Titre : Sang et révélations

Auteurs : Yuna Chan ) et )

Source : Gundam Wing, on pouvait pas faire autrement aussi...

Genre : romance, action, angst, surnaturel angst ( je vous assure, ça vaut le coup de le mettre deux fois !) et tortures, aie aie aie !!!

Couples : Un très cuit 3x4, suivi d'un Sally x Wufei bien à point, un Yoki x Kari saignant et un 1x2 bleu... mdrr

Disclaimers : Les G-boys sont pas à nous... Paraît que c'est mieux mais ça dépend des points de vues...

Légendes : : flash back

: changement de scène, d'endroit...

Réponses aux reviews, encore merciiiiiiiiiiiiiiiii :

Yami-rose : Oui, comme tu peux le voir Heero va bien !! J'imagine très bien ta réaction devant le bureau... Ahem, j'espère qu'il y avait pas trop de monde... lol Mais c'est vrai que ça fait plaisir... Pour la peur... Euh.. c'était voulu ? Je crois que j'aggrave notre cas en disant ça mais bon... Pour Quatre et Trowa, c'est le but aussi !! Pardonnées ? lol C'est vrai que pour Wufei et Sally, par contre... enfin, tu verras bien... Et pour Yoki Kari... je confirme.. lol Désespéré et désespérants... Pour la discussion entre Duo et Heero... Et bien, tu l'as en avant première et oui, elle est dans ce chapitre !! ouiiii lol T'as remarqué toi aussi que Yoki c'était un peu la Tim-rocket à lui tout seul ? Il s'envole toujours vers d'autres cieux... et son retour sera fracassant, tu crois pas si bien le dire... (mdrrrr ) Mais tout est dans le chapitre ! Pour oz et ses projets... à c'est plus tard, je pense... lol Merci encore pour tes compliments, merci beaucoup. Et de ta compréhension pour la lenteur des chap aussi... Merci donc pour ta review et bonne lecture !.

Lolo : Merci pour les compliments !! Pour le Heero et Duo... Ah, c'est compliqué, tu vas voir... lol « Yoki, pas si méchant que ça »... Enfin, une âme humanitaire dans ce monde de brute ! Non, tu as raison, au fond... et tu vas bien le voir ! j'ten dis pas plus !! lol Merci, comme tu vois, on a relativement eu de la chance pour écrire la suite... (même si c'était long...) mais elle est là ! Bisous et bonne lecture

Kimiko06 : Ah, ça fait plaisir de savoir que tu peux lire la fic de là ou t'es !! Mais je me demande.. tu peux poster aussi ? bon, ok, j'arrête d'en demander de trop... lol Tu es prémonitrice, y'a pas d'autre solution ! lol Désolée si la fic arrive tard... mais bonne lecture miss !

Shaman girly : Contentes que ça te plaise !! On fait tout pour ça aussi... lol Quel enthousiasme dans cette review ! C'est génial !! Bisous et bonne lecture !

Ruines : Bonjour, bonsoir, selon l'heure à laquelle tu liras !! lol pour moi, c'est bonsoir... Merci Tu n'es pas la première à le dire mais ça fait plaisir de l'entendre... Comme ils sont long.. à venir, on les fait long... à lire ! lol on compense comme on peut quoi... Alors merci pour le compliment, on l'avait compris comme ça de toute façon !! Pour le chapitre 13, vu la date à laquelle tu as reviewvé, je dois dire qu'on est désolé mais il a été long à venir, on sait... --, Pour Heero trop actif avec les inconnus et frigide avec dudulle ben.. faut voir quand c'est qu'il va décoincer la situation.. Bon, il y a un progrès dans ce chapitre.. suivi de quelques autres pas... en arrière... lol tu verras quoi ! Merci de compatir à la douleur de Duo, je crois qu'on va monter un club... Il y en a beaucoup qui disent ça... lol Pour Wu et Sally, lis c'est dans ce chapitre !! Si Yoki meurt à la fin ? J'ai le droit de rien dire où Yuna me tombe dessus ! lol secret professionnel !! Donc, pour toutes tes autres questions euh.. même réponse, désolées ! Mais on prend compte de tes suggestions, et j'y répondrais euh.. quand la fic sera finie pour t'expliquer tout ça, oki ? Merci pour tes suggestions, tes questions, en effet, on assume !! lol Allez, bonne lecture et merci pour ta longue review

Yami-aku : Merci beaucoup pour les compliments, et pour savoir ce qui va arriver.. ; et ben à toi l'honneur ! Lis donc, les réponses sont presque toutes à la clé... Bonne lecture ! bisous

P'tite note des auteuses : Il paraît que nous deux réunies, c'est la catastrophe pour les G-boys... dixit Itchy-chan... Ben elle avait pas tort... Je dis ça parce que nous écrivons du fond d'une cave : nous sommes recherchées pas les G-boys pour réglage de compte et bientôt par vous donc, nous ne divulguerons pas notre cachette, même sous la menace et si « vous avez les moyens de nous faire parler » (accent russe, s'il vous plait !) Voilàà A part ça bonne lecture à tous... 0 Ah si ! c'est chouette, Y'a pas mal de nouveaux reviewveurs qu'on avait pas encore lus ! ça fait bien plaisir !!

Deuxième note aussi importante, c'est à dire pas trop :Ce soir, surprise, nous vous dévoilons beaucoup si ce n'est tout ce qu'il y a à savoir sur cette fic dans ce chapitre !! Et oui, enfin, toutes les révélations sont là !!! Enfin, presque... héhé Vous allez enfin comprendre le comportement contradictoire des gens !!! lol Ou l'esprit tordu des auteurs, c'est juste une question de point de vue bien sûr... lol

Chapitre 13 : Avec un jeu d'enfants.

« Encore surprise par ce qu'elle venait de lire, la jeune femme ne vit pas Wufei s'adosser contre la porte et la regarder fixement. »

-Tu as besoin d'aide ? demanda le chinois d'une voix neutre.

Sally sursauta et se retourna vers le jeune homme. Ses yeux noirs passaient de son visage aux feuilles qu'elle lisait.

-Tu... Tu t'es marié, bégaya la chinoise, encore sous la surprise.

Le jeune homme acquiesça de la tête sans dire un mot.

-Un mariage arrangé, répondit-il lentement tout en s'approchant de la chinoise.

Il lui prit le papier des mains et un léger sourire se dessina sur son visage au souvenir de ce jour. Il ne voulait pas se marier et avait piqué une crise devant ses parents pour les faire céder le jour même. Mais les dispositions étaient prises depuis trop longtemps et la parole de son père était engagée. On ne pouvait pas revenir en arrière pour les caprices d'un enfant.

Le papier qui était resté entre les mains de la jeune femme la brûlait maintenant. C'était un acte de décès. Au nom de Meiran Chang Ling.

-Elle est morte il y a un an, continua le jeune homme sans même prendre la peine de regarder ce que Sally lisait. C'est une longue histoire.

Lui, fixait le mur qui lui faisait face, d'un air calme.

Sally reposa les papiers sur la petite commode de bois.

-Raconte-moi.

Wufei fixa le mur un moment en silence avant de commencer à parler, d'une voix qu'elle n'avait jamais entendue, une voix ni assurée, ni tremblante, juste une voix fatiguée.

-Je n'étais pas né que mes parents avaient déjà signé les papiers de mes fiançailles. Quand j'ai eu treize ans, on a célébré notre mariage. Je ne connaissais pas ma future femme mais je la détestais déjà.

Wufei soupira et prit un air pensif avant de continuer d'une voix basse :

-On m'avait lié de force avec elle et c'était tout ce que je voyais. Je ne voulais pas faire sa connaissance et je l'ignorais, l'oubliant parmi toutes mes préoccupations. Je fermais les yeux devant les crises qu'elle me faisait, j'ignorais sa colère et je ne voulais pas voir qu'elle souffrait autant que moi de cette situation. Et puis un jour, elle est venue dans ma chambre. Sa mère venait de mourir. Je n'avais pas le temps de lui parler, de toute façon, je n'avais jamais le temps pour l'écouter. J'étais la seule famille qui lui restait. Et je n'étais qu'un inconnu à ses yeux, j'étais sa seule famille et je l'ignorais, souffla le chinois en continuant de fixer le mur droit devant lui.

Il reprit, d'une voix plus ferme :

-Je n'ai compris cela que plus tard. Elle a versé sur moi toute sa colère et toute sa haine, et quand elle a fini, je suis parti. Le soir, elle était toujours là, prostrée devant mon lit et elle m'attendait. Je ne savais pas quoi faire, elle restait silencieuse à mes côtés, soumise comme elle avait si bien appris. Soumise comme je détestais. J'ai continué à travailler, plongé dans mes livres pour oublier cette fine silhouette derrière moi. J'apprenais la diplomatie, l'honneur, la paix. La guerre qui avançait dehors ne m'intéressait pas. Elle, elle pensait à ma mère, à qui elle devait obéissance, et qui l'obligeait à la servir comme une servante. C'était la tradition, là aussi, elle y était préparée. Elle s'est approchée de moi pour voir ce que je faisais. Quand elle a vu que je lisais elle a poussé un cri de rage et a envoyé toutes mes affaires par terre. Je me suis levé, furieux et elle a éclaté en larmes. Je ne savais pas quoi faire.

Les larmes étaient une de ses plus grandes faiblesses. Dès qu'une personne pleurait près de lui, un sentiment de gêne l'envahissait, un mal incomparable et il ne pouvait faire autrement que de partager la peine des gens qui l'entouraient. Pour s'en garder, il se réfugiait souvent derrière ses colères noires, cachant son bouleversement.

-Je l'ai regardé pleurer et s'asseoir lentement sur mon lit, poursuivit le jeune homme. Deux enfants qui ne se comprennent pas, voilà à quoi nous ressemblions tous les deux. Je me suis assis à ses côtés et elle m'a expliqué ses problèmes. Sa tristesse, les souvenirs qu'elle avait de sa mère. Je la regardais en silence, sans faire un geste. Je n'ai rien dit. Elle s'est endormie peu après et je suis resté à ses côtés. A partir de ce jour, elle n'a plus eu à servir ma mère, ni à rendre compte du moindre de ses gestes. Je lui assurais une certaine liberté. Elle a commencé à étudier, et elle a appris l'art de la guerre. J'étais contre. Elle voulait partir faire la guerre qui se profilait dehors et dont je me souciais si peu.

La guerre était l'arme des brutes et des barbares, voilà ce qu'on lui avait toujours appris...

-Tous les soirs, on se disputait, on se criait dessus, on en criait jusqu'à ne plus avoir de voix, jusqu'à ce qu'elle pleure, en fait. Elle ne voulait pas se tenir prête et observer juste la guerre de loin, regarder les gens mourir sous ses yeux sans réagir. Moi, j'étais trop scolaire, comme elle disait, et toujours plongé dans mes études. Entre nous, le stade de l'indifférence était passé à la haine. Elle s'est surnommée Nataku et s'est battue pour protéger notre colonie. Elle en est morte. Quand je l'ai vue, allongée, inerte sur le bitume, je me suis précipité à sa rencontre. Elle ne respirait plus depuis longtemps déjà. Je lui ai pris la main et je l'ai gardé contre moi durant tout le temps de son transport sur la civière, jusqu'à son cercueil. Ses doigts entre les miens, c'était la première fois que je la touchais depuis que nous nous connaissions. Je voyais pour la première fois toute la fragilité de cette personne, de sa peau si fine. Je me suis relevé, seul, plus seul que je n'avais jamais été. J'étais son mari, et pour rester digne d'elle, j'ai adopté tous ses idéaux pour l'honneur et la justice. Ce serait comme renier ma vie si j'avais continué sans elle. J'ai continué à me battre en son nom.

-Tu l'aimais ?

-... Non. Je ne l'aimais pas. je la respectais en temps que personne. Je ne l'ai vraiment comprise qu'à sa mort. Nos vies se sont croisées sans jamais se comprendre. Elle était ma femme. Je me suis rendu compte qu'elle me manquait quand elle est morte. Elle me manquait, nos discussions, assis sur le rebord du lit, les regards noirs qu'elle me lançaient quand je lisais trop tard le soir et que je l'empêchais de dormir. Le bruit de ses pas qui m'agaçaient tant ils étaient bruyants. Le sourire timide qu'elle m'a donné, le soir où ma mère lui a annoncé qu'elle n'aurait plus besoin de ses services. L'assurance qu'elle a prise par la suite... La moindre de nos disputes me manquait. Même si tous ses moments me sont douloureux, je les ai gardé en moi, en souvenir de cette jeune fille. Meiran...

La voix du chinois se cassa et il se racla la gorge avant de reprendre d'une voix sourde.

-Je me suis rendu compte que je tenais à elle trop tard. Elle était morte et tous les mots que je voulais lui dire ont été prononcés face à une tombe. C'était... une amie chère à mon cœur.

-Wufei...

-Alors aujourd'hui, je ne veux plus voir une femme se battre, qui sait, peut être est-elle mariée ? Peut être que quelqu'un tiens à elle comme je tenais à Meiran. Peut être plus ? Les femmes sont faibles et ne doivent pas se battre. Meiran m'a fait trop de mal sans même s'en douter, je pense. La douleur que sa perte a causé, je ne la souhaite à personne.

-C'est parce que nous sommes faibles que nous nous battons, murmura la jeune femme.

-Sally, toi, je sais que je t'aime, je sais que je tiens à toi, et je te l'ai dit. Et je ne veux pas te perdre comme Meiran. Je ne supporterais pas d'emmener avec moi, dans un tiroir, deux actes de décès.

Sally ne répondit rien mais prit le jeune homme dans ses bras, le gardant contre son cœur, et ils restèrent ainsi plusieurs minutes, savourant chaque seconde qui s'offraient à eux.

Touchée que le garçon se soit confié à elle de manière si ouverte, la chinoise ne savait plus quoi dire et se contenta de le serrer plus fort contre elle pour lui montrer combien elle l'aimait.

Kari laissa Heero se reposer dans sa chambre et rejoignit Duo et Hilde dans sa chambre.

-Alors, tu as été plâtrée ? demanda la japonaise, un brin moqueuse.

-M'en parle, pas ! Tu signes ? C'est sec ! répliqua Hilde en montrant sa jambe.

Duo lui tendit un marqueur en souriant légèrement.

-Et alors, je signe quoi ? Kari, une amie qui vous veut du bien ? suggéra la brune.

Les adolescents éclatèrent de rire devant le sourire machiavélique de la jeune fille.

La japonaise s'approcha du plâtre de l'allemande et commença à écrire.

Elle signa et fit un sourire devant les têtes consternées des autres.

Elle avait écrit en japonais, et aucun des deux adolescents présents ne pouvait le lire. Les signes restaient pour eux incompréhensibles et la japonaise eut un petit rire.

-Et voilà... Je signe autre chose ? demanda t-elle d'un ton malicieux.

-A moi, maintenant, sourit Duo avant de s'emparer du feutre noir.

Il dessina une petite faux qui faisait un clin d'œil et griffonna quelques mots à côtés :

« Remets-toi vite ma petite Hildie, j'ai besoin de quelqu'un pour m'aider à mettre de l'animation dans cette baraque ! Kiss ! »

Ils passèrent une bonne heure à plaisanter ainsi, parcourant le plâtre blanc de mots, de dessins, de schémas explicatifs, et de fous rire.

-C'est malin, maintenant, je ne veux plus l'enlever ! soupira Hilde.

-C'est clair ! Celui-là, on l'encadre et tu le gardes pour tes gosses !

-Je le vois très bien sur le mur du salon, oui... fit sembler de réfléchir la jeune fille.

Elle bailla en s'étirant dans son lit et Kari fit un sourire.

-Tu es fatiguée, on va te laisser te reposer un peu.

-Ouais, il se fait tard en plus. 22 heures, va falloir pioncer ma vieille !

-Et je fais comment ? Je peux même plus bouger, moi !

-Dormir ne nécessite pas forcément de faire beaucoup de sport, remarqua Kari.

-Tu me connais pas ! Je fais de la gym même en dormant moi !répliqua Hilde. Argh ! une nuit entière immobile, je vais pas tenir !

-Promis, on pensera à toi ! sourit Duo. Allez, moi j'y vais. J'ai un peu la dalle quand même... Et Sally t'as déjà donné à manger, mais moi... Ben j'ai juste eu le droit de te regarder alors bon...

-Hum, je reconnais bien là mon frère de cœur, sourit Hilde. Allez, va manger, ingrat !

Avec un dernier sourire, l'américain se glissa par l'ouverture.

-Tu ne le rejoins pas ? s'étonna Hilde en voyant Kari s'asseoir à son chevet.

-Je n'ai pas faim, se justifia la japonaise. Toutes ses émotions m'ont coupé l'appétit.

-Je te comprends, soupira l'allemande.

Elle joua un instant avec la couverture et plongea son regard dans celui de la jeune fille.

-J'avais peur de rester seule cette nuit... c'est un peu idiot mais... je suppose que tu l'as senti ?

-Oui.

-Je le savais. Ton empathie... c'est pas jouable quoi, fit la jeune fille en soupirant plus fort, pour reprendre contenance.

-Tu t'en est sortie, affirma la japonaise.

-Je sais.

-Tu t'en veux ? s'étonna Kari en déchiffrant le sentiment qui minait tant son amie.

-Heero... Je sais qu'il m'a sauvée... D'une manière pas très normale, et je sais que ça a remis en cause pas mal de choses... Alors, le fait qu'il l'ait fait pour moi... C'est de ma faute. Duo était si triste quand il est arrivé ici... Il me l'a caché tout cet après-midi mais je voyais qu'il crevait d'envie d'aller le voir... Même si on a passé de bons moments, je savais qu'il voulait le voir, lui parler. Il a tant de questions à lui poser... En même temps, je sais qu'Heero a risqué sa vie pour moi... Je m'en veux de ne pas avoir fait plus attention.

-Ce n'est pas de ta faute. Heero et Duo... Ils ont beaucoup de choses à se dire mais tu n'y es pour rien. Il fallait qu'ils parlent de toute manière. Pour sa vie... Je crois que l'essentiel est que vous soyez tous les deux, ici maintenant.

-Et pour toi ? Comment ça va se passer ? chuchota Hilde au bout d'un moment.

-Pour moi ? Pour moi... Je ne sais pas encore, avoua la jeune fille.

-Tu penses beaucoup aux autres Kari, je sais pas si c'est à cause de ton empathie, mais tu penses trop à nous. Pense à toi quelquefois. Vis à vis de Yoki, pense à toi. Je sais que tu l'aimes à en mourir, je sais qu'il est très important pour toi, mais je t'en prie. Ne le laisse pas te détruire.

Kari fit un sourire et hocha la tête.

-D'accord, souffla t-elle d'une voix inaudible.

Elle prit la main de la jeune fille et la serra fort, laissant des larmes glisser le long de ses joues.

-Kari, fais venir Heero dans cette chambre, je veux le remercier pour tout...

-Promis.

Heero venait de se réveiller. Il tenta de se lever, et aussitôt, une migraine l'assaillit, lui faisant fermer les yeux. Il prit une grande inspiration et se leva brusquement, luttant contre l'étourdissement qui menaçait de le faire tomber. Il tendit les bras, reprenant son équilibre et fit un pas en avant. Un deuxième pas plus tard et sa tête tournait moins.

Il voulut avancer vers la porte et sortir lorsque sa vue se brouilla soudainement et Heero tomba en avant avec un bruit sourd, sans même tendre les mains en avant pour se rattraper, ses réflexes ayant diminués face à sa fatigue.

Le jeune homme se releva péniblement, et constata qu'il ne pouvait pas sortir habillé comme il l'était, c'est à dire en caleçon.

Le japonais s'habilla rapidement et descendit les escaliers silencieusement.

Alors qu'il cherchait à sortir dehors pour marcher un peu et faire le point, il fallait qu'il réfléchisse à pas mal de choses, il croisa Trowa.

-Tu ne devrais pas être debout, lui reprocha le français.

-Dis plutôt que je ne devrais pas être en vie.

Le français fronça les sourcils devant l'affirmation, mais il continua :

-J'ai lu les rapports.

Heero tressaillit.

-Je suppose que c'est lui qui te fait garder le silence, mais... Tu devrais lui dire, poursuivit Trowa en observant le moindre changement dans l'humeur du japonais.

Celui-ci secoua la tête en signe de négation.

-Pas sans son accord.

-C'est toi qui souffre en attendant.

-Lui aussi, murmura Heero en baissant la tête.

Trowa sembla réfléchir un moment, ne bougeant plus.

-Je comprends, finit-il par dire au bout de quelques instants. Ca n'a pas du être facile pour lui.

Heero eut un sourire triste et continua d'avancer. Mais alors qu'il allait tourner au coin du couloir, il se retourna et regardant fixement le français, il eut une légère mimique et lui lança :

-Tu ne me l'as pas dit !

Trowa se retourna, surpris, puis fit un vrai sourire.

-Je suis avec Quatre, répondit-il d'un ton amusé.

-Je veux tous les détails ! protesta Heero.

-Je suis heureux, rit Trowa.

-Alors, ça me va, déclara le jeune homme d'un ton grave.

Un dernier sourire et il avait tourné le coin du couloir.

Ce sourire se perdit lorsqu'il vit Duo, le nez dans le frigo, à la recherche de quelque chose à grignoter. Il devait avoir une explication avec l'américain. Et visiblement, maintenant, songea Heero en voyant Duo se retourner et le regarder, trop tard pour faire demi-tour.

Duo le fixait, sans savoir vraiment quoi faire. Heero était en face de lui, Heero était réveillé, il allait bien. Posant son casse-croûte sur la table, il le regarda s'avancer vers lui, et s'arrêter à une distance respectable.

Aucun des deux adolescents n'osait dire un mot. Heero releva lentement la tête vers les yeux du jeune homme qui, n'y tenant plus, alla s'asseoir sur une chaise, dans la cuisine.

Le japonais le suivit du regard et s'insulta mentalement pour s'obliger à aller voir le garçon.

Il s'assit en face de lui, et réprima une grimace quand il vit que Duo se reculait de la table, comme pour l'éviter.

-Tu as l'air d'aller mieux, déclara soudain Duo, coupant le silence oppressant qui s'était installé.

-Ca peut aller, finit par répondre Heero après une courte hésitation.

-Tant mieux, tu sais, j'ai plutôt faim, en fait, je me suis éclipsée de chez Hilde pour grignoter un bout... Tu me connais, je suis un ventre sur patte, dixit Wu-man !

Heero ne répondit rien mais fronça les sourcils.

-Alors comment ça s'est passé à la base ? Avant d'avoir fait mumuse avec l'armure mobile de Oz, évidemment... Je veux dire, le séjour chez Oz était agréable ? Pas trop d'ozzis dans les pattes ?

Heero ne répondait toujours rien.

-Et t'étais bien installé ? Ils t'ont tous pris pour Yoki ? Pas de problèmes avec Treize ?

-Duo.

-Enfin, tu as récupéré toutes les informations que tu voulais, non ? Donc, ça s'est plutôt bien passé, enchaîna le jeune homme avec un sourire forcé.

-Qu'est ce que tu veux savoir ? demanda finalement Heero, coupant l'américain dans une de ses questions.

-Hein ?

-Arrête de jouer à ça avec moi, répondit le jeune homme d'une voix basse. Tu cherches une réponse, je le vois comme dans un miroir, murmura encore le japonais.

Duo baissa la tête, triturant nerveusement sa natte.

-Je t'ai vu avec Treize, avec les soldats d'Oz.

-C'était moi, déclara calmement l'asiatique.

-J'espérais un peu que tu dirais le contraire, souffla l'américain. Tu... me disais que tu avais besoin de temps... Je pensais que tu étais timide, pas sûr de toi pour ces choses là... J'ai découvert un garçon plein d'assurance...

Heero allait dire quelque chose mais Duo l'arrêta.

-Je ne sais pas si j'ai envie de savoir ce que tu vas me dire... Est-ce qu'ils embrassent mieux que moi ? demanda le jeune home brusquement. Tu étais dans leurs bras et je regardais... J'ai eu si mal, Heero... Même si Kari m'a montré que tu ne faisais que soutirer des informations... C'était nécessaire ? Tout ce mal, c'était nécessaire, tu crois ? souffla le jeune homme avant de baisser la tête, cachant son visage derrière les mèches de sa frange.

-Yoki l'aurait fait. Je... l'imitais... Duo, regarde-moi.

Duo releva lentement la tête devant l'ordre, plongeant ses yeux aux bord des larmes dans ceux du japonais.

-Tu veux savoir si j'ai pris du plaisir dans ces baisers, ces attouchements, quand je savais que tu me voyais ? Tu veux savoir si j'étais heureux de savoir que tu étais triste ? Chaque fois qu'il m'approchait, je voyais ton regard blessé, à chaque seconde, tes yeux m'accusaient, tristes et déçus. Je pouvais presque toucher ta douleur.

-Je...

-Je ne t'ai pas menti sur mes sentiments, Duo. Je ne le ferais jamais.

-J'ai eu mal...

-Je sais... Je suis désolé. C'est tout ce que je peux te dire. Je suis vraiment désolé, Duo, mais je n'avais pas le choix.

-Tu savais exactement quoi faire... Tu l'as embrassé d'une manière si naturelle, même lorsque tu dansais, cela semblait vrai ! Heero, personne n'est capable de jouer la comédie à ce point là ! Tu m'as menti en me disant que tu voulais prendre ton temps avec moi ! Tu n'en as pas besoin ! Même lorsque tu dansais... Tu m'avais dit que tu ne savais pas danser !

-C'est vrai. Je ne sais pas danser, souffla Heero. Et je veux prendre mon temps avec toi... Je n'avais jamais dansé avant ce jour. J'étais sorti une fois en boîte, quand tu nous y avait traîné. Et tu t'es mis à danser. Je n'ai rien inventé. Il paraît que j'imite les choses très bien. J'ai une excellente capacité à assimiler les gestes, les attitudes des personnes. C'est assez utile en infiltration. Mais je ne sais qu'imiter. Quand je dansais, je t'imitais. C'est tout bête, c'est idiot à dire comme ça, mais je n'avais que toi comme modèle. J'ai reproduit tous les gestes que tu as fait ce soir là. Je ne suis bon qu'à ça.

-Heero...

-Alors si tu trouvais que j'avais l'air amoureux, si j'avais l'air attiré, c'était faux. Je savais que je te faisais mal au moindre de mes gestes et que tu prendrais ça comme une trahison. Ca n'en est pas une, Duo. Je connais beaucoup de choses, j'ai déjà embrassé un garçon, touché ou caressé son corps, mais je n'ai jamais apprécié le faire. C'était soit une infiltration, soit une parfaite imitation d'une quelconque scène que j'aurais vue.

-Tu jouais la comédie avec moi...

-Jamais ! Je n'ai jamais joué avec toi, je ne t'ai jamais menti. Je peux juste espérer que tu me crois. Que tu aies encore confiance en moi. Je ne te demande pas de me comprendre, je ne te demande pas de dire oui à tout ce que je fais... Juste que tu restes à mes côtés, Duo. J'ai juste besoin de tes bras...

-Qui me dit que tu ne me feras plus mal ? demanda d'une voix hésitante le jeune homme.

-Personne... Je peux juste essayer. Je ne veux pas te faire de mal, Duo. Je ne le pourrai pas.

L'américain se releva lentement, et se plaça derrière la chaise du garçon qui lui faisait face.

Doucement, il entoura le cou du japonais de ses bras et posa sa tête au creux de son épaule. Il prit une profonde inspiration, et ferma les yeux un moment. Lorsqu'il releva la tête, l'américain posa un baiser derrière l'oreille du garçon et lui murmura doucement :

-Je t'aime, Heero. Quoi que tu fasses, je ne peux pas m'en empêcher. Je t'aime, je t'aime, n'en doute jamais. Même si je suis en colère contre toi, je t'aime.

Heero laissa sa tête reposer contre la joue de l'américain, et entrelaça ses doigts avec ceux du jeune homme. Il les serra fort, et Duo sentit une étrange chaleur l'envahir, avant de lentement desserrer son étreinte, et de laisser pendre son bras, comme fatigué.

-Je t'aime, Heero, mais laisse-moi un peu de temps... Le temps de te connaître vraiment... Je t'aime, souffla encore le jeune homme avant de repartir, se fondant dans la pénombre de la pièce.

Ce que Duo ne vit pas fut la larme qui coula lentement sur le visage du japonais, laissant un léger sillon humide sur sa joue.

-Ce sentiment... murmura t-il. J'ai failli l'oublier...

Au bout d'un moment, le japonais se releva et décida se sortir prendre l'air, il avait besoin de s'aérer, de réfléchir.

Trowa toqua à la porte de Quatre. Après y avoir été invité, il se glissa à l'intérieur de la chambre, en silence.

-Trowa... sourit le jeune arabe.

Le français ne lui répondit pas mais sourit. Quatre était assis en tailleur sur le sol, et semblait se concentrer. Il avait relevé la tête dès qu'il avait sentit sa présence.

-Tu faisais le vide ?

-Oui, je capte trop d'émotions... Entre Duo, Hilde ou Wufei...

-Heero ?

-Non. Il ne me laisse pas accès à ces sentiments. Je rencontre une barrière à chaque fois... Je suppose que ce n'est pas contre moi particulièrement...

-Ce soir, la maison est agitée, constata le français.

-Oui. C'est vrai. Et puis... J'ai le sentiment que quelque chose approche... Je ne saurais rien décrire mais ça me bloque... J'ai un mauvais pressentiment, Trowa. Il va se passer des choses. Je ne sais pas quoi, mais il va se passer des choses.

-Je ne sais pas si ce que tu dis va arriver... Mais je veux que tu saches que quoiqu'il arrive, je serai là. Toujours.

Le blond fit un sourire et, se relevant se réfugia dans les bras du jeune homme.

-Dans tes bras, j'ai le sentiment que rien ne peut nous arriver, murmura t-il en fermant les yeux.

Ils restèrent enlacés de longues minutes, se berçant du silence, profitant de ces instants de paix. La journée avait été éprouvante pour eux aussi.

Heero marchait maintenant seul, dehors depuis quelques minutes. Il savait qu'il y avait quelque chose qui lui échappait, mais il ne parvenait pas à s'en souvenir. Il y avait une chose qui l'empêchait d'être rassuré, une chose qui était terrible... Mais il ne se souvenait plus quoi. Il sentait au fond de lui la peine, mais d'où provenait-elle ?

Ce n'était pas celle du mensonge qu'il tenait toujours face à Kari, ni la peine de voir Duo triste par sa faute... Il y avait un autre problème...

Soudain, le japonais se stoppa dans sa marche. Les yeux agrandis par l'horreur, il venait de se rappeler ce que sa mémoire avait voulu occulter après sa perte de conscience.

Le hangar avait explosé. Et avec, les scientifiques qui avaient menés le projet... Et Réléna.

Heero jura quand il se souvint qui était la personne qui avait fait sauter le hangar et le jeune homme se mit à courir vers la planque. Il s'arrêta un moment devant la porte pour se calmer et réguler son cœur.

Lorsqu'il pénétra dans le couloir, il semblait tout à fait normal.

Trowa le vit prendre les clés de la voiture et devant son regard interrogateur, Heero lui répondit qu'il retournait sur le lieu de la bataille. Le français fronça les sourcils mais ne fit aucun commentaire et le laissa repartir le trousseau de clés à la main.

Heero se dépêcha de sortir et courut au hangar y chercher la voiture. Il démarra en trombe, accélérant de plus en plus, pour approcher du hangar sinistré.

Dans sa tête, la voix de la raison lui criait de faire demi-tour, qu'il ne trouverait que des cendres, de la poussière et que ça ne servait à rien de venir constater sur les lieux ce qu'il savait déjà. N'avait-il pas déjà vu l'explosion ? Est ce qu'une personne normalement constituée pourrait y survivre ?

Mais la deuxième voix, la plus forte, celle qui avait en ce moment même le plus d'impact était cette petite voix pernicieuse qui lui rappelait avec cruauté qu'il croyait bien à un moment que Yoki et Kari était mort... Et qu'est ce que ça lui avait apporté de ne pas aller vérifier par lui même ? Une erreur monumentale, une erreur qui avait fait de sa vie un cauchemar.

Heero roulait maintenant de toute la puissance de la voiture, gardant un œil vif sur la route désertée. Il fallait absolument que les scientifiques soient vivants.

Son seul espoir d'en savoir plus... d'apprendre, de questionner, de trouver des réponses autres que celles qu'il avait pu lire étant enfant, il avait besoin d'entendre que tout cela avait une raison, qu'il y avait une raison importante, une raison qui justifiait tout ça. Elle devait bien exister cette raison, ne ?

Alors il espérait que les savants étaient encore en vie, tout comme il ne se pardonnerait pas si Réléna était morte...

D'accord, la jeune fille était exubérante, et semblait un peu trop attachée à lui... Mais maintenant, il ne pouvait pas s'imaginer la vie sans elle... Toutes ses bizarreries étaient entrés en lui et il sentait qu'elles lui manqueraient si elle venait à mourir.

Elle était devenue l'espoir des colonies, des centaines de personnes croyaient en elle et suivaient ses idéaux de paix. C'est vrai qu'elle avait des goûts spéciaux... Qu'elle avait tendance à crier très fort, et à le coller... mais c'était Réléna.

Elle n'est pas parfaite, et alors qui l'était ?

C'était même quelque chose qui le rassurait lui. Une personne qui n'est pas parfaite. La jeune fille avait ses défauts, ses qualités et ne cherchait pas à lui mentir. Elle l'avait vu, avait voulu faire sa connaissance. Quand il l'avait prise à part un jour, pour lui expliquer qu'elle ne l'intéressait pas, qu'elle pouvait arrêter de le suivre, elle lui avait posé la question qui l'avait perturbé pendant longtemps :

« Alors, pourquoi tu ne peux pas me tuer ? »

Et il n'avait pas su répondre. C'était certain, il ne parvenait pas à l'éliminer alors que ça aurait été bien plus simple pour lui... Elle était au courant de trop de choses le concernant. Et lui, à voir son visage, il n'arrivait pas à la tuer. Pourquoi ? Sans doute son inconscient qui l'arrêtait. C'est vrai que sa ressemblance avec Kari était frappante. Un sosie presque parfait en somme.

Alors maintenant, qu'il savait pourquoi il n'arrivait pas à la tuer, c'était trop tard. Il avait fait sa connaissance, il était entré dans son monde. Et c'est vrai qu'elle était complètement déjantée, mais c'était elle. Elle était comme ça et c'était mieux. Pourquoi est ce qu'il aurait fallu qu'elle change ?

Pour paraître plus intelligente vis à vis des autres ?

Elle ne s'embarrassait pas du regard des gens et s'en moquait ouvertement. Elle avait envie de faire quelque chose, elle le faisait... même si ce quelque chose consistait à lui courir après... A rouler dans une limousine rose parce que c'était ainsi qu'elle concevait la vie... En rose.

Et même s'il avait insisté, s'il avait expliqué que non, il ne l'aimerait pas de cette manière, qu'il ne pouvait pas s'attacher à elle, même pas elle en tant qu'amis, elle l'avait suivi, elle était quand même là.

Elle savait être sérieuse parce qu'elle comprenait ce qu'on attendait d'elle... mais elle ne voulait pas renoncer à sa personnalité, un peu loufoque, un peu fanatique.

Le temps se chargerait seul de détruire ses illusions ou de calmer son caractère si entier alors pourquoi avancer l'échéance en lui jetant à la figure ses quatre vérités qu'elle connaissait mieux que quiconque ?

Alors même si elle ne pensait pas comme les autres, si elle était différente, est ce que c'était une raison pour la juger ?

Elle était exceptionnelle, point. Alors, il n'avait pas voulu la tuer dans la base, pas plus qu'il ne la tuerait plus tard et s'en voudrait si Yoki l'avait fait...

Enfin, Heero s'arrêta près de ce qui restait de la base. Des décombres encore fumantes, des corps carbonisés, des armures tranchées en deux jonchaient le sol. Heero regardait ce champ de bataille sans le voir. Il savait que dans quelques heures, les troupes de Oz viendraient constater les dégâts et relever les plaques des soldats morts.

Le jeune homme accéléra et quelques minutes plus tard, il était devant le hangar... Enfin, ce qui en restait. Le jeune homme descendit lentement de la voiture et se dirigea d'un pas prudent vers les décombres. Il fallait vérifier, être sûr qu'ils étaient tous morts...

Et s'ils avaient réussi à s'échapper ? S'ils étaient en vie et pouvaient répondre aux questions qu'il voulait leur poser ? Il fallait que les scientifiques soient en vie. Il avait besoin d'une réponse à une question toute bête, une question qui le hantait : « Pourquoi ? »

Pourquoi ?

Heero arriva au pied du tas de cendre et ne put que constater les corps à moitiés calcinés, les bras éclatés et les restes du hangar qui restaient là, en témoin de ce qui s'était passé.

Ils étaient mort... Ils étaient tous morts... Ceux qui étaient les responsables, ceux qui devaient payer, ceux par qui il attendait tellement, étaient maintenant réduits en poussières...

Un regard circulaire apprit au japonais que rien n'avait été épargné, pas un seul recoin n'avait échappé à l'explosion.

Pourtant, un doute le prit.

Il se dirigea vers ce qui avait été l'entrée du hangar et releva plusieurs traces de pas... Yoki... Quelque part en lui, un sentiment de soulagement le prit, Yoki, oui, il n'avait pas pu tuer Réléna, n'est ce pas ?

Non, si lui-même alors qu'il ne connaissait pas la jeune fille n'avait pas pu, alors même qu'il ne se souvenait plus de l'existence de Kari... Alors, Yoki avait du la sortir de là avant que tout n'explose...

-Elle est vivante, murmura le jeune homme en reconnaissant les traces de pas qui accompagnaient le japonais à la sortie.

-Tout juste frérot, répondit une voix qu'il ne connaissait que trop bien derrière lui.

Il n'eut pas le temps d'éviter le bout de bois qui s'abattit sur sa nuque avec force et sombra dans l'inconscience.

-Dis, tu n'as pas vu Heero ? demanda Kari à Trowa, en passant sa tête par l'entrebâillement de la porte.

-Il est retourné sur le lieu de bataille... Il devrait pas tarder.

-Il voulait faire quoi là-bas ? Oz va bientôt passer pour évaluer les dégâts, c'est trop dangereux ! fit la jeune fille en fronçant les sourcils.

-Il avait l'air pressé, je crois que c'était important pour lui d'y aller. Une impulsion. Je n'ai pas eu le temps de lui en demander plus, avoua le français.

-Bon, si tu le vois, dis-lui que je veux lui parler, c'est important, d'accord ?

-Hm.

Kari repartit en sens inverse, le front barré par un pli soucieux. C'était contraire aux enseignements de J ça. repartir sur le lieu de bataille... Soit Heero avait à faire quelque chose de bien précis là-bas, important pour la mission, soit c'était sur une impulsion... Et qu'est ce qui avait bien pu passer par la tête du japonais pour y retourner d'un coup ?

Lorsqu'il se réveilla, Heero était attaché à une chaise, les pieds et poings liés et un bandeau couvrait ses yeux.

Il inspira une bouffée d'air et fronça les sourcils. Yoki était à côté, il le sentait. Yoki était tout près de lui.

-Tu es réveillé, Heero ? demanda le japonais d'une fausse voix concernée.

-Qu'est ce que tu veux ? demanda à son tour le jeune homme, d'une voix prudente.

Yoki fit un sourire et enleva le bandeau des yeux de son frère.

-Juste inverser les rôles... Quel effet ça fait d'être attaché ?

-... On est attaché, répliqua le japonais en articulant chaque syllabe.

Yoki fit un sourire et s'assit face à son jumeau. Il croisa les bras et plongea son regard dans les yeux bleus du garçon qui lui faisait face.

-Est ce que tu lui a dit ? demanda t-il finalement, en abandonnant tout air ironique sur son visage.

-J'aurais du ? murmura en réponse son interlocuteur.

Yoki se releva brusquement et sembla réfléchir un moment. Tourmenté, voilà ce que sentait Heero dans son esprit. Yoki avait les idées confuses, se posait trop de questions, Yoki s'embrouillait dans ses pensées.

-Tu ne lis pas dans mes pensées, hein, Heero ? demanda Yoki en fronçant les sourcils.

Devant le regard du jeune homme il eut un petit rire.

-Tu détestes ça, je sais.

Il continua de marcher en long et en travers, semblant réfléchir intensément.

-Heero, quel est ton plus vieux souvenir ? demanda soudain Yoki.

Heero ne répondit pas, il savait déjà ce qui allait se passer.

Yoki eut un rire hystérique.

-Moi non plus, s'écria t-il d'une voix forte.

Son poing s'enfonça avec force dans la tête du prisonnier une fois, puis ce dernier reçut un coup de pied dans le ventre suivi d'une série de coups de poings partout sur son corps. Les coups pleuvaient sur lui, l'assommant à moitié, redoublant de violence, de bestialité.

Yoki libérait toute sa force sur son frère, se défoulant, passant ses nerfs sur Heero qui était, en fin de compte une des personnes responsables de son malheur.

Les yeux crevant de rage, Yoki frappait ce visage qui lui ressemblait tant, ce corps identique à lui, son frère et à la fois son meilleur ami, celui avec qui il avait partagé tant de choses...

Tant de rires... De complicité entre eux...

Les gestes qu'ils faisaient derrière le dos de J quand il parlait, les grimaces...

« Yoki se pencha un peu sur son siège pour capter le regard d'Heero. On s'ennuyait ferme en cours d'espagnol... Heero mima la mort par strangulation quand Kari fut interrogée sur quelque chose qu'elle ne connaissait pas et ils sourirent.

Le japonais fouilla un moment dans sa trousse avant d'en ressortir une paire de ciseaux. Yoki le regarda, hochant la tête en signe d'approbation. Heero bascula un moment en arrière avec sa chaise avant de tendre le bras et d'enfoncer le ciseau dans la prise électrique derrière lui.

Aussitôt, un grand clac retentit et la salle de cours de J fut plongée dans le noir le plus total.

Le fer avait provoqué un court circuit et le courant avait littéralement fait fondre le plastique du ciseau... Qui passa de trousses en trousses avant de s'arrêter dans celle de Kari. Une odeur de carbone flottait maintenant dans les airs... (1)

Ils avaient pris tous les deux une heure en salle de torture mais qu'est ce qu'ils avaient ri ce jour là... »

-Arrête, Yoki, arrête, parvint difficilement à prononcer Heero avant de se prendre une gifle magistrale qui envoya valser sa tête du côté opposé où elle était.

Le souffle court, les lèvres coupées, en sang, l'arcade sourcilière éclatés, l'aveuglant, le nez saignant abondamment, déversant son flot de sang sur les lèvres déjà rouges du jeune homme, Heero ne manifestait pourtant aucune haine, juste la douleur qu'il sentait en Yoki, la douleur qu'il recevait par coup, comme une pluie qui se déversait sur lui, des gouttes et des gouttes d'eau qui tombaient de toutes leurs forces sur son corps.

-Tu veux que j'arrête ? Tu peux en endurer plus que ça, je te connais, Heero. Avec J on a eu plus, non ?

-Arrête, Yoki, souffla encore une fois Heero.

-Ne jamais demander à l'ennemi grâce. Tais toi et subi. Meurs en mais ne perd pas ton honneur ni tes informations, se mit à réciter le japonais.

-L'ennemi ne doit pas savoir qui tu es ni deviner tes faiblesses, ne lui montre pas tes failles et reste indifférent, c'est la seule défense que tu pourras adopter face à lui dans une situation comme celle-ci, je sais, répliqua Heero.

-Tu vois que tu n'as pas oublié... Alors pourquoi tu ne le fais pas avec moi ? Je ne suis pas digne d'être ton ennemi ?

-Yoki...

-Tu m'énerves ! Tu es tout ce que je suis et ça m'énerve Heero ! cria le japonais avant de le frapper magistralement.

Il se dirigea vers une petite table derrière lui et prit une fine lame, bien aiguisée.

-Tu vois Heero, je veux trouver ta limite... Jusqu'où tu peux endurer sans crier ? Je veux te faire souffrir comme j'ai souffert Heero. Pour que tu me ressembles jusqu'au bout.

Le jeune homme s'approcha du brun et le regarda un moment avant de se saisir de son bras gauche. Lentement, il fit glisser la lame le long de sa peau, sans appuyer, juste pour que le froid fasse apparaître petit à petit la chair de poule, que les poils se hérissent.

Il souffla doucement sur le revers du bras, réveillant le froid et enfonça d'un coup la lame, la faisant glisser sous la peau. Pas assez profond pour provoquer un saignement, juste une rougeur, un picotement, puis le jeune homme remonta la lame, soulevant la peau et la tirant avec lui, tirant sur le bras, la peau qui se déchirait et suivait en lambeaux la lame.

« Yoki rentra dans sa chambre, torse nu, les marques de coups sanglantes visibles.

Exténué, il allait s'allonger sur son lit lorsque Heero entra dans la chambre, des écorchures barrant son torse nu.

Les deux adolescents se regardèrent un moment, jaugeant les dégâts.

Ils éclatèrent de rire en voyant leur état si similaire et s'allongèrent côte à côte sur le lit, un sourire identique flottant sur leurs lèvres.

Ils ne regrettaient rien.

Voir J se bouffer par terre valait tous les coups du monde. »

Sous la lame, Yoki pouvait sentir pulser les veines, il sentait les muscles se tendre sous la douleur, le sang affluer et remonter colorer les pigments de la peau.

Le bras en sang, Heero ferma les yeux, occultant la douleur, ne voulant pas croire en cette réalité. Ne pas voir cette peau arrachée laissant son bras nu, frémissant et réceptif à la moindre poussière, au moindre frôlement. Le mal.

-Est ce que tu as mal, Heero ? Moi, je crois que tu ne souffres pas autant que moi... murmura Yoki.

Ne pas croire que Yoki était là, face à lui et qu'ils ne riaient pas. Ne pas croire que Yoki le torturait lentement, ne pas voir ses yeux qui brûlaient, ses yeux pleins de rage, de larmes et de rancœur vis à vis du passé. Ne pas sentir les piques sur sa peau, ne pas voir le sang, et ne pas laisser la douce chaleur l'envahir. Ne pas crier sous la douleur, s'imaginer que c'est un ozzi, pas son frère, pas lui... Pas celui avec lequel il partageait les tortures, pour le meilleur et surtout pour le pire...

Ne pas être trahi par la personne en qui il a placé toute sa confiance, il y a si longtemps...

-Ton point faible c'est le haut de ta clavicule... Je le connais, je connais tous tes défauts parce que j'ai les mêmes... La clavicule... Ici, fit Yoki en pointant son doigt sur l'endroit sensible.

-Là où ta peau s'affine, où l'os voudrait dépasser, où on pourrait presque croire qu'il va percer la peau... Ta peau si fine, Heero... Avec ce sang dessous... Qu'y a t-il dans tes cellules, dans ton corps, en toi, que je n'ai pas ? Tu as un cœur qui bat, des poumons, t'es fait exactement comme moi alors bordel pourquoi moi, on me traite comme ça ? éructa le jeune homme en enfonçant lentement la lame dans le fond de la chair, près de la clavicule.

-C'est quoi, la différence ? Je l'ai cherchée, je ne l'ai pas trouvée...

-Il n'y a pas de différence, Yoki, répondit doucement Heero, reprenant son souffle.

-Oui, et c'est notre secret, sourit Yoki avant de glisser un doigt dans la peau ouverte, sous la clavicule.

Heero ne put retenir un cri de douleur quand il sentit Yoki jouer avec une veine, remonter, arrachant quelques vaisseaux au passage et bloquer un moment la veine cave. Retirer son doigt et puis appuyer encore.

-C'est encore plus amusant que la dissection d'une souris morte, remarqua Yoki d'un ton indifférent.

Il appuya encore une fois, jouant sur le sang qui affluait, bloquait et s'accumulait puis pouvait s'écouler librement lorsqu'il relâchait. Il étouffait peu à peu, sa tête flottait loin et la sensation oppressante, qui revenait...

Heero cracha une gorgée de sang à terre et ferma les yeux. Comment en étaient –ils arrivés là ? Pourquoi ? Pour un jeu d'enfant... Tout avait commencé avec ce pari... Le mal envahit son esprit un instant avant de s'estomper, alors que Yoki continuait les tortures avec une petite cuillère... « parce que moins c'est tranchant, plus cela fait mal » avait-il dit.

Un jeu d'enfant...

« -Heero, t'es pas cap de courir jusqu'à là-bas et de revenir, tout ça, sans que J ne te punisse pour avoir enfreint le règlement !

-Si, je suis cap !

Et Heero se mit à courir, aussi vite que ses jambes de onze ans pouvaient le faire, aussi vite qu'il le pouvait pour ne pas que J le repère sur ses caméras.

Il arriva au bout du couloir, s'appuya fortement sur une dalle et fit demi-tour, se servant de l'élan pour accélérer.

Il courait dans le couloir quand Yoki avait cassé la caméra du couloir d'un geste machinal et était resté là, le regardant, la bouche ouverte.

-Ben qu'est ce que...

L'enfant fut interrompu par un bruit sourd derrière lui. La direction que regardait Yoki. Le mur s'était ouvert, laissant place à un passage dissimulé.

Les deux garçons, se regardèrent, les yeux brillants et prirent le parti d'emprunter le couloir caché.

Chacun sortit son arme pour assurer sa défense et ils descendirent lentement, prenant garde à ne pas faire de bruit. Mais visiblement, les couloirs étaient vides et J n'était pas là. A bien y réfléchir, Kari non plus, alors J devait sûrement l'évaluer... pour ça que J leur avait confié cette mission à deux, mission qu'ils avaient expédiée plus vite que prévu. »

Heero se courba sous la douleur que lui infligeait Yoki et se concentra à nouveau sur ses pensées qui l'empêchait de voir cette réalité. De voir son sang qui coulait et sa vie qui s'échappait petit à petit.

Avec une résignation qu'aucun des pilotes de gundam n'aurait reconnu, il semblait subir, et attendre la mort, ne cherchant pas à se défendre, rêvant ailleurs, prêt à mourir.

« Ils avançaient dans le couloir, le souffle régulier, sans peur, sans appréhension.

Quand ils virent la porte ouverte, ils entrèrent et tout ce qu'ils virent leur coupa le souffle. Une vaste pièce d'ordinateurs, des rangées de disquettes envahissaient les lieux.

Heero s'approcha de l'un deux et prit la souris. L'écran de veille disparut peu à peu, laissant place à l'interface. Le japonais s'assit devant l'écran et commença à pirater cet unité centrale pour découvrir ce qui se cachait derrière.

D'abord, savoir ce que contenait les disquettes.

Le mal. Le froid. Le mal, la lame qui pénètre la peau. Le mal, la mort, que la mort arrive, vite... Le mal, la mort le mal, la mort, le mal, la mort.

« Ils avaient visualisés une disquette et s'étaient reconnus dessus. Eux. Leur entraînement. Eux quand ils se couchaient le soir. Leur entraînement. Kari seule dans une salle d'examen. Heero qui trafiquait les fils électriques. Yoki qui balançait son poing dans la mâchoire d'un adversaire.

Tout était filmé, ils le savaient mais... Comme des rats de laboratoire. Des sujets observés 24 heures sur 24.

Ca avait été le premier choc... Le lire, le voir... Se voir... Leur conversations, leurs rires, leur gémissements, leurs soins... »

Yoki venait de le détacher et le traînait par terre, donnant quelques coups de pieds dans son dos, tirant ses cheveux, laissant couler le sang, le laisser rencontrer se sol gris et froid...

Heero ne réagissait plus. Il ne chercha pas à ramper vers la sortie, ni même à résister, il se laissait faire, son esprit embrumé dans le passé. Il revoyait la scène qui les avaient amenés à cette situation.

« Le jeune garçon continuait de pirater l'ordinateur et s'exclama, un sourire aux lèvres dessiné :

-Yoki, on vient de tomber sur la BD de J...

-Sa base de données ? Génial ! Essaie de savoir d'où on vient Heero. Quand je sortirais d'ici, je veux retrouver ma famille... »

Ma famille... Aujourd'hui, sa seule famille, c'était eux. Kari et Yoki. Et Yoki le tuait à petits feux, retournant le couteau dans la plaie.

Non, la douleur était trop forte, la douleur était trop présente, si forte, elle envahissait tous ses esprits, remontait, était partout il allait être submergé...

-Ahhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhh !!!! s'écria le japonais lorsque la douleur fut insupportable.

Yoki le gifla encore une fois, le fit rouler au sol d'un autre coup de pied. Une araignée qui passait par là se mit en devoir de remonter le long du bras du japonais, là où le sang gouttait lentement, là où la peau avait été arrachée.

Heero retraçait son parcours, ses pattes qui collaient presque au sang, et sa piqûre...

Le japonais hurla une nouvelle fois quand Yoki écrasa l'araignée sur son bras.

Pour tenter d'oublier la douleur, pour oublier ces souffrances, ce calvaire le jeune homme se concentra encore sur ses pensées, laissant son corps à l'abandon, ne cherchant pas à éviter les coups où à les amortir. Mais la douleur restait présente, plus que tout autre chose, elle envahissait son être, le laissant mort...

Ce serait si simple de se laisser aller, de ne pas sentir ce coup de poing, encore, de partir, loin, très loin, là où personne ne revenait...

Pour la deuxième fois dans la même journée, Heero sentait la mort approcher et allait à son encontre... mais cette fois-ci, Kari ne l'empêcherait pas d'y aller... Rien, plus rien ne le retenait ici...

Ni Yoki qui le tuait, ni Kari, ni...

Le jeune homme eut un sursaut.

Duo. Duo, il devait survivre, pour Duo, pour revoir son visage, son sourire, ses lèvres, pour lui expliquer, tout, lui expliquer toute la vérité, tout ce qu'il cachait depuis si longtemps, pour se faire pardonner, pour l'aimer...

Heero revint ainsi petit à petit à la réalité cruelle, aux coups de Yoki, à la souffrance qu'il endurait depuis une éternité, lui semblait-il et serra les dents quand il reçut un autre coup.

Yoki pleurait. Les larmes lui brouillaient la vue mais il continuait à anéantir la seule personne en qui il avait placé toute sa confiance, il réduisait le tout à néant, frappant, se vengeant d'une chose dont Heero n'était pas directement responsable, se défoulant tout simplement, sachant qu'il se passait les nerfs, qu'il n'y était pour rien, et qu'il allait avoir mal en repensant à cet épisode de sa vie mais il frappait encore et encore, tenant d'enlever cette souffrance, fruit de leur ressemblance...

Heero s'accrochait à la vie, respirant tant bien que mal, reprenant son souffle, pensant si fort à Duo qu'il en avait mal à la tête ou était-ce le coup qu'il venait de recevoir ?

Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo, Duo...

Ne pas le faire souffrir encore. Il lui avait promis. Duo. Ne pas le faire souffrir. Ne pas mourir. Duo. Tenir sa parole. Duo. Duo. Duo.

Il fallait survivre, pour le voir, lui parler... Il donnerait tout pour le revoir encore...

Duo, son avenir, son espoir, la branche à laquelle il s'accrochait quand son passé devenait trop douloureux...

-DUOOooooooooooo !!!!! s'écria Heero sous un coup plus violent.

Les yeux mi-clos, il repensait à chacune de ses conversations avec l'américain, à leur première rencontre, à ses longs monologues qu'il écoutait d'un air indifférent, à son regard avant de l'embrasser, à la confiance qu'il plaçait en lui...

-Duo, tu peux me passer le livre qui est derrière-toi, s'il te...

Quatre s'interrompit aussitôt en voyant l'expression de l'américain. Les yeux écarquillés, il regardait fixement devant lui, dans le vide, le souffle soudain court.

-Duo ? Qu'est ce qui se passe ? demanda Quatre prudemment.

-Heero, ne put que murmurer le jeune homme avant de tomber brusquement au sol, ployant sous la douleur qu'il ressentait.

-Heero ? Comment peux-tu ? Duo ! s'écria le jeune arabe en voyant son ami souffler de plus en plus rapidement, à la recherche de son souffle.

-Il m'appelle... Il va mal... Très mal... Appelle Kari...

-Je vais la chercher ! répondit Quatre en sortant précipitamment, à la recherche de la japonaise.

Quelques secondes plus tard, Kari revenait, suivie de Trowa.

-Kari... Qu'est ce qui se passe ? Je... Il m'appelle... Mon nom... Il le répète sans arrêt, c'est sans fin... Il a mal... Je le sens...

-Comment ? C'est impossible, Duo, affirma la jeune fille en secouant la tête.

-L'empathie ? suggéra Quatre.

-Pas avec Heero... Pas avec Heero, répéta la jeune fille lentement. A moins que... prononça t-elle doucement...

-A moins que quoi ? s'impatienta Quatre, en voyant Duo fermer les yeux.

-A moins qu'Heero ne lui ait donné sa clef... Mais c'est impossible, je ne sens rien, moi.

-Il a mal... murmura Duo. Il faut faire quelque chose, il faut le sortir de là...

Kari se concentra un moment, fermant les yeux, tentant de trouver le japonais, de retrouver la trace de son esprit, et d'y pénétrer, elle connaissait la clef, il ne devrait pas y avoir de problèmes...

-Je ne peux pas entrer dans son esprit... constata t-elle d'une voix blanche.

Trowa l'interrogea du regard.

-Il a changé sa clef, je ne peux plus entrer dans son esprit, expliqua la jeune fille.

-Il faut l'aider, répéta Duo en se redressant doucement, un air déterminé peint sur le visage.

-Il t'as confié sa nouvelle clef... Il ne te l'as pas dit ? Il t'as donné le moyen d'entrer dans son esprit, Duo. Que tu le saches ou non, Heero t'as donné toute sa confiance... Tu es le seul qui puisse le retrouver. Je ne peux pas... Son esprit m'est fermé... reprit la japonaise d'un ton blessé.

C'était la première fois que Heero la bloquait. Non, qu'il avait changé sa clef. D'ailleurs, comment avait-il fait ? Et surtout pourquoi ? Est ce qu'il ne lui faisait plus confiance ?

-Ou es t-il ? demanda Trowa.

-Je ne sais pas... paniqua Duo en regardant les autres d'un air hagard. Il ne les voyait pas, il était ailleurs, tentant d'entendre encore la voix d'Heero. Celle qui répétait son nom inlassablement d'une voix de plus en plus faible.

-Concentre toi et essayes de savoir... reprit Kari.

-Il est... Dans une maison... Non, il est... Dans un grand bâtiment... C'est un lieu familier, il connaît ce lieu. Il le connaît très bien, c'est là... C'est là qu'il...

Duo fronça les sourcils, apparemment, l'information n'était pas facile d'accès, Heero la bloquait consciemment ou non.

-C'est là qu'il a grandi, termina Duo.

Kari prit une grande inspiration accusant le coup.

-Je sais où ils sont, déclara t-elle d'une voix froide.

Elle avait retrouvé tout ce qui faisait d'elle le soldat parfait. L'entraînement revenait en surface et le masque froid était le mieux adapté pour gérer ce type de situation. La jeune fille se dirigea vers le hangar et monta dans le Wing. Duo la suivit, ainsi que Trowa, Quatre, Wufei et Sally qui avaient entendu toute la dernière partie de leur conversation.

Tous allaient venir en aide à celui qu'ils considéraient comme leur leader, à un jeune homme qui leur avait tant caché de choses sur son passé. Mais ils y allaient, au nom de leur amitié, pour celui qu'ils avaient appris à connaître, durant toute cette année passé ensemble.

Sally prit place aux commandes du Ariès de Hilde qui était restée dans sa chambre, immobilisée par sa jambe. Elle devait répondre aux mads si jamais ils appelaient. Wufei la regarda monter, une peur sans nom au fond des yeux mais la jeune femme se retourna, il soutint son regard, hocha la tête doucement et monta à son tour dans Shenlong, priant Nataku de leur accorder encore une fois la victoire s'ils venaient à se battre.

Kari les guida d'une voix ferme, donnant ses directives, rappelant à tous Heero. De temps en temps, Duo grognait pour aller plus vite. Il entendait toujours la voix d'Heero qui l'appelait, encore et encore, inlassablement.

Kari les fit s'arrêter à l'orée d'un bois et ils camouflèrent ainsi leurs armures mobiles.

-Séparons nous par équipe de deux. 03 et 04 vous restez ici en surveillant les alentours. Qui sait qui sont ses alliés. 05 et Sally vous passez par l'aile droite du bâtiment. Si vous entendez du bruit, bipez-moi Mais n'entrez sous aucun prétexte à l'intérieur d'une pièce. Duo, tu me suis, on passe par l'aile gauche, ordonna Kari.

Ils se séparèrent sans un regard, et chacun alla s'acquitter de sa mission.

Duo suivait la japonaise, les yeux un peu dans le flou. Heero avait arrêté de l'appeler, et cela l'inquiétait.

-Il n'appelle plus, hein ? murmura Kari.

-Non, répondit Duo.

Le silence se fit entre eux, plus oppressant au fur et à mesure que le temps passait.

Et puis, enfin, ils entendirent la voix de Yoki. Kari arrêta Duo d'un geste et lui fit signe d'emprunter un escalier, plus haut. Ils passeraient par en haut. Duo la suivit, sentant son sang battre à ses veines. Ils se rapprochaient d'Heero, ils allaient le sortir de là. Mais doucement tout doucement, le moindre faux pas et qui sait ce qui arriverait...

Kari commença à ramper sur une poutre et Duo la suivit. Bientôt, ils purent avoir une meilleure vue sur la pièce dans laquelle étaient les deux jumeaux.

Heero était assis, le dos contre un mur, le sang entourant son corps et Yoki s'était assis sur une chaise, non loin de là, le regard fixé sur le japonais.

Duo voulut intervenir tout de suite mais Kari l'en empêcha aussitôt.

Attendre un moment propice. Et pour le moment, Yoki était sur ses gardes, et dans une excellente forme, même.

-Je sais ce que tu penses Heero. Si seulement je n'avais pas accepté ce pari... Et bien si, tu l'as fait, on a découvert cette foutue pièce et tu sais quoi ? On a même lu tous les dossiers de J. Alors, découvrir qu'il nous surveillait geste après geste, c'était pas trop grave, enfin, on s'en doutait de toute façon... Non... C'est pas ça que tu regrettes, hein ?

« -Je voudrais retrouver ma famille.

-Attends... Hum, je viens de trouver un truc assez dur à pirater... , sourit Heero.

-Montre, fit Yoki en remplaçant le japonais devant l'ordinateur.

Quelques minutes plus tard, les deux enfants lisaient avec avidité chaque ligne qui s'offraient à leur vue. Et leur regards se chargèrent d'incompréhension, avant de prendre une légère expression de doute.

C'était un texte sur la vie d'Heero Yuy, le leader des colonies. C'était un rapport signé Odin Lowe. Un rapport sur les habitudes de vie du leader, tout ce qui pourrait l'aider à l'abattre, en fait.

C'était pas une surprise, non, après tout, Heero avait deviné ce qu'avait l'homme qui l'avait élevé. C'était pas ça, la surprise du texte. Non. C'était les noms. Heero Yuy, était le représentant des colonies.

Et il avait un sosie. Un sosie qui s'appelait Yoki. Et il assistait quelquefois à des meeting à la place du dirigeant lorsque c'était trop risqué.

Une autre information troublante : Heero Yuy avait une sœur. Kari. Mariée à un certain Kento Takeshi. Kari Takeshi, donc.

Les deux japonais froncèrent les sourcils. Ils savaient depuis toujours qu'ils avaient des noms de code. Heero Yuy, ça avait été facile de trouver... Mais pour les autres, ils s'étaient toujours demandé où J les avait pêchés... Voilà la réponse... Est ce que J avait choisi ces noms au hasard ou... ?

Une seconde disquette plus tard et les deux japonais découvrirent l'horreur.

Pendant un moment, ils se regardèrent, et tout avait changé. Cherchant qui était qui, cherchant le moindre acte de naissance, il trouvèrent un carnet de fiche d'état civil. Date de naissance, groupe sanguin, prénom... C'était des faux, ils étaient déjà à leur nom de code mais... C'était un acte de naissance pour deux jumeaux. Deux jumeaux, oui.

Mais des faux jumeaux.

Une fille et un garçon.

Et ils étaient trois.

Ils s'étaient toujours demandés d'où venait Kari. C'est vrai, eux se ressemblaient tellement qu'ils savaient qu'ils étaient jumeaux. Donc, J les avait « adoptés » ensemble. Et pour Kari... Ils s'étaient toujours demandés.

Les deux jeunes gens se regardèrent. Ils n'avaient aucun lien de parenté entre eux. Aucun.

Mais leur ressemblance...

Un sosie... Ca n'existait pas un sosie aussi parfait. Ca n'existait pas.

Cherchant des réponses à leurs questions, à leur angoisse naissante, ils continuèrent à fouiller cet ordinateur, cette base de données troublante. »

-Avec le recul, on aurait pas du, hein ? Mieux valait rester dans le doute, sourit Yoki amèrement.

-Yoki...

-Et on a fait croire à Kari qu'on était jumeaux. On lui a menti toute sa vie. D'abord en lui faisant croire que c'était toi qu'elle aimait, mais ça, j'étais le seul concerné, ensuite en lui disant que tu étais mon jumeau. Là, mon vieux, t'étais dans le coup, sourit Yoki.

Heero cracha du sang à terre, et releva la tête pour croiser le regard du japonais.

Yoki éclata d'un rire froid.

-Un putain de clone. Je suis rien qu'une expérience de laboratoire ! Et Kari... Qui aurait pu croire qu'elle était ta sœur, hein ? Tu me ressemblais tellement... On savait qu'il y avait eu des jumeaux... Alors on a tout de suite fait le rapprochement... Je te ressemblais, j'étais ton jumeau. Une fausse jumelle, on risquait pas de vous reconnaître tous les deux. Ta sœur, Heero. Ta sœur que tu protèges tant.

Cachée par la pénombre, allongée sur une poutre, Kari écoutait, abasourdie, tout ce que disait Yoki. C'était pas vrai... derrière elle, elle pouvait sentir la confusion de Duo, sa surprise totale. Moins totale que la sienne. C'était pas possible... Pas vrai du tout. Non, ça ne pouvait pas être comme ça. Non.

Yoki était le clone d'Heero ? Heero était son frère ? Tout se mélangeait dans sa tête, les sourires des japonais, les gestes tendres qu'ils avaient eux les uns envers les autres, la complicité des deux frères, leur ressemblance et surtout, surtout la phrase qu'ils répondaient, souriants, quand on leur faisait une remarque sur leur manière d'agir en parfaite concordance : « On est jumeaux, c'est normal. »

Non.

C'était pas normal et elle aurait du s'en rendre compte.

Les menteurs... Les tricheurs... Une haine incomparable submergea la jeune fille et elle dut se contenir pour ne pas exploser.

Se contenir pour ne pas que les empathes ne devinent sa présence. Et garder la bride sur Duo. Contenir encore les émotions de l'américain un moment, dresser la barrière pour ne pas que les japonais ne sachent qu'ils étaient là, à les écouter.

-J'ai toujours pas compris pourquoi tu ne lui avait pas dit, quand tu l'as retrouvée... demanda Yoki, songeur. Pourtant, tu savais que je ne te ferais pas de cadeau... Alors pourquoi tu m'en faisais ?

-C'est à toi de lui dire, souffla Heero en réponse.

-Je ne t'ai pas fait de cadeau... J'ai même essayé de buter, Duo, putain ! J'ai tout fait pour que tu souffres, et toi, tu m'as laissé faire ? Mais qu'est ce qu'il y a dans ta tête, hein ?

Heero releva la tête et le regarda fixement.

Doucement, Yoki recula.

-Non, pas de ça avec moi, Heero... Je ne veux pas que tu me comprennes... Je ne veux pas de ta compassion...

-Je t'ai déjà compris.

Yoki donna un coup de pied rageur dans le corps du japonais et lui cracha au visage :

-Qu'est ce que tu peux comprendre, toi ? Tu as eu une enfance, des souvenirs à toi, tout ne s'embrouille pas dans ta tête ! Tu t'en es sorti, toi ! Pas eu besoin de justifier ton existence dans ce monde, t'as pas eu besoin de faire des faux-sourire ! On t'as accepté comme tu es et on t'as même aimé ! Moi, je n'ai eu droit qu'à des regards curieux, de dégoûts, de haine ou d'envie. J'ai du mentir pour m'en sortir !

-Je l'ai fait aussi, déclara calmement le japonais.

-Heero, tu n'as pas menti, tu ne t'en souvenais plus ! J t'avais si bien conditionné...

-Comment peux-tu savoir ça ?

-J'ai lu des rapports... C'est moi qui est retrouvé tous les scientifiques, tu sais ? Les uns après les autres, je les ai retrouvés et enfermés. Tous. Et il y en a un qui m'a parlé... Heero, tu étais celui qui avait survécu à la dernière épreuve de J... Celui qui avait ramené les bons dossiers, celui qui n'avait pas cramé. Celui qui avait rempli sa mission.

-Je...

-Seulement, tu es resté prostré, des heures et des heures, sans réagir au moindre bruit, allongé au sol, me tenant par la main. Tu aurais du mourir après la deuxième explosion, tu ne l'as pas fait parce que... Hum, quels étaient ses termes exacts déjà ? Ah oui, sourit le jeune homme. « Un étrange halo bleu t'as entouré et t'as protégé. » Paraît que le mien était vert et celui de Kari jaune... rajouta le japonais d'une voix indifférente. Ce qui explique pourquoi je ne suis pas à l'état de cendres aujourd'hui... J t'as séparé de moi, tu m'agrippais fort, il t'as ramené dans une chambre, dans un lit et tu n'as plus bougé. Ni pour te nourrir, ni pour répondre aux questions des « docteurs ».

-Je ne savais pas ça... Je n'ai jamais vu ces lumières...murmura Heero.

-Peut être qu'elle n'ont commencé à briller que quand tu as fermé les yeux... Qui sait ? Mais je n'ai pas fini... Je sais que tu nous avais oublié parce que J a du estimer que c'était trop pour toi. La mort de tes compagnons... Trop. Alors, il t'as hypnotisé, Heero. Tu étais dans une sorte de coma, tu ne pouvais pas t'en défendre même si tu l'avais appris... Et ils sont remontés, loin, très loin dans tes souvenirs, pour nous effacer. Pour que tu oublies cette dernière journée. Tu ne devais jamais t'en souvenir...

-Trop tard.

-Tu m'étonnes ! rit Yoki. Il a suffit que tu lises la disquette que je t'ai donné pour retrouver toute ta mémoire. Des bribes de souvenirs en bribes de souvenirs... Ca a du te faire un choc, je me trompe ? J'imagine bien la scène.

-Non, tu n'imagines pas, le coupa le japonais.

-Oui. C'est vrai. Je me demande encore comment une simple disquette a pu te faire souvenir de tout ça... mais après tout, ce n'était que de l'hypnose... Il suffit de contourner cette merde pour trouver ce qu'elle cache. Et tu t'es souvenu de tout ? Tout de suite ?

-Hai, répondit Heero d'un ton las, revenant dans sa fatigue à sa langue natale.

-Ton empathie et tout... Tu t'en es souvenu. Je suis impressionné. Donc, tu vois, tu n'as pas vraiment menti à tes coéquipiers en leur cachant que tu avais une sœur et un clone, tu ne t'en souvenais plus... sourit le jeune homme. Et ils t'ont accepté tel que tu étais Heero. Froid et renfermé. Avec un passé d'entraînements pas communs. Ils t'ont accepté, même quand tu leur as dit, plus tard que tu étais empathe. Ils t'ont même accepté quand tu leur a dit que tu étais télépathe, je parie ?

-Oui.

-Si j'avais dit à n'importe qui qu'en plus d'être un clone, j'étais empathe et que je « jouais » avec l'eau...

Il eut un petit rire avant de reprendre.

-Ca aurait été pire, conclut-il d'une voix froide. .

-Qu'est ce qui s'est passé ?... Après l'accident, qu'est ce qui s'est passé ? répéta Heero devant le regard interrogateur du japonais.

-Après l'accident, reprit Yoki d'un ton lointain... Après l'accident, répéta t-il d'un ton plus dur, J m'a cru mort. Tout comme toi, d'ailleurs...

-Je ne sentais plus ta présence.

-La lumière verte m'a protégé... Je n'étais pas mort, la preuve. J m'avait laissé dans une pièce, seul. Avec Kari. Il pensait qu'on était mort. J'ai vu le four, j'ai compris, et je me suis cassé.

-Qu'est ce que tu veux dire ? demanda Heero d'une voix tremblante.

-Qu'ils allaient nous faire brûler et effacer toute trace de notre existence, voilà. Alors, j'ai emmené avec moi Kari, et je me suis enfui, j'ai passé les barbelés, les caméras. J'ai appris à une bonne école, c'est sûr. J'aurais aimé voir la tête de J quand il a vu à quel point j'avais bien retenu ses leçons... Et je suis arrivé dans le monde... Kari sous le bras est vite devenue gênante. Je ne savais même pas si elle était morte... Elle le paraissait en tout cas. Je l'ai laissé dans un hôpital en pensant pouvoir revenir... Pour ensuite revenir te chercher avec Kari... Je supposais que tu étais vivant, tu n'étais pas dans la pièce avec nous. J'ai trop présumé de mes forces. Quelques rues plus loin, je m'évanouissais, tombant dans le coma. Choc post traumatique, parait-il.

-Et Kari s'est retrouvée en famille d'accueil...

-J'avais laissé son prénom et « faux-nom » près d'elle à l'hôpital. Je soupçonnais l'amnésie au cas où elle se réveillerait. Quant à toi, je suppose que tu as continué l'entraînement... Elle, elle allait au lycée.

Le silence se fit, le temps pour Heero de reprendre son souffle, de maîtriser le tremblement de ses mains, tandis que le sang s'écoulait goutte à goutte de ses plaies sur le sol.

-Est ce que tu sais ce que j'ai enduré, moi ? reprit Yoki. Ne pas savoir pourquoi on est là, te ressembler, à toi, le modèle pour le clone. Toujours. Et quand je suis sorti du coma, ma naïveté m'a poussé à tout avouer. Qui j'étais et d'où je venais. Du laboratoire de scientifiques fous. Mais j'étais un humain, hein ? Non... Et je l'ai appris à mes dépends. Mais c'était trop tard. La nouvelle avait déjà fait le tour de l'infirmerie. Manque de pot pour moi, elle était dirigée par un ancien caporal de Oz. Alors l'information a circulée. Pour eux, je n'étais qu'un clone. On pouvait faire de moi tout ce qu'on voulait... Me jeter en prison, me battre, me tuer s'ils en avaient envie, j'étais pas humain, personne ne regretterait « l'expérience » comme ils m'appelaient. Et là, j'ai trouvé la faille de mes ennemis, Heero. Pour un clone, j'étais plutôt bien foutu alors...

-Tais-toi ! Je ne veux pas entendre ça ! souffla le japonais.

-Tu m'étonnes ! Comment ne pas vomir ? Comment jouer la comédie ? J'avais qu'à imaginer ce four que me réservait J. Alors, j'ai couché avec ces soldats, pas par plaisir, crois-moi. Et tu l'as deviné, hein ? C'est pour ça que tu savais exactement comment réagir dans cette base...

Heero acquiesça de la tête. Il n'avait eu qu'à réfléchir un moment... Comment Yoki avait-il fait pour intégrer Oz ? Sans doute parce que J le poursuivait. Voilà pourquoi il était resté. Il avait parlé, ça n'arrangeait pas son cas... Alors, de quoi Yoki aurait-il pu user pour s'attirer les faveurs des soldats de Oz, pour obtenir qu'on ne l'enferme pas ? Son corps. Ca le répugnait, cette conclusion l'avait choqué mais c'était si logique... Qui accepterait un clone, hein ?

-J'ai du me faire la moitié des soldats de cette base pour mériter une certaine estime... continua Yoki, confirmant les pensées du japonais. Et le commandant Treize pour bénéficier de sa « protection ». Parce qu'à tout moment, un fanatique pouvait déterminer que je ne méritais pas de vivre, que je n'étais qu'une chose et m'écraser. Mais j'avais besoin de rester auprès d'eux, J avait lancé à mes trousses quelques hommes parmi ses élites qui voulaient par dessus tout me voir dans une cage de laboratoire. Et c'est là que Oz a eu une idée, la pire que j'ai jamais entendue venant de cette bande d'abrutis...

-Faire une armée entière de clone, compléta Heero, soudain las.

-Oui. On se demande d'où ça leur est venu, ça encore. Ils avaient remarqué que j'étais doué dans le maniement des armes, après l'entraînement qu'on a subi, qui ne l'aurait pas été, hein ? demanda le jeune homme amèrement. C'était ça ou crever, évidemment que je savais manier les armes !Et ils ont voulu monter leur projet. Retrouver les scientifiques et les obliger à me cloner encore et encore, de la même manière que J avait fait avec toi. Laisser l'enfant se développer, plus rapidement que la normale grâce à un système de régulation, et le libérer à l'âge de 11 ans, en ayant pris soin de lui insérer les cellules clonées de ton cerveau, pour la mémoire... Un garçon de onze ans qui sait se battre, c'est inestimable.

-Comme pour toi, souffla Heero en se remémorant les rapports de J qui expliquaient brièvement l'opération...

-Oui, à une différence près. Ils voulaient cette fois faire « hormoner » l'enfant jusqu'à dix-huit ans. Pour qu'il soit plus opérationnel, je suppose.

-Tu étais déjà instable...

-Exact. Normalement, j'aurais du mourir. Mes cellules n'auraient pas du avoir la capacité de se régénérer. J'aurais du mourir très vite en fait. Mais non. Mon système de survie était très développé. Devrais-je dire ton système de survie, Heero ? Après tout, tu étais le donneur, dans cette histoire, même si tu ne le savais pas...

-Mais ils voulaient quand même te cloner et risquer la mort des nouveaux clones. Je sais, ils en ont parlé devant moi.

-Oui. Seulement ils se sont vite rendu compte que je n'étais pas utilisable pour servir de « papa ». Encore une fois, tu revenais en course. Ma mission était de te ramener entre leurs mains pour qu'ils puissent te cloner. Evidemment, j'étais un excellent élément, je connaissais par cœur un pilote de gundam, ses manières d'agir, ses habitudes, son entraînement. J'étais indispensable. Mais j'ai pris tout mon temps pour te retrouver. Parce qu'une fois en ta possession, qui aurait eu besoin de moi ? Et puis je suis tombé par hasard sur son dossier... Kari. Elle était vivante. Elle avait survécu, comme moi. Et je savais qu'elle ne se rappelait de rien, mais je voulais tellement la revoir... Et puis... toi. Tu étais capable de le faire. Lui faire revenir la mémoire. Tu avais sa clé et tu étais bien plus doué que moi pour les manipulations psychiques. Je ne voulais pas risquer de tout casser en elle. Et là, coup du destin, tu l'as rencontré. La chance me souriait. Tu as vite découvert ton passé, et tu lui as rendu la mémoire.

-Je ne pensais pas servir tes intérêts en faisant ça...

-Je dois dire que je ne savais pas moi-même ce que je voulais... Est ce que ce n'était pas mieux pour elle de rester sans ce passé si douloureux ? je veux dire, un entraînement de soldats, il n'y avait pas de quoi être fier.

-Le doute est pire que tout.

-En es-tu sûr ? J'aurais préféré rester dans le doute, Heero. Je sais, j'ai vu dans ton ami... Trowa... Lui n'aime pas ce doute et ça le ronge... Il ne sait pas la chance qu'il a, sourit Yoki. Et tu ne peux pas lui rendre la mémoire à lui, hein? Tu n'as pas sa clé... Mais je pense qu'il a tort.

-Non.

-Si tu veux. De toute façon, à ce moment, tu m'as rendu service.

-Ca ne t'as pas servi à grand chose. Kari n'approuvait pas tes actions, et elle ne voulait pas te suivre.

-C'est vrai... J'ai tenté de l'enlever mais ça n'a pas marché... mais qu'importe, sourit Yoki. Elle avait retrouvé la mémoire, elle se rappelait de moi, juste un peu, c'est tout ce que je voulais. Je ne voulais pas qu'elle m'oublie...

-Et elle a découvert la vérité...

-Ca j'aurais préféré que tu te taises...

-J'étais pas au courant !

-Ben la prochaine fois, tu devineras ! répliqua Yoki, mi-furieux, mi-amusé.

-Mais bien sûr... Comme si j'allais me douter que tu avais couché avec ma sœur dans l'infirmerie...

-En tout cas... Ca a changé la donne... murmura Yoki. Comme je t'ai haï pour ça, murmura le brun avant de baisser les yeux. Mais je voulais la revoir, la regarder, une fois rien qu'une. C'est la seule chose dont je suis sûr aujourd'hui... Je l'aime. J'en suis certain, c'est une de seules choses qui me distinguent de toi, même. Oui, j'en suis sûr, pour une fois que je n'ai pas les mêmes réactions que toi...

-Yoki...

-Les mêmes réactions, quoique je pense, quoique je dise, c'était toujours la même chose, s'énerva le japonais. Sauf... sauf pour elle... Mais pourtant, je continuais à réagir comme ton parfait clone, j'avais les mêmes réactions, toujours... Et pourquoi ? Hein ? Qu'est ce qui faisait que j'avais exactement les mêmes envies que toi, les mêmes habitudes, les techniques de travail, les mêmes réflexes ? Non, pas l'entraînement de J... Bien avant... Tout ça à cause de ces scientifiques... Ces putains de scientifiques qui avaient rien trouvé de mieux à faire que de cloner tes cellules de cerveau... Avoir dans la tête les souvenirs de quelqu'un d'autre est très désagréable, tu sais ? demanda Yoki sur le ton de la conversation.

Heero hocha la tête doucement. Il s'en doutait assez, oui.

-Avoir tes souvenirs est peut être pire, Heero. Voir Odin te sourire quand tu adoptais la parfaite imitation de son fils pour passer les barrages, voir tes premiers casses, tes premières égratignures... Et toujours, essayer de remonter à mes premiers propres souvenirs... Mes premiers souvenirs c'est... en fait, je ne sais pas, tout est faussé. Ca devrait être la tête des scientifiques à travers la vitre, c'est le flingue d'Odin plaqué sur ma tempe. Et savoir que tout est faux... Savoir que mon monde est un mensonge... Alors c'est pour ça qu'on disait que je te ressemblais tant, Heero. Parce que j'avais les mêmes souvenirs, les mêmes apprentissages de l'enfance. Forcément, on pensait pratiquement toujours aux mêmes choses. Les mêmes références... On dit que tout se joue dans les six premières années. Biologiquement, je n'en ai que 4. J'ai 4 ans. Qui me croirait ? J'ai le même niveau que toi, la même force, les mêmes défauts... Une machine à tuer. Et tu sais le pire ? Si ça se trouve c'est complètement faux, ce que je me dis là. Si ça se trouve, je suis bien mort... Et ces cons ont recréé un autre clone, avec les cellules de mémoire de Yoki... Le vrai... Tout se mélange, tout est faux ou tout est vrai, comment savoir ?

-Je ne pense pas, non. Tu es Yoki, souffla faiblement Heero avant de fermer les yeux, à la limite de perdre connaissance.

Yoki poussa un soupir de rage et s'apprêtait à frapper de nouveau Heero, son poing droit dans sa tempe, lorsque Kari tomba de la poutre où elle était allongée. Un faux mouvement et...

Tout ce qu'elle venait d'apprendre, tout ce que Yoki avait dit ne pouvait pas être vrai... C'était impossible voyons... C'était... Trop cruel...

Alors qu'elle tombait dans le vide, Duo ne put la rattraper, les larmes coulaient sur son visage.

Un ancien réflexe lui fit faire un salto arrière pour freiner et amortir la chute. Alors que ses pieds se posaient sur le sol, elle faillit perdre l'équilibre, ayant pris trop d'élan mais Yoki la maintint fermement, l'empêchant de tomber à la renverse.

Deux secondes plus tard, il lui fauchait les jambes d'un coup de pied puissant et elle tombait en avant, rencontrant violemment le sol.

A SUIVRE...

(1) Fait véridique pour le ciseau... Ah, c'était trop drôle... Une coupure de courant en classe, franchement, ça valait le coût... du ciseau...

Note des auteurs :

Alors ?

Qu'est ce que vous en pensez ?

Ca fait mal, hein ? Vous comprenez mieux pourquoi Yoki est comme ça ? Pourquoi il « s'amuse » avec les soldats ?

Maintenant, le titre est clairement expliqué, non ? Sang et révélations... Sang pour les liens du sang et révélations parce que... Qui s'en serait douté, hum ? Enfin... On vient juste de confirmer notre statut d'auteurs sadiques à travers ce chapitre, non ?

Hum, pourtant, quelques points ne sont pas encore éclaircis... Et la fin n'est pas à venir...

Pas encore en tout cas...

Nan pêche, c'est le plus long chapitre de la fic !! 33 pages, un record !! Mais il fallait bien ça vu l'attente !!

Ca mérite une review vous croyez ? chibi eyes