry.
Ce dernier, ainsi que Ron, s'était avancé en empoignant sa baguette. Mais, contrairement à ces amis, Míriel avait gardé un visage impassible et se contentait de fixer calmement le Serpentard. Celui-ci, faisant fi de l'avertissement du jeune homme continuait à exécuter ses mimiques, accompagné par les rires de Crabbe et Goyle.
« Draco », coupa tout de même la jeune fille après quelques instants. « Aurais-tu l'obligeance de communiquer à ton père que je mets fin à partir de maintenant à tous nos arrangements financiers et que je vais également intenter un procès contre lui pour le meurtre de ma mère, de mon oncle et de ma cousine et pour enlèvement et agressions sur ma propre personne ? »
Malfoy stoppa net ses singeries et ses deux compagnons arrêtèrent de rire.
« Mais tu sais bien qu'aucun juge n'osera condamner mon père », dit-il en tentant de prendre un air dégagé.
« Un juge oserait n'importe quoi si on lui donnait cent mille gallions », répondit Míriel.
Et laissant figé là le Serpentard, elle se dirigea calmement vers la grande salle.
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Le soir venu, ils s'étaient assis autour d'une des petites tables de la salle commune, chacun s'occupant soit avec un devoir soit avec autre chose. Míriel s'était attaquée à ses travaux de rattrapage en Sortilèges qui se concentraient pour le moment aux charmes de confusion et à ses dérivés. Elle rayait pour la troisième fois déjà une phrase de son deuxième paragraphe quand la voix d'Hermione la fit émerger de ses réflexions.
« Vous ne connaîtriez pas un verbe qui serait formé par les lettres i-r-o-u ? »
« Ouïr », grommela-t-elle sans même prendre la peine de lever les yeux de son parchemin.
« Merci, comment as-tu fait pour trouver si vite ? » s'exclama la jeune fille.
« C'est parce que cela fait quinze minutes que j'essaie de trouver un moyen de dire que la plupart des sortilèges de confusion n'ont pas d'effet sur l'ouïe… »
« Mais pourquoi veux-tu savoir ça Hermione ? » demanda Harry.
« C'est pour mon anagramme », répondit-elle.
« Ton quoi ? » fit Ron.
« Mon a-na-gra-mme. C'est lorsqu'on mélange les lettres d'une phrase pour en obtenir une autre. Comme par exemple, là je commençais avec « Les chiens rougeoient dans la lande fanatique. » et maintenant je suis rendue avec « Ouïr le chant des … » », expliqua-t-elle.
En entendant cela, Míriel sentit son esprit s'éclaircir soudainement. Une phrase complètement débridée qui prenait magiquement sens… Les inscriptions de la Perle ! Délaissant son devoir, la jeune fille se leva et se dirigea vers son amie. Elle se saisit d'un bout de parchemin et y retranscrit le message. « Par repos, la suppression sort les quatre lords catarrhe étrangers. Le mur annonciateur a ces tour rose écarlate. V.O. »
« Est-ce que tu crois que cela pourrait être un anagramme ? » demanda-t-elle.
« Et bien… probablement puisque sinon ce texte n'a aucun sens… Où est-ce que tu l'as trouvé ? »
« Ça n'a pas d'importance. Est-ce que tu serais capable de le résoudre ? »
« Euh… je peux essayer, mais je ne te garantie rien, il n'a pas l'air facile. »
« Fais de ton mieux, c'est très important. »
Après cette recommandation, Míriel retourna se plonger dans ses devoirs comme si de rien n'était, ignorant les regards interrogateurs que lui lançaient ses amis.
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Hermione devait avoir pris l'anagramme de la Perle comme un défi personnel, car elle ne le lâcha pas une seule seconde avant plusieurs jours. Elle traînait maintenant avec elle une longue feuilles de parchemin où était raturées de nombreuses lignes d'essaies infructueux et où se suivait une liste de combinaisons possibles. Míriel la consultait souvent pour voir où son amie était rendue et pour l'aider à sélectionner les pistes les plus probables, car contrairement à cette dernière, elle savait bien qu'une phrase parlant de dominos ou de porridge n'était pas la bonne réponse.
C'est finalement presque par hasard que la solution apparut. Une nuit, alors qu'Hermione n'arrivait pas à dormir, elle s'était installée sur le rebord de sa fenêtre et avait entrepris de se remettre à travailler sur l'anagramme. N'ayant pas réellement la tête aux recherches, elle s'était bien vite laissée déconcentrer et s'était abandonnée à la contemplation des étoiles et de la lune. La beauté des astres l'avait toujours fascinée… Elle rebaissa nonchalamment les yeux sur son parchemin et soudain, en observant une des phrases, certaines lettres attirèrent son attention. « Les quatre lords catarrhe étrangers. » Deux fois le mot « astre », puis « or » et « argenté ». L'astre d'or, l'astre argenté… le soleil et la lune ? C'était la première fois qu'elle trouvait quelque chose d'aussi « poétique ». Cela voulait peut-être dire qu'elle était sur la bonne piste. Elle sortit sa plume et son encrier et entreprit de retranscrire les quelques mots qu'elle avait identifiés et de rayer les lettres qu'elle avait utilisées. Par la suite, le tout s'enchaîna de lui-même. En moins d'une heure, à force d'essayer, de barrer et de recommencer, quatre vers prirent forment sous les yeux de la jeune fille.
« Lorsque l'astre argenté
Aura caché l'astre d'or,
Alors la Perle pourra être cassée
Car pendant un instant, son pouvoir sera mort »
Émerveillée par sa découverte, Hermione bondit sur ses pieds et accourut jusqu'au lit de Míriel. En tirant ses rideaux, elle la vit pelotonnée dans sa montagne de couverture, la tête enfouie dans ses bras et l'oreiller repoussé le plus loin possible contre le montant de son baldaquin. Sans attendre, elle commença à la secouer par l'épaule.
« Míriel ! » chuchota-t-elle. « Réveille-toi, Míriel ! »
« ….'mmmveudormirmmm », grommela la jeune fille en rabattant sa couette par-dessus sa tête.
« Mais c'est important ! »
L'adolescente endormie avança une main tâtonnante vers sa table de chevet où elle saisit sa montre à gousset. Elle jeta un coup d'œil somnolant hors de ses couvertures pour regarder l'heure.
« …l'est deux heures… Hermione… »
« Mais j'ai trouvé la réponse à ton anagramme ! »
Cette phrase eut l'effet d'un choc électrique sur Míriel. Elle se redressa d'un coup, ne semblant soudain plus du tout fatiguée.
« Quoi ? Tu as vraiment réussi ? »
« Oui ! »
« Fais-moi voir… »
Hermione lui tendit le bout de parchemin où elle avait inscrit sa réponse finale. La jeune fille s'en saisit rapidement d'une main tandis que de l'autre elle empoignait sa baguette magique.
« Lumos », murmura-t-elle pour lui permettre de distinguer ce que son amie avait marqué.
Elle lut et relut plusieurs fois les quatre vers que l'anagramme avait donnés, un sourire grandissant aux lèvres. Lorsqu'elle fut certaine que ses yeux ne lui jouaient pas de tours et qu'il était bien écrit « La Perle pourra être cassée » elle se tourna vers sa compagne de chambre.
« Fais-moi penser que je n'ai plus le droit de te refuser le moindre service à partir de maintenant… »
« Euh… d'accord. »
Sans perdre plus de temps, Míriel se leva ensuite de son lit et enfila sa robe de chambre. Parchemin et baguette en main, elle était presque sortie du dortoir lorsque Hermione l'arrêta.
« Mais où est-ce que tu vas ? »
« Voir mon cousin. »
« À cette heure ? »
« Oui. C'est trop important pour que j'attende encore quelques heures avant de lui montrer ce que tu viens de trouver ! »
L'adolescente n'eut pas le temps de demander comment la réponse à un simple anagramme pouvait être si cruciale que déjà son amie était partie. Míriel sortit de la salle commune et arpenta les couloirs de l'école d'un pas vif jusqu'aux appartements du professeur de Défense contre les forces du mal qui étaient situés juste à côté de sa salle de classe. Elle n'eut pas de difficulté à y pénétrer malgré le mot de passe, y étant déjà fréquemment venue. Elle trouva Frank dans son lit, à moitié assis, un livre ouvert sur les genoux, semblant s'être endormi au beau milieu de sa lecture. Avec un sourire joueur, elle se saisit du bouquin et le referma vivement sous le nez du jeune homme. Le claquement sec le réveilla en sursaut.
« Heinquoikesquia ? » bafouilla-t-il en clignant des yeux. « Míriel ? Mais qu'est-ce que tu fais ici ? »
« J'ai la solution Frank ! » s'exclama-t-elle.
« La so… quelle solution ? » demanda-t-il, le cerveau fonctionnant encore au ralenti.
« Les inscriptions sur la Perle. Je sais ce qu'elles veulent dire ! »
« Ah oui ? » fit-il alors que son esprit décliquait. « Comment est-ce que tu as fait ? »
« Je me suis aperçue que les phrases formaient un anagramme et ensuite, Hermione a pu le décoder pour moi », expliqua la jeune fille.
« Et de quoi ça parle ? »
Míriel lui tendit le bout de parchemin et il lut avidement ce qui y était écrit. Après avoir fini, il tourna la tête vers elle, une expression stupéfaite sur le visage. Il ouvrit la bouche et la referma après quelques secondes sans rien dire pour relire encore une fois les quatre vers du poème.
« Attends, si je comprend bien, on pourrait détruire définitivement la Perle sans aucun danger lors d'une éclipse totale de soleil ? » dit-il finalement.
Elle hocha affirmativement la tête, un sourire rayonnant aux lèvres.
Le professeur se laissa gagner par son enthousiasme quelques secondes avant de froncer les sourcils.
« Mais… pourquoi nos ancêtres n'ont-ils pas brisé la Perle eux-mêmes alors ? Au lieu de marquer cela de manière à ce que personne ne le découvre ? »
« Parce que… »
Mais Míriel se tut, se rendant compte qu'elle n'en avait pas la moindre idée. Ils restèrent alors de longues minutes sans parler, réfléchissant tous les deux à cette question. La jeune fille sortit alors la Perle de sous sa robe de chambre et en observa la monture. C'est alors qu'un détail la frappa.
« Les inscriptions sont en Anglais ! »
« Oui et ? Qu'est-ce que ça change ? »
« Mais nos ancêtres parlaient le Français à l'époque ! »
C'est alors que Frank comprit.
« Ce n'est donc pas eux qui ont forgé la monture ? »
« Non, c'est… »
Elle jeta un coup d'œil aux gravures. « V.O. »
« … Victor D'Ouvillest »
« Qui ? »
« C'était le bijoutier du village. Ils l'ont écrit quelque part dans un de leurs livres… Ça vient seulement de me revenir. »
« Mais comment avait-il pu découvrir quelque chose sur la Perle ? Et pourquoi aurait-il voulu le cacher ? »
Míriel réfléchissait à toute vitesse.
« Probablement que D'Ouvillest ne savait pas sur quoi il travaillait, que les De l'Omberge ne lui avait commandé qu'une monture en argent, rien de plus », dit-elle en émettant ses hypothèses à voix haute. « Il était curieux alors il a enquêté et a découvert l'existence de la Perle. Peut-être était-il alchimiste lui aussi alors en faisant des recherches et sans doute en se basant sur ses propres expériences, il a conclu que le pouvoir de l'ombre se désintègrerait de lui-même si on le lâchait dans un monde sans soleil. Il fallait donc une éclipse. »
« Mais pourquoi ne pas avoir fait part de ses découvertes à nos ancêtres ? »
« Il avait peur qu'on lui fasse du mal ou qu'on le tua si les De l'Omberge apprenaient qu'il les avait espionnés et qu'il avait découvert leur secret. Mais il ne voulait pas non plus que ses trouvailles soient perdues alors il s'est arrangé pour les « camoufler » »
« En les mettant à l'endroit le plus visible ? »
« Mais il a écrit en anglais alors nos ancêtres ne se sont pas méfiés. Ils croyaient probablement que c'était une citation que le bijoutier affectionnait particulièrement, ou même que ce n'était qu'une sorte de marque de fabrication. En plus il avait signé ses initiales, alors ils n'ont pas cherché trop loin. »
« Mais ils ont bien dû se rendre compte que ce n'était qu'une phrase sans queue ni tête à la fin ! »
« Oui, mais seulement plusieurs générations plus tard. Et alors l'histoire de Victor D'Ouvillest avait été oubliée. »
En voyant que tout coordonnait, Frank ne put s'empêcher de sourire.
« C'est parfaitement logique, tout se tient ! Comment est-ce que tu as fait pour trouver ça ? »
« C'était élémentaire, mon cher Watson ! »
« … Pardon ! »
« Euh… c'est Hermione qui dit tout le temps ça. C'est sûrement une expression moldue. »
« Mais pourquoi est-ce que tu m'a appelé Watson ? »
« … J'en sais rien moi ! »
Le jeune homme lui envoya un regard bizarre, avant qu'ils ne pouffent de rire tous les deux. C'était comme si on leur avait ôté un poids considérable de sur les épaules. Maintenant, ils savaient qu'une simple éclipse allait suffire pour mettre fin à leur calvaire.
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La fin juin était arrivée et les examens avec elle. Míriel était maintenant aux prises avec un horaire surchargé. En plus des cours usuels, elle avait un nombre inhabituellement élevé de pratique de Quidditch à cause de la finale du championnat qui approchait et également de l'étude à n'en plus finir. Elle utilisait la moindre minute de temps libre pour rattraper ses nuits de sommeil écourtée par le travail ou pour se replonger de plus belle dans ses manuels. Elle allait aussi jusqu'à manger le plus gros petit déjeuner possible pour ainsi pouvoir manquer son repas du midi et utiliser son temps ailleurs.
Malgré tout cela, elle trouvait tout de même l'occasion de lire religieusement la Gazette du sorcier d'un bout à l'autre, à la recherche de la moindre allusion à une éclipse prochaine. Frank et elle s'étaient faits à l'idée que cela prendrait sûrement du temps et qu'ils devraient s'armer de patience. Mais elle ne désespérait pas.
Son acharnement fut récompensé lorsque, à peine cinq jours avant la fin de l'année, elle vit dans un petit encadré, au bas de la dernière page du journal, quelques lignes annonçant une éclipse totale de soleil, le jour même, à 16h, à Berlin en Allemagne.
Ne tenant pas compte du fait qu'elle avait un examen de métamorphose qui commençait dans à peine dix minutes, elle se précipita dans le bureau de son cousin pour lui apprendre la nouvelle.
« Frank ! On part sur l'heure pour Berlin ! » s'exclama-t-elle en entrant dans le bureau du jeune homme.
« Quoi ? Berlin ? Aujourd'hui ? Mais… »
« Je n'ai pas dit « aujourd'hui », j'ai dit maintenant. Allez, dépêche-toi, trouve-toi des vêtements moldus, tu ne peux pas sortir accoutré comme ça. »
« Mais… mais… Míriel, j'ai un cours dans cinq minutes ! Et toi tu as un examen ! »
« On s'en fiche royalement de l'examen, on s'en va en Allemagne ! », déclara la jeune fille.
Alors que son cousin allait répliquer, elle lui mit sous les yeux son exemplaire de la Gazette du sorcier en lui indiquant le petit encadré en bas de page.
« É-CLI-PSE SO-LAI-RE BER-LIN » articula-t-elle.
Après avoir lu l'article, il releva la tête vers elle, un sourire émerveillé aux lèvres et l'air de quelqu'un qui vient de voir son plus grand rêve se réaliser.
« Tu as raison, il n'y a pas une seconde à perdre », dit-il en se levant et en se dirigeant du côté de ses appartements. « Aide-moi à me trouver des fringues de moldu, tu veux ? »
La jeune fille s'exécuta sans perdre un instant. Une dizaine de minutes plus tard, ils avaient déjà fini par s'accorder (ce qui n'était pas facile vu leur ignorance complète du monde moldu) sur un jean bleu pâle et un t-shirt blanc. Alors que Míriel se dirigeait vers la porte pour sortir se trouver elle aussi des vêtements, on toqua à celle-ci. Sans prendre le temps d'attendre une réponse, elle s'ouvrit, laissant apparaître Dumbledore.
« Frank ! Que faites-vous encore ici ? Vos élèves vous attendent », s'exclama-t-il.
« Et bien demander à quelqu'un de me remplacer, monsieur le directeur », répondit le jeune homme. « Pour l'instant j'ai un Portoloin pour l'Allemagne à attraper au plus vite. »
« Pour l'Allemagne dites-vous ? Mais qu'allez vous faire en Allemagne à cette heure ? »
« La destruction de ce qui nous pourrit la vie depuis trop longtemps déjà », déclara Míriel à la place de son cousin. « Mais, excusez-moi, je dois partir à la recherche de ma seule paire de jean », continua-t-elle avant de sortir et de se diriger vers la tour des Gryffondor.
Elle ne revient que de longues minutes plus tard, ses pantalons retrouvés et une blouse à rayures en guise de haut.
« Ne riez pas », dit-elle immédiatement en entrant, ne semblant pas apprécier le résultat.
Elle vit son cousin se mordre la lèvre, mais il se retint et déclara à la place :
« Somme-nous prêts à partir ? »
« Tout à fait », répondit-elle.
Ils s'avancèrent tous les deux vers la cheminée du bureau où un feu avait été allumé malgré qu'on soit en juin.
« Et maintenant, excusez-nous monsieur le directeur, mais nous avons une affaire de famille à régler », lança Frank en jetant une poignée de poudre de cheminette parmi les flammes. « Potogare de Londres ! » cria-t-il en avançant dans l'âtre.
Il se mit alors à tourbillonner sur lui-même jusqu'à temps qu'il disparaisse. Míriel s'approcha ensuite du feu à son tour.
« Vous direz au professeur McGonagall que j'aurai à reprendre son examen un autre jour, n'est-ce pas ? »
Dumbledore acquiesça d'un signe de tête.
« Alors on se retrouve ce soir. Au revoir ! »
Et la jeune fille disparut dans le feu.
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Ils étaient arrivés au Portogare de Londres –le point de départ et d'arrivée de tous les Portoloins internationaux– et avaient acheté des billets pour le prochain en destination de Berlin. Celui-ci était malheureusement deux heures plus tard et ils durent attendre.
Une fois arrivés dans la capitale, il était déjà midi et ils en profitèrent pour aller déjeuner dans un café. C'est après cela qu'ils se mirent en quête d'un endroit loin des regards indésirables et où ils pourraient profiter au maximum de l'éclipse. Ils étaient parvenus aux frontières de la ville, dans un des petits bouts de verdure qui entourait les banlieues. L'endroit était désert, le soleil plombant trop fort en cette chaude journée. Ils s'étaient postés sur une petite bute herbeuse au sommet parsemé de grosses pierres (probablement « décoratrices »). Il était 15h30, il leur fallait attendre à présent. Míriel s'était étendue sur une des roches de la colline, observant le ciel, guettant la moindre oscillation de lumière. Frank, quant à lui, se contentait de faire les cents pas en jetant des coups d'œil impatient à sa montre toutes les trente-cinq secondes. C'est lorsque après une attente interminable, celle-ci émit un bip sonore annonçant 16 heures que le jeune homme arrêta de tourner en rond et que l'adolescente se redressa.
C'est alors qu'on vit distinctement l'ombre de la lune se profiler parmi les rayons aveuglant du soleil.
D'un geste rapide, Míriel sortit la Perle de sous sa chemise et la passa par-dessus sa tête.
La lumière faiblissait autour d'eux tandis que les astres s'alignaient peu à peu l'un devant l'autre.
Elle dévissa vivement la monture d'argent qui retenait la pierre prisonnière et posa celle-ci sur une roche plate encastrée dans le sol.
Le cercle de noirceur avait déjà englobé plus de la moitié de son rival.
Frank s'approcha du bijou et leva le pied au-dessus de lui.
« Alors on prend une chance et on fait comme si le vieux bijoutier avait raison ? » dit-il.
« Nous n'avons plus le temps de reculer maintenant. »
« Alors allons-y ! »
Il jeta un regard au ciel et lorsque le soleil eut complètement disparu, il prit une grande respiration et fracassa la Perle d'un coup de talon. S'échappa alors des débris de verres un nuage de fumée noire, beaucoup plus compact que de la simple vapeur l'aurait été. C'était de l'ombre à l'état pur. Celle-ci s'éleva à quelques mètres du sol et resta en suspension pendant plusieurs instants. Les deux jeunes gens retenaient leur souffle.
Puis finalement, un coup de vent passa et la fumée se désintégra comme un nuage de poussière. C'est alors que les premiers rayons de soleil réapparurent et Frank et Míriel purent respirer à nouveau. En voyant les éclats de vitre qui étaient restés par terre, la monture vide qui était serrée au creux de sa main et la lumière qui brillait dans le ciel, la jeune fille ne put s'empêcher de se sentir soulagée. Énormément soulagée. Sans qu'elle puisse se contrôler, elle commença à rire sans raison particulière. Un rire de joie, simple et clair dans le silence de la campagne qui les entourait.
Elle était heureuse, plus heureuse qu'elle n'avait jamais pensé l'être. La Perle de l'ombre était détruite.
C'était la fin d'une ère pour les Delombre.
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Note de l'auteur : Et le prologue qui s'envient très très bientôt…
La fin est proche….
Reviews ? sivouplait…
