- Vous rendez-vous compte Narcissa ?! S'exclama Hermione subjuguée. Le peuple des sirènes a régné en maître sur les océans pendant plus de trois millénaires !
- C'est bien pour ça que je n'aime pas le poisson… soupira-t-elle, une aiguille de couture entre les dents.
- Mais c'est incroyable ! Ils ont gravé leurs légendes aux cœurs des grottes les plus profondes des fonds marins ! Des milliers d'écrits oubliés reposeraient dans les eaux les plus inaccessibles du monde, au moment même où nous parlons !
- Votre posture Hermione ! S'agaça Narcissa. Redressez votre posture !
Epinglée de la tête aux pieds, Hermione grimaça aux piques incessants des aiguilles traversant sa première sous-robe. Un mètre de couture en mains, la Malfoy s'efforçait de prendre ses nouvelles mensurations pour la confection d'une robe de bal sur mesure. Mais c'était sans compter le nouvel objet d'étude de la jeune femme, qui bien qu'elle doive rester droite et silencieuse, ne pouvait s'empêcher d'annoter un livre sur l'Histoire des Peuples Marins du Monde Magique. Incapable de tenir en place et trépignante à chaque découverte, c'est avec la plus grande peine de monde que Narcissa tentait désespérément de comparer différents tissus et plis de coutures sur son mannequin en mouvement. Devant constamment la replacer, la redresser et reprendre ses points de repères, la Tutrice désespérait au point de devoir saisir le livre de sa pupille et de le jeter à l'autre bout de sa chambre dans un soupir exaspéré.
- Hermione, il suffit ! Tonna-t-elle à bout de nerf.
- Mais…
- Bien que je respecte vos enseignements avec le Maître, veuillez respecter ce que je tente désespérément de vous inculquer !
- Mais je…
- Chut ! Siffla-t-elle brusquement. A moins que ce ne soit pour parler de votre robe, je ne veux plus rien entendre !
Gênée mais aussi profondément amusée devant l'autorité de sa Tutrice, Hermione esquiva un sourire et pinça les lèvres en signe s'acquiescement. Même si elle s'était habituée aux tenues protocolaires et talons trop hauts qu'on lui imposait de porter, elle n'était décidément pas faite pour servir de mannequin de mesure. Comment le pourrait-elle ?! Ils avaient avancé ! Ils avaient fait une découverte ! Aussi, même si elle avait passé la nuit enfermée dans la bibliothèque à répertorier les œuvres à lire pour leurs recherches, Hermione ne regrettait aucun de ses cernes. Ils avaient réussi ! Ils s'étaient rapprochés d'une piste de réponse ! Et rien que pour cela, elle ne parvenait pas à rester en place. Mais mieux valait ne pas faire de vague… en particulier devant une Malfoy au regard foudroyant et aux aiguilles agiles.
- Pour quelle occasion est-ce ? Demanda-t-elle alors en contemplant les ébauches de croquis accrochés au miroir.
- Je l'ignore. Dit-elle distraitement. Le Maître n'a pas encore spécifié l'évènement ni la date, mais il semblerait qu'il s'agisse d'un bal.
- Un bal ?
- Hum hum… du moins je l'espère. Souffla-t-elle. Les bals me manquent tant.
Surprise par ces propos, Hermione la regarda sans comprendre. Les sangs purs régnaient en maîtres depuis plus de deux ans, pourquoi se priveraient-ils de bals ?
- Vous… vous n'avez plus organisé de bals depuis la guerre ?
- Grand Dieu, non ! Difficile d'organiser quoi que ce soit quand les plus grandes familles du pays sont divisées, en fuite, endeuillées ou… décimées. Sans parler de la réorganisation politique du Ministère, de la reconstruction du Parlement, des espions, traîtres, attaques, attentats et autre joyeusetés orchestrées par la Résistance. Les bals, fêtes et réceptions ont donc été interdites…
Bouche bée, la jeune femme ne trouva pas quoi dire devant la tristesse et l'amertume de sa Tutrice. Nul doute qu'un tel interdit devait être dur à vivre pour les familles de Sangs Purs s'étant battues pour faire valoir leur suprématie, mais ce qui la surprenait le plus était bien leur résignation. Dans sa fuite, Hermione s'était toujours imaginé les Mangemorts et autres fidèles du Maître se repaître de leur victoire dans une débauche de fêtes, bals et réceptions privées, festoyant et chantant à n'en plus pouvoir. Pourtant elle semblait s'être trompée, à tel point qu'aucun des camps n'avait trouvé quelque chose à fêter après les combats. Comme à chaque fin de guerre, les morts devaient être enterrés, les villes reconstruites, les pertes acceptées et plaies cicatrisées. Les réjouissances pouvaient soulager les cœurs certes… mais ne pouvaient être que déplacées devant un cimetière franchement creusé.
- Alors vous… vous n'avez jamais célébré votre victoire ? Demanda-t-elle sans y croire.
- Il y a bien eu une cérémonie au Ministère mais… ce n'était qu'une officialisation de la Victoire du Maître et le bâtiment était pour ainsi dire en ruine, alors…
Hermione ne put s'empêcher de déglutir devant le regard attristé de Narcissa. Elle voulait retrouver sa vie, sa joie et ses fêtes ; le bonheur des danses de bals et autres ivresses insouciantes d'instants de réjouissance. Elle voulait oublier la guerre, les cris et les morts. Un souhait commun qui pourtant semblait si loin.
- Dans ce cas, prions pour que ce soit un Bal. Dit Hermione dans un doux sourire.
- Que Merlin vous entende. Souffla-t-elle. Le Ministère et Poudlard ont été reconstruits. Le climat s'est apaisé, les enlèvements de parlementaires ont cessé et Potter n'a plus été vu dans le pays depuis déjà plusieurs semaines ! Avec un peu de chance, l'ère de la peur prendra bientôt fin.
L'ère de la peur… un choix de mots anodins qui résonna cependant avec force aux oreilles de la jeune femme.
L'ère de la peur… ou comme le disait les maya « l'ère de malheur ». Soit le siècle le plus sombre de l'humanité.
Un siècle voué à marquer la fin du Monde Sorcier.
- Oh, je vous imagine déjà ! Belle et fière aux bras de notre Maître, dansant dans une somptueuse robe de soie. Vous serez le bijou de sa couronne !
Choquée par son soudain revirement d'humeur, Hermione mit plusieurs secondes avant de comprendre le sens de sa phrase. Elle… Au bras du Maître… Dansant à un bal…
- Vous… vous n'y pensez pas ? Dit-elle plus pâle.
- Bien sûr que si ! La tradition veut qu'une Initiée d'Honneur ouvre le Bal avec son Mage Noir. Bien entendu, il n'y a plus eu d'Initiée pendant des siècles mais… oh Merlin ce serait si merveilleux de pouvoir enfin renouer avec nos traditions ancestrales !
Oh Seigneur…
Oh seigneur…
Elle avait devoir danser.
Avec Voldemort.
A un bal de Mangemort.
Elle allait devoir danser avec Voldemort à un bal de Mangemort !
Elle allait devoir danser avec Voldemort à un bal de Mangemort !
Paniquée à cette simple pensée, Hermione senti son souffle se couper aussi brutalement qu'au laçage de son corset. Elle ne pouvait pas danser ! Pas avec lui ! Pas devant l'ensemble des représentants du Monde Magique ! Non ! C'était impossible ! Elle n'avait participé qu'à un seul bal au cours de sa vie, et tout cela pour finir en pleures sur les marches des escaliers de Poudlard ! Alors aujourd'hui ? En tant qu'Initiée de Voldemort et plus grande Traîtresse de l'Histoire ?! Non… non, elle ne le pouvait pas ! Haletante dans son élan de panique, Hermione sentie ses mains trembler sous l'adrénaline de son cœur battant. Danser avec Voldemort. Danser avec Voldemort. Elle n'y arriverait jamais. Jamais ! Comment le pourrait-elle ? Même Narcissa avait été impressionné par sa maladresse lors de leurs dernières leçons ! Non, non, non, non… elle ne pouvait pas le faire ! Elle ne pouvait pas ! Elle ne pouvait p…
« C'est un ordre Granger. »
Irradiée par la soudaine brûlure de sa marque, Hermione étouffa un cri dans un spasme de douleur surpris. Choquée, elle recroquevilla son bras contre elle, le souffle court et une fière au front.
« Ne doute plus jamais de toi ».
Grand Dieu… c'était de la torture ; un véritable brasier sous sa peau, une brûlure au fer blanc, un feu à vif sur sa chaire meurtrie. Et pourtant, cette douleur n'était qu'un rappel. Un piège vicieux de son nouveau Maître dont le simple souvenir lui laissa échapper un juron enragé. Maudit soit-il… elle n'avait plus le droit de penser ce genre de chose. A vrai dire, elle n'avait même plus le droit penser librement ! Un constat humiliant et horripilant qui malgré sa peine, lui fit esquiver un sourire désabusé. Par Merlin qu'il était doué… oui, Voldemort était à n'en plus douter le Sorcier le plus malin et vicieux qu'elle ait jamais rencontré, car même ses crises d'angoisses et remises en question n'étaient plus tolérées. Mais à quel prix ?! Car d'ici à ce qu'elle doive danser au bal, nul doute que la douleur de sa marque aurait fini par l'achever…
- Hermione vous… vous allez bien ?! S'inquiéta subitement Narcissa dont le regard était resté focalisé sur ses étoffes.
Les lèvres pincées et les joues rouges de douleur, la jeune femme s'accrocha à sa commode pour reprendre son souffle. C'était insupportable. Intolérable. Un véritable supplice gravé dans sa chaire, capable de faire pâlir le plus puissants des Doloris.
- Oui, je… ce n'est rien je vous assure. Grimaça-t-elle.
- Mais enfin vous…
- Un contretemps. Insista-t-elle. Rien de bien… méchant.
A la vue des veines soudainement noircies de son bras bandé, Narcissa eut un jappement effrayé. Elle n'ignorait pas quel genre de tourments la Marque du Seigneur des Ténèbres était à même de causer… aussi, c'est le visage étrangement plus pâle qu'elle s'empressa de faire apparaître un sac de glace. D'un geste presque trop familier, elle s'attela à le placer contre son bandage en sang, ignorant les cris douloureux et protestations d'une Hermione au bord du malaise. Pourtant et après plusieurs secondes, ses gémissements s'apaisèrent. Livide, la jeune femme réussit enfin à respirer pleinement malgré sa brûlure toujours ardente et déglutit durement. En sueur et la gorge sèche, elle s'assit à même le sol contre le rebord de son lit, le sac de glace fermement tenu contre son bras encore parcourus de spasmes réflexes. Seigneur… Si elle devait souffrir ainsi chaque fois qu'elle doutait, sa peine ne faisait que commencer.
- Tentez de vous calmer. Déclara Narcissa en la rejoignant à terre. La Marque réagit à la peur. Elle accentue la douleur.
De mieux en mieux…
- Je suis désolée. Souffla Hermione gênée. J'ai… j'ai eu une mauvaise pensée.
- Une pensée proscrite par le Maître. Comprit-elle.
- Oui, je… disons qu'il m'a été recommandé d'arrêter de douter. J'imagine que ça doit avoir ses avantages mais c'est… difficile.
- Oh pauvre chérie… Déglutit Narcissa d'une petite voix.
Le corps tremblant, Hermione chercha vainement à s'apaiser. Si la douleur s'était tarie, elle n'en restait pas moins constante, languissante et profondément ancrée dans sa chaire. Mais elle devait l'oublier. Oublier la douleur, oublier l'angoisse et les doutes ! Faire le vide ! Aussi, elle se focalisa sur le froid des glaçons contre sa peau, la douceur de son couvre lit et la soudaine étreinte de Narcissa. Serrée contre elle, Hermione se laissa bercer par sa main sur son front, les battements inquiets de son cœur et le parfum enivrant de sa robe. Telle une mère calmant son enfant, elles restèrent ainsi un long moment, silencieuses dans l'écho de ses soubresauts nerveux. Des instants de douleur mais aussi de réconfort, qui lui remémorèrent avec peine les instants où sa propre mère venait la veiller étant enfant. Des instants perdus et oubliés depuis presque trois ans. Des instants dont le simple souvenir lui parut presque plus insupportables encore que la douleur de la marque. Les larmes aux yeux, Hermione se senti défaillir, ne sachant plus où ses pensées devaient aller… aussi, elle préféra tout oublier. Sans un mot, elle rendit donc son étreinte à Narcissa et se concentra sur le moment présent. Un moment simple et réconfortant, accompagné d'une comptine que se mit fredonner sa Tutrice. Chantonnant du bout des lèvres, le corps recroquevillé de sa pupille contre elle, elle caressa ses cheveux et la berça de sa mélodie ; un air doux et paisible, datant de l'époque où Drago lui-même n'était qu'un nourrisson. Une époque lointaine et révolue, aujourd'hui remplacée par les cris enfiévrés de ses enfants.
- Par… pardon… Souffla-t-elle après un long silence.
- Chut. Ne dîtes rien. Répondit Narcissa la gorge serrée.
- Avec le temps je devrais être habitué.
- A quoi donc ?
- A la douleur. Dit-elle dans son cou.
- Sottise. Nul ne devrait jamais devoir s'y habituer.
Calmée après plus d'une demi-heure de sanglot muets et le bras engourdie, Hermione se redressa lentement contre son lit. Vide, nauséeuse et plus épuisée que jamais, elle eut l'impression de sortir tout droit d'un manège à sensation. Une comparaison adéquate, aux reflets qu'elle eut de ses cheveux emmêlés dans son miroir.
- Merci Narcissa. Souffla-t-elle alors reconnaissante. Et désolé pour vos points de repères sur ma robe.
- N'ayez crainte. Avec ou sans, vous serez de loin la plus belle de toute.
Emue, la jeune femme lui sourit malgré ses joues humides. Elle était si douce, si prévenante et attentionnée… un véritable cadeau du ciel, qu'elle n'aurait jamais cru pouvoir mériter en de tels lieux.
- Je… je suis désolé de vous avoir jugé pendant toutes ces années Narcissa. Sincèrement, je…
- Chut... nous en avons déjà parlé. Mais j'imagine que je vous dois moi aussi des excuses pour les traitements que ma sœur vous a infligé.
- Mais vous n'avez…
- Je n'ai rien fait. L'interrompit-t-elle gravement. Justement. Vous étiez aussi jeune que Drago à cette époque et sa camarade de classe. Peu importe la cause pour laquelle vous vous battiez… j'aurais dû intervenir.
Ne retenant plus ses larmes, Hermione détourna le regard et soupira avec force. Jamais elle n'aurait attendu de telles excuses de sa part et pourtant… pourtant elle les lui offrait. Un ultime cadeau qu'Hermione accueilli comme le dernier soin à appliquer sur la cicatrice irrégulière trônant sur son bras.
- Merci…
- Allez. Sourit-elle. Allons vous rafraîchir avant votre dîner. Votre travail avec le Maître aura beau vous priver de sommeil, je refuse qu'il vous voie avec de tels cernes !
- Encore en retard… Fit remarquer Voldemort.
Attablé à sa place habituelle avec livre de Dynasties Vampiriques en main, le Mage regarda son élève s'avancer face à lui. En retard de plusieurs minutes, Hermione soupira à son œillade mécontente et s'efforça de presser le pas pour le rejoindre. Bien entendu, il avait fallu que Narcissa insiste pour lui faire essayer une nouvelle paire de talon ce soir. De quoi la ralentir dans sa course déjà fastidieuse et provoquer des réprimandes. Aussi c'est les pieds en feu et les chevilles crispées qu'elle réussit à prendre place, une grimace douloureuse plaquée sur le visage.
- Veuillez m'excuser. Ça ne se reproduira plus…
- Tu l'as déjà hit hier.
Les lèvres pincées, la jeune femme s'efforça de ne pas répondre à sa remarque et déglutit. A quoi bon avoir une Marque ensorcelée quand un Maître exaspérant pouvait vous rappeler vos fautes ? Gênée, elle sentie son regard aiguisé la détailler avec attention et frissonna à l'éclat rougeoyant de ses pupilles. Le teint pâle et les joues creusées, Voldemort ne manqua de remarquer sa fatigue après leur nuit de documentation active. Pourtant et bien qu'elle tentât de le cacher, le léger tremblement de sa main gauche éveilla sa curiosité, accentué par la noirceur exagérée des veines de son bras. Un détail révélateur et intriguant, qui fronça ses sourcils dans un grondement sourd. De toute évidence, sa chère Initiée n'avait pas mis plus de 20 heures avant de manquer à sa parole.
- Alors. Dit-il brusquement. Comment était ta journée ?
- Très… instructive. Répondit-elle du bout des lèvres.
- Vraiment ?
C'était le moins qu'elle puisse dire. Non contente d'apprendre qu'elle devrait honorer les rites archaïques des Initiés d'Honneurs et danser à un bal, elle avait eu la joie de jauger l'effectivité de sa marque. De quoi lui faire amèrement regretter le récit de ses malheurs et la « promesse » qu'elle avait faite. Néanmoins et outre sa colère, Hermione ne mentait pas. Ce qu'elle avait appris sur les Sirènes dépassait de loin tout ce qu'elle avait pu imaginer. De quoi apaiser les frissons encore douloureux de son bras un court instant et détendre sa grimace désormais imprimée sur ses joues.
- Il semblerait que le peuple des sirènes soient bien plus mystérieux que nous le pensions.
- Tient donc ?
- Je doute vous apprendre quoi que ce soit mais j'ai découvert qu'elles avaient pour rituels d'inscrire leurs légendes sur les parois des fonds marins.
- Les Ecrits Immergés. Déclara-t-il. Une vielle habitude aux aires de légendes marines qui existe cependant belle et bien.
- Avez-vous pu les lire ?
- Merlin non ! S'exclama-t-il amusé. Je suis peut-être tout puissant mais j'ai moi-même des limites. Les sirènes sont vicieuses, méfiantes, perfides et particulièrement inhospitalières. Je n'ai eu que très peu de contact avec leur espèce et m'épargnerait volontiers d'en rencontrer d'autres. D'ailleurs je doute que quiconque ai jamais eu la chance de lire le moindre de leurs écrits.
Songeuse, Hermione réfléchit à ses mots. Il était vrai que les sirènes n'étaient pas réputées pour leur amabilité. A vrai dire, elles n'étaient que très peu aimées dans le Monde Magique. Un comble dans la mesure où les Moldus ne voyaient en elles que des femmes poissons à la beauté féérique.
- Je ne peux cependant m'empêcher de penser que c'est une piste intéressante. Dit-elle. Les sirènes ont une espérance de vie de plusieurs siècles et des pouvoirs encore méconnus à ce jour !
- C'est exact. Mais leurs contacts avec les sorciers sont rares et peu courtois. Grimaça-t-il. Je doute que l'une d'elle accepte de se faire mettre en bocal pour nous compter les légendes de son peuple.
L'absence de diplomatie dans sa réflexion ne n'étonna pas. De toute évidence, Voldemort ne souhaitait pas s'encombrer d'une approche progressive et pacifique à leur encontre. Pourtant et si ses suppositions étaient exactes, il se pourrait bien qu'ils n'aient que peu d'autres choix en la matière.
- Et pour ce qui est des vampires ? S'enquit-elle.
- Une race plus détestable encore. Grimaça-t-il. Leurs codes sont étranges, leurs modes de vie archaïques, leurs rituels barbares et leur sympathie parfaitement inexistante. Autant tenter notre chance avec les poissons cannibales du Lac Noir…
- Je doute que ce terme soit politiquement correct. Fit-elle remarquer amusée.
- Les sirènes sont bien trop susceptibles… Gronda-t-il en levant les yeux au ciel.
- Plus que vous ?
Soudainement muet face à elle, Voldemort se figea de stupeur devant sa moquerie à peine déguisée. Décidément, leur petite discussion de la veille n'avait pas su calmer l'ardeur de son impertinence. Pourtant et loin de souhaiter châtier son insubordination, Voldemort laissa échapper un sourire. Personne encore n'avait encore eu l'audace de lui faire pareille réflexion ; un détail qui aurait probablement dû l'enrager mais qui au contraire, le fit doucement ricaner. Après un mois de travail intense, il avait eu le temps d'observer une Hermione studieuse et déterminée. Pour autant, il n'avait laissé que peu de place à la témérité de son caractère. Un aspect encore inconnu de sa personnalité, qui bien qu'il s'affirmât peu à peu au fil des jours, attisait davantage son intérêt.
- Allons très chère… Restons courtois pour notre dîner. Je ne voudrais pas que tu réitères ta désagréable expérience de tout à l'heure. Dit-il malicieusement tout en jetant un regard à son bras.
- Loin de moi cette idée. Répondit-elle innocemment.
- Bien, dans ce cas mangeons.
Sans rien ajouter, le Mage se détourna dans un air faussement outré et fit apparaître leur repas. Mettant un terme à leur discussion, un dédale de plats divers apparu devant eux. Pourtant et bien qu'elle contienne son fou rire, Hermione ne put s'empêcher de sourire devant sa grimace. Nul doute qu'il désespérait de voir son éducation primaire prendre le dessus sur les enseignements de Narcissa. Ainsi ils commencèrent à manger en silence, pourtant et bien qu'elle redoutât ses réponses, la jeune femme ne put contenir ses questions plus longtemps.
- Est-il vrai que… que vous souhaitez organiser un bal ? Demanda-t-elle en découpant minutieusement sa viande.
- C'est une possibilité, en effet. Pourquoi cela t'intéresse-t-il ?
- Et bien, je… j'avoue que cela m'a surprise. Je ne suis pas familière de ce genre d'évènement.
Intrigué devant le soudain frémissement de sa voix, le Mage Noir haussa un sourcil curieux. Loin d'être aveugle au tremblement de sa fourchette, il la vit tenter de le dissimuler dans un raclement de gorge distrait. Une tactique vaine et surtout… révélatrice.
- Cela t'effraie-t-il ? Demanda-t-il dans un sourire malicieux.
- Non ! Répondit-elle brusquement. Pas… pas le moins du monde.
Mensonge et déni. Un combo royal en une seule soirée qui fascina Voldemort dans un sourire narquois. De toute évidence, le mystère de la douleur de sa marque n'en était plus un. Sa chère Initiée d'Honneur redoutait un bal. Elle, Hermione Granger, une guerrière de Gryffondor aux capacités rares, redoutait un bal… bon dieu, l'ironie était belle. Pour ne pas dire exquise. Pourtant il ne dit rien et porta son verre à ses lèvres dans un fou rire contenu. Décidément cette jeune femme était un paradoxe ambulant.
- Bien… Sourit-il. Dans ce cas tu seras heureuse d'apprendre qu'un bal est effectivement prévu. La date n'est pas encore fixée mais je ferais de mon mieux pour ne pas te faire trop languir.
Les joues roses, Hermione senti la brûlure de sa marque se raviver à mesure que son cœur s'emballa sous son regard d'ébène. Grand dieu… qui espérait-elle tromper ? Elle ne voulait pas y aller. Elle ne voulait pas y danser ! Et voilà que Voldemort la pensait impatiente d'y participer ?! Quelle idiote !
- C'est… très aimable à vous. Dit-elle dans un sourire crispé. Mais je… je m'en réjouie surtout pour ma Tutrice.
- Ah oui ?
- Oui, elle… elle a hâte de voir les fêtes et autres réceptions reprendre leurs cours.
- Je n'en doute pas. Dit-il. Narcissa est une sorcière du monde. Une femme de haut rang, à l'esprit vif et aux principes exemplaires. Je suis heureux de constater qu'elle te prépare d'avance à tes prochaines obligations.
Les mains figées au-dessus de son assiettes, Hermione ne trouva pas la force de répondre. « Ses prochaines obligations ». Au pluriel ? Ainsi… ainsi il y aurait plusieurs bals ?! Plusieurs fêtes ?! Oh Grand Dieu… elle était fichue. Car même si elle manœuvrait pour échapper à l'un d'eux, il y en aurait toujours d'autres. Elle était piégée. Dans sa panique grandissante, elle reposa ses couverts et déglutit amèrement. Si seulement il l'avait laissé pourrir dans ses cachots…
- Bien sûr. Dit-elle mal à l'aise.
- Il me semble pourtant que tu as déjà participé à un bal pendant tes études. Fit-il remarquer.
- Oh, ce n'était pas grand-chose… seulement le bal d'Hiver du Tournoi des Trois Sorciers.
- Avec qui y es-tu allé ?
- Victor Krum.
Surpris par sa réponse, le Mage approuva avec ferveur. Même s'il n'était pas fier que le Directeur de son Ecole, Igor Karkaroff ait trahit la moitié de ses mangemorts pour quitter Azkaban, les Krum restaient une famille de Sorciers puissants, revendiquant sans honte leur usage de la magie Noir. Un choix on ne peut plus acceptable, comparé à Potter et Weasley…
- Intéressant. J'ignorais que tu avais fréquenté les élèves de Durmstrang. Dit-il intrigué. Ils ont la réputation d'être ambitieux envers les dames.
- Oh non, je… je n'ai pas fréquenté Victor. Je… j'ai simplement accepté de l'accompagner.
Si ses bafouillages gênés la couvrirent de honte, ils firent rire Voldemort qui se délecta de la rougeur de ses joues.
- Allons Hermione, tu n'as pas à avoir honte de tes aventures de jeunesses. Et puis, soyons réaliste… c'est un bien meilleur parti que Ronald Weasley ! S'exclama-t-il. D'ailleurs, n'avais-tu pas une relation romantique avec lui ?
Les yeux écarquillés devant son ricanement amusé, Hermione ne trouva pas quoi répondre. Elle pouvait accepter d'être son élève, son initiée et même sa cavalière à un bal, mais parler de ses aventures de jeunesse… de sa relation avec Ron… avec lui ?! Non. Non, c'était au-dessus de ses forces. Aussi c'est plus livide qu'une morte que la jeune femme fixa son assiette pour ne pas tomber de sa chaise.
- Je… nous étions jeunes. Souffla-t-elle les dents serrés. D'ailleurs, c'était une erreur. J'y ai mis un terme presque aussitôt après votre victoire.
Et encore le mot était faible… Entre cris, larme et incompréhension, Ron avait catégoriquement refusé de croire que tous ses efforts étaient voués à l'échec. Pourtant Hermione n'avait su lui mentir. Elle avait confondu la tendresse de leur amitié avec la frénésie d'un amour naissant. Or il n'en était rien… Aussi, c'est honteuse et mal à l'aise qu'elle avait repoussé ses avances et regretté leur baiser. Blessé, Ron avait mis plus d'un an à accepter sa décision et plus de six mois supplémentaires avant de lui reparler. Des instants de conflits et de silence, qui avaient marqué un grand froid dans leur relation. Ayant perdu leur complicité, Hermione avait dû faire face à un Ron froid, distant et rancunier. De quoi dégrader le peu de stabilité qu'ils avaient vainement tenter de préserver.
- Ravi de l'apprendre. Dit le Mage soulagé. Je peux tolérer ton ascendance de Né-Moldu mais les Weasley… c'est au-dessus de mes forces.
Ne trouvant même plus le courage d'avaler ses légumes, Hermione déglutit avec difficulté. Décidément, parler de sa vie sentimentale avec le Seigneur des Ténèbres était de loin l'épreuve la plus incongrue et déplaisante de sa journée…
- Toujours est-il que tu n'auras malheureusement pas la liberté de choisir ton cavalier lors du bal. Poursuit-il. Comme Narcissa a dû te l'expliquer, une Initiée d'Honneur se doit de respecter certaines traditions.
- Oui, je suis au courant. Souffla-t-elle. Je… je ferais de mon mieux pour ne pas vous faire honte.
Si ses angoisses l'avaient amusé jusqu'à présent, Voldemort ne put s'empêcher de grimacer devant l'évidence de son malaise. Elle redoutait ce bal, non pas pour les danses et autres festivités, mais pour les regards, ragots, murmures et critiques qu'elle ne manquerait pas d'essuyer dès son entrée. Aussi, le Mage reposa son verre et la regarda d'un air songeur. Bien que l'imminence de l'extinction de leur magie lui ai forcé la main, il n'avait pas fait d'elle son Initiée pour la voir devenir la risée du Monde Sorcier. Hermione Granger était une sorcière à l'ascendance impur et aux principes naïfs… mais une sorcière d'exception. Une vérité qu'il avait bien l'intention de prouver au reste du monde.
- N'ait aucune crainte Hermione... Dit-il d'un ton plus doux. Je ne suis pas idiot. Je sais d'avance que tu devras supporter la défiance de mes fidèles ainsi que les remarques insidieuses de mes Ministres, mais je peux t'assurer qu'aucun écart de conduite ne leur sera toléré.
Surprise par sa soudaine sollicitude, la jeune femme le regarda le souffle court. Il était évident que Voldemort ne laisserait pas ses mangemorts faire d'esclandres ni même remettre en cause sa nomination, mais l'entendre le dire la soulagea plus qu'elle n'aurait pu l'imaginer. Elle serait à son bras, constamment avec lui et sous son implacable surveillance. Un effroi pour beaucoup mais une aubaine pour elle, qui bien qu'elle en soit intimidée, la protègerait des quelques mangemorts qui auraient l'audace de l'approcher.
- Merci. Souffla-t-elle reconnaissante.
- Bien entendu, j'espère que tu as consciences des enjeux d'un tel évènement. J'attendrais de toi un comportement exemplaire. Dit-il plus gravement.
- Oui bien sûr. Assura-t-elle. Narcissa a déjà prévu de réorganiser nos leçons afin que je sois prête.
- Savoir danser et s'habiller est une chose mais… tu dois comprendre que ton allégeance sera déterminante. Insista-t-il.
- Mon allégeance ?
- Tu es Hermione Granger. Dit-il avec force. Un lion parmi les serpents ! Mes fidèles ne seront pas assez bêtes pour t'attaquer directement devant moi, mais ils chercheront à te mettre mal à l'aise. Ils te parleront des combats, de Potter, de la résistance et te décriront avec fierté comment la plupart de tes amis ont été tués. Ils voudront te pousser dans tes retranchements et te pousser à la faute. Quitte à risquer ma colère, ils voudront prouver au monde que tu n'es qu'une Sang de Bourbe inculte et inapte à la vie en Société.
Ebranlée par l'horreur du scénario qui l'attendait, Hermione sentie un vertige la faire tanguer sur sa chaise. Il disait vrai. Chacun d'eux se ferait une joie de lui rappelait d'où elle venait et ce qu'ils lui avaient fait. Et pourtant, c'était inévitable. Aussi, la jeune femme prit une grande inspiration et couvrit sa marque encore bouillante. Elle ne pourrait pas y échapper. Jamais. Mais elle pouvait le surmonter. Elle avait survécu à la guerre, à la fuite, à la torture et à la faim ! Elle avait déjà connu le pire de ce monde ! Un bal n'y changerait rien. Une danse n'y changerait rien ! Et leurs manigances non plus… Les joues rouges d'une soudaine colère, ses poings se resserrent autour de ses couverts, incrustant les reliefs de l'argenterie contre sa peau. Qu'ils étaient fourbes, cruels et vicieux… une bande rat incapable de réfléchir par eux même et mendiant l'attention de leur Maître. Ils n'étaient rien ! Ils ne valaient rien ! Et pourtant, ils allaient tenter de l'humilier. De la rabaisser à ce qu'elle n'était pas et ne serait jamais !
- Vous avez raison… mais je ne me laisserais pas déstabiliser par vos mangemorts. Cingla-t-elle subitement. Si je dois supporter leurs récits infâmes et manipulations odieuses, alors soit ! Qu'ils essaient. Je serais prête à leur répondre.
Heureux, Voldemort frémit devant la férocité de son regard. Elle était prête à se battre ; un détail qui le fit franchement sourire devant elle. Ce bal serait à n'en pas douter, le plus divertissant de tous.
- Méfie-toi. Tu commences à parler comme une véritable Initiée. Dit-il amusée.
- Pauvre de moi… Railla-t-elle. Malgré toute ma mauvaise volonté, il semblerait que vos enseignements portent leurs fruits !
- Et oui très chère, inutile de lutter. Je gagne toujours.
Un nouveau chapitre, avec de nouveaux projets ;) l'histoire avance lentement mais sûrement et croyez moi, les prochains chapitres seront mouvementés alors restez à l'affût !
A très vite :D
