Ma tendre enfant,

Une fois encore, c'est par le biais de cette seule lettre que je peux te témoigner notre amour. Le Maître reste catégorique et refuse que nous te rendions visite ; il clame que cela pourrait altérer ta guérison et que nous devons nous montrer patient. Mais sache-le mon enfant, tu nous manque sincèrement. Drago fait les cents pas non loin de ta chambre, à l'affut de la moindre faille de ronde dans l'espoir de pouvoir te voir. Quant à Lucius, il passe tout son temps au ministère mais cela ne suffit pas à la distraire ; il s'inquiète pour toi. Comme nous tous. Mais je t'en conjure Hermione, ne sois pas trop dure envers toi-même. Il est vrai que ces récents évènements nous ont tous profondément choqué et inquiétés, mais il ne s'agit là que d'un malencontreux accident et je prie les Dieux pour que tu ne penses pas autrement. Sois indulgente, tendre et compatissante à ton égard. Tu as besoin de repos et de soins. Pour le reste, ne t'inquiète de rien.

Avec tout notre amour,
Narcissa

PS : Ton frère est déterminé à passer les Elfes qui gardent ta porte, alors ne sois pas surprise si tu l'entends vociférer dans le couloir… tu lui manque beaucoup.

A la lecture de sa lettre, Hermione sentit sa gorge se serrer à mesure qu'un sanglot la lui assiégeait. Narcissa… Lucius… Drago… Sa famille. Après tout ce qu'elle leur avait fait subir, ils ne l'abandonnaient pas. Même après qu'elle ait failli incendier son propre frère, ils s'évertuaient à demander de ses nouvelles et à vouloir la voir. Bon Dieu ils lui manquait tellement. Et elle s'en voulait tant… Elle aurait voulu pouvoir le leur dire ; pouvoir sortir de sa chambre et les serrer dans ses bras ! Mais de nouvelles consignes avaient été données… des mesures contraignantes, dures et sévères, mais également peu surprenantes. Après l'esclandre de sa dernière crise de manque, il était évident que son Maître ne la laisserait pas à nouveau sans surveillance…

- Miss Malfoy, comment vous sentez-vous ce matin ?

Surprise de le voir si tôt, Hermione sourit du mieux qu'elle put devant la figure amicale de son médicomage et cacha sa lettre dans son dos. Narcissa avait dû soudoyer un Elfe pour qu'il la lui remette malgré les consignes de leur Maître… aussi, c'est mal à l'aise qu'elle s'efforça de cacher ses yeux rougis de larmes et se redressa.

- Très bien ! Assura-t-elle sans mentir.

- Avez-vous vomi ? Ressenti la moindre bouffée de chaleur ou fièvre ?

- Non, je… je me sens vraiment mieux.

- A la bonne heure !

Et encore le mot était faible. Une semaine s'était écoulée depuis qu'elle s'était réveillée dans son lit, confuse et désorientée après l'épisode de la Tour d'Astronomie. Une semaine entière passée à prendre des potions, à trembler dans le vide et à craindre de nouvelles hallucinations… mais une semaine portée sous le sigle de la guérison qui, même si elle n'arrivait pas encore à y croire, avait porté ses fruits. Après quatre jours, sa fièvre était tombée. Après cinq, ses nausées s'étaient calmées. Et après six, elle avait été en mesure de se lever… Une amélioration significative de son état, qui bien qu'elle en soit heureuse, ne la réconfortait malheureusement pas.

- Pas d'hallucinations ? De bruits étranges ? De voix ?

- Non, aucune. Sourit-elle malgré elle.

- Votre guérison est donc en bonne voie !

Oui, elle l'était. Mais à quoi bon s'en réjouir ? Cela faisait une semaine que son Maître savait ce qui était arrivé … ou plus précisément ce qu'elle avait fait. Sa crise, ses hallucinations, l'invocation de son Feudeymon suivit de sa fuite dans le château… Par Merlin, cette simple pensée la fit rougir de honte. Tout ceci semblait remonter à une véritable éternité. Mais c'était arrivé. Coincée sous l'étau de ses démons, elle avait perdu pied. Incapable de distinguer le vrai du faux, elle s'était laissée dériver dans la plus inconstantes des réalités. Des instants confus et étranges, dont les simples souvenirs lui semblaient tout droit sortis de la plus excentriques des fantaisies. Entremêlées, ses pensées se confondaient avec ses délires passés, ne lui laissant qu'un miasme d'idées confuses et désordonnées. Qu'il s'agisse de sa confrontation avec la Báthory ou de sa dispute avec Ron, leurs visages se troublaient et leurs voix se distordaient. Comme si sa nouvelle clairvoyance annihilait les souvenirs de sa démence, leurs existences s'effaçaient lentement de sa conscience. Leurs mots, leurs cris, leurs discours… ils s'évanouissaient peu à peu aux fils des jours. Pourtant, une seule hallucination restait intacte ; la seule qu'elle aurait presque souhaité oublier… celle de son Maître. Loin d'être confus, le souvenir de leur échange restait gravé au fer blanc dans sa mémoire. La chaleur de sa peau, la lourdeur de son souffle, le frisson de leurs corps, la sensation de ses mains sur ses joues… tout se rejouait inlassablement dans son esprit troublé, la laissant à la merci de tout ce qu'elle redoutait. Telle la lueur éblouissante d'un phare, elle se sentait aveuglée par le flot d'émotions contradictoires qui l'avaient assiégé. Un flot qui jusqu'alors n'avait cessé de croître dans son cœur… Et même si elle s'évertuait encore à le nier, ce dernier la hantait. Une évidence qu'elle rejeta d'un mouvement de tête agacé devant son médicomage intrigué.

- Avez-vous ressenti de nouvelles absences ? Demanda-t-il.

- Pas que je sache. Je… je me perds souvent dans mes pensées mais ce n'est pas nouveau. Dit-elle gênée.

- Je vois…

- Mais je vais bien ! Insista-t-elle en le voyant prendre des notes. Je vous assure !

- Ne vous en faîte pas Miss. Sourit-il. Votre état s'améliore d'heures en heures et ce n'est plus qu'une question de temps avant que votre organisme n'élimine les derniers restes de magie résiduelle du Sang de Dragon… vous serez sur pieds en un rien de temps.

Rassurée, la jeune femme soupira de soulagement. Elle savait que bon nombre de fidèles rêverait de rester alité… mais dans son cas, c'est à peine si elle pouvait encore regarder les murs de sa chambre sans avoir envie de hurler. Deux semaines la séparaient de leur retour de Turquie. Deux semaines d'études et de recherches perdues dans leur quête de prophéties… une idée qui au-delà de son état, lui donnait la nausée.

- Merci. Soupira-t-elle. Sincèrement, je ne sais pas ce que je ferais si je devais rester alitée une semaine de plus…

- Mais je vous recommande néanmoins la plus grande des prudences. Insista-t-il. Outre votre crise de manque, votre corps à subi énormément de dommages pendant votre voyage.

- Oui, nous… nous avons rencontré quelques imprévus. Dit-elle du bout des lèvres.

- C'est le cas de le dire… grimaça-t-il. Je ne voudrais pas extrapoler mais il se peut que vous comptabilisiez à vous seule plus de blessures que la majorité de mes patients réunis. Et dans la mesure où je soigne les victimes de Bellatrix Lestrange, ce n'est pas une rien…

Gênée devant l'intensité de son regard, Hermione baissa la tête dans une grimace. Elle aurait voulu pouvoir dire qu'il exagérait… mais même-elle n'était pas sûr de cela. Entre ses quatre années de fuite, son altercation avec les sirènes, sa crise de folie dans la bibliothèque, ses mésaventures en Turquie et sa crise de manque, elle avait davantage vu son médicomage ces derniers mois qu'en sept ans de vie à Poudlard…

- Oui, je m'en doute… Déglutit-elle du bout des lèvres. Je veillerais à prendre soin de moi, je vous le promets.

- Et à ne plus vous empoisonner ?

Honteuse, la jeune femme se mordit la langue dans un frisson. Qu'il lui pose une telle question n'était pas surprenant… en particulier aux vues de sa dernière rechute ; néanmoins, elle rosie ses joues de gêne. Après ce qu'il s'était passé et malgré ses efforts pour le faire oublier, cette étiquette resterait à jamais associé à son nom. Celle d'une ancienne droguée… d'une consommatrice de Sang de Dragon qui non contente d'avoir survécu à deux sevrages, serait toujours susceptible de replonger dans son addiction.

- Je ne veux plus revivre ça…. Je vous jure de tout faire pour ne plus céder.

- C'est à vous que vous devriez faire cette promesse Miss… à moi, vous ne devez rien.

- Mais je dois tout à mon Maître. Soupira-t-elle. Et je doute qu'il me pardonne un nouveau faux pas…

Et encore, elle ignorait comment il avait pu lui pardonner celui-là ! De ce qu'elle avait entendu, c'est lui qui l'aurait trouvé inconsciente en haut de la Tour d'Astronomie… c'est lui qui l'aurait porté jusqu'à sa chambre et bordé dans son lit. De quoi l'affliger d'une honte encore plus grande... Bon sang, il l'avait vu dans cet état. Il l'avait vu tremblante de fièvre dans le froid, désorientée par ses hallucinations et seulement vêtue d'un pyjama ! Quelle horreur… quelle indignité ! Elle son Initiée d'Honneur, récupérée à la volée entre deux crises hallucinatoires… Qu'avait-il bien pu penser ?! Ça, elle préférait ne pas l'imaginer. Pourtant et alors qu'elle s'imaginée déjà destituée, il ne l'avait pas renié.

Au contraire… il l'avait choyé.

Elfes guérisseurs, médicomages, repas sur-mesure, bouquets de fleurs, cadeaux… rien n'avait été laissé au hasard. Encombrée jusqu'au plafond, sa chambre regorgeait de plus de bouquets de lys, de roses, de boîtes de chocolat, de livres, de robes et de bijoux qu'elle ne pouvait en compter ! Confuse devant tant d'attentions, elle n'avait d'abord pas voulu y croire. Persuadée qu'il ne s'agissait là que d'une nouvelle divagation, elle était restée stoïque devant la pile de nouveaux livres qu'il lui avait offert pour sa convalescence, incapable de mesurer l'ampleur de sa nouvelle dévotion ! Mais après plusieurs jours et devant l'accroissement de tous ses présents, elle avait dû se rendre à l'évidence. C'était réel. Son Maître voulait prendre soin d'elle. Voldemort voulait prendre soin d'elle ! Alors même qu'elle lui avait une fois de plus prouvé sa faiblesse, il avait fait en sorte qu'elle soit soignée dans les meilleures conditions, lui avait offert un nombre incalculable de présents et avait même annulé tous ses rendez-vous pour rester sur place en cas d'urgence. De même et bien qu'il ne soit pas venu la voir, il n'avait cessé de demander de ses nouvelles, allant jusqu'à harceler son médicomage pour suivre l'évolution de son état. Un panel d'attentions toutes aussi touchantes qu'extrêmement surprenantes, qui n'avait fait qu'exacerber la profonde confusion de ses sentiments… Par Merlin, mais que se passait-il ? Pourquoi agissait-il de la sorte ? Ça n'avait aucun sens ! Elle ne méritait rien de tout cela ! Et certainement pas après tout le chaos qu'elle avait causé ! Mais ça ne l'avait pas arrêté… Une sollicitude qui au-delà la surprise, laissait Hermione profondément intriguée. Elle ne s'était pas attendue à tant d'inquiétude. A vrai dire, elle ne l'avait même pas imaginé ! Et pourtant, il ne l'avait pas destituée. Il était resté. Il l'avait soigné. Et l'avait même gâtée ! De quoi lui faire amèrement regretter toute la défiance et les reproches dont elle l'avait accablé…

- Ne vous en faîte pas… Lui dit son médicomage. Le Maître s'inquiète surtout de votre état de santé. Pour ce qui est du reste eh bien… mes compétences s'arrêtent là.

- Vous avez fait bien assez de miracles. Sourit-elle. Vos potions sont de véritables merveilles.

Surpris devant un tel compliment, le vieil homme releva ses lunettes dans un sourire.

- Oh, vous êtes bien aimable très chère mais je ne peux m'en attribuer le mérite. Déclara-t-il amusé.

- Que voulez-vous dire ?

- Eh bien, elles viennent de la réserve personnelle de notre Maître.

- De sa réserve ? Répéta-t-elle sans comprendre.

- Vous n'êtes pas sans savoir qu'il domine l'ensemble des arts de la magie, et la confection de potions médicomagiques ne fait pas exception. Il a préparé l'intégralité de vos potions en moins d'une nuit ! J'ai d'ailleurs dû lui prescrire un sédatif pour qu'il puisse trouver le sommeil ; les effluves de mandragore sauraient garder un centaure éveillé pendant plus d'un mois !

Il… il avait préparé l'intégralité de ses potions ?! En une nuit ?! Ahurit, Hermione ne trouva pas quoi dire. Elle n'ignorait rien de ses capacités en la matière mais… delà à ce qu'il les prépare lui-même ? A hauteur de trois potions par heure pendant huit jours… Seigneur, le décompte lui donna mal à la tête. C'était une œuvre titanesque ! Inhumaine presque ! Et pourtant il l'avait fait. Alors même qu'il aurait pu laisser son médicomage s'en charger, il avait lui-même pris en main la guérison de son Initiée. Une nouvelle attention qui dans sa confusion sentimentale, suffit à l'achever.

- J'ignorais tout ça… souffla-t-elle désorientée.

- Ne vous en inquiétez pas. Contentez-vous de vous reposer.

- Quand… quand pourrais-je reprendre mes activités ? S'empressa-t-elle de demander.

- D'ici quelques jours.

Si tard ? Par Merlin, c'était infernal ! Elle voulait reprendre ses recherches, retrouver les Malfoy, reprendre son quotidien et plus important encore… elle voulait le retrouver, lui.

- Mais…

- Ne brûlez pas les étapes Miss. Le Maître a été très clair à ce sujet ! Il a même autorisé les Elfes à vous ligoter à ce lit si nécessaire ! Déclara-t-il avec force.

- Je vois…

- Soyez patiente. Dit-il dans un dernier sourire. Vous serez remise en y rien de temps.

- Que Merlin vous entende…


- Ecoute moi bien espèce de cancrelat putride ! S'écria Drago à bout de nerf. Ma sœur a besoin de moi ! Je devrais être avec elle plutôt que d'errer dans ce maudit couloir !

Epuisé par ses cris, l'Elfe de Maison roula des yeux dans un soupir. Si les premières insultes du Malfoy l'avait d'abord effrayées, ces derniers jours l'avaient pour ainsi dire habitués à ses revendications endiablées.

- Je regrette Maître Drago mais les ordres sont les ordres…

- Je connais les ordres !

- Alors vous savez que je ne peux pas vous laisser la voir.

- Mais enfin il s'agit de ma sœur !

- J'en ai bien conscience mais…

- J'en assumerais la responsabilité ! Explosa-t-il.

- Je regrette Maître Drago mais les ordres sont les ordres. Récita-t-il pour la énième fois.

De misérables vermines… il se faisait congédier du chevet de sa sœur par de misérables vermines ! Quelle honte ! Quelle insulte ! Il était un Malfoy ! Un membre respecté du Ministère et un sorcier médaillé pour sa bravoure ! Il n'avait pas à essuyer la condescendance de ces créatures ! De ces vils serviteurs aux yeux vides de toute intelligence ! Mais ils n'en démordaient pas…

- Ecoute-moi bien misérable vermicel, je…

- Maître Drago, vos cris ne changeront rien. S'agaça-t-il.

- Comment oses-tu ?! S'étouffa-t-il.

- Les ordres sont les ordres. Répéta-t-il. Si vous souhaitez formuler une objection, je vous recommande de demander audience à notre Maître.

Cet Elfe n'avait donc rien de mieux à faire que de lui répéter ces inepties ?! Il connaissait les ordres de son Maître ! Pour preuve, il les maudissait depuis plus d'une semaine ! Mais à cette heure, le jeune homme s'en fichait… Une semaine qu'il attendait dans ce couloir, inquiet et désespéré ! Une semaine qu'il faisait le pied de grue devant sa chambre, à l'affut de la moindre faille pour entrer ! Mais ça ne marchait jamais… jamais ! Comme si sa simple présence reformait les rangs, une floppée d'Elfe lui barrait la route à quelques mètres de sa porte… à quelques mètres d'Hermione. Un constat qui l'enrageait presque autant que l'insolence de cet elfe…

- Je ne me répéterais plus. Claqua-t-il baguette en main.

- Le Maître vous a également interdit d'user du sortilège Doloris à notre encontre. Lui rappela-t-il.

- Et je me demande encore pourquoi… Ragea-t-il entre ses dents.

- Car nous sommes là pour veiller au bon rétablissement de…

- Par Morganes, c'était de l'ironie ! Explosa-t-il atterré. Misérable cloporte, je sais très bien pourquoi tu es là !

- Dans ce cas, vous savez très bien que…

- Un mot de plus et c'est le Maître lui-même qui te mettra en terre !

- Toujours aussi courtois à ce que je vois ! A croire que l'ancien Drago a investi le château en mon absence…

Bouche bée à l'écho familier de cette voix, le jeune homme se figea brutalement. Ce ton… cette moquerie à peine déguisée… par tous les Dieux. Faisant volte-face, le Malfoy sentit un vertige le saisir et déglutit sans y croire. Elle était là. Alors même qu'il hurlait pour pouvoir entrer, celle qu'il attendait depuis presque un mois était enfin là…

- Alors ? Demanda Hermione amusée. Tu ne dis pas bonjour à ton insupportable petite sœur ?

Seigneur… Après tant d'efforts, de cris, de doutes et d'incertitude… elle était là. Hermione était là. Hermione était là ! Simplement accoudée dans l'encadrement de la porte qu'il avait mille fois tenté de faire exploser pour la retrouver, il la vit sourire de son air amusé et se pincer le nez pour ne pas s'esclaffer. Elle… sa sœur. Ebranlé, Drago ne trouva pas la force de respirer et la détailla en apnée. Vêtue d'une simple robe de chambre en soie noir, elle le fixait avec tendresse malgré la pâleur de ses joues. Un regard dont il avait presque oublié l'éclat mordoré…

- Hermione ? Souffla-t-il ahuri.

Amusée devant lui, la jeune femme ne put s'empêcher de sourire. Narcissa n'avait pas menti… il vociférait tel un ogre sur le point de charger. Mais il n'avait pas changé… Toujours aussi blond et inconstant, l'acier de son regard la transperça de toute part, traduisant son choque et sa confusion devant sa simple apparition. Pourtant, il ne rêvait pas. C'était elle. Une évidence qu'il mit plusieurs secondes à réaliser, avant que son adrénaline ne le sorte de sa consternation. Aussi, il n'eut le temps d'ordonner ses pensées… Incapable de résister, son corps réagit de lui-même devant celle qui lui avait tant manqué et vint s'élancer jusqu'à elle. Ignorant le regard outré de l'Elfe de Maison ou encore les simples convenances de son sang, il enjamba la distance qui les séparaient dans un souffle effréné, avant de soudainement l'enlacer de ses bras tremblants. Une étreinte qu'il avait désespérément attendu… un instant qu'il avait mille fois imaginé… et une délivrance qui le fit haleter. Enserrant sa taille avec vigueur, il la pressa avec force contre son cœur battant, incapable de réaliser que sa prière venait de s'exhausser. Sa sœur, vivante et en bonne santé…

- Oh seigneur… souffla-t-il dans son cou. C'est toi. C'est vraiment toi !

Presque étonnée devant sa poigne, Hermione sentit ses pieds s'agiter dans le vide dans l'écho d'un sanglot refoulé. Elle aussi peinait à réaliser ce qu'il se passait… mais non pas à cause des centaines de potions qu'elle buvait ! Non c'était plus fort. Plus profond… Et pour cause, elle avait cru le perdre. Lui. Son frère. Alors qu'elle campait en Turquie avec son Maître, elle avait eu peur pour son avenir au Ministère. Alors qu'elle hallucinait devant lui, elle avait eu peur pour sa vie. Alors qu'elle sombrait dans la démence, elle avait cru avoir perdu sa confiance. Mais il était là malgré tout, heureux et sans souffle dans leur étreinte. Un ultime cadeau qui surpassa tous les autres… Aussi, elle n'hésita qu'un court instant avant de l'enserrer à son tour de ses maigres bras. Par Merlin, il la serrait avec tant de force… tant d'empressement… tant de manque. Que les Dieux lui en soit témoin, jamais elle n'avait imaginé pareilles retrouvailles. Après l'épisode du Feudeymon, elle avait redouté leur réunion… ou plus précisément, son abandon. Oui. Elle avait eu peur qu'il la renie, qu'il l'accable de ses cris et ne la juge avec honte et mépris. Mais il n'éprouvait rien de tout cela. Elle pouvait le sentir à la puissance de ses bras, il désespérait de ne plus la voir. Et elle aussi…

- C'est vraiment toi ! Répéta-t-il d'une voix étouffée. Je savais que tu t'en sortirais ! Je savais que tu guérirais ! Je l'ai toujours dit !

Au bord des larmes, Hermione hocha la tête sans rien dire et se sentie trembler contre lui. Tant de choses étaient arrivée depuis la dernière fois qu'ils s'étaient enlacés… Son départ de Turquie, la colère de son Maître, les Vampires, sa crise… une petite éternité s'étaient écoulée, ponctuée de drames et de rebondissements. Mais malgré ça… malgré tout ce qu'elle avait fait, il n'avait jamais cessé de vociférer dans ce couloir. Il n'avait jamais cessé de la chercher dans le noir.

- C'est merveilleux ! Il faut le dire à maman !

Emue à l'évocation de Narcissa, Hermione sourit en le sentant résister pour ne pas la lâcher. Si ça n'avait tenu qu'à lui, il ne l'aurait jamais plus laisser partir… Mais sa curiosité était trop grande. Aussi c'est avec vigilance qu'il la reposa au sol, le regard à l'affut du moindre Elfe désireux de l'arracher à lui.

- Elle m'avait dit que tu serais là. Sourit-elle amusée. Et que je risquais de t'entendre beugler !

- Je n'aurais pas eu à beugler si ces maudits Elfes m'avaient laissé entrer !

- Le Maître a donné…

- … des ordres ! Je sais ! Mais peu m'importe, tu es là maintenant et c'est tout ce qui compte !

- Tu as raison.

- Mais… et ton médicomage ? Paniqua-t-il subitement.

- J'ai…

- Si tu as fait le mur je peux te couvrir ! Je peux même te cacher s'il faut !

- Quoi ? Non ! S'exclama-t-elle exaspérée. J'ai assez désobéi aux ordres pour le reste de ma vie !

- Alors comment ?

- J'ai obtenu un droit de promenade. Dit-elle simplement.

- Merlin soit loué !

Oui… elle était là. Mais dans quel état ? Inquiet après avoir laissé son adrénaline retomber, le jeune homme la scruta sans osé respirer. Par Merlin… elle semblait épuisée. Epuisée mais heureuse ; un maigre réconfort malgré la minceur alarmante de son corps. Elle avait perdu du poids… beaucoup de poids. Une évidence que même les pans lâches de sa robe en soie noire ne purent dissimiler à son regard. Aussi, il effleura sa mèche blonde du bout des doigts avant de durement détailler ses joues couleur de craie.

- Bon sang… Hermione mais qu'est-ce qui s'est passé ?

Il voulait savoir. Il voulait comprendre ! Mais face à son inquiétude grandissante, sa propre honte vînt l'étouffer. Il ne l'avait jamais abandonné. Alors même qu'il avait souffert des doloris de leur Maître et qu'elle avait failli l'incendier, il était resté dans ce couloir à hurler pour pouvoir la retrouver. Une vérité qui suffit à la faire craquer…

- Oh Drago… Souffla-t-elle désespérée. Je suis tellement désolée.

- Quoi ?! S'étouffa-t-il brusquement.

- Je… je sais que le Maître vous a puni pour mon départ. Je ne le voulais pas ! Je te jure ! Je n'ai jamais voulu que vous payiez à ma place ! Je l'ai dit au Maître ! Je… je lui ai dit que vous n'y étiez pour rien et que moi seule devait assumer les conséquences de mes actes, mais il était déjà trop tard !

- Hermione…

- Et quand je t'ai vu dans ma chambre… juste après le Feudeymon… oh mon dieu j'ai eu tellement peur de t'avoir blessé ! Haleta-t-elle soudainement. Ce que j'ai fait est… impardonnable ! Je… je m'en veux tellement si tu savais… je n'aurais jamais dû te cacher ce qui se passait ! Je sais que j'aurais dû t'en parler mais j'avais peur que tu me détestes et à cause de moi tu as failli être blessé ! Je… Je comprendrais que tu ne veuille plus me parler ! J'ai… j'ai déshonoré notre famille et…

- Hermione !

- Je suis tellement désolé… tellement si tu savais…

Elle pleurait, haletait et s'époumonait en même temps. Un combo peu reluisant qui la laissa en apnée devant un Drago déboussolé. Par Morgane, sa culpabilité allait finir par la tuer ! Ahuri, le jeune homme ne la laissa pas finir et s'empressa de la serrer à nouveau à contre lui, désespéré devant le flot d'inepties qu'elle s'évertuait à déblatérer. Une étreinte bien moins heureuse, mais libératrice… Essoufflée dans ses pleurs Hermione pleura contre son épaule, redoutant l'instant où elle devrait affronter son jugement. Mais il ne vînt pas… à la place, Drago se contenta de l'enlacer, le cœur lourd devant la peine qui la torturait.

- Maudite Gryffondor… Rit-il désabusé. A ce rythme ton cœur va finir par lâcher.

- Drago je…

- Hé ! Regarde-moi. Dit-il plus fort en redressant son menton. Arrête de t'excuser.

- Mais…

- Je vais bien ! Assura-t-il. Les parents aussi ! On est tous vivants, alors arrête de paniquer.

- J'ai failli te tuer ! S'exclama-t-elle horrifiée.

- C'est vrai... Déglutit-t-il. Et j'avoue que ton Feudeymon était particulièrement effrayant mais je vais bien ! Et puis, ce n'est pas comme si c'était la première fois ! Moi aussi j'ai essayé de te tuer.

- Mais enfin, c'était… c'était différent ! On était en guerre !

- Et alors ? Ça a toujours marché comme ça dans la famille ! On tente de se tuer, on se réconcilie… si tu savais le nombre d'Avada que ma tante a déjà tenté de me jeter, tu serais surprise !

Sérieusement ? Il… il ne lui en voulait pas ?! Après tout ce qu'elle lui avait fait enduré ?!

- Mais…

- Hermione je vais bien ! D'accord ? Je vais bien ! Répéta-t-il déterminé.

- Mais… mais Lucius ? Haleta-t-elle. Le Maître l'a torturé !

- Oui et… ça n'a pas été simple à gérer, je ne vais pas te mentir. Mais c'est un mangemort de plus de trente ans d'ancienneté. Un doloris de plus ou de moins n'est pas prêt de le tuer…

- Oh Seigneur...

- Hermione, il va bien !

Comment pouvait-il dire ça ? Elle avait failli les condamner ! Elle avait remis en cause leur loyauté et avait presque détruit le peu de sécurité que leurs années de servitude leurs avaient apporté ! Ce n'était pas rien ! Et pourtant son regard ne déviait pas… implacable, il la fixait avec conviction, déterminée à lui faire entendre raison. Mais sa culpabilité ne s'allégeait pas pour autant.

- Drago, je…

- Hermione, s'il te plaît. L'interrompit-il. Tu es la seule dont l'état nous importait ! Tu as failli y rester !

- Mais…

- Maintenant dis-moi ce qu'il s'est passé. Tonna-t-il plus sévèrement.

Ce qu'il s'est passé ? Par Merlin, où commencer...

- Qu'est-ce… qu'est-ce que tu sais ? Demanda-t-elle mal à l'aise.

Son regard changea à sa question… ce qu'il savait ? Trop peu de choses, pour ne pas dire presque rien. Et pourtant cela avait suffi à nourrir ses insomnies.

- Que ton escapade en Turquie à mal tournée… que le Maître a quitté un Conseil de Guerre en urgence, que le Ministère Turc est au bord de la crise diplomatique et qu'apparemment tu aurais eu une altercation avec des vampires. Dit-il gravement. Sans oublier ta petite addiction au Sang de Dragon – que tu t'es bien caché de m'avouer – suivis de ta crise psychotique et ton Feudeymon…

Eh bien… dis ainsi, elle paraissait bonne pour l'asile.

- Seigneur… souffla-t-elle dépitée. Comment fais-tu pour ne pas me détester ?

En toute honnêteté avec lui-même, il l'avait détesté. Mais pas comme par le passé… non, c'est plus irritant et soudain. Une haine fugace et exaspérée, mêlé à une profonde inquiétude et un soupçon d'indignation… Mais comment aurait-il pu en être autrement ?! Elle lui avait menti ! Pire encore, elle s'était mise en danger de la pire manière que l'on puisse imaginer ! Mais il aurait dû s'y attendre. Avec elle et son tempérament, rien n'était acquis… pas même sa propre survie.

- Tu es ma sœur… Une sœur pleine de secrets et au comportement passablement suicidaire certes, mais je savais dans quoi je m'embarquais.

- Vraiment ?!

- Hermione… Gronda-t-il. S'il te plaît arrête de t'inquiéter. Je… je veux juste savoir ce qui t'es arrivé !

- Mais…

- Par Morganes, tu es bien la seule femme au monde que j'ai envie d'engueuler et de consoler en même temps ! Alors arrête de tergiverser et répond à mes questions !

Répondre ? Mais à quoi ? Il y avait tant de choses à raconter, qu'elle ne savait même pas par quelle histoire commencer !

- C'est assez… long à expliquer. Bafouilla-t-elle.

- J'ai tout mon temps.

- Non, je… ne peux pas tout te dire. Pas maintenant ! Pas ici. Il y a trop de choses…

- Mais…

- Ecoute, je… je n'ai que peu de temps avant qu'on me rappel dans ma chambre et il faut que je m'explique avec le Maître.

- Quoi ?! Mais… non ! S'écria-t-il outré. Hors de question !

- Drago s'il te plaît… Supplia-t-elle. C'est… c'est très important.

- Plus important que moi ?!

Elle aurait voulu pouvoir lui faire comprendre… lui expliquer le fond de ses pensées et le laisser exhumer ses sentiments. Mais elle n'en avait pas le temps ! Quelque part dans le château, son Maître attendait de ses nouvelles, mort d'inquiétude et probablement de honte ! Il fallait qu'elle le voie. Il fallait qu'ils s'expliquent ! Qu'elle sache ce qu'il allait advenir d'elle, de leur recherche et de tout ce qui faisait aujourd'hui sa vie… incluant son insupportable et trop protecteur de frère. Aussi, c'est l'âme en peine qu'elle le vit la juger avec douleur et lui prit la main. Elle n'avait pas l'intention de l'éviter. Elle n'avait pas l'intention de lui mentir ! Mais ce genre d'aveux n'avait pas sa place au détour d'un couloir…

- Ecoute… rien n'est plus important que notre famille. Déclara-t-elle avec force. Je te le jure. Mais en toute honnêteté et après ce que j'ai fait, je ne sais même pas si le Maître me laissera à nouveau vous voir.

- Quoi ?! S'étouffa-t-il.

- J'ai fait des choses Drago… souffla-t-elle du bout des lèvres. Des choses horribles et odieuses et… à cause de moi des gens sont morts ; notre pays est en proie à la guerre et même notre Maître a failli payer le prix de ma stupidité…

- Mais enfin, tu…

- Je dois assumer les conséquences de mes actes. Dit-elle.

- Mais quand pourrais-je te voir ?! S'inquiéta-t-il.

- Je ne sais pas mais je promets de tout de révéler ! Je te le jure ! Mais pour l'heure… s'il te plaît laisse-moi l'affronter.

L'affronter. Un mot si fort et si… dur. Jamais encore il ne l'avait vu redouter un entretien avec le Maître. Une constatation qui loin de le rassurer, raviva tout ce qu'il avait redouté. Aussi, c'est le cœur lourd que Drago regarda leurs mains jointes. Si elle disait vrai… si elle avait fait toutes ces choses… alors son destin était plus qu'incertain.

- Tu… tu me jures que tu me reviendras ? Demanda-t-il.

- Parole de Malfoy.

Le clin d'œil qu'elle lui lança le fit sourire… et pourtant, cela n'apaisa en rien la peur qui l'éventra quand sa main le lâcha.


Petit chapitre plus simple mais aussi décisif ! Ses retrouvailles avec Drago ! Mais ses retrouvailles avec Voldemort approchent... vos pronostiques ?

En tout cas merci pour tous vos messages et soutien ! Je vous souhaite à tous une très belle année et j'ai hâte de l'entamer à vos côtés ;)

A la semaine prochaine !