- Oh Maîtresse… je suis si heureux de vous voir enfin manger avec appétit ! C'est miraculeux !

- Je ne te le fais pas dire. Sourit Hermione en avalant un bout de pastèque. Je sais que ces dernières semaines ont été un peu… compliquées, mais il est temps que je me reprenne en main. Après tout je suis une Initiée. Je ne peux plus rester enfermée.

Aux anges, Arnis sautilla brusquement devant elle et s'extasia dans un cri de joie. Enfin ! Après six longues semaines de travail acharné, de folie et de potions douteuses, elle se décidait à sortir. Elle se décidait à reprendre sa vie !

- Oh… oh Maîtresse, c'est merveilleux ! Je m'en vais prévenir votre Tutrice sur le champ !

- Non, attend ! S'exclama-t-elle subitement. J'ai… j'ai besoin de ton aide avant.

- Tout ce que vous voudrez !

- Je… je ne suis pas vraiment présentable. Je… je ne veux pas que les Malfoy me voient dans cet état.

Et encore le mot était faible. Aussi maigre qu'à son arrivée au château, Hermione avait bien failli tourner de l'œil devant son reflet. Méconnaissable, ses cernes semblaient tatoués sur sa peau, son teint aurait pu concurrencer celui de Bellatrix tandis que ses cheveux n'étaient plus qu'à un sac de nœud dressé sur sa tête. Elle ne ressemblait plus à la pupille que Narcissa avait quitté. A vrai dire, elle ne ressemblait plus à rien ! Et l'idée de se présenter à elle dans cet état… de n'afficher que les restes décharnés de la femme qu'elle était, la couvrait d'une honte qu'elle n'avait jusqu'alors jamais connue. Elle ne voulait pas l'effrayer. Elle ne voulait pas voir la déception de tous ses efforts ruinés ! Mais plus encore… elle ne voulait pas leur faire pitié. En particulier à Lucius et Drago. Malgré leurs responsabilités, leurs postes et leurs devoirs, ils avaient quitté le Ministère et étaient restés à Poudlard. Ils étaient restés pour la surveiller, la soutenir et l'aider… Et même si elle n'avait pas encore eu l'occasion de le leur dire de vive voix, ils avaient réussi. Savoir qu'ils étaient là quelque part dans le château, à s'inquiéter et à prier pour elle, l'avait motivé. Plus puissante que toutes les potions du monde, leur présence avait attisé le feu de sa détermination ! Elle voulait les sauver de ce fléau, eux plus que quiconque en ce monde ! Et elle avait réussi. Grace à eux, elle avait réussi… Aussi, elle ne pouvait supporter l'idée de les décevoir après tant d'efforts. Elle voulait qu'ils soient fiers. Qu'ils soient heureux ! Mais aucun d'eux ne le serait devant l'image d'une sorcière rachitique en pyjama. Non, elle voulait leur faire honneur ; exactement comme eux lui avaient fait honneur. Elle voulait dignement leur présenter leur nouvelle fille.

- Est-ce… tu accepterais de m'aider à me préparer ? Demanda-t-elle alors gênée.

Bouche bée, Arnis haleta subitement devant elle. Préparer l'Initiée du Seigneur des Ténèbres ? C'était… c'était un honneur. Que dire ! C'était le plus grand honneur de sa vie ! Jamais on ne lui avait confié une telle tâche ! Une telle responsabilité ! Et pourtant, c'est d'une voix douce et d'un regard tendre qu'elle lui demandait son aide. A lui. Arnis, l'Elfe de Maison. Frôlant la crise cardiaque, la petite créature tituba d'émotion et balbutia sans parvenir à respirer.

- Oh Merlin… oui, je… c'est avec plaisir !

- Vraiment ?

- Oui ! S'écria-t-il exalté. Bien sûr ! Je ferais tout ce que vous voudrez !

Emut, Hermione sourit et respira un grand coup. Après six semaines à ne porter qu'un short et un t-shirt, elle n'était même plus sûr de savoir marcher avec un corset. Mais elle ne pouvait pas se défiler. Les Malfoy l'attendaient depuis déjà trop longtemps…

- Bien ! Dans ce cas c'est décidé. Mais puis-je te demander un dernier service ?

- Bien sûr !

- Fais savoir à Lucius et Narcissa que leur fille se joindra à eux pour dîner. Déclara-t-elle avec force. Ce soir, notre nouvelle famille sera enfin au complet.


Le souffle court, Hermione se figea devant la porte en acajou qui se présenta devant elle. Cachant le tremblement de sa main dans la couture de sa robe, elle déglutit avec peine et sentit son cœur l'assourdir de ses battements frénétiques. Seigneur… elle n'avait pas été aussi nerveuse depuis son Bal d'Initiation. Et pourtant, ce soir les enjeux étaient bien grands ; car ce soir et pour la première fois depuis longtemps, elle retrouvait enfin une vie. Une vie normale. Une vie simple. Une vie où elle ne resterait plus enfermée dans sa bibliothèque. Une vie où elle serait aimée et écoutée… une vie de famille. Mais elle ne pourrait pas y arriver avant d'avoir accompli une dernière épreuve. Peut-être la plus difficile de ses derniers mois, mais la plus essentielle. Aussi, Hermione inspira avec force et contrôla une dernière fois son allure. Elle devait être parfaite. Elle devait être digne, belle et irréprochable ! Elle devait lui montrer qui elle était vraiment au-delà de la folle qui s'était volontairement exilée. Elle devait lui montrer qu'il avait eu raison de l'adopter.

- Entrer.

La voix de Lucius résonna avec force depuis son bureau, hérissant l'échine de la jeune femme dans un frisson. Ils ne s'étaient pas vus depuis le bal… depuis près de six semaines ! Et pourtant il n'avait jamais quitté le château. Lui. Lucius. Le seul homme sur qui elle n'aurait jamais parié… le seul homme qu'elle n'aurait jamais imaginé être impatiente de rencontrer… le seul homme dont la voix la pétrifia sur place. Que dirait-il ? Que penserait-il ? Serait-il heureux ? Ou mécontentent ? Aurait-il honte d'elle ? De son comportement ? De son allure ? Elle l'ignorait mais redoutait déjà chacune de ses questions. Narcissa lui avait mainte fois prouvé qu'elle l'aimait. Drago avait fait table rase du passé et s'était engagé à la protéger. Mais lui ? Il ne lui avait encore rien dit. Rien promis. Peut-être détestait-il l'idée de l'avoir adopté ? Peut-être avait-il seulement accepté sur ordre de son Maître ? Peut-être la méprisait-il toujours ?! Après tout, elle ne lui avait encore rien montré de sa personnalité qui vaille la peine d'être apprécié. Et pourtant il était resté… alors que rien ne l'y obligeait, il était resté ! Cela voulait forcément dire quelque chose ! Et c'est avec cet espoir qu'Hermione trouva le courage d'abaisser la poignée.

Assis à son bureau de travail, la tête penchée sur ses dossiers, Lucius ne la vit pas immédiatement. Sûrement s'attendait-il à voir Drago ou Narcissa… aussi, elle entra sans rien dire et attendit en silence. Plus fatigué que dans son souvenir, elle le vit griffonner quelques notes d'un coup de poignet agacé, avant de soudainement soupirer. A croire que les formalités bureaucratiques du Ministère savaient désabuser n'importe quel sorcier. Pourtant il ne suffit que d'un bref regard à Lucius pour brutalement se figer. N'osant pas croire en ce qu'il voyait, il lâcha sa plume dans un spasme surprit et ouvrit la bouche sans trouver quoi dire. Il devait rêver. Ça ne pouvait pas être vrai, il… il devait forcément rêver ! Et pourtant… elle était là. Elle. Hermione. Devenait-il fou ? Hallucinait-il ? Il le crut. Car même s'il avait été informé de son intention de se joindre à eux pour dîner, il n'était pas parvenu à l'imaginer. Ils avaient tant espéré la voir sortir de cette bibliothèque ; tant attendu qu'elle reprenne ses esprits ! Et c'était fait. Tel un miracle, leurs prières avaient été exhaussées. Tel un rêve, la fille qu'il n'avait pas encore eu la chance de connaître, lui revenait.

- Bonsoir Lucius. Souffla-t-elle dans un sourire timide.

Ahurit, le Malfoy s'avança sans rien dire devant elle. Comme s'il la rencontrait pour la toute première fois, il la détailla sous toute les coutures, à la recherche du moindre relief, du moindre scintillement, de la moindre preuve qu'elle n'était qu'un mirage. Et pourtant il ne trouva qu'elle. Hermione. L'initiée du Seigneur des Ténèbres. Sa fille. Vêtue d'une élégante robe noire aux manches évasées, il se surpris à la voir en bonne santé. Le teint pâle mais reposé, elle arborait des joues roses, des lèvres rouges, un chignon bouclé et un regard étincelant. Une image de beauté et de simplicité, qui le bouleversa presque autant que sa présence à ses côtés. Oui… il ne rêvait pas. Après des semaines d'attente, elle était enfin là.

- Hermione… dit-il du bout des lèvres.

Ne parvenant pas à soutenir son regard, la jeune femme déglutit. Et dire qu'elle l'avait haï… qu'elle l'avait méprisé et maudit. Et pourtant, elle se tenait là devant lui, morte de honte à l'idée de l'avoir contraint à fuir ses obligations au Ministère. Morte de honte devant sa surprise, son émoi et ses doutes. Morte de honte devant son nouveau père… aussi, elle s'inclina subitement devant lui. Un geste qui le désarma plus encore.

- Avant que vous ne disiez quoi que ce soit, je tiens… je tiens à vous présenter mes excuses. Déclara-t-elle subitement en fixant ses chaussures. J'ai manqué à tous mes devoirs en me comportant comme je l'ai fait. J'ai causé de l'inquiétude, de la peur et du désarroi et n'ai pas honoré le cadeau que vous m'avez fait en acceptant de faire de moi un membre de votre famille. Et… pour cela Lucius, je tiens à m'excuser. Je veux que vous sachiez que je n'ai jamais eu l'intention de vous blesser, vous, Drago et Narcissa et que je comprendrais votre colère et déception à mon égard.

Désemparé, le Malfoy resta choqué devant elle. Des excuses… elle lui présentait ses excuses ?! C'était plus que ce qu'il avait attendu. Plus que ce qu'il avait espéré ! Aussi, il ne trouva pas quoi dire devant sa révérence et balbutia dans son trouble. Il n'avait que peu de fois eu le déplaisir de la croiser avant la guerre. En ce temps, il ne connaissait d'elle que son pédigré, sa maison, ses amitiés avec Potter et son insupportable tempérament. Mais la guerre était passée, la transformant alors d'élève prodigue à fugitive, jusqu'à ce que son véritable potentiel se révèle enfin… jusqu'à ce que Voldemort la nomme comme Initiée et qu'il lui soit offert la possibilité de l'adopter. Il mentirait s'il disait qu'une telle demande ne l'avait pas initialement outré. Il n'était pas le bienfaiteur des sangs de bourbe graciés ! Ou un chenil pour bêtes égarées ! Mais on ne lui avait pas offert le choix de refuser. Bien malgré lui, il avait dû se faire à l'idée que son nom, sa réputation et sa fortune devraient être associé à cette rebelle ! Cette sang de bourbe ! Cette femme dont la nomination n'avait pas le moindre sens à ses yeux ! Et puis, il l'avait rencontré au bal... Il l'avait observé danser, entendu parler, écouté chanter et avait dû se rendre à l'évidence. L'enfant impure, l'adolescente bornée, la guerrière du Trio d'Or qu'il avait tant détesté… n'existait plus. Ne restait que cette sublime créature de savoir, d'élégance et de fierté. Cette femme au regard franc et au sourire parfait. Cette Initiée au potentiel magique inégalé… oui. Il ne pouvait plus en douter. La Hermione Granger qu'il avait connu ne se serait jamais incliné devant lui pour implorer son pardon. La Hermione Granger qu'il avait connu ne se serait jamais donné la peine de se préparer avant de se présenter à lui.

Mais Hermione Malfoy… sa fille… si.

Désormais, il comprenait l'amour que Narcissa lui portait.

Désormais, il comprenait l'amitié fraternelle que Drago éprouvait…

Car lui-même ne put contenir sa fierté face à elle. Une fierté qu'il n'avait jusqu'alors ressenti qu'envers son fils, mais qui l'étreignit d'une force qui le laissa sans voix. Elle portait son nom. Cette magnifique femme, cette incroyable sorcière, cette digne Initiée portait son nom... Un fait qu'il ne réalisa pleinement qu'à cet instant et qui le ravit d'une joie qu'il n'avait encore jamais connu. Aussi, Lucius ne put la laisser agenouillée plus longtemps. Saisissant ses mains tremblantes d'anxiété, il la releva lui-même dans un soupir comblé et sourit franchement face à elle. Il s'était attendu à tout... mais à pas ça. Pas à tant de perfection.

- Hermione… je n'éprouve ni colère, ni déception à votre égard. Dit-il.

- Vraiment ? Demanda-t-elle sans y croire.

- Il est vrai que votre attitude était quelque peu… déroutante et particulièrement éprouvante. Admit-il. Mais de ce que je sais, le Maître vous a donné une mission. Si vous êtes devant moi ce soir, j'imagine que vous l'avez accompli.

Accomplit était un grand mot, mais elle avait réussi là où elle n'avait cessé d'échouer. Un exploit plus grand encore qu'il ne pourrait jamais l'imaginer.

- Oui. Sourit-elle. J'ai réussi. Mais je n'aurais pas dû vous ignorer.

- Vous avez fait ce que vous estimiez être nécessaire pour honorer votre devoir envers notre Maître. Et pour cela, je ne peux que vous témoigner mon respect.

Ahurit, Hermione sentit son souffle se couper. Il ne la méprisait pas. Ne la congédiait pas. Ne la détestait pas ! Il… il la respectait. Lui, Lucius Malfoy, l'homme le plus sévère, guindé et étriqué de Grande-Bretagne… la respectait. Par Merlin, est-ce possible ?

- Mais… vous êtes resté alors que le Ministère vous réclamait. Dit-elle. Vous avez toutes les raisons du monde de m'en vouloir.

- Très chère, je suis resté parce que ma famille avait besoin de moi. Parce que ma… fille avait besoin moi. Et en toute honnêteté, je crois bien que Narcissa et Drago auraient fini par rameuter tout le pays à votre porte si je n'étais pas intervenu.

Retenant un fou rire, Hermione regarda leurs mains jointes un court instant et soupira dans un nouveau bonheur. Alors c'était possible… c'était possible d'être véritablement respecté, d'avoir une famille en soutient et de ne pas être abandonné. C'était possible d'être aimé. La jeune femme sentit un sanglot émut enserrer sa gorge. Elle avait tant redouté leur confrontation, son jugement ou son mépris, qu'elle n'avait pas osé imaginer une autre réaction de sa part. Et pourtant, elle ne lut rien d'autre dans ses yeux que de la fierté.

- Merci. Souffla-t-elle reconnaissante. Sincèrement je… je ne saurais comment vous exprimer ma profonde gratitude.

- Commençons par aller manger. Sourit-il. Il me semble que Narcissa et Drago meurent d'impatience de vous retrouver.

- Pensez-vous qu'ils seront en colère ? S'inquiéta-t-elle.

- Narcissa risque de pleurer, quant à Drago… et bien, j'imagine qu'il vous réprimandera pendant quelques années.

Si ce n'était que ça, elle serait heureuse de le supporter. Car aussi étonnant que cela puisse paraître, ses chamailleries et blagues enfantines lui avaient manqué.

- Dans ce cas, allons y.

Tout en lui offrant son bras, Lucius la guida hors de son bureau et ils échangèrent un sourire. Ils ne se connaissaient peut-être pas bien, n'avaient que de mauvais souvenirs à partager et étaient encore réservés, mais tous deux avaient néanmoins une certitude. Ce dîner serait le plus agréable de tous.


- Par Merlin, tu ne me pardonneras donc jamais ?! S'exclama Hermione dans un fou rire.

- Laisse-moi réfléchir. Tu t'es enfermée pendant six semaines, et je n'ai eu droit qu'à une pauvre lettre comme lot de consolation… A ton avis ?

Le bousculant d'un coup d'épaule, Hermione soupira devant le sourire malicieux de Drago. Décidément, Lucius avait vu juste… il n'avait pas fini de la sermonner. Pour autant aucune animosité n'habitait les traits du jeune homme. Plus heureux que jamais à son entrée dans leur salle de dîner, c'est sans gêne qu'il s'était précipité pour l'enlacer. Une étreinte forte, émouvante et profonde dans laquelle elle avait pu ressentir son soulagement et son bonheur aussi clairement que sa peur… une peur sourdre, muette et pourtant palpable dans le tremblement nerveux de sa voix. La peur de la voir de nouveau disparaître s'il se risquait à la lâcher. Mais elle n'avait pas l'intention de s'enfuir. Au contraire, c'est plus soulagé que jamais qu'Hermione l'avait laissé la soulever dans les aires avant d'enlacer Narcissa dont les larmes dévalaient déjà ses joues. Affligée par ces semaines d'angoisses, c'est pâle et fébrile qu'elle avait serré sa pupille dans les soubresauts de ses sanglots. La pauvre avait tant attendu qu'elle sorte de cette bibliothèque… tant redouté qu'il lui arrive malheur derrière ces portes closes, qu'elle aussi ne voulut plus la laisser partir. Inspirant son parfum et détaillant son visage sous toutes les coutures, sa Tutrice s'horrifia de la finesse de sa taille et des creux de ses joues. Et encore, elle ne l'avait pas vu sous tout son maquillage. Mais ces quelques détails n'avaient pas d'importance. Ils étaient tous là… tous réunis. Et personne ne pourrait jamais leur enlever ça.

Aussi, c'est plus heureux que jamais qu'on leur fit servir leur repas et que la soirée s'écoula. Loin des dînez austères et silencieux auxquels Hermione s'était attendue, ils avaient ri, échangé, partagé et savouré plus de trois heures de discussions animées et sourires ravis. Désireux de l'informer de tout ce qu'elle avait manqué, Lucius lui raconta en détail chaque nouvelle mesure du Ministère ; Narcissa lui fit remplir son assiette trois fois d'affilées et Drago ne cessa de lui poser mille et une questions sur ses travaux. Des instants légers, simples et sincères, dont la jeune femme remercia le ciel. C'était plus que ce qu'elle avait espéré. Plus que ce qu'elle pensait même mériter ! Et pourtant jamais elle n'avait passé plus agréable dîner. Contrairement à ce qu'elle avait toujours cru, les Malfoy n'avaient rien de la famille stricte, protocolaire et sévère qu'elle s'était imaginée. Ils avaient leurs valeurs, leurs statuts et habitudes… mais n'étaient pas des monstres. Une évidence qui l'avait ému devant les regards heureux de Narcissa, sourires fiers de Lucius et rires légers de Drago. Ils étaient une famille. Ils étaient heureux. Et aujourd'hui, elle aussi faisait partie de ce tableau. Elle aussi faisait partie de leur bonheur.

- J'imagine que toutes les excuses du monde ne suffiraient pas. Dit-elle amusée.

Esquivant un sourire, le jeune homme soupira devant ses battements de cils enfantins et la laissa s'accrocher à son bras. Par Merlin, les Dieux ne lui avaient pas offert la plus facile des sœurs. Et pourtant il n'en aurait voulu une autre pour rien au monde. Certes, ces dernières semaines avaient été éprouvantes… et oui une part de lui, lui en voulait de s'être exilée loin d'eux. Mais jamais sa colère ne pourrait surpasser la joie qu'il avait de la retrouver. Aussi, il feignit un air contrarié, avant de subitement les faire assoir sur les marches menant aux dortoirs.

- Continue pendant quelques semaines et je t'enverrais une lettre pour t'informer de ton avancé. Dit-il malicieux.

- C'est mesquin ! S'exclama-t-elle outrée.

- Pas autant que toi !

- Tu exagères…

- Dis celle qui s'est enfermée pendant…

- Ça va, ça va ! L'interrompit-elle dans un fou rire. J'ai compris, je suis une affreuse bonne femme !

- C'est toi qui le dis, pas moi.

Lui écrasant le pied de son talon, Hermione lui tira la langue avant de laisser leurs rires résonner au milieu du couloir désert. Un court instant innocent et enfantin pendant lequel Poudlard sembla aussi vivant qu'à l'époque où ils y étaient étudiants. Un court instant de bonheur qui n'était malheureusement qu'illusion. Car aussi belle que soit cette idée, ils n'étaient plus des enfants… aussi, ils s'essoufflèrent rapidement dans le nouveau silence des lieux et regardèrent le corridor avec nostalgie. Si on leur avait dit en ce temps qu'ils finiraient par rire ensemble, assis sur les marches des dortoirs après un dîner de famille… Par Merlin, ils se seraient étouffés sur place. Et pourtant c'était vrai. Ils étaient là. Les deux ennemis jurés, réunis là où tout avait commencé.

- Plaisanterie à part… je suis sincèrement désolée si je t'ai blessé Drago. Souffla-t-elle du bout des lèvres. Je me suis laissée dépasser par la mission qui m'a été donné.

- Je comprends.

- Vraiment ?

Oui. Même s'il haïssait l'admettre après l'avoir sermonné toute la soirée, il comprenait pourquoi elle avait agi ainsi. Peut-être même plus qu'elle ne pouvait l'imaginer ; et pour cause, lui-même l'avait déjà vécu.

- Quand le Maître m'a… m'a ordonné de tuer Dumbledore en sixième année j'ai… j'ai fait la même chose que toi. Avoua-t-il sans la regarder. Tu l'as vu par toi-même, je ne fréquentais plus les groupes de classes, je m'éloignais de mes amis et ne participais plus à aucune activité... J'avais l'impression que personne ne pourrait jamais me comprendre ; que j'étais seul et abandonné avec ce poids sur les épaules. Avec ce… fardeau dont je ne pourrais jamais me défaire.

Un fardeau dont la seule issue était la réussite… l'accomplissement de leur tâche, la réalisation de leur œuvres, l'exécution des ordres… Oui. C'était ça. Un fardeau exigeant, constant, palpable et étouffant dont l'appel résonnait avec force au cœur même de leur être. Un fardeau vicieux et affamé, qui dévorait chaque parcelle de leurs corps et de leurs esprits avant de les laisser vides, inertes et décharnés. Un fardeau qui à chaque instant, risquait de les voir s'écrouler dans un rire cruel et satisfait. Telle était leur croix à porter. Tel était le prix de leur loyauté…

- J'ignorais tout ça. Souffla-t-elle désolée.

- Ce n'est pas grave. A l'époque tout ceci me semblait… tellement grand. Tellement insurmontable ! J'étais terrorisé ! J'avais l'impression que mon crime était déjà tatoué sur mon front avant même d'avoir tenté quoi que ce soit !

- Pardon de te le dire mais... tu n'étais pas l'infiltré le plus discret du château. Railla-t-elle dans un sourire.

- C'est vrai. Je sais que Potter a eu des doutes dès le premier jour de la rentrée.

- Ça c'est parce que tu lui as cassé le nez dans le wagon du train. Rétorqua-t-elle.

- Il te l'a dit ?!

- A ton avis ?

Grimaçant à l'écho de ce souvenir, Drago soupira. Cela remontait à si loin… à si longtemps. Et pourtant ils eurent l'impression que c'était hier que l'on leur avait posé le Choipeaux sur la tête ; que c'était hier que leur voyage avait commencé. Mais le temps était passé. Les années aussi… pour finalement les laisser là, assis sur les mêmes marches qu'ils avaient piétinées pour aller en cours, devant les mêmes murs qu'ils avaient arpentés pour filer en douce, dans le même château qui avait été leur maison pendant plus de six longues années. Aussi, le Malfoy déglutit dans sa nostalgie et regarda Hermione fixer l'horizon du couloir. Espérait-elle y voir ses amis sortant de classe, comme au bon vieux temps ? Ou son Maître rentrant de mission, après six semaines de silence ? Il l'ignorait. Mais une tristesse habitait ses traits. Une tristesse qu'il en avait assez de la voir éluder derrière de beaux sourires.

- Toujours est-il que je ne t'en veux pas pour ce que tu as fait. Continua-t-il. Je t'en veux pour… la façon dont tu l'as fait.

- Comment ça ? Demanda-t-il.

- A l'époque, je n'avais pas de véritables amis ; seulement des fans et des groupies. Je ne me sentais pas en confiance pour parler de ma mission. Mais ce n'est pas ton cas aujourd'hui…

- Drago je…

- Tu m'as moi. Insista-t-il d'une voix plus forte. Tu as notre mère et tu as même un père ! Je sais que tes travaux avec le Maître sont confidentiels mais… tu aurais pu me parler. Tu aurais pu me confier tes doutes, tes peurs ou tes angoisses ! Tu aurais pu me laisser t'aider.

Surpris par la profondeur de son regard, Hermione déglutit dans un frisson et baissa la tête. Oui. Elle aurait pu. Et pourtant elle avait choisi de ne pas le faire. Telle une sentence, elle s'était faite prisonnière de cette cage de livres et de recherches, s'affamant et s'épuisant elle-même derrière ces portes closes. Pourquoi ? Elle l'ignorait… mais n'était pas bête. Le déni la rongeait encore, obscurcissant sa vue et embrouillant ses pensées. Elle ne voulait pas faire face à la réalité. Elle ne voulait pas faire face à ce qu'elle redoutait. Mais devant la sincérité de son regard et la douleur qu'il éprouvait face à elle, elle ne put plus l'éviter. Il se trompait s'il pensait ne pas compter à ses yeux… s'il pensait ne pas être digne de sa confiance ! Elle n'avait jamais voulu le blesser. Elle n'avait jamais voulu lui faire croire qu'il ne valait pas ses secrets ou sa loyauté. Mais elle avait eu peur. Peur de rester enfermée dans ce château avec lui et ses parents ; peur de ce que cela aurait impliqué ; peur de tout ce que cela aurait représenté ! Et pourtant… tout était déjà fait.

- Drago je… je sais que je t'ai fait du mal. A vrai dire je… je t'ai ignoré de la même façon que le Maître m'ignore depuis des semaines.

- Pourquoi ?! Demanda-t-il. Je sais que je ne suis pas le frère dont tu rêvais mais…

- Oh non, je t'assure ! Ça n'a rien à voir avec toi. S'exclama-t-elle subitement.

- Alors pourquoi ?

Se mordant la lèvre à mesure que l'hésitation la gagnait, Hermione serra les dents dans un soupir. Elle n'aurait pas la force de lui mentir. Pas sur ça… pas à lui… mais était-elle prête à le dire ?

- Parce que… si je t'avais parlé, si je m'étais confiée à toi et si j'étais restée avec vous… j'aurais fait partie de votre famille. Et cette idée me terrifiait. Avoua-t-elle la gorge serrée.

- Parce que nous étions ennemis… Comprit-il.

- Non. Non… au contraire !

- Je ne comprends pas.

Elle aussi avait mis de temps à le réaliser… à pouvoir mettre des mots sur le désarroi qu'elle ressentait et à accepter sa peine, sa douleur et le désespoir qui ne faisaient que croître dans son cœur. Du temps à véritablement embraser l'avenir que les Malfoy lui offraient.

- Faire partie de votre famille est un immense cadeau. Dit-elle. Sincèrement je… je ne trouverais jamais les mots capables d'exprimer mon bonheur et ma reconnaissance.

- Alors où est le problème ?!

- Mes parents, Drago. Là est le problème… mes vrais parents.

Surpris, le jeune homme ne sut que répondre. Bouleversée devant lui, il la vit se pincer les lèvres dans un sanglot désespéré et contenir ses larmes avec peine. Aussi, il n'eut plus aucune question en suspens. Ce n'était pas lui qu'elle avait rejeté… ce n'est pas ses parents qu'elle avait voulu fuir. Mais l'amour. L'amour qu'ils avaient à lui offrir, au détriment de celui qu'elle portait déjà dans son cœur.

Celui des Grangers.

Désemparé, Drago perçu sa douleur aussi clairement que si on l'avait poignardé en plein cœur. Il avait fait erreur depuis le début. Elle n'était pas triste… mais en souffrance. Résonnant dans son âme tel un gong infernal, la perte de ses parents, de sa chaire et de son sang, de toute sa vie passée à leurs côtés et de leur amour la hantait jour et nuit. Plus qu'une torture, c'était de l'agonie. Un véritable supplice qu'elle sentait grandir à mesure que son adoption se concrétisait, que ses liens avec les Malfoy se renforçaient et que leur famille se formait. Oui. Elle avait eu beau le cacher, c'était vain. Faire partie de leur famille la terrifiait. Cesser d'être une Granger la terrifiait. Renaître sous un nouveau nom la terrifiait... Mais comment aurait-elle pu leur dire ? Ils avaient tant fait pour elle, pour la rassurer et la mettre en confiance. Elle ne voulait pas se montrer ingrate ! Mais enfermer cette douleur la tuait à petit feu. Le souvenir de ses parents la tuait à petit feux ! Aussi et pour la première fois depuis longtemps, Hermione se laissa pleurer. Ne retenant ni ses larmes ni ses sanglots, elle pleura ses parents, son nom, leurs vies et tout ce qui était perdu aujourd'hui. Elle pleura comme elle l'aurait fait devant leur tombe… comme elle l'aurait fait pour oublier. Une image qui brisa le cœur de Drago dont le souffle se coupa devant sa peine. Quel idiot. Il avait tellement été aveuglé par son orgueil blessé qu'il n'avait même pas imaginé quels genres de tourments une adoption pouvait causer. Lui-même ne pouvait concevoir l'idée d'abandonner son nom pour un autre, alors elle ? Une rebelle dans l'âme, une Gryffondor entêtée et une guerrière obstinée ? Seigneur, autant demander à Voldemort de renier Salazar ! Et pourtant c'est ce qu'on lui avait imposé. Sans la consulter, ni même la préparer, ses parents avaient été rayé de son identité pour la laisser sous tutorat. Pour la laisser orpheline… et bientôt Malfoy.

Désarçonné, le jeune sorcier ne supporta plus de la voir ainsi. D'un geste fort il lui prit donc la main et l'attira contre lui pour la loger entre ses bras. Elle aurait beau avoir du mal à l'accepter, elle était sa sœur ! Et même s'il n'aurait jamais cru dire ça un jour, il refusait de la laisser dans cet état. Il refusait qu'elle pleure autre part que dans ses bras. Ils restèrent donc ainsi de longues minutes. Secoués par les soubresauts de ses sanglots, Hermione s'accrocha à sa chemise et tenta de reprendre son souffle. Elle n'aimait pas se sentir faible ou vulnérable… elle n'aimait pas dévoiler au monde ce qu'elle s'évertuait à cacher. Mais avec lui, elle n'en eut pas honte. Avec lui, elle se sentit en sécurité. A tel point que même quand son cœur s'apaisa, elle inspira son parfum et laissa sa tête reposer contre son torse. Un court instant de paix, malgré le feu qui lui dévorait la poitrine.

- Je suis désolé Hermione. Souffla-t-il. En toute honnêteté, j'ignorais qu'ils étaient encore en vie… le Maître nous a dit que tu n'avais plus de famille.

- Et c'est le cas. Grimaça-t-elle.

- Je… je ne comprends pas.

Se redressant dans un soupir, la jeune femme sentit ses cils baignés de larmes et les essuya d'un revers de poignet. Elle pouvait le faire… elle pouvait lui dire. De toute façon, ce n'était pas comme si ça allait changer quoi que ce soit. Une fois encore, tout était déjà fait.

- Je savais dans quoi je m'engageais quand la guerre a commencé. Je savais quels risques je prenais et quels… genres de peines j'encourais. Mais mes parents n'avaient rien demandé. Déclara-t-elle du bout des lèvres. Ils ne sont que de simples moldus. N'importe qui voulant m'atteindre, me faire chanter ou simplement se venger, pouvait les retrouver et les tuer. Alors j'ai décidé de les protéger… quitte à ne plus jamais les revoir.

Troublé, Drago la regarda fixer le vide avec douleur. Jamais il ne l'avait encore vu ainsi. Jamais il ne l'avait vu… déchirée.

- Je les ai obliété…

- Quoi ?! S'horrifia-t-il.

- Je n'avais pas le choix. L'existence de la magie, de Poudlard, de la guerre et même… de ma propre existence les mettaient en danger. Je ne pouvais pas prendre le risque de les voir pourchassés par ma faute. Ils… ils n'ont rien demandé !

- Mais Hermione c'est…

- Irréversible. Je sais. Dit-elle gravement. J'ai… j'ai effacé leur mémoire, nos souvenirs et toute notre vie. Mais je devais le faire. Je devais m'assurer qu'il ne leur arriverait rien. Je… je devais les protéger.

De nouvelles larmes aux yeux, Hermione contint ses sanglots avec peine. A part Harry et Ron, personne ne savait ce qu'elle avait fait… Personne ne connaissait la douleur, le fardeau et l'horreur que le simple souvenir de sa vie d'avant lui procurait. Personne ne connaissait sa détresse à l'idée de ne plus jamais pouvoir éteindre sa mère et entendre le rire de son père. Personne ne connaissait la culpabilité et la honte que son acte avait insufflé dans son âme. Aussi, c'est fébrile qu'elle se tourna vers Drago. Après des années passées à taire ce secret, à fuir sa peine et cacher sa douleur, jamais elle n'aurait imaginé que ce serait à lui qu'elle se confierait…

- Je ne savais pas. Souffla-t-il déboussolé.

- Ce n'est pas grave… j'imagine qu'après cinq ans j'aurais dû me faire à l'idée que j'étais orpheline ; j'aurais dû faire mon deuil.

- Hermione, ce sont tes parents. Même si… s'ils t'ont oublié, tu n'as pas à faire le deuil de toute une vie de souvenir !

- Et pourtant il le faut. Dit-elle du bout des lèvres.

- Mais…

- Je les ai revus. Tonna-t-elle soudainement.

- Quoi ?

- Avant de me rendre il y a trois mois, j'ai découvert une veille formule dans un grimoire. Je ne l'ai pas testée mais elle… elle serait capable d'inverser un sortilège d'oubliette.

Le Malfoy la regarda ahurit et pourtant c'était vrai… le grimoire de Merlin ne renfermait pas que le secret de la prophétie. Et pendant un bref instant, Hermione avait retrouvé espoir. Pendant un bref instant, elle avait cru pouvoir retrouver ses parents et réparer tout ce qui avait été brisé ces cinq dernières années. Mais un tel cadeau ne pouvait lui être accordé.

- Je… je suis retournée chez nous. D'aussi loin que je me souvienne, ils ont toujours rêvé de partir vivre en Australie. J'imagine qu'apprendre que leur fille unique était une sorcière a bouleversé leur projet.

Sa voix se brisa au milieu de sa phrase, mélange de sanglot et de désespoir. Mais elle ne pouvait pas s'arrêter là. Elle devait le dire et ôter ce poids de sa poitrine.

- Quand je suis arrivée… il y avait un énorme camion dans notre rue et des cartons tout autour de la maison. Ils déménageaient.

- Mais tu aurais pu leur rendre leurs souvenirs ! S'exclama-t-il.

- Non, je… je n'ai pas pu.

- Pourquoi ?!

- Ils ont adopté une petite fille.

Le poids de ses mots sonna comme un boulet de canon dans le couloir, les laissant muet l'un face à l'autre. C'était énorme… Et tellement douloureux. Quand elle avait vu sa mère couvrir de baiser le front d'une autre enfant, elle n'y avait pas cru. Et puis son père était sorti, des sacs de jouets et de peluches pleins les bras, prêt à les mettre dans le camion en direction de leurs nouvelles vies et de leur avenir. Un avenir dont elle ne ferrait de toute évidence pas partie.

- Une petite fille ? Tu… tu as une sœur. Souffla-t-il alors sans y croire.

- Oui. Dit-elle dans un sourire. Une magnifique petite sœur d'à peine un an que je ne connaîtrais jamais…

- Mais tu aurais pu…

- Ils l'ont appelé Hermione. Trancha-t-elle brusquement.

Cette fois, Drago sentit son souffle se couper sous la douleur d'une telle nouvelle. Un autre enfant. Ses parents avaient adopté un autre enfant… et lui avait donné son prénom. Son prénom ! Etait-ce seulement possible ?! A cet instant, le jeune homme ne put que comprendre ses larmes. Il n'existait pas pire torture que de savoir que l'on avait poussé les gens que l'on aimait le plus au monde à nous remplacer.

- J'imagine qu'ils auront une belle vie en Australie avec… avec leur fille. Déglutit-elle. Une petite Hermione Granger, sans pouvoirs ni magie. Comme ça aurait toujours dû être le cas.

- Hermione…

- Ce n'est pas grave. Dit-elle en réhaussant les épaules. J'ai manqué ma chance. Mais je n'ai pas l'intention de les priver de la leur. Ils vont pouvoir tout recommencer, tout reprendre à zéro et avoir une nouvelle vie. C'est tout ce qui compte pour moi.

- Mais… mais et toi ?

Elle ? Elle était devenue l'Initiée de Voldemort, avait décimé toute une race de créature magique et ne tarderait pas à devenir l'héritière d'une des plus puissantes familles du pays... alors oui, ce n'était pas l'avenir qu'elle s'était imaginée. Et oui, elle aurait volontiers sacrifié la dernière année qui lui restait à vivre en échange d'une dernière étreinte de ses parents. Mais elle ne pouvait pas se montrer égoïste. Elle n'en avait pas le droit. Même s'il n'était pas là, le Maître comptait sur elle. Et le monde Magique aussi. Alors oui. Même si ça lui crevait le cœur, elle devait faire le deuil de son passé, de ses parents, de sa vie d'avant et de tout ce qui la faisait encore sombrer. Plus qu'une question de responsabilité, sa survie était en jeu. Elle ne pouvait pas continuer à vivre ainsi… dans la douleur, la honte et la peur de l'avenir. Elle devait avancer. Elle devait contempler le futur qui s'offrait à elle comme le cadeau qu'il était et l'accepter. Et ça commençait par eux.

Lucius, Drago et Narcissa.
Sa famille.

Aussi, la jeune femme le regarda un court instant et sentit son cœur s'apaiser. Elle n'avait fait qu'une partie du chemin… a vrai dire, elle avait à peine entamé son voyage ! Mais elle était prête à tourner la page. Elle était prête à voir la vérité en face. Elle n'était plus Hermione Granger. Elle n'était plus cette enfant idéaliste qui croyait en la bonté du monde et était prête à tout pour la Résistance. Elle n'était plus celle que ses amis avaient abandonné dans une tente. Et elle ne le serait plus jamais. Ne restait que ce qu'elle était aujourd'hui. Une sorcière accomplie, une Initiée respectée, une sœur et une fille aimée… et il était temps de l'accepter. Il était temps d'embraser sa destinée. Déterminée, elle se releva donc dans un sursaut d'adrénaline et regarda Drago dans les yeux.

- Pendant longtemps j'ai cru que je n'étais que ce que la guerre avait fait de moi. Lui dit-elle. Mais j'avais tort. Je suis plus que ça.

- Et qui es-tu ?

- Hermione Malfoy. Ta sœur.

La force de ses mots le fit frissonner. Jamais encore elle ne l'avait dit avec autant de fierté.

- Hermione Granger est morte. Tonna-t-elle plus fort. Et ce soir, je lève ma baguette en son honneur. Elle était forte, téméraire et… je me souviendrais d'elle avec tendresse. Mais il est temps que je la laisse partir.

Baguette en main, elle récita un sort que Drago ne comprit pas avant de la regarder avec inquiétude. Pourtant et à cet instant, jamais Hermione ne fut plus certaine de toute sa vie. Il était temps qu'elle fasse le deuil de son enfance et de sa vie passée. Il était temps qu'elle entre enfin dans son avenir. Elle détacha donc ses cheveux et laissa leurs boucles tomber tout autour d'elle.

- Qu'est-ce que tu fais ?! Demanda-t-il surpris.

- Je fais honneur à notre nom.

Sans sourciller, elle passa sa baguette autour de sa tête et en quelques secondes ce fut fait. Ses cheveux autrefois longs et bouclés tombèrent au sol, vestiges de son ancienne vie et de tout ce qu'elle décidait d'oublier. Un geste fort et impulsif qu'elle n'aurait jamais cru avoir le courage d'accomplir mais qui laissa naître sous leurs yeux une nouvelle Hermione.

La vrai Hermione Malfoy.

- Qu'en penses-tu ? Demanda-t-elle dans un sourire.

Le souffle coupé, Drago ne trouva pas les mots. Jamais depuis qu'ils se connaissaient, il ne l'avait vu ainsi… jamais il ne l'avait vu les cheveux courts. Arrêté à sa clavicule, ses longues ondulations avaient laissé place à un carré plongeant et lisse. Une coupe surprenante et moderne qu'il n'aurait jamais imaginée sur elle, et qui pourtant ne fut rien comparé au choc de ce qu'il vit dans ses cheveux. Une mèche blonde platine.

- Hermione, tu… tu…

Haletant, il n'eut pas le courage de choisir quels mots employer. Elle était incroyable, sublime, magnifique ! Elle venait de révéler tout le potentiel resté jusqu'alors caché derrière ses boucles désordonnées ! Elle était… à couper le souffle. Et devant cette mèche blonde, Drago sentit ses propres émotions le bouleverser. Ce petit détail n'était peut-être pas grand-chose et pourtant… il serait à jamais leur seule et unique ressemblance.

- Tu es splendide. Souffla-t-il enfin.

- Tu penses que… nos parents vont aimer ? Demanda-t-elle alors plus inquiète.

Tout en s'approchant, le Malfoy effleura sa mèche du bout des doigts et sourit franchement. Plus qu'un changement, c'était une révolution… la plus belle de toute.

- Ils vont adorer. Dit-il en toute franchise. Viens, ne perdons pas de temps ! J'ai hâte de leur présenter leur nouvelle fille.

- Non attend ! S'exclama-t-elle. Il… il y a autre chose que je dois te dire avant.

Surpris par son ton beaucoup plus grave, Drago s'arrêta dans sa lancée et la regarda se triturer la main dans un réflexe inquiet.

- Quoi donc ?

- Je… je veux te prouver que mes excuses sont sincères. Dit-elle subitement.

- Comment ça ?

- Ce soir, je fais le deuil de mon passé. Ce soir, j'accepte mon nouveau nom et ma nouvelle famille mais… je veux te prouver que ce ne sont pas des paroles en l'air. Je veux… je veux te dire toute la vérité.

Tenterait-il de la dissuader ? Hurlerait-il après elle ? La dénoncerait-il à leurs parents ? Elle l'ignorait. Mais elle voulait croire en leur nouvelle alliance. Elle voulait croire qu'elle pouvait lui faire confiance ! Aussi, c'est le cœur au bord des lèvres qu'Hermione prit ses mains dans les siennes et soupira avec force.

- J'ai fait le serment de ne pas parler de mes travaux avec le Maître, mais…

- Tu n'as pas à trahir ta promesse pour moi !

- Je sais mais… il faut que tu saches quelque chose. Insista-t-elle. J'ai fait une découverte.

- De quel genre ?

- Incroyable. Dit-elle dans un sourire radieux. Sincèrement c'est… c'est la plus belle avancée que le Maître et moi ayons jamais fait en trois mois ! Ça change absolument tout !

- Hermione c'est formidable ! S'exclama-t-il alors.

- Oui je sais, mais le maître n'est toujours pas rentré et… et j'aimerais qu'il soit fier de moi. J'aimerais avoir trouvé ce que nous cherchions.

- Et comment comptes-tu t'y prendre ?

Là était le point sensible de son discours… elle devrait prendre une décision. Et elle savait d'avance, elle ne plairait à personne.

- Avant tout, promets-moi de ne rien dire.

- Tu veux déjà faire des cachoteries aux parents ?! Rétorqua-t-il moqueur.

- Drago…

- Bien, bien ! Je le jure !

Il n'aimerait pas ça. Leurs parents n'aimeraient pas ça. Voldemort n'aimerait pas ça ! Mais après avoir passé plus de six semaines enfermée dans sa bibliothèque, Hermione ne pouvait pas s'arrêter là.

Elle avait trouvé Aloff.
Elle avait trouvé la sphère.

- Je vais devoir m'absenter.

- Pardon ?! S'étouffa-t-il.

- Laisse-moi finir avant de crier.

- Mais…

- Ce ne sera pas long ! Poursuit-elle. Mais il faut que je parte, c'est essentiel !

- Mais où ?!

Loin. Très loin…

- En Turquie.


Et voilà ! Hermione a pris une importante décision... où cela va-t-il la mener ? Que trouvera-t-elle là bas ? Et Voldemort... comment réagira-t-il quand il saura que son Initiée est partie ? Dîtes moi ce que vous en pensez ! J'ai hâte de connaître avis ! En tout cas, j'espère que ces chapitres vous auront plu et que vous serez au rendez-vous la semaine prochaine pour la suite ;) !

Encore merci pour tous vos partages et messages ! Je vous dis à très vite pour la suite ! Vous n'allez pas être déçu... ;)))

BISSEESS