LA NUIT LA PLUS LONGUE
Épisode IV : Arrogant
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Pendant un instant, je n'y ai pas cru. Ce n'était pas comme ça que ça devait se passer... Jamais elle n'était sensée me dire non. Mais pourtant, elle semblait catégorique.
-Non.
-Non ? Je ne..
Je me tut. Si je n'avais eu cette dignité superficielle qu'ont tous les serpentards, je vous avouerais probablement que jamais dans ma vie je ne me suis senti aussi abruti que pendant ce bref instant. Ces quelques secondes. Un enfer éternel d'impuissance. J'étais totalement désarçonné par cette crinière sauvage sous laquelle se cachait cette Granger qui rendait mon cœur fou. Fou d'impuissance, pas fou d'amour, entendons-nous. Faut pas rêver debout. Ce n'est pas parce que je vais bientôt, peut-être, éventuellement, mourir...que je suis cinglé à ce point. Non, rectification, je ne mourrai pas. Au pied du mur, ce sera elle ou moi, et j'ai déjà fait mon choix. Qu'elle aille au Diable! cette griffondor de Granger...Qu'elle y aille en enfer, et on s'y rencontrera dans quelques dizaines d'années.
Je fronçai les sourcils. Peu importe mes paroles, ma mort "imminente", Granger m'avait dit non, et ça ne me plaisait pas. Ce n'était pas sensé se passer comme ça.
-Tout de même, monsieur Zabini, vous n'y avez quand même pas cru…
-Cru à quoi?
-Ne faîtes pas l'idiot, je parle de votre embauche.
-Ah, tiens...j'avais oublié...
Granger me lança un regard méfiant. Je décidai alors de rectifier mon tir. Je n'allais à coup sûr pas lui donner raison en réagissant comme le serpentard orgueilleux et prétentieux que j'étais. J'écrasai mon impatience et toute la gamme d'émotions vilaines qui allaient avec et je baissai les yeux en signe de soumission. Les femmes adorent se sentir supérieures aux bels hommes. Ce n'est pas de la vantardise, c'est un fait.
-Excusez-moi, je me laisse emporter. C'est seulement que...j'avais beaucoup d'espoir. Je croyais que vous, vous comprendriez. Je dois me heurter à la réalité : ce qu'on fait a toujours des conséquences. J'ai agi toute ma vie comme un idiot prétentieux, et il me revient ce que je mérite. C'est triste à dire, mais qu'est-ce que je peux y faire?
Qu'est-ce que je peux y faire? Comment puis-je me rattraper de toutes ces erreurs? Je crois, Hermione, que travailler dans cet hôpital et soigner ces pauvres victimes de guerre en serait une, solution. Seulement, vous y voyez un inconvénient. Vous êtes intelligente et vous n'avez pas tort, chère Hermione, vous voyez clair dans mon jeu.Cependant, ce n'est pas comme ça que ça devait se passer. Vous brouillez les plans, et peut-être que je devraimettre une croix surle mystère qui entoure votre acteet mes pressentimentspour vous assassiner plus tôt que je l'avais prévu. Ça ne vous plaira probablement pas, à moi non plus d'ailleurs...je suis un peu couard face à la mort. Toutefois, j'ai bien plus peur de ma mort que de la vôtre et j'ai été élevé parmi des assassins. Ainsi va la vie...
Ça, c'est la vérité. Bien entendu, j'ai bien évité de la dire. Ma mère n'a pas élevé un idiot, quoique j'en dise.En réalité, j'ai plutôt mis court à la conversation.
-Maintenant, je vais...
-Vous allez vous asseoir une minute, j'aimerais vous parler.
Toujours en gardant la tête basse, je me rassis sur la chaise moelleuse. Une mèche de cheveux ébène glissa sur mon front. En face de moi, Hermione Granger fouillait dans sa paperasse, sérieuse. Je l'imaginai alors aussi souriante que sur le cliché dans son appartement. Heureuse, sereine. Puis tout vint se gâcher et je la vis courir derrière moi, la baguette levée, la haine au cœur. Le vent soufflait, les feuilles virevoltaient, les nuages avançaient. Un coup de baguette, un seul coup et je...
-Monsieur Zabini, je crois avoir une proposition qui pourrait vous être intéressante...
J'étais toujours plongé dans mes songes, absent.
-Monsieur?
-Ne m'appelez pas Monsieur, ce n'est pas approprié. Juste Zabini, ça suffit.
-Ne jouez pas les modestes, Monsieur Zabini, je crois que… vous méritez autant ce titre que tout le monde.
-Vous avez hésitez.
-Bien sur que non.
-Si.
-Très bien, alors. Vous avez raison! Je suis désolée. C'est seulement que…
-Vous patinez, ma chère Hermione. Vous me considérez comme un pauvre sorcier blasé.
-Bien sur que non, nous avons déjà eu une conversation là-dessus, et je crois avoir été très claire. Si vous ne me croyez pas, c'est votre problème.
-Je sais que vous me trouvez blasé. Et vous avez un peu raison.
Je ris un peu. Un petit éclat de rire qui n'était pas à sa place. Un petit éclat de rire perdu dans le vide. Je poursuivis :
-Je suis un pauvre gars. Allons, ce n'est pas ça qui va nous empêcher de dîner, non?
Hermione me sourit doucement. Ce sourire non plus n'avait pas sa place, parce que ses yeux disaient tout le contraire. C'est-à-dire que j'y lisais tout sauf de la compassion. Ça ressemblait bien plus à du doute.
-Non...? répétai-je.
-Non, puisque j'avais justement une intéressante proposition à vous faire.
-Laquelle?
-Celle de travailler dans cet hôpital, mais dans un secteur qui vous serait plus…adapté.
-Ah oui, lequel?
¤
Je suivais Ronald Weasley d'un pas nonchalant, curieux de découvrir où il m'amenait. La proposition qu'Hermione m'avait faite était toute simple. Elle était de travailler dans cet hôpital, certes, mais pas avec les gens. Pas avec elle. Même pas sur les étages auxquels les gens, les malades, les ensorcelés (et/ou autres) avaient accès. Non, j'étais reclus au sous-rez-de-chaussée. En d'autres mots, j'allais me retrouver comme un rat dans son trou. Ça allait être glauque, humide et vide, je le sentais. Toutefois, je n'allais pas me plaindre, plutôt remercier ce Dieu moldu qui devait veiller sur moi. J'allais m'occuper de la poste à Sainte-Mangouste. J'allais être reclus, mais j'allais avoir plusieurs occasions de rencontrer mon assassine. C'était suffisant.
-Tu dis rien?
-Hein? Réponds-je à Weasley assez sèchement pour que ses oreilles de belette vire au rouge.
-J'aurais cru que quelqu'un comme toi en aurait beaucoup à dire dans ta situation.
-Quelqu'un comme moi? Dans ma situation? T'es pas ce qu'on appelle un chic type.
Weasley n'ajouta rien d'autre. Je sentais pourtant qu'il bouillait. Ça ne lui plaisait pas d'être là avec moi... Ses années de Poudlard lui pesaient sur le cœur? Peu probable, il était trop idiot pour s'en souvenir. Quoique les Weasley puissent être bien têtus...comme des ânes!
Je ricanai silencieusement. Je me sentais drôlement ridicule, mais c'était comme ça depuis des jours. J'avais tellement les nerfs à vif que chaque broutille me faisait éclater de rire.
-Et voilà, Zabini, on y est.
-Merci pour la peine.
Weasley me lança un regard tranchant. Il ne m'aimait pas. Je lui souris tout de même, en bon gentleman sournois que je suis.
-Ne me remercie pas, si ce n'était d'Hermione, je...
Ronald Weasley se tut. Non,j'avais tortenaffirmant qu'il ne m'aimait pas. En fait, il me détestait. Et je n'étais pas stupide au point de ne pas deviner que son amourache avec Granger y était pour quelque chose. À Poudlard, son amour sautait aux yeux et je ne crois pas me tromper en avançant que depuis, rien n'a changé. Maintenant qu'il voyait un autre joueur se mêler à sa partie, rien n'allait plus dans sa petite tête remplie de jalousie. Weasley ne s'était jamais senti à la hauteur.
-Tu agiterais un peu ta baguette et vlan! Je me transformerais en crapaud, c'est ça? Ah, au fait, appelle-moi Monsieur Zabini. Je crois en valoir la peine.
Weasley me jeta un drôle de regard et je compris que j'étais peut-être aller trop loin.
-C'est ça, et va au diable.
Weasley s'en fut après m'avoir lancé un dernier regard. Malgré mes réticences, je ne pus m'empêcher de ricaner une fois de plus. Je me dirigeai ensuite vers la pièce qui n'attendait que moi, vers ces hiboux qui ne demandaient que mon attention.
Comme je le pensais, la pièce était très sombre. Mais en plus, ça sentait affreusement mauvais.
Le trèfle Noir
