- Tu n'es pas sérieuse ?! Souffla Voldemort désabusé.

- Maître, je…

- Laisse-moi récapituler un instant… Gronda-t-il en se massant les tempes. Selon toi les « bannis et sillonneurs de fonds » seraient des pirates ?!

Mal à l'aise, Hermione se mordit la langue devant son scepticisme et déglutit avec peine. Elle savait de quoi cela avait l'air. Elle savait vers quoi une telle piste les mènerait. Mais c'était la seule qu'ils avaient…

- Oui. Affirma-t-elle.

- Des pirates… fantômes ?

Un grand silence suivit ses derniers mots, symbole de toutes la gêne et l'embarras que la Sorcière éprouva. Grand Dieu… il allait la prendre pour une folle. Mais les preuves étaient là ! Elle-même n'avait pas voulu y croire mais Luna ne mentait pas ! Les bannis et sillonneurs de fonds étaient des pirates. Des âmes bannies par les hommes et maudites par les Dieux, condamnées à sillonner les mers et les basfonds avec pour seul et unique repos le froid et les vents implacables des océans… Oui. Elle en était certaine. Et Luna aussi. C'étaient eux qui avaient la dernière prophétie.

- Je sais que cela semble insensé mais selon la légende, ils…

- Et selon toi ces pirates écumeraient les mers depuis des siècles telles… des âmes errantes, avec à leur bords la dernière sphère prophétique. Continua-t-il sans la regarder.

- C'est exact. Dit-elle. Mais…

- Et ton plan serait de partir à leur rencontre ?

Bien sûr ! C'était une évidence ! Il fallait les trouver ! Il fallait écouter les légendes et partir les rencontrer ! Mais au regard de son Maître et à la veine battante de son front, la jeune femme n'eut d'autre choix que de calmer son engouement.

- Oui, mais…

- Donc si je comprends bien… Tonna-t-il plus fort. Alors que nous sommes en guerre, que le monde a les yeux rivés sur nous, que nos alliés se défilent et que la Résistance cherche à percer nos défenses, tu veux que nous quittions le château et que nous prenions la mer… tout cela pour tenter de trouver des vaisseaux fantômes, remplis de pirates fantômes, dont nous ignorons absolument tout ?!

Dit ainsi, autant les interner de suite… Et pourtant c'était vrai. C'était son plan. Aussi, Hermione refusa de céder à la honte et resserra sa prise sur le livre de conte que Luna lui avait donné. Un petit ouvrage usé à la couverture défraîchît, que la Lovegood avait gardé sur elle comme un souvenir. Mais il était bien plus que ça… il était la preuve de ses dires. Plus encore ! Il était la preuve de l'existence même de la prophétie ! Il était la piste qu'ils attendaient ! La solution pour laquelle ils priaient ! Et cependant, c'est avec désolation que son Maître la regardait…

- Maître… s'il vous plaît. Implora-t-elle. J'ai conscience de tout ce que cela implique… mais les preuves sont là !

- Ah ! S'exclama-t-il désabusé. Bien sûr ! Au temps pour moi, j'avais oublié le plus important… soit le fait que tout ton plan repose uniquement sur les fabulations et légendes d'un livre pour enfant !

Ahuri, le Mage ne sut même plus quoi dire. Il savait que ce Fléau Divin les menait à envisager l'impossible… à vrai dire, il était même prêt à croire en tout ce qui lui semblait inconcevable ! Mais des pirates ? Par Salazar, des pirates ?! C'était de la folie. De la folie ! Et le pire était que c'était pour cela que son Initiée l'avait sorti de son lit… Au bord de la crise de nerf, Voldemort sera les dents et fini son verre dans un grondement ; mais un Whisky Pur Feu ne suffirait pas à lui seul à engourdir sa consternation… Par Merlin ! Il avait une guerre à mener, une attaque de résistants à anticiper, des Sols Cogneurs à trouver et malgré ça… malgré tout cela, il fallait que ses seules heures de repos soient troublées par des comptes de bonnes femmes mal lunées et les cris acharnées de son Initiée. A croire que les Dieux ne cesseraient jamais de le tourmenter…

- Ce ne sont pas des fabulations ! S'écria-t-elle outrée.

- Oh pitié… S'agaça-t-il.

- Je vous le jure !

Il fallait qu'il la croie ! Il n'avait pas le choix ! Il… il ne pouvait rester aveugle ! Pas devant toutes ses preuves ! Certes, il ne s'agissait que de légendes… mais toutes leurs quêtes n'étaient-elles pas uniquement basées sur cela ?! Sur des contes ? Des histoires ? Des récits que le communs de mortels refusait de croire ? Si ! Et pourtant, ce n'est qu'un regard désabusé qu'elle rencontra. Un regard qui bien plus que des mots, la désespéra…

- Sérieusement Hermione ? Soupira-t-il fatigué. Des pirates ? Fantômes qui plus est ?!

- Je…

- Je sais que ces sphères nous ont mené aux limites du réel en Turquie, mais de là à envisager de telles inepties ?!

- Vous devez me croire ! Supplia-t-elle. Les légendes racontent que ces pirates étaient autrefois des voleurs, des assassins et des truands, avant d'être condamnés par un puissant sorcier à prendre la mer comme ultime châtiment !

- Hermione…

- Cela a du sens ! S'entêta-t-elle. Autrefois les traitres, les voleurs et tout homme ne pouvant payer leurs dettes étaient condamnés à la Galère. Ils y passaient plusieurs années si ce n'est toute leurs vies, et étaient marqués tels du bétail afin que personne n'ignore leur infâmie ! Certes c'était assez barbare… mais ce livre regorge de références historiques précises !

De mieux en mieux… comme si l'histoire de son règne n'était pas assez compliquée, il fallait que son Initiée s'acharne lui réciter celle d'anciens condamnés.

- Il est dit que ces pirates étaient tous des hommes avant d'être maudits par ce mauvais sort. Ils se seraient alors retrouvés coincés entre la vie et la mort, condamnés à devoir écumer les océans à bord de leurs vaisseaux pour expier leurs fautes !

- Continue et je vais commencer à les envier… grinça-t-il amer.

- Vous ne comprenez pas ! S'agaça-t-elle. Les légendes disent que ces pirates ont sillonnés milles fois les mers, qu'ils ne redoutent ni les hommes ni les sorciers, et que nul bateau n'a un jour réussi à leur échapper ! Ils ont erré sur les océans pendant plus de mille ans et amassé suffisamment d'or pour en couvrir toutes leurs dents, mais n'ont jamais trouvé le moyen de mettre un terme à leur pénitence…

Et c'est pour ça qu'il devait abandonner son pays et prendre la mer au matin ? Des criminels condamnés et ensorcelés, qui avaient passé plusieurs siècles à maudire les sorciers ? Dans le seul et unique but de leur voler un trésor qu'ils n'étaient pas certains de trouver ? Alors même qu'ils ignoraient tout de leurs localisations ou de la seule véracité de leur existence ?! Par Merlin… si Yaxley avait été là il aurait fait une attaque.

- C'est ridicule… Siffla-t-il.

- Mais…

- Il suffit ! Tonna-t-il. J'en ai assez entendu pour cette nuit…

Bouleversée, Hermione le vit se lever de son fauteuil et soupirer d'un air consterné. Grand Dieu… il refusait de la croire. Il refusait de considérer leur seul et unique espoir. Non… non, ce n'était pas possible. C'était pourtant leur seule piste ! Leur seul indice ! Il ne pouvait la rejeter d'un revers de poignet ! Il ne pouvait l'ignorer d'un seul coup d'œil désintéressé ! Et pourtant Hermione le comprit… il ne voyait en ses paroles qu'une profonde et absurde lubie. Une hérésie aussi incongrue qu'inutile, qui n'était parvenue qu'à déranger sa nuit. Une évidence que la jeune femme n'eut aucun mal à deviner et qui la laissa bouche bée à mesure qu'il la détaillait avec sévérité. Grandit de colère face à elle, elle déglutit devant la largeur de ses épaules et détourna le regard dans un frisson. Rougeoyantes malgré sa fatigue, elle sentit l'étau de ses pupilles la faire rougir devant lui, la laissant sans souffle et profondément démunie…

- Tout ceci n'est rien de plus qu'une légende. Claqua-t-il durement.

- Mais…

- Que les choses soient claires ! Quitter Poudlard pour chasser un mirage est hors de question. Tourner le dos à la guerre qui se prépare pour prendre la mer est hors de question. Et espérer trouver des réponses dans un conte pour enfant est une absolue perte de temps… Alors je te prierais de ne plus croire en ces fadaises, et de te plonger dans de véritables livres afin de m'apporter des pistes crédibles !

En apnée, Hermione sentit chacun de ses mots la percuter avec brutalité. « Perte de temps ». « Se plonger dans de véritables livres ». « Des pistes crédibles ». Par Merlin… c'est à cela qu'il croyait qu'elle passait son temps ? A explorer des pistes impossibles ? A croire des récits vides de sens ? Non… elle ne pouvait pas le croire. Et pourtant le jugement et le mépris teintaient déjà son regard. Un regard qu'Hermione vit la transpercer et qui perfora son cœur de part en part... C'est donc ainsi qu'il la voyait ? Comme une enfant ? Une sorcière débutante ? Une folle échappée d'Azkaban ?! Ces derniers mois ne lui avaient-ils donc rien appris ?! C'est elle qui les avait menés jusqu'en Turquie ! C'est elle qui avait trouvé non pas une, mais deux prophéties ! Il devrait savoir qu'elle ne l'aurait jamais réveillé si elle ne croyait pas en cette théorie ! Si elle n'était pas absolument certaine d'avoir trouvé la dernière clé de leur énigme ! Mais non… il s'obstinait et la méprisait. Aussi, c'est plus blessée que jamais qu'Hermione le regarda se détourner dans un soupir affligé avant de s'accouder devant la cheminée. Mourantes malgré leurs vapeurs ardentes, les braises s'étouffaient peu à peu sous l'épaisseur de la cendre. Ne resterait bientôt de leur feu brûlant que des bouts des charbons à la chaleur latente, condamnés à mourir froidement sous le regard indifférent de leur antre. Un spectacle dont Hermione ne put manquer l'ironie, à l'heure où son propre cœur semblait à jamais meurtri...

Bon sang… mais qu'avait-elle espéré ? Qu'il l'écouterait ?! Que l'homme qui la fuyait depuis des semaines se donnerait la peine de croire en elle ?! Non. C'était une erreur. Tout ce cirque, cette comédie, ses discours sur un retour à la normal, ses fausses promesses sur sa volonté d'être un meilleur Maître… tout cela n'était rien de plus qu'une énorme erreur ! Et pourtant, elle y avait cru ; elle avait cru en leur chance, en sa foi et sa volonté de sauver le monde. Elle avait cru en lui, en son regard et en sa sympathie. Mais tout cela n'était que romantisme, espoirs vains et idées surréalistes. Oui… elle plus que quiconque aurait dû le savoir ! Voldemort ne chercherait jamais à s'améliorer et elle ne pourrait jamais se conformer à sa seule volonté. La preuve vivait sous leurs yeux ce soir ; ils avaient essayé… et échoué. Aucun d'eux ne pourrait jamais changer. Aucun d'eux ne pourrait jamais se côtoyer sans se défier. Et aucun d'eux ne pourrait dépasser le fossé qui les séparaient. C'était une évidence, une certitude... et une vérité que même les Dieux ne pourrait jamais déjouer. Alors que pouvait-elle espérer ? Elle ? Hermione Granger ? Leur collaboration ne serait jamais plus que ce qu'elle était déjà : une inutile et inextricable joute verbale. Aussi, c'est sans rien dire que la jeune femme caressa la reliure de son livre. La mort dans l'âme, elle détailla ses coutures et rebords cornés avant de sentir un violent sanglot l'étrangler. Tout comme lui, elle était usée et abîmée. Tout comme lui, elle regorgeait de savoir méprisé et sous-estimé. Et tout comme lui, son Maître la rejetait…. Une nouvelle ironie qui cette fois la fit amèrement soupirer. Par tous les Dieux… quand apprendrait-elle enfin sa leçon ? Quand accepterait-elle l'évidence ?! On ne devait rien attendre d'un homme qui souhaitait rester dans l'ignorance. Et dans l'idéal, on ne devait pas s'y attacher non plus… pour la simple et bonne raison que c'était une cause perdue. Et Voldemort en était une. Pas en tant que Maître, Seigneur ou Professeur… mais dans son cœur.

Oui.
Elle n'avait plus le droit d'espérer après lui.
Elle n'avait plus le droit d'attendre indéfiniment que le Destin lui donne une chance !
Elle… elle n'avait plus le droit de se laisser souffrir.

Et puis, à quoi bon ? Il resterait toujours cet homme changeant et violent. Ce même homme pour qui elle éprouvait ses insupportables et indéniables sentiments… mais dont elle ne pouvait rien attendre. C'est donc le cœur et l'âme endeuillés qu'Hermione reprit son souffle et retînt ses larmes. Elle avait toujours su que son attachement était vain et qu'il n'en ressortirait jamais rien. Mais le voir mourir devant elle, au rythme de l'agonie de ces braises… Seigneur, jamais elle n'avait rien ressenti de plus cruel. Elle releva donc la tête et serra les dents une dernière fois, prête à mettre un terme à cette journée qui n'en finissait pas. Pourtant et alors qu'elle s'attendait à le voir contempler la mort des flammes, c'est sur elle que son regard se porta. Franc et presque surpris, il la détailla avec attention dans le plus implacable des silences, avant que ses traits ne commencent peu à peu à se durcir... Allait-il renchérir ? La disputer d'avantage ? Elle ne voulait pas le savoir…

- Pardonnez-moi de vous avoir dérangé Maître… Souffla-t-elle alors du bout des lèvres. Cela ne se reproduira plus.

Et c'est sans plus de cérémonie qu'elle se détourna de lui. Le dos droit et les poings serrés, Hermione s'efforça de ne pas faillir dans sa dernière lancée ; de ne pas trembler… de ne pas pleurer… et de ne pas céder aux sanglots qui l'étouffaient. Et pourtant, l'écho de sa voix ne parvînt qu'à la figer.

- Es-tu blessée ? Demanda-t-il brusquement.

Surprise, la jeune femme ne sut même pas quoi dire et haussa un sourcil. Blessée ? Oui, elle l'était. Plus que ça même ! Elle agonisait ! Mais le connaissant, elle doutait que cela soit le sens de sa question…

- Que… que voulez-vous dire ? Balbutia-t-elle.

- Je sens une souffrance, comme… une blessure.

Confuse, elle le vit la rejoindre en deux enjambées et frémit devant lui. Tremblant d'une nouvelle énergie, il l'irradia de la puissance de son aura avant de la détailler à nouveau, un air inquiet plaqué sur le visage. Par Merlin, mais que se passait-il ? Comme s'il était à la recherche d'une plaie qu'il n'aurait pas vu, elle le vit examiner ses bras, mains et jambes de ses pupilles abyssale… une réaction qu'elle ne comprit pas et qui la fit instantanément rougir dans son pyjama.

- Je ne suis pas blessée. Seulement… fatiguée. Dit-elle alors mal à l'aise. Cela passera.

- Es-tu sûr ? Insista-t-il. Ton serpent hurle à la mort depuis plusieurs minutes.

Etonnée devant une telle observation, Hermione frissonna en sentant son regard se poser sur sa marque. Oui… son serpent hurlait, étouffé sous ses bras croisés et les manches de son pyjama molletonné. Un cri d'agonie et de détresse, qui résonnait avec force depuis la douleur de son cœur éventré…

- Ce n'est rien. Assura-t-elle gênée. Lui aussi doit être fatiguée.

- Ne me mens pas. Siffla-t-il.

- Je ne mens pas ! S'agaça-t-elle. Je suis véritablement exténuée !

Hochant vaguement la tête devant elle, Voldemort la sonda un court instant. Il ne se trompait pas. Les vibrations de sa marque étaient étranges… vives et chaotiques, elles le frappaient avec violence à mesure qu'elles résonnaient avec force depuis le cri de son serpent. Semblable à des vagues déferlantes, il pouvait les sentir le submerger de leur rythme désordonné, allant jusqu'à l'assommer de leur puissance incontrôlée. Or, il le savait… cela ne pouvait aucunement être la conséquence d'une simple fatigue. Non, c'était plus que ça… C'était plus fort. Plus troublant. Plus oppressant ! Oui… quelque chose se passait dans son corps et son esprit. Quelque chose qu'il n'avait jusqu'alors jamais ressenti et qu'il ne put décrire… mais quelque chose qui le fit fatalement frémir. Et pour cause ! Si elle ne s'était pas tenue debout devant lui, il aurait juré qu'elle était en train de mourir…

- A quand remonte ton dernier entretien avec ton médicomage ? S'enquît-il brusquement.

- Une semaine. Pourquoi ?

- Convoque le demain matin. Sonna-t-il brutalement. Je veux un rapport complet.

- Qu… quoi ? Mais…

- C'est un ordre. Claqua-t-il.

Désorientée, Hermione le vit tourner les talons tout aussi brutalement, ne lui offrant que son dos à fixer avec sidération. Il voulait un rapport complet ?! Mais… mais pourquoi ?! Cela n'avait aucun sens ! Elle avait repris du poids, buvait chaque jour ses potions et n'avait même plus de symptômes de manque ! Aussi, la jeune femme hésita à insister, peu désireuse de passer plus d'une heure à se faire ausculter pour apaiser le mal imaginaire que son Maître lui avait décelé… mais à quoi bon lutter ? Quoi qu'il veuille d'elle, il l'obtiendrait de force ou de gré. Autant ne plus se donner la peine d'essayer.

- Bien Maître… soupira-t-elle. Je ferais en sorte qu'il vous le transmette avant l'heure du déjeuner.

Cela aurait pu s'arrêter là.
Cela aurait dû s'arrêter là !
Et pourtant, Voldemort n'y parvînt pas.

Frappé de plein fouet alors qu'il pensait en avoir terminé, de nouvelles vagues le tétanisèrent sur place depuis la marque de son Initiée. Plus violentes que les précédentes, elles lui coupèrent le souffle avec brutalité et le laissèrent chanceler devant sa cheminée. Ahuri, la brutalité de leurs cris lui assaillit sauvement l'esprit avant de ne le faire tressaillir. Tel un Feudeymon enragé, il se sentit incendié sous l'ardeur de leurs rafales, laissant alors se dessiner les contours d'un profond désespoir... suivi d'une souffrance. Par Salazar… jamais il n'en avait ressenti de telle. Semblable à une véritable gangrène, il la sentit se rassasier de sa chaire et de ses pensées, le transformant alors en un réceptacle de hurlements étouffés. Grand Dieu… c'était partout. Dans sa magie, dans son corps, dans son cœur, dans son esprit ! Et pourtant elle ne montrait rien. Comme si cette agonie lui était égale, elle vivait et respirait tandis que lui vacillait sous la cruauté de ce mal… Non. Ce n'était pas possible. Ce n'était pas acceptable ! Cette douleur, cette brûlure, cette torture, c'était… intolérable.

- Par Salazar ! Mais qu'est-ce que tu as ?! Hurla-t-il violement en faisant volteface.

- Qu… quoi ?! Paniqua-t-elle.

Elle ne pouvait pas le cacher. Il le sentait, quelque chose hurlait ! Quelque chose brûlait ! Quelque chose mourrait en elle ! Et quoi que ce soit… il ne pouvait le supporter.

- Je… je ne comprends pas. Bafouilla-t-elle effrayée. Je…

- Ne me mens pas !

Pris de court devant la violence de ses hurlements, Hermione recula dans un jappement. Seigneur… mais que se passait-il ?! Elle n'avait rien fait ! Rien dit ! Et pourtant, il était hors de lui. Comme si une furie avait pris possession de son esprit, elle vit son visage grimacer avant de ne brusquement commencer à trembler. Une image qui dans son incompréhension commença peu à peu à la terrifier.

- Non… je le sens. Siffla-t-il brusquement. Tu es blessée, je le sens !

- Je… je n'ai rien Maître. Je vous jure, je…

Non. Elle mentait. Elle mentait ! Ces sensations, ces ondes, ces vibrations… c'était réel. C'était là ! C'était vivant ! Aussi, c'est sans prendre la peine de l'écouter que le Mage s'élança jusqu'à elle d'un pas enragé. N'écoutant plus que les hurlements de son serpent, il ne la vit même pas reculer jusqu'à sa porte d'entrée et saisit son bras à la volée. Il devait l'examiner. Il devait comprendre d'où cela venait, trouver la source de ce mal insensé et l'exterminer ! Mais il n'eut qu'à remonter sa manche, pour que la douleur ne fasse qu'empirer. Jurant entre ses dents, Voldemort sentit son esprit s'embraser à mesure qu'il s'obstinait, mais Hermione elle, ne parvînt même plus à respirer. Ces gestes… son regard… sa brutalité… ses cris… Par Merlin, jamais elle ne l'avait vu ainsi. Désorientée, elle envisagea un court un instant de riposter et de ne pas tolérer son agressivité ! Mais face à lui et sa proximité… son corps ne réussit qu'à se tétaniser. Pétrifiée, elle sentit toute la puissance de sa carrure l'écraser contre la porte, la laissant confuse et béate devant l'exigence de sa poigne. Mais aucune de ses grimaces ne l'arrêta. Sourd et aveugle, elle le vit examiner sa marque avec avidité avant que sa peau ne s'enflamme brusquement sous la violence de son toucher. Seigneur… il perdait l'esprit ! Il divaguait ! Mais n'en avait que faire… Le regard fou, Voldemort détaillait son serpent danser frénétiquement autour de son monde, le corps parcourut d'incontrôlables frissons. Tout croc dehors, sa présence suffit à ce que son cri ne résonne plus fort, le faisant grimacer plus encore... Par Salazar, c'était insupportable ! Cette douleur… cette brulure… c'était une véritable de la torture ! Du Feu à l'état pur ! Mais elle ne réagissait pas... Alors qu'il la sentait agoniser, que sa marque hurlait et que le mal la rongeait, elle ne réagissait pas !

- Ce n'est pas possible… ragea-t-il entre ses dents. Je le sens ! C'est là, quelque part !

Mais quoi ?! Quoi bon Dieu, quoi ?! Hermione ne le savait pas… Aussi, c'est les joues rouges et au bord de l'asphyxie qu'elle le vit palper son autre bras et tâter son visage. Pourtant, il cherchait quelque chose qui n'existait pas. Elle pouvait le sentir, son obsession n'avait pas plus de sens que sa folie. Mais il ne recula pas. Incapable d'envisager qu'il puisse se tromper, la jeune femme retint en cri en le voyant jeter un Infinite Incantatem à son pyjama. Mais là encore, aucun maléfice, aucun sort et aucune magie ne se révéla…

- Maître !

- C'est impossible… siffla-t-il sans l'écouter. Il y a forcément quelque chose ! Je le sens !

- Il n'y a rien ! S'exclama-t-elle alors. Je… je n'ai rien, je vous le jure !

- Non ! Non, il y a forcément quelque chose !

- Il suffit ! Tonna-t-elle brutalement.

Choqué devant la dureté de son ton, Voldemort se figea un court un instant. Pourtant et alors que l'audace de ses paroles aurait dû l'enrager, le Mage ne parvînt qu'à haleter dans un gémissement étouffé. Ça empirait… par tous les Dieux, la douleur empirait ! C'était là ! C'était devant lui ! C'était en elle ! Et c'était pire que l'Enfer…

- Tu ne peux pas, ne pas le sentir… souffla-t-il ahuri. Tu… tu ne peux pas, ne pas le sentir !

- Mais de quoi parlez-vous ?!

- De ta souffrance ! Hurla-t-il.

- Mais enfin, je ne…

- Non, elle est là ! Insista-t-il. Elle est là ! Elle grandit ! Je la sens depuis ta marque !

Bouche bée, Hermione regarda son bras avant de violement frissonner. Sa douleur ? Seigneur… se pouvait-il que… non, ça ne se pouvait pas. Elle savait qu'il pouvait détecter ses mensonges, ses blessures physiques et même sa présence… Mais sa véritable douleur ? Celle qui lui éventrait le cœur ? Non… il ne pouvait pas. Pas celle-là ! Et pourtant, jamais son regard ne quitta son bras. Hanté par des ondes qu'elle ne percevait pas, elle le vit gémir entre ses dents avant de mordre son poing dans un frisson. Grand Dieu… se pouvait-il qu'il ait raison ? Que sa marque lui communique ce que son cœur n'osait dire ? Elle espéra se tromper, mais face à cette idée ses mains commencèrent elles aussi à trembler.

- Tu la sens. Dit-il alors. Tu sens la douleur.

- Maître je…

- Dis-moi d'où elle vient. Exigea-t-il.

- Ce n'est pas…

- Est-ce le manque de sang de Dragon ? Demanda-t-il. Ou un sort ?! L'un de ces résistants t'aurait-il jeté un maléfice ?!

- Non, je… cela n'a rien à voir. Dit-elle du bout des lèvres.

Grand Dieu, que pouvait-elle lui dire ? Jamais il ne la laisserait partir sans savoir ce qu'il se passait ; sans comprendre ce qu'elle ressentait. Malheureusement pour lui, il ne le pourrait jamais…

- Dis-moi de quoi il s'agit !

- Ce… ce n'est rien. Bafouilla-t-elle. Je vous le jure, ce n'est… que passager.

- Passager ?! Répéta-t-il ahuri.

- Oui !

- Hermione, tu agonises ! Cingla-t-il durement.

Oui. C'était vrai… elle agonisait. Jours et nuits depuis des semaines, son cœur saignait. Mais à quoi bon le lui expliquer ? Quoi qu'il fasse, rien ne pourrait l'effacer ! Et pour cause… elle se l'était elle-même créée. Naïve et romantique, elle avait entretenu un feu destiné à mourir. Un feu qui aujourd'hui se riait de son agonie…

- Ce n'est pas aussi grave que ça en a l'air. Insista-t-elle.

- Non. Tu mens. Claqua-t-il.

- Maître, je…

- Dis-moi la vérité Hermione !

- Mais enfin, ce n'est…

- C'est un ordre !

A ses mots, Hermione cessa de respirer. Non… non, non, non ! Il ne pouvait le lui ordonner ! Et pourtant c'est le cœur au bord des lèvres que la jeune femme sentit déjà la magie de sa marque s'animer. Galvanisé par la violence de sa sommation, sa peau s'embrasa, la douleur la terrassa et son souffle haleta. Seigneur… Il savait ce qu'il faisait. Il savait qu'elle obéirait. Et il savait qu'elle en souffrirait… Un constat qui l'horrifia davantage, et qui telles les épines aiguisées du karma, décupla le mal de sa marque. Frappé à son tour Voldemort vacilla soudainement, les joues rouges et le souffle coupé par les vagues incendiaires qui ne cessaient de le submerger. Une scène étrange, incongrue et incompréhensible, devant laquelle le monde aurait blêmi : celle des deux plus grands Sorciers du pays, se renvoyant l'un l'autre un mal invisible qu'ils ne cessaient de nourrir.

- Seigneur, c'est un véritable supplice… Gronda-t-il en s'accrochant à sa table.

- Maître, s'il vous plaît. Supplia-t-elle au bord du malaise. Ne me forcez pas à le dire…

- Non. Il faut que ça cesse ! Je dois savoir !

- Maître…

- Dis le moi !

- C'est vous !

C'était fait.
C'était dit.

Et alors que le feu de son bras s'apaisait, Hermione haleta violement dans l'écho de son propre cri. Seigneur… elle l'avait dit. Elle l'avait hurlé. Elle l'avait avoué ! Et cela suffit à l'étouffer de regret. Par Merlin, qu'avait-elle fait ? Qu'avait-elle dit ?! C'était de la folie ! Une véritable hérésie ! Pourtant et alors qu'elle s'attendait déjà à recevoir un doloris, c'est un Voldemort stoïque qu'elle vit la regarder d'un air ahurit. Figé, il ne dit rien pendant plusieurs secondes, incapable de réaliser l'ampleur de sa confession. Le souffle court et les joues encore rouges, il la détailla sans comprendre, comme s'il attendait qu'elle poursuive son explication. Mais sa marque avait cessé de brûler… et plus rien n'avait à être révélé. Aussi c'est presque sonné que le Mage recula de quelque pas et s'appuya contre sa table. Lui ? C'était… lui ? Mais comment… « lui » ?! Comment ?! Cela n'avait aucun sens. Aucun ! Et pourtant il put le lire à son regard emplit de larmes et son souffle haché… elle disait la vérité.

- Moi ? Répéta-t-il brusquement.

- Maître, je… je…

- Comment ?! Demanda-t-il subitement.

Au bord de l'évanouissement, Hermione déglutit dans un frisson. Pitié non… pas d'avantage de questions. Pas plus d'interrogations ! Pas plus d'ordres et de sommations ! Elle n'avait rien de plus à lui offrir ! Rien de plus à lui dire ! Mais elle le savait… sa réponse était à elle seule une question qu'il ne la laisserait pas éviter.

- Hermione… répond. Gronda-t-il menaçant.

- Non… s'il vous plaît, ça… ça n'en vaut pas la peine. Souffla-t-elle.

- Pas la peine ?! S'étouffa-t-il.

Elle ne pouvait pas être sérieuse ! Elle souffrait le martyre, refusait de le lui dire, confessait sa douleur sous la torture de sa marque et décidait finalement de fuir ?! Non… non, il ne pouvait pas le tolérer. Pas quand la magie de sa propre allégeance lui révélait qu'il était lui seul responsable de cette souffrance…

- Je ne te le demanderais plus. Siffla-t-il entre ses dents.

- Maître…

- Répond ! Scanda-t-il.

C'était trop…
Ses cris, ses menaces, ses défiances, ses remarques… ce cirque et ces mensonges qui n'en finissaient pas.
C'était trop pour que sa promesse de retenue ne se brise pas.
C'était trop pour que son cœur de Gryffondor ne s'éveille pas.
Et c'était trop pour que sa propre fierté de femme, sa colère et sa haine ne s'embrasent pas…

- Est-ce vraiment nécessaire ? Cracha-t-elle brusquement.

- Pardon ?

- Vous avez eu votre réponse ! Continua-t-elle hors d'elle. Vous savez ce que je ressens ! Vous savez qui est l'instigateur de cette souffrance ! Alors qu'il y a-t-il de plus à dire ?!

Sonné devant la brutalité de ses paroles, Voldemort la vit haleter à mesure qu'une nouvelle rage la saisissait. Une rage qu'il n'avait plus vu chez elle depuis longtemps et qui devant lui, renaissait brusquement de ses cendres.

- Tu ne réponds pas à ma question. Siffla-t-il amer.

- Quelle question ?! S'écria-t-elle désabusée.

- Comment est-il possible que je sois celui qui te fasses souffrir ?! Explosa-t-il en rage. Nous ne nous voyons plus des semaines ! Nous ne communiquons presque pas ! Et la magie de ma marque ne s'active qu'à mes ordres ! Alors pour l'amour du ciel, dis-moi par quelle sorcellerie je pourrais être celui qui te fasse tant souffrir ?!

Et il osait se le demander ?! Après tout ce qu'il venait d'énumérer ? Après l'aveu de tout ce qu'il lui faisait endurer ?! Par Merlin, cet homme était aveugle ! Que dire ! Il frôlait la sottise ! Et pourtant, sa question était sincère. Alors qu'il venait de précisément décrire le calvaire qu'il lui faisait subir, Voldemort se demandait sincèrement comment il pouvait la faire souffrir… une ironie devant laquelle Hermione ne put s'empêcher de sourire.

- Vous n'avez donc aucun indice ? Rit-elle ahurie. Aucune piste ? Aucune idée ?

- Cesse de jouer avec moi ! Gronda-t-il violement.

- Je ne joue pas !

- Est-ce à cause de cette quête ridicule ?! Demanda-t-il. Mon refus t'aurait-il offensé au point de te torturer ?!

Par tous les Dieux… il ne voyait donc rien.

- Ce n'est pas un simple caprice ! Et cela n'a rien à voir avec la prophétie !

- Alors réponds-moi !

- Vous connaissez déjà la réponse ! S'écria-t-elle à bout de souffle. Vous l'avez même revendiqué !

- Quoi ?! S'étouffa-t-il.

Désespérée, Hermione sentit son cœur flancher. Peu importe ses cris ou sa colère, il ne la comprendrait jamais… c'était impossible, voire contre nature pour lui. Et quand bien même, comment le pourrait-il ? Il était dénué du plus basique des sens communs, de la plus primaire des compréhensions du genre humain et de tout ce qui s'y apparentait de près ou de loin ! Après tout, il n'était plus Homme depuis longtemps… ne restait de lui que Pouvoirs et soif de Sang.

- C'est vous ! Exulta-t-elle au bord des larmes. Par tous les Dieux, c'est vous ! Vous et votre comportement ! Vous et votre ignorance ! Vous et vos fausses promesses ! Vous et vos mensonges ! Seulement et uniquement vous !

Décontenancé, Voldemort ne sut que répondre à ce qu'elle hurlait ; à vrai dire, il ne fut pas même certain de tout comprendre. Mais cela importait peu, car désormais plus rien ne semblait capable d'apaiser son feu…

- Vous ne cessez de me repousser ! Hurla-t-elle. J'ai beau tout faire et tout tenter, vous me fuyez telle une pestiférée ! Nous ne travaillons plus ensemble, nous n'échangeons plus que par courriers et je suis réduite à vous demander audience si je veux pouvoir bénéficier de quelques minutes de votre temps !

Ainsi, c'était cela.
C'était la raison.
Son ignorance… sa distance… sa persévérance à réduire le temps qu'ils passaient ensemble... tout cela s'était condensé en une seule et même souffrance.

- Depuis des semaines je m'interroge… Siffla-t-elle avec hargne. Depuis des semaines je cherche à comprendre les raisons de votre comportement ! Mais la réponse m'ait enfin apparu ! La réponse est… qu'il n'y en a pas. Vous êtes simplement comme ça. Un homme changeant, inconstant, aigri et malhonnête. Un homme qui ne tient pas ses promesses ! Un homme qui préfère se terrer dans son trou telle une vulgaire vipère !

Les joues rouges et le regard étincelant, Voldemort frémit devant les cris de son insolence. Des cris qu'il pensait avoir étouffé au cours de cette année… Des cris qu'il avait œuvré à bâillonner depuis les débuts de leur cohabitation forcée. Et pourtant, aujourd'hui ces cris chantaient… Oui. Ils chantaient sa fougue, sa sauvagerie et l'ardeur de son feu incandescent. Des chants que ni les Dieux, ni lui et ses enseignements n'avaient su faire taire très longtemps. Aussi, c'est la mâchoire serrée que le Mage Noir la vit regarder tout autour d'elle d'un air désabusé. Un air qui ajouté à ses mots, suffit à attiser la rage qu'il peinait à calmer. Comment osait-elle lui dire cela ? A lui ? Son Maître ? Il n'avait pas à entendre cela ! Il n'avait pas le tolérer cela ! Et pourtant, malgré la colère que lui insufflait son affront, il ne parvînt pas répondre... Scellées l'une contre l'autre, ses lèvres n'étaient plus qu'une fine ligne pâle, réduit au silence par la force de sa haine abyssale. Une haine rancunière et macabre, dans laquelle il pouvait sentir naître l'écho de ses propres hurlements, vifs et impatients de se faire entendre.

- J'ai tenté de vous le faire comprendre ! J'ai tenté de vous le dire et d'attirer votre attention ! Mais vous n'écoutez jamais… Jamais ! Et je le vois maintenant. Tous mes efforts, ma dévotion, mon dévouement… ce n'était qu'une perte de temps.

Elle allait le rendre fou. Cette sorcière allait le rendre fou ! Ses mots, ses cris, ses insultes… Par Merlin, c'était intolérable. Insupportable ! Indéfendable ! Mais elle continuait. Sans jamais s'arrêter, ses mots jaillissaient de ses lèvres, prêts à le frapper de leur mépris à peine déguisé.

- Il suffit... Siffla-t-il d'une voix blanche.

- Tout ceci, cette quête de réponse et cette… discussion ! Rien n'a plus la moindre importance ! Continua-t-elle amère. Cela ne sert à rien que je me rende malade, que je vous cours après ou que je cherche à vous l'expliquer ! Quoi que je fasse, rien ne changera jamais !

Qu'elle se taise… Par Salazar, que les Dieux la fassent se taire ! Elle n'avait pas le droit de lui parler ainsi ! Elle n'avait pas le droit de le regarder avec un tel mépris ! Elle ne savait rien de ses motivations ! Rien de ses pensées ou des raisons de son comportement ! Mais elle insistait… comme si elle ne hantait pas assez son âme, elle estimait mériter des justifications. Comme si elle était la seule possédée par le mal, elle le martelait de ses discours et cris furibonds. Et comme s'il était coupable, elle n'avait rien d'autre à hurler que des condamnations…

- Après tout, qu'est-ce que j'espérais ? Cingla-t-elle. Vous n'êtes que le plus Puissant de tous les Mages Noirs, l'homme qui a défié la Mort et conquis le monde ! Alors pourquoi vous donneriez-vous la peine de regarder votre Initiée ? Pourquoi vous donneriez-vous la peine d'honorer votre promesse et d'être un bon Maître ?!

- Assez !

- Alors pour répondre à votre question : oui, je souffre ! Et oui, c'est à cause de vous !

- Endoloris !


Il ne voulait plus l'entendre. Il ne voulait plus l'écouter. Il ne voulait plus la supporter… ainsi et sans qu'il ne puisse le contrôler, sa magie avait parlé. Frappé en pleine poitrine, Hermione ne comprit pas immédiatement ce qu'il venait de se passer. Non, tout ce qu'elle sentit fut son souffle se couper... Un bref instant qui ne dura qu'une seconde. Un bref instant de pur et absolu silence. Le seul silence que son Maître cherchait désespérément à entendre. Mais il ne dura pas longtemps… une évidence que Voldemort avait presque oubliée, avant que ne résonnent soudainement les cris d'un enfer qu'il n'avait jusqu'alors pas imaginé.

Les siens.
A elle.

Terrassée par la douleur, Hermione ne s'entendit même pas hurler. Brûlé, tailladé, brisé et profané, c'est tout son corps qu'elle sentit se faire démembrer. Comme si ses membres étaient lentement arrachés, ses articulations craquèrent, ses muscles se tordirent et ses os frémirent sous l'étau d'un tel supplice. Un supplice qu'elle n'avait plus vécu depuis longtemps, mais qui portait en lui la marque du plus cinglant des doloris.

Le Sien.
A lui.

Elle ne sut pas combien de temps cela dura. Une seconde ? Une minute ? Une éternité ? Tout ce qu'elle comprit, c'est que cela cessa à l'instant où son cœur recommença à battre. Un cœur cette fois-ci piétiné, qu'elle ne sentit même plus résonner dans sa poitrine tant la douleur la faisait encore trembler. Endoloris par les restes de magie qui l'avait assailli, elle haleta sans parvenir à respirer, sentit ses mains s'accrocher au sol dans un spasme incontrôlé et frissonna sous la douleur de ses muscles tétanisés. Par Merlin… depuis quand n'avait-elle pas subi de doloris ? Un an ? Probablement. Mais sa douleur… sa douleur n'avait pas changé. Telle une amie trop encombrante, elle l'avait submergée de son feu cuisant, lui rappelant alors tous les cris qu'elle avait hurlé sous l'étau de sa poigne exigeante. Allongée sur le tapis, ses pensées se mêlèrent à ses souvenirs, désordonnées et confus sous l'acouphène qui lui vrilla l'esprit. S'en suivit alors habituelle nausée qui lui tordit les boyaux, très vite supplantée par le craquement douloureux des vertèbres de son dos… Seigneur, le Doloris était à n'en pas douter le pire Sort que Morgane ait jamais créé. Du moins, jusqu'à ce qu'un autre hurlement ne la fasse brutalement frissonner…

Le Sien.
A lui.

Oui. Possédé par elle ne sait quel démon, Voldemort hurla à son tour. Mais pas de douleur… non. De rage, de colère, de désespoir, d'horreur et de tout ce qu'il était possible de hurler à poumons déployés. Pourquoi ? Elle ne le sut pas. Trouble, sa vue ne lui offrit que contours difformes et décolorés à observer. Pourtant, elle ne pouvait pas se tromper. Il hurlait à s'en étouffer. Incapable de s'arrêter, elle l'entendit briser sa table à la seule force de son poing, incendier son canapé et frapper les murs de plus d'Avada qu'elle ne put en compter. Un état qu'elle ne parvînt pas à comprendre à l'heure où c'était elle qui venait d'être torturée, mais qui ne fit qu'empirer. Comme si ses cris galvanisaient sa haine, il renversa les tables, fracassa les chaises, brisa les vases contre les fenêtres et détruisit son salon en moins de temps qu'il n'en fallut pour qu'elle se relève. Du moins, c'est qu'elle crut deviner entre ses cils… mais quand elle fut à genoux, grimaçante et en sueur sous ses spasmes de douleur, elle ne put que constater son erreur. Certes, le salon était intégralement détruit, victime de la fureur destructrice qui l'avait assailli… mais son Maître aussi. Haletant sous la puissance de sa rage, elle le vit agenouillé devant la cheminée, le corps encore tremblant de magie après son carnage endiablé. Le regard tourné vers le sol et les poings serrés, il semblait user de toute sa force pour dompter le chaos incandescent qui l'avait submergé. Mais le mal était déjà fait… tout aussi dévastés l'un que l'autre, les deux sorciers peinèrent à respirer sous la lourdeur du silence qui les asphyxiaient. Incapables de bouger, Hermione resta ainsi de longs instants, le cœur et l'esprit bouleversé par la transe qui l'avait possédé. Une transe qu'elle ne parvînt pas à comprendre, et qui face à son dos tremblant et ses membres ruisselants, la fit claquer des dents.

Elle était allée trop loin.
Elle avait oublié à qui elle parlait.
Elle avait oublié quel genre démon habitait le Mage qu'elle servait.

Aussi, elle ne pût s'empêcher de sursauter quand elle le vit se relever. Un réflexe dont elle ne chercha pas à se cacher et qui traduisit toute la terreur qui se mit à la secouer. Fut un temps elle ne l'aurait jamais cru capable de la blesser… mais son regard, sa magie, la force de son aura et toute la mortalité qu'il dégagea, suffirent à lui faire redouter le simple écho de ses pas. Allait-il recommencer ? L'achever ? Elle le pensa… et s'y prépara. Pourtant et alors qu'il s'avançait jusqu'à elle, jamais elle n'entendit voix plus brisée que la sienne.

- Pourquoi tu fais ça ? Demanda-t-il.

Terrorisée, Hermione n'osa plus respirer et se recroquevilla dans un sanglot étouffé. Elle ne pouvait pas le regarder… pas après ça. Pas après ce doloris. Pas après cette crise d'hystérie. Une fatalité que Voldemort devina malgré sa folie et qui le fit tressaillir. Non. Non… pas ça. Pas cette peur… pas cette posture… pas cette douleur… il l'espérait de la part de ses fidèles, mais pas d'elle ! Pas de son Initiée ! Et pourtant, elle s'inclinait… Le corps tremblant et le regard défait, elle bafouillait dans la terreur qu'il avait insufflé dans son cœur. Une réaction on ne peut plus compréhensible après ce qu'il avait fait… mais une ultime torture qui en plus de toutes les autres, raviva le désespoir qui l'avait submergé.

- Pourquoi tu fais ça ?! S'écria-t-il sans souffle.

- Je suis désolée, je… je ne…

- Tu as tout ce dont une femme peut rêver ! Scanda-t-il. Le pouvoir, la gloire, le nom, la beauté et pourtant tu… tu t'obstines à me défier !

- Cela ne… ne se reproduira plus, je… je vous le jure…

- Ne vois-tu pas ce que tu me fais Hermione ?! Hurla-t-il. Ne vois-tu pas ce que je cherche à empêcher ?!

A empêcher ? Mais… mais enfin de quoi parlait-il ?! Elle n'avait rien demandé si ce n'est un peu de respect et d'attention… Si ce n'est la fin de son implacable ignorance ! Et pourtant, elle put le lire dans ses tremblements… sa rage n'avait rien avoir avec leur affrontement.

- Tu crois que ça été facile de t'ignorer ?! De te délaisser dans ce… simulacre de désintérêt ?! Tu crois que j'y ai pris du plaisir ?! Cracha-t-il avec hargne. Que j'ai aimé te fuir ? Que je l'aie fait dans le seul but de te nuire ?

- Je… je…

- As-tu la moindre idée de ce que moi je subi ?! Demanda-t-il alors. As-tu la moindre idée du combat que je mène chaque jour depuis plus d'un mois ?! De la douleur, du désarroi et de tout ce que je m'efforce de garder loin de toi ?!

- Je ne comprends pas… je…

Bien sûr que non. Lui-même n'était pas certain de comprendre l'étendu du mal qui le rongeait, du démon qui le possédait, de… de cet effroyable désir qui aujourd'hui encore le consumait. Alors comment le pourrait-elle ?! Elle, l'objet même de sa tourmente et de sa peine ? Elle, la Déesse qui hantait ses nuits et ses rêves ? Elle… l'incarnation même du pêché de chaire ? Non… elle ne le pourrait pas ; et encore moins après ce soir. Une évidence qui devant sa peur et son extrême pâleur, lui donna un haut le cœur.

Par Salazar… il avait torturé son Initiée.
Il avait torturé son Initiée.
Il avait torturé son Initiée !

Non… Ce n'était pas possible. Il n'avait pas pu faire ça ! Mais alors que la brume de sa rage s'effaçait, les conséquences de ses actes elles, le frappaient de plein fouet. Il l'avait fait souffrir. Elle. La seule et unique femme qu'il avait juré de protéger, celle-là même qui ne l'avait jamais abandonné. Et aujourd'hui… aujourd'hui ne restait d'elle qu'une fidèle terrorisée. Un corps tremblant et blessé. Une âme meurtrie et humiliée. Par tous les Dieux… il n'avait jamais voulu en arriver là. Il n'avait jamais voulu la torturer ! Mais ce qu'elle lui faisait éprouver… ce qu'elle lui faisait ressentir… le pouvoir qu'elle avait sur son corps et son esprit… rien n'aurait su le décrire. Et le pire était encore à venir ; car il le savait désormais, l'éviter n'avait fait que renforcer cette infâmie ! Que dire ! Cela lui avait donné une vie ! Telle une entité indépendante de sa propre volonté, il l'avait senti grandir, envahir peu à peu son esprit, enfiévrer sa chaire, vivre dans ses insomnies jusqu'à surpasser son propre déni ! Alors quand il l'avait entendu l'accabler… quand il l'avait entendu hurler après tout ce qu'il avait fait pour les protéger… il avait cédé. Et comme s'il avait voulu lui faire payer l'existence de ce désir insensé, sa magie l'avait torturé. Aussi, c'est le cœur au bord des lèvres que le Mage s'agenouilla devant elle dans le murmure d'une prière. Fort et imposant face à sa faible carrure, il la vit déglutit sans trouver quoi dire, tétanisée devant l'ombre de sa baguette. Incapable de parler, Hermione serra les dents comme pour cesser de trembler… comme pour retrouver un peu de la dignité qui lui avait été arrachée… mais l'intensité de son regard ne pouvait que la faire flancher. Insondables, ses pupilles la détaillaient avec avidité, comme désireuses de lui avouer un secret. Mais sa mâchoire était contractée et ses poings serrés. Désemparée elle haleta donc pendant de longues secondes, incertaine quant à la tournure des évènements… jusqu'à ce que sa voix ne la tétanise soudainement.

- Ce que j'ai fait… Dit-il. La façon dont je t'ai ignoré, la distance que j'ai instaurée… tout cela n'avait pour but que de nous protéger.

Les protéger ? Mais… de quoi ?! Par Merlin de quoi ?! La guerre était déjà là ! La résistance aussi, de même que tous leurs ennemis ! Ils devaient faire front commun et agir ensemble ! Non pas se diviser au profit d'une quelconque protection ! Et pourtant, ses mots portaient en eux un double sens. Un sens qu'Hermione crut vaguement percevoir dans le trémolo de sa voix, mais dont la finalité lui échappa…

- Qu… quoi ? Souffla-t-elle en apnée.

- Tu n'as pas à le comprendre. Déglutit-il. Mais tu dois le savoir.

- Maître, je… je…

Elle voulait comprendre. Plus encore, elle le méritait ! Mais elle ne parvînt pas à insister… à l'entendre, il n'y avait pas d'issus. A l'écouter, elle n'avait d'autre choix que d'accepter sa décision. Mais pourquoi ? Par tous les Dieux, pourquoi ? Pourquoi agir comme ça ? Et comment en étaient-ils arrivés là ? N'avaient-ils pas fait le vœu de tout se dire ? De faire preuve de transparence et de se soutenir ?! Si… et pourtant, un mal plus grand qu'eux transcendait ce souhait. Un mal qui n'aurait jamais dû en être un, mais dont la fatalité résonnait entre eux dans l'écho d'un rire malin. Bouleversée, Hermione sentit alors son cœur se contracter et ne sut plus où regarder. A croire que son doloris n'était pas destiné à être la plus grande douleur de la journée…

- Cesse de t'interroger. Souffla-t-il les dents serrés. Et pitié, cesse… cesse de souffrir.

- Je ne peux pas. Dit-elle du bout des lèvres. Je… je ne comprends pas.

- Il n'y a rien à comprendre.

- Pourquoi les choses doivent-elles changer ? Demanda-t-elle brusquement. Pourquoi… pourquoi devez-vous m'ignorer ?!

- Hermione…

Mais il ne put en dire d'avantage. Désespérée, Hermione oublia jusqu'à la peur qui la paralysait et agrippa ses mains sans respirer… Un contact inattendu qu'il ne vit pas venir et qui dans sa surprise, le fit violement frémir. Seigneur… elle n'en démordait pas. Malgré tout ce qu'il venait de faire et dire, elle s'acharnait à le retenir… à le supplier et à le regarder comme s'il était le seul capable de la sauver. Mais elle se trompait. Il ne pouvait pas l'aider. Il ne pouvait rien lui avouer ! Mais elle insistait... Eraflée, sa peau s'échauffait contre la sienne. Tremblante, sa poigne l'agrippait malgré sa peine. Larmoyants, ses yeux le fixaient sans la moindre haine… ne subsistait que sa douleur. Mais pour lui, il n'existait que ce désir. Un désir qui à la chaleur de leur toucher, lui donna à nouveau envie de hurler.

- S'il vous plaît… implora-t-elle. S'il vous plaît, dîtes moi… dîtes moi de quoi vous pensez nous protéger. Dites-moi pourquoi vous me fuyez.

Non… non, il ne pouvait pas. Il n'en avait pas le droit.

- Je… je ne peux pas. Déglutit-il.

- Maître…

- Je ne peux pas Hermione ! Tonna-t-il plus fort.

- Pourquoi ?! Supplia-t-elle.

- Pourquoi ? Répéta-t-il sans souffle.

Presque amusé par sa question, Voldemort la fixa intensément. Elle semblait si perdue, si démunie, si vulnérable devant tout ce qu'elle désirait savoir… et c'était le cas. Implorante, ses joues brillaient de larmes devant lui, désireuses d'exhumer tout ce qu'il s'empêchait de dire. Des larmes scintillantes, légères et salées. Des larmes qu'il vit colorer ses joues et qu'il regarda couler jusque dans son cou… Des larmes qu'il se surprit à contempler et qui le plongèrent dans la plus étouffante des apnées. Bon sang… comment une femme pouvait-elle être si belle à regarder ? A croire que même ses pleures avait été créées dans le seul but de le déstabiliser ! Simples et délicates, elles agitaient son menton d'un léger frémissement avant de couvrir ses lèvres d'un rouge profond. Un rouge dont il ne put se détourner et dont la tentation se mit à la hanter. Troublé par leur proximité, il sentit les effluves de son parfum lui chatouiller le nez et frémit en sentant son combat lui échapper. Un combat qui face à son regard ambré, lui semblait impossible de gagner…

- Parce que… si je me risquais à suivre cette voie…

Perdu dans sa propre pensée, Voldemort ne sentit pas son corps se rapprocher de sa proie. Une proie qui face à son prédateur, ne résista pas… Confuse et désorientée, Hermione haleta sous la force d'attraction qui la posséda et frémit au contact de leurs peaux moites. Fronts contre fronts, leurs propres âmes semblèrent aux abois, horrifiées par la dernière distance qui les séparaient. Une distance qui peu à peu s'amenuisait… laissant alors leurs souffles se mélanger à mesure que la chaleur de leurs peaux se propageait.

- Si je me risquais à le dire tout haut ce que mon esprit pense tout bas…

Frémissants l'un contre l'autre, Voldemort s'entendit haleter et étouffa un râle quand il effleura son nez. Un contact léger, simple et délicat, qui résonna dans son corps tel l'écho d'un gong infernal. Seigneur… elle était trop proche. Il devait reculer. Il devait se détourner ! Mais jamais ses yeux n'avaient autant brillé… jamais son parfum ne l'avait autant envoûté… et jamais ses lèvres ne l'avaient autant appelé…

- Si je me risquais à céder…

Il ne pouvait pas.
Il n'en avait pas le droit !
Mais que Salazar lui en soit témoin… jamais il n'avait autant désiré une femme.

- Maître, je…

- Tu dois partir. Souffla-t-il.

Jamais des mots ne lui parurent plus difficile à dire.

- Mais…

- S'il te plaît.

Et jamais il n'eut autant envie de la retenir...

- Je… je n'en ai pas envie. Avoua-t-elle du bout des lèvres.

- Moi non plus… admit-t-il. Mais c'est ainsi.

Oui. Il le fallait. Car désormais Voldemort le savait… tôt ou tard, il céderait.
Plus qu'un présage, les Dieux l'avaient décidé.
Ne restait donc qu'une seule et unique question à se poser.

Jusqu'à quand pourrait-il résister ?


Et voilà :DDDD

Comme vous avez pu le voir nous sommes à un tournant de la relation Hermione/Voldemort mais aussi à un tournant dans leur quête de prophétie !
Autant vous dire que les prochains chapitres vont être très mouvementés ! ;)

Qu'en avez-vous pensé ? N'hésitez pas à me donner vos avis dans les commentaires et vos pronostics pour la suite ;) ! J'ai hâte de vous lire !

Je vous dis à la semaine prochaine !
A très vite :-*