Le regard perdu sur le scintillement argenté de sa jambe, Hermione essuya durement la sueur qui ruisselait de son front. Assise sous les derniers rebords du pont assez larges pour lui offrir un peu d'ombre, elle déglutit le souffle court, engourdie par la chaleur qui lui brûlait douloureusement les joues. Mais comme tout ce qui faisait désormais sa vie, la jeune femme ne parvint qu'à s'en résigner dans l'écho d'un profond soupir. Grand Dieu… comment en étaient-ils arrivés là ? Eux ? Des Sorciers ayants marqué l'Histoire ? Elle se le demandait… sûrement qu'ils devaient payer le prix de leur vanité ? L'arrogance et la confiance démesurée qu'ils avaient placé en leur projet ? En leurs chances et leurs capacités ? Mais à quoi bon se torturer… A quoi bon s'interroger quand le Ciel lui-même vous avait abandonné ?! Ne leur restait que la vérité à accepter, que la fatalité à supporter et leur fierté à ravaler… car elle le savait. Désormais ni les Dieux, ni leur magie ne pourrait les sauver.

Cinq jours qu'ils avaient été frappés par une magie inconnue…
Cinq jours d'angoisse, d'horreur, de douleur et de cris à peine contenus…
Cinq jours que le soleil brûlait chaque centimètre de leurs peaux mises à nue…
Cinq jours qu'ils dérivaient, résignés et abattus…

L'avaient-ils mérité ? Sûrement. Mais bien que le Destin ait choisi de les affliger de cette cruelle pénitence, cela ne répondait malheureusement à aucune de leurs questions. Qu'était-il arrivé ? Où étaient-ils ? Comment le bateau avait-il pu être détruit ? Pourquoi ne croisaient-ils aucun autre navire ? Pourquoi n'y avait-il plus la moindre brise ? Pourquoi le Soleil ne s'était jamais couché depuis leur dérive ? Quand tomberait enfin la nuit ? Ces dernières questions en particulier aurait pu sembler stupides… comme sorties tout droit d'un esprit rongé par la folie ! Mais il n'en était rien… car bien qu'elle peine encore à y croire, Hermione ne se trompait pas.

Le Soleil ne bougeait pas.
Pire encore, il ne s'éteignait pas…

Immobile dans le ciel, il les surplombait de ses rayons avec véhémence, les accablant alors d'une chaleur frôlant l'indécence. Lourde, pesante et ahurissante, elle brûlait leurs poumons de son air incendiant, les plongeait dans la plus sévère des déshydratations et allait même jusqu'à faire fumer leur pont ! Redoutant un incendie, ils étaient contraints de l'inonder par la magie ; mais ce cirque semblait infini… Non. Pas un cirque. Une agonie. Oui… cette chaleur était l'œuvre d'un démon. Un jeu sordide, à la cruauté sans nom ! Une punition… qui après plusieurs jours d'assauts constants, la laissait béate d'incompréhension. Par Merlin, cela n'aurait jamais dû être possible ! Un soleil immobile ? Cette idée était risible ! Mais plus elle suffoquait, plus ses doutes commençaient à l'assaillir. Et pour cause… cela faisait cinq jours qu'il n'avait pas fait nuit... Comme si la terre avait cessé de tourner, que les astres s'étaient figés et que le monde entier était à l'arrêt, la lune les avait abandonnés ! Invisible dans les cieux, elle ne s'était jamais montrée! Insensible à leurs sueurs et grimaces déshydratées, elle se laissait désirer, amusée de les voir subir le courroux d'un Soleil déterminé à les tuer! Mais elle n'était pas la seule… Complice de leur agonie, pas un seul nuage n'avait traversé le ciel. Pas un seul souffle de vent n'avait apaisé leur peine ! Pas le moindre courant d'air n'avait répondu à leurs prières ! Pourquoi ?! Pourquoi les éléments se retournaient-ils contre eux ? Pourquoi le Soleil les tourmentaient-ils ? Pourquoi avait-il chassé la nuit ? Comment était-ce seulement possible ?! Par quel mauvais Sort ? Par quelle Magie ? Avaient-ils changé d'Univers ? De Monde ? De Dimension ?! Seigneur… tant de questions agitaient son esprit. Tantôt légères ou écrasantes, discrètes ou hurlantes, simples ou lancinantes, elles habitaient chaque recoin de sa conscience telle une horde de parasites se rassasiant de son ignorance. Et pourtant… malgré toutes ces questions, ne subsistait qu'une seule réponse ; la seule qu'elle considérait aujourd'hui comme une évidence.

Quelque chose avait mis un terme à leur voyage.

Qu'importe qu'il s'agisse d'une force, d'une entité, d'un Dieu ou d'une malédiction ! Qu'importe qu'il s'agisse d'une punition, d'un retour de bâton ou même d'une énigme qui ne demandait qu'à être percée ! Quoi qu'est causé leur déchéance, le « qui » et « le quoi » n'avait plus la moindre importance. Non… Désormais, la seule véritable question qu'ils devaient se poser, était de savoir comment ils pouvaient rentrer. Et pour cause ! Ils étaient à l'arrêt…

Coincés sur un navire délabré que la force de gravité aurait naturellement dû faire sombrer, ils gisaient là… immobile et sans voile, sur une épave dénuée de gouvernail. Et pourtant, elle n'avait pas voulu y croire. Alitée pendant plus de trois jours dans l'obscurité d'une cabine convertie en hôpital, elle s'était bercée de vains espoirs, convaincue que son Maître s'était laissé gagner par l'effroi ; convaincue que rien ne les empêcherait de réparer leurs quelques dégâts ! Quelle innocente pensée était-ce là… Car maintenant qu'elle les voyait, qu'elle les répertoriait et comptait du bout des doigts, la jeune femme se sentait haleter sous le poids de son propre désespoir. Bien sûr elle aurait pu tenter de le nier ! Se persuader qu'ils avaient encore une chance de rentrer et que rien ne serait jamais en mesure de les arrêter ! Mais qu'est-ce que cela lui aurait apporté ? Il n'y avait plus rien à espérer ! Plus rien à sauver ! Car rien n'avait été épargné… De la proue à la poupe, de bâbord à tribord, de la coque aux bardages, des mats à la barre… le fier et insubmersibles Bateau des Durmstrang n'était plus qu'un immense bout de bois parsemé d'échardes. Brisés, les mâts jonchaient le plancher défoncé du pont. Déchirées, les voiles pendaient lâchement sans le moindre vent. Affaissés, les escaliers, rambardes et poutres d'ornements s'éparpillaient sous le soleil cuisant. Eventrée, la coque même du Navire grinçait douloureusement sous l'ardeur des flots la traversant ; sans parler de la trentaine d'étage, des calles et canaux de sauvetage qui étaient restés au fond des Océans… Oui. Elle ne pouvait pas être aveugle ! Se complaire dans la bêtise et l'orgueil ! Il ne leur restait plus rien ; plus rien de fonctionnel, plus rien de fiable, plus rien de seulement sauvable ! Seulement quelques cabines, bibelots, cartes et rames… mais rien de véritablement réjouissant au vu d'un tel drame. Aussi, c'est plus affligée que jamais qu'Hermione gisait parmi les derniers débris qui leur restait. Assommée par la chaleur et la fatalité, elle rôtissait dans le tremblement anxieux de sa fatigue, confuse devant tout ce qui agitait son esprit. Confuse mais aussi profondément démunie devant cet incommensurable manque de logique… Seigneur, elle n'était pas folle. Elle n'était sotte, aliénée ni même idiote ! Et pourtant, rien de ce qu'elle voyait devant elle n'avait le moindre sens ! Ils n'avaient pas coulé… Alors que leur coque était littéralement éventrée, ils n'avaient pas coulé ! Comment ?! Comment une telle chose pouvait-elle exister ?! Certes, cela les avait sauvé d'une mort certaine – du moins, la sienne – mais un pareil miracle ne pouvait rester sans réponse ! Sans explication ! Plus qu'une coïncidence ou qu'une simple chance, leur survie défiait l'intégralité des lois de ce monde ! Magique et Moldu confondu !

Et encore, ce n'était presque pas le plus grave ! Car à ce stade, ce n'était pas tant l'état de leur navire qui l'inquiétait, mais la bien la mer sur laquelle ils flottaient… Une mer qu'aucun marin n'aurait jamais eu l'audace d'imaginer. Une mer simple à l'allure de rêve inespéré, qui avait fait de leur dérive un cauchemar que nul ne devrait jamais endurer. Une mer vide et inhabitée… Pourtant, Hermione n'avait pas immédiatement compris ce que cela impliquait. Confuse, elle avait regardé son Maître se ronger les sang, troublé devant la clarté de leur étrange horizon. Incapable de comprendre les raisons de sa tourmente, elle l'avait entendu maugréer en silence, le souffle court et les mains tremblantes. Mais les raisons d'un tel comportement étaient évidentes...

Il n'y avait pas de courants.
Pas un seul souffle de vent.
Pas le moindre mouvement.
Ni même le remous d'un seul poisson !

Un sublime et implacable néant, qui après plusieurs jours de complète stagnation, ressemblait désormais à un véritable acharnement. Oui… c'était cela. Un acharnement. Une punition injuste et infâmante ! Une véritable condamnation sans procès ni défense ! Hermione le voyait maintenant ; il n'y avait plus rien à essayer de comprendre. Il n'y avait rien à questionner ou à tenter ! Les Dieux les avaient condamnés…. Non contents de le laisser hurler là où personne ne pourrait jamais les entendre, ils les accablaient un peu plus chaque jour de leur suprême véhémence. Pire encore ! Ils riaient devant leurs propres châtiments, les privant ainsi de la fraîcheur du vent et de la force des courants ! Mais sans eux… sans l'espoir d'un simple filet d'air et la joie d'un infime tressaillement de cette mer… ils étaient perdus. Figés. Condamnés à rester ancré dans le vide insolent de cette immensité bleuté ! Car là aussi, un nouveau détail incompréhensible l'avait stupéfié ! Les océans sur lequel ils voguaient n'étaient plus rouge sang… Lavé des vestiges de son Génocide, les eaux avaient retrouvé l'éclat de leur bleu impérial, laissant les deux sorciers tout aussi choqués que profondément béats. Comment était-ce possible ? A quoi bon se le demander… à ce stade, elle pourrait tout aussi bien voir un cochon voler sur un balai qu'elle ne chercherait même pas à s'interroger ! Elle devait l'accepter ; le monde qu'elle connaissait jusqu'alors les avaient quittés. Plus rien n'avait la moindre logique, de sens ou de cohérence… Ni leur voyage, leur quête, leurs rêves et leurs espoirs ; ni le vent, l'océan, le ciel ou le calme de leurs voiles… rien.

- Initiée !

Sortant brusquement de ses pensées, Hermione sursauta à l'appel empressé de son Maître. Un appel inquiet et presque effrayé, qui tandis qu'elle se relevait de son antre ombragé, ne parvînt qu'à la faire douloureusement grimacer… Bien sûr, il fallait qu'il utilise la magie de sa marque pour la localiser.

- Ici Maître !

Elle aurait dû se douter qu'il la chercherait… qu'il s'inquiéterait de ne pas la trouver dans son lit et paniquerait à la seule idée qu'elle soit partie marcher sans lui. Mais que pouvait-elle dire ? Elle détestait rester alitée. Elle détestait attendre son aval pour se lever. Elle détestait rester inactive, à regarder les heures passer sans comprendre un dixième de tout ce qui leur était arrivé ! Mais plus encore… elle détestait se sentir diminuée. Non pas que son Maître soit à blâmer ! Le pauvre avait passé des jours entiers à la consoler, l'entendre hurler et la soigner… Mais être traitée comme une malade ? Une chose dénuée de toute énergie vitale ? Un être condamné à porter les stigmates d'une blessure aussi grave ? Par Merlin, il n'existait rien de plus haïssable. Et pour cause ! Elle était plus que ça ! Elle était plus qu'un corps abîmé, qu'un espoir brisé ou qu'un membre arraché ! Bien sûr sa convalescence serait longue et rien au monde ne saurait apaiser la douleur de la perte de sa jambe… mais elle avait trop lutté pour atteindre les sommets ; trop travaillé pour devenir une Sorcière respectée et revendiquer son droit au respect ! Alors tout perdre ? Sous seul prétexte qu'elle n'était plus « entière » ?! Non… elle ne pouvait l'accepter. Aussi, c'est presque gênée que la jeune femme déglutit à l'apparition d'un Voldemort consterné…

- Hermione ! Gronda-t-il.

Sautant par-dessus les restes de leurs escaliers, le Mage noir accourut vers elle dans l'éclat d'une rage mal réprimée. Une image qui ajoutée à son aura vrombissant de magie, ne parvînt qu'à la faire frémir.

- Maître, je…

- Je t'avais dit de m'attendre ! S'exclama-t-il soudainement.

Ruisselant de sueur et grandit de colère, Hermione se ratatina devant la sévérité de ses pupilles d'ébène. Torse nu, essoufflé et les cheveux détrempés, il semblait avoir traversé un désert dans le seul but de la retrouver. Non pas que cette comparaison soit véritablement erronée… malgré leurs sorts, la température de leur cabine avoisinait les 55 degrés.

- Je sais et je suis désolée, mais vous sembliez occupé et…

- Ta jambe est encore trop faible pour parcourir de trop grandes distances ! Je te l'ai déjà dit !

En encore, le mot était faible ! Horrifié devant son air éternellement buté, il le lui avait hurlé chaque fois qu'il l'avait surprise à se lever, à marcher ou à lâcher la rambarde des escaliers… mais pourquoi sa chère Initiée l'aurait-elle écouté ?! Après tout, ce n'était pas comme s'ils étaient coincés sur un bateau délabré ! Que leur magie était limitée ! Qu'ils n'avaient encore aucune idée de comment rentrer ou que sa survie en dépendait ! Ce n'était pas comme si le pont était jonché de débris, qu'elle pouvait se blesser ou perdre la dernière jambe qui lui restait ! A croire que même la perte d'un membre ne suffisait pas à la raisonner…

- Mais…

- Tu pourrais te blesser ! Trébucher et ne plus être capable de te le relever !

Oui… elle le savait. Plus encore, elle le ressentait dans sa chaire. Un détail qu'Hermione tentait désespérément d'oublier malgré l'insensibilité de sa prothèse, mais qui la frappait un peu plus chaque fois que son Maître l'accablait de ses hurlements inquiets.

- Je sais… souffla-t-elle du bout des lèvres.

- Alors que fais-tu là ?!

- Je voulais voir les dégâts… et essayer de les comprendre.

Par Salazar, n'obéirait-elle donc jamais ?! Il lui avait dit de ne pas s'en approcher ! De rester dans sa cabine, à l'abris du bois branlant et trous béants qui éventraient le plancher ! Mais là encore, elle n'avait pas écouté… Aussi, c'est les dents serrées et le visage atterré que le Mage Noir la jaugea dans l'écho d'un grondement étouffé. Bien sûr, il comprenait sa volonté, son désir d'aider et sa difficulté à rester allongée… Pourtant Voldemort le savait ; aussi louable que soit sa démarche, cette dernière ne la mènerait qu'à désespérer davantage.

- Je doute qu'il y ait quoi que soit à comprendre… Déglutit-il sombrement.

Qu'elle cède au désespoir n'était pas très surprenant… en particulier après la perte de sa jambe. Mais que lui-même reconnaisse leur impuissance ? Leur faiblesse ? Et leur ignorance ? Par tous les Dieux, cela semblait inconcevable ! Et pourtant, Voldemort ne pouvait nier l'évidence plus longtemps. Il avait tenté de percer le mystère du fléau qui les avaient frappé… de comprendre ce qui leur avait échappé et de remonter la piste qui les avaient mené à gésir sur un bateau délabré ! Qu'il s'agisse de ce soleil aveuglant, de cette chaleur étouffante, de cette mer sans courant, de l'absence de vent… il avait tout tenté ! Tout cherché ! Tout étudié ! Sans relâche et dès le premier jour de leur naufrage, il avait parcouru le pont et le reste de leurs étages, étudié la coque et ses impacts, collecté ce qu'il restait de leurs canaux et ramassé leurs maigres rames… Mais ni sa détermination, sa magie, son expérience et ses heures de réflexion, ne lui avait apporté la moindre réponse. Un constat tout aussi aberrant que profondément déconcertant, qu'il vivait désormais comme la plus magistrale des humiliations. Bon sang… Il était un Mage Noir ! Un être Suprême ! Un Dieu sur cette maudite terre ! Rien ne devrait pouvoir le retenir sur cette maudite mer ! Rien ne devrait pouvoir le faire rôtir sous de ce maudit soleil ! Rien ne devrait résister à la Magie de sa maudite Baguette ! Et pourtant… il semblait condamné à l'échec. De quoi ajouter à sa honte une saveur amère, qu'il s'empressa d'éluder d'un rapide hochement de tête.

- Mets ça. Ordonna-t-il soudainement.

Surprise devant une telle sommation, Hermione hoqueta brusquement à la vue d'un chapeau de paille démesurément grand. Usé et de toute évidence déniché dans l'une des armoires qui avaient été épargnées, elle n'eut presque pas le temps de le regarder et sursauta quand son Maître l'enfonça sur sa tête dans un soupir agacé.

- Est-ce vraiment nécessaire ?! Demanda-t-elle.

- A rester sous ce soleil de plomb, tu vas attraper une insolation… Gronda-t-il.

- Et vous ? Demanda-t-elle.

- Je suis immortel très chère… Je ne crains pas les coups de soleil.

A cette réflexion, la jeune femme ne put s'empêcher de le détailler dans un frisson. Pour les coups de soleil, elle ne savait pas… mais pour ce qui était du bronzage ? Par Merlin, c'était une autre histoire ! Plus halée que jamais, sa peau autrefois immaculée s'était vêtue d'un éclat doré, laissant de légères taches de soleil chatouiller son nez. Détrempées, ses boucles ébènes mouillaient son front, tandis que de fines gouttelettes de sueur rampaient sur les lignes de son torse musclé… de ses abdos divinement galbés… et de son dos parfaitement sculpté. Une allure quelque peu aventurière pour un Seigneur des Ténèbres, qui ajoutée aux courbes de ses veines gonflées d'anxiété, échauffa subitement les joues de son Initiée. Seigneur... jamais encore elle ne l'avait vu ainsi ; jamais encore elle ne l'avait vu dans un contexte aussi… physique. Toujours en robe de sorcier ou torse nu devant un feu de cheminée, elle ne connaissait de lui qu'un corps d'Adonis façonné à l'image de milles désirs. Mais maintenant qu'elle le voyait soulever des poutres, enrouler des voiles, grimper sur les cordages et redresser leurs mâts entre deux soupirs las… Par Merlin, Hercule lui-même se serait étouffé d'embarras ! Depuis quand était-il si fort ? Robuste ? Sûrement l'avait-il toujours été… mais qu'elle ne l'avait jusqu'alors jamais remarqué. Aussi, c'est profondément distraite qu'Hermione ne le remarqua pas s'avancer devant elle. Silencieux, il la regarda de haut en bas, inquiet à l'idée qu'elle puisse s'être éraflé un genou entre deux gravas… mais elle, ne vit que la peau tendue de ses bras.

- Comment va ta jambe ? Lui demanda-t-il.

Etonnée, la jeune femme mis plusieurs secondes avant de comprendre sa question. Sa jambe ? Perdue au fond de l'Océan. Pour ce qui était de sa prothèse en revanche, elle ne pouvait le nier… son Maître l'avait véritablement sauvé. Plus qu'une simple reconnaissance, c'était un fait. Une évidence ! Une vérité ! Car sans elle… sans ce membre de magie artificielle… Seigneur, elle aurait sombré. Dépéri. Oscillé entre effroi et déni ! Mais maintenant qu'elle pouvait se lever, marcher et renouer avec sa mobilité, c'était le goût de la vie elle-même dont elle pouvait à nouveau s'enivrer. Car bien que son manque de sensibilité la laisse encore hagard et désorientée, que le souvenir de son moignon ensanglanté la fasse trembler et que le mirage de sa jambe perdue lui donne envie de hurler, la douleur elle l'avait enfin quitté… Emplit d'une magie destinée à accélérer sa guérison, elle ne sentait plus rien des tiraillements, douleurs et frémissement de son moignon. Plus rien des sueurs froides, de la fièvre et des frissons ! Comme si sa prothèse s'était muée un véritable membre, elle s'était surprise à retrouver à un certain équilibre, à pouvoir sauter par-dessus les débris et même à courir ! Pas longtemps, certes ; mais c'était un début. Un début de délivrance. Un début d'acceptation. Un début de cicatrisation. Une chance, dont elle chérissait chaque instant. Car il n'était plus question de se plaindre ou de pleurer désormais… de geindre ou de se lamenter la tête enfouie dans son oreiller ! Oui, un nouveau drame l'avait frappé. Oui, un nouveau traumatisme la hantait. Oui, ses cauchemars ne la quitteraient jamais. Mais elle survivrait… elle guérirait… et grâce à son Maître, elle sourirait à nouveau à la vie qui s'offrait à elle.

C'est donc après un court silence et le cœur emplit de remerciement, que la jeune femme s'entendit haleter dans sa propre émotion.

- Je vous l'ai dit… elle est parfaite.

- Je suis heureux pour toi… mais je n'aime pas t'entendre dire ça. Soupira-t-il.

- Mais c'est vrai ! Insista-t-elle.

- Elle n'est que temporaire… S'agaça-t-il. Du moins, si nous arrivons un jour à quitter ce nouvel enfer.

Mal à l'aise, la jeune femme le vit contempler leur pont avec résignation, terrassé par l'ampleur de leur ignorance. Maudissant plus que jamais la clarté des Cieux qui les surplombait, son visage grimaçait autant que ses mains tremblaient… le laissant las et accablé par la chaleur d'un Soleil enragé. Mais bien qu'elle partage son désespoir, Hermione ne pouvait se résoudre à abandonner. Ils devaient trouver un moyen de rentrer… à vrai dire, ils n'avaient pas le choix ! Leurs vivres et stock d'eau ne tarderaient pas à s'épuiser, la chaleur ne tarderait pas à les – la – tuer, sans parler de leur royaume, de la guerre et de tout ce qui pouvait dégénérer ! Ils ne pouvaient pas rester là, à attendre que les Dieux aient pitié ! Ils devaient créer leur chance, allier leurs pouvoirs et user de toutes leurs connaissances ! Et puis, leur bateau était déjà en miette alors… ce n'était pas comme s'ils avaient encore quelque chose à perdre.

- Peut-être pourrions essayer de partir à la rame ? Dit-elle. Nous avons encore quelques canaux fiables et…

- J'ai déjà testé cette idée. Dit-il sans la regarder. C'était impossible.

- Comment ça ?!

- Ils n'avancent pas…

- Quoi ?! S'étouffa-t-elle.

- Ils n'avancent pas. Répéta-t-il désabusé. Peu importe les rames, la magie ou la force de mes bras, ils… ils font du sur-place… comme si la mer elle-même les retenaient en otage.

Grand Dieu…

- Et… et le bateau ?! On pourrait essayer de le réparer avec…

- Inefficace… aucun sort ne marche. Je pourrais tout aussi bien utiliser ma baguette comme d'un marteau que nous aurions plus de résultats…

Par Merlin, c'était une blague !

- Et les sortilèges de détresse ? Nous pourrions peut-être…

- J'ai tout essayé Hermione. Tonna-t-il durement. Absolument tout ! Les sorts de transplanages, de Morganes, de Magie Noire, de repérage et même de Magie Divinatoire mais… rien ne marche. Rien ne marche !

Ainsi, il n'y avait pas d'issue. Ainsi, ils étaient perdus… condamnés à errer sur une mer abandonnée par les vagues. Résignés devant un horizon s'étiolant lentement dans l'appel hurlant de leur désespoir. Abandonné, seuls et démunis sur le vestige rachitique de leur naufrage…

- Nous sommes coincés… Siffla-t-il les dents serrées.

- Mais il doit bien y avoir quelque chose !

- Non Hermione ! Il n'y a rien ! Rien à part l'eau, le Soleil et cette putain d'épave ! S'écria-t-il enragé.

Il perdait patience… fou de rage, il hurlait son effroi aussi brutalement que mourraient leurs derniers espoirs. Mais comment lui en vouloir ? Ils étaient perdus dans un cauchemar.

- J'ignore comment cela est possible… Et j'ignore ce qui nous amené ici ! Mais ce qui est certain, c'est que nous sommes maudits…

Maudits…

- Et perdus ! Continua-t-il. Sans étoiles, ni vents, ni courants pour nous repérer, allez savoir dans quel Enfer nous nous sommes échoués !

Perdus…

- J'ai tout essayé… gronda-t-il durement. Mais cette chaleur, cet Océan, et ce soleil qui ne se couche jamais… Par Salazar, je n'ai jamais vu une telle chose en plus de 75 ans d'existence.

Tout essayé…

- Ça ne devrait pas être possible ! Je veux dire… aucune magie n'est assez puissante pour réaliser une telle chose ! S'exclama-t-il. Pour évincer la nuit ! Ou figer un astre ! Ou éradiquer les vagues ! C'est… contre nature !

Contre nature …

- Rien ne devrait être capable de transformer un Océan en un paysage aussi stérile ! Aussi… désertique !

Désertique…
Désertique…
Désertique…
Désertique…

Oh Seigneur…

« Hermione, je t'en prie… Tu ne peux pas raisonnablement croire que ces cartes peuvent nous aider ! »

C'était ça…

« Bien sûr que si ! »

Depuis le début…

« Mais enfin, ils ont mis un désert au beau milieu de l'Atlantique ! »

Un désert au beau milieu de l'Atlantique.
Un désert au beau milieu de l'Atlantique.
Un désert au beau milieu de l'Atlantique.

Grand Dieu... c'était ça ! Depuis le début, c'était là ! C'était ça ! Ahuri, Hermione sentit son corps se figer sous la violence d'une nouvelle apnée. Comme frappée en plein cœur, sa cage thoracique se contracta brusquement, laissant ses membres se paralyser dans l'écho de cette soudaine révélation. Par tous les Dieux… comment avait-elle pu ne pas le voir ? Le manquer ?! Rester aveugle alors même que tout concordait ?!

Une Océan stérile.
Un paysage désertique.
Une mer sans courant.
Un soleil irradiant…

Tout cela un sens ! Une raison ! Une existence viable et tangible ! Et pour cause… tout cela avait été répertorié sur la carte latine.

- Oh seigneur…

Cela semblait impossible… inconcevable ! Mais ce paysage, cette chaleur, leurs dégâts, ce manque de logique et leur ignorance ne trompaient pas ! C'était là ! Sous ses yeux et depuis le premier jour, la vérité était là ! Oui… elle le voyait désormais. La carte qu'elle avait étudié d'un œil mitigé disait vrai. Ce bout de papier vieux de plus de mille ans dont son Maître s'était moqué disait vrai ! Et pour la première fois depuis leur naufrage, un début de compréhension la frappait…

- Hermione ?

Mais elle ne l'entendait plus… Agités, les rouages engourdis de son esprit l'assourdissaient de leurs grincements endiablés, la laissant bouche bée devant tout ce qui faisait désormais sens à ses yeux écarquillés. La carte avait raison. La carte était la solution. La carte était la réponse à toute leurs questions ! Et se faisant, elle pouvait les guider hors de cet enfer sans nom… Aussi, c'est sans même s'entendre haleter qu'Hermione fit volteface sans respirer. Elle devait la trouver. Elle devait la trouver ! Elle devait la trouver ! Plus qu'une évidence, c'était une nécessité ! Un détail qui en plus de tous les autres, la fit brusquement accourir vers les escaliers…

- Hermione !

Horrifiée devant sa course effrénée, Voldemort emboîta son pas dans plus de cris qu'il ne put en compter. Mais rien n'aurait pu la convaincre de se retourner… de perdre du temps et de lui expliquer ! Peu lui importait de trébucher ; de s'esquinter ou de boîter ! Elle avait une carte à trouver, une nouvelle piste à étudier et de nouveaux secrets à percer ! Car elle n'avait plus le moindre doute… si ce bout de papier cartographiait cette étrange dimension, cela signifiait que d'autres marins l'avaient traversé ; que d'autres marins avaient subi la chaleur de ce Soleil enragé et le désespoir de cette mer abandonnée ! Mais plus important encore, cela signifiait que d'autres marins avaient réussi à échapper… c'était même certain ! Pour preuve, jamais cette carte n'aurait fini dans leur calle si aucun d'eux n'était parvenu à survivre au naufrage ! Ainsi, ils avaient de l'espoir. Ainsi, ils avaient une échappatoire ! Ainsi ils… ils avaient une chance de rentrer à Poudlard.

Transcendée à cette seule pensée, Hermione s'engouffra à grands pas dans leurs couloirs à moitiés effondrés et courut sans respirer. Elle devait la trouver… où qu'elle soit dans ce maudit bateau, elle devait la trouver !

- Hermione ! Ta jambe !

Oui… elle pouvait le sentir, ses muscles tremblaient sous la brutalité de son adrénaline. Mais quand bien même elle devrait finir sa course en rampant, elle n'avait pas l'intention de ralentir, de s'arrêter ou d'hésiter à courir ! Cette carte était leur seule chance de survie…

- Hermione arrête !

C'est donc sans prêter attention à ses cris que la jeune femme entra en trombe dans leur cabine. Jonchée de morceau de poutre, d'éclat de verre, de draps ensanglantés, de compas brisés et feuilles déchirées, il ne restait plus grand-chose de la luxueuse demeure du Capitaine. Eventré par la force de leurs impacts, le point d'observation sous-marin avait explosé, la cheminée s'était écroulée, la bibliothèque s'était renversée, les vitrines avaient coulé et même le plancher semblait sur le point de céder… ne restait que leur hôpital de fortune, installé non loin de leurs seules rations de vivre et stock de potions encore valides. Oui… il ne faisait aucun doute qu'un tel spectacle aurait réussi faire blêmir le Directeur de Durmstrang ; et pourtant, c'est sans même y jeter un regard qu'Hermione empoigna les malles que son Maître avait empilé à la sueur de son front.

- Hermione !

N'écoutant plus que le palpitant de son cœur, elle ignora jusqu'à la brûlure de sa marque et s'acharna malgré la douleur. Elle ne pouvait pas renoncer… la carte était là, dans l'une de ses malles, attendant patiemment d'être trouvée ! Attendant patiemment qu'une âme éclairée vienne enfin exhumer tous ses secrets ! A supposer qu'elle n'ait pas disparu avec la marée… non ! Non, elle ne pouvait l'envisager ! Elle ne pouvait se tromper ! Elle l'avait elle-même rangé après l'avoir étudié – certes cela remontait à plus de dix jours… mais elle était forcément là ! Elle était forcément dans cette malle !

- Bon sang, mais qu'est-ce qui te prend ?!

Stoppée dans son élan par la poigne d'un Voldemort hurlant, Hermione hoqueta brusquement quand il la fit pivoter avec exigence. Pourtant, elle n'afficha ni crainte, ni révolte ou agacement… seulement un profond soulagement, que son Maître détailla sans comprendre.

- Vous avez trouvé ! S'exclama-t-elle.

- Comment ?!

- Vous avez trouvé ! Vous… avez trouvé ce qui nous échappait !

Sidéré, le Mage la vit se détourner sans s'expliquer, les joues rouges et le souffle haché. Par Merlin, mais de quoi parlait-elle ? Trouvé ?! Mais trouvé quoi ? Ils n'avaient fait que constater leurs faiblesses entre deux cris de rage ! Il n'avait rien trouvé ! Rien élucidé ! Et pourtant, c'est transit d'une joie inédite qu'il la vit plonger tête la première dans l'une des dernières malles de leur cabine. Insensible à ses remontrances ou aux grondements de sa colère latente, elle fouillait d'un air déterminé, détaillait leurs cartes avec avidité, murmuraient les lèvres pincées et s'enfiévrait sous son apnée. Une image étrange qu'il contempla bouche bée, avant qu'elle ne s'exclame d'un cri endiablé.

- Elle est là !

Elle l'avait trouvé… elle l'avait trouvé ! Elle l'avait trouvé ! Au fond de leur malle, repliée sur elle-même et froissée par le remous des vagues, la réponse à toutes leurs questions était là !

- Mais enfin de quoi parles-tu ? S'agaça-t-il.

- De la carte !

- Quelle carte ?!

Trop agitée pour lui expliquer le raisonnement de son esprit affolé, Hermione ne prit pas la peine de se relever et la déplia à même le sol sous ses yeux écarquillés. Il n'avait plus à s'en faire… car bien qu'aucun d'eux ne comprenne encore ce qui leur était arrivé, la carte elle savait. Une carte désormais sienne, dont les rebords cornés et milles promesses, la firent frémir dans un sursaut d'ivresse. Seigneur… c'était là. Sous ses yeux, les réponses étaient toute là ! Mais suffiraient-elles à les sauver de leur naufrage ? Elle l'espéra… Aussi, c'est dans l'anxiété d'un dernier tremblement que la jeune femme se pencha sur les ombres de son encre. Envoûtée par son œuvre, elle ne vit pas son Maître s'agenouiller devant elle et la détailler d'un drôle d'œil. Et pour cause ! Devant elle gisait le mot qu'elle cherchait… le seul capable de les sauver.

- Désert…

Elle ne rêvait pas… elle avait vu juste ! Depuis le début la réponse était là ! Depuis le début !

- Désert ! Répéta-t-elle avec force.

- Quoi ?!

- Regardez ! S'exclama-t-elle. Désert ! C'est écrit en toute lettre ! Désert !

- Désert ?! Mais enfin qu'est-ce que…

Ebranlé, Voldemort se tu aussi violement que son Initiée…

Désert…
Désert…
Désert ?!

Incapable de respirer, son regard s'ancra sur le mot qu'elle ne cessait de répéter. Un mot qu'il avait à peine remarqué. Un mot dont il s'était toujours moqué ! Mais maintenant qu'il le voyait… que la chaleur de ce maudit soleil les laissait agoniser et que les Dieux semblaient les avoir abandonnés… son sens jusqu'alors caché, le fit brusquement haleter. « Désert ». Par Salazar, se pouvait-il que… Non… Non, il ne pouvait y croire ! C'était de la folie ! Un mirage ! Un mensonge destiné à raviver de faux espoirs ! Et pourtant, le latin ne mentait pas ; pas plus que les dessins délavés de cette étrange carte…

- Désert ! Cette mer est un désert ! Continua-t-elle. Un désert !

- Un désert…

Muet au son de ce seul mot sur ses lèvres, le Mage sentit son esprit s'embraser à mesure que son souffle s'épuisait. Un désert… un désert… un désert… Bon sang, un désert !

- Vous l'avez-dit vous-même ! Aucune magie n'est capable de transformer un Océan en un paysage aussi stérile !

- Mais…

- Ce n'est pas un océan ! S'extasia-t-elle. Ce n'en a jamais été un !

Un désert…
Un Océan qui n'en avait jamais été un…

Par tous les diables, était-ce possible ?! Mais comment ? Comment ?! Cela défiait toutes les lois de la magie ! Du bon sens et de leur monde ! Et quand bien même, comment étaient-ils arrivés ici ? Dans ce désert d'eau stagnante et de soleil irascible ?! La carte stipulait qu'il se trouvait au large ! Or, ils n'avaient jamais changé de cape… Pire encore, ils étaient prêts à faire marche arrière ! A rentrer à Poudlard et à partir en guerre ! Et pourtant, les Océans en avaient décidé autrement. Une incompréhension et un mystère, qui plus que tous les autres le laissèrent hagard sur un sol jonché d'éclat de verre… Désemparé, le Mage n'osa plus parler devant la carte qu'Hermione contemplait avec avidité et passa une main lasse dans ses cheveux détrempés. Incapable de comprendre la gravité de ce que ces mots impliquaient, il sentit une migraine l'enfiévrer dans un râle étouffé ; ou était-ce à cause des 55° qui les asphyxiaient ? Il le savait plus… à vrai dire et à ce stade de sa vie, Voldemort n'était même plus certain de comprendre le sens de sa propre magie…

- Vous comprenez ce que ça veut dire ?! Cette carte nous montre un chemin !

- Un chemin ?! S'étouffa-t-il. Mais… vers quoi ?

A sa question, la jeune femme ne sut que répondre. Un chemin… Un chemin… oui, elle en était certaine ! Plus qu'une sensation ou qu'un mirage, c'était l'évidence même ! Mais vers quoi ? Elle ne savait pas précisément… Pourtant et bien qu'elle ne sache pas exactement pourquoi, un vif pressentiment la secoua à mesure que sa main se referma sur sa carte. Froissés sous ses doigts, les contours de son parchemin la firent frissonner… comme un appel lointain que l'absence de vent et le soleil de plomb ne cessaient d'étouffer. Mais bien que ses murmures se perdre entre ses pensées, son cœur lui les entendaient. Légers et inaudibles, ils agitaient son âme d'un écho irrépressible. D'une clameur héroïque ! D'un espoir dangereux ! Mais fatalement irrésistible…

- Un chemin… souffla-t-elle pour elle-même.

Oui… elle pouvait le sentir. Cette carte n'était pas qu'une réponse ! Elle… elle était une piste !

- Un chemin caché derrière le désespoir de cette mer désertique…

« Cette île serait maudite. Un lieu emplit de magie oubliée, que seules les âmes des marins égarés peuvent trouver »

- Un chemin que nul ne pouvait emprunter sans en payer le prix…

« Ce voyage nous mènera aux limites du monde connu… sorcier et moldu. Nous serons confrontés à une magie inconnue, à laquelle aucun homme n'a jamais survécu. Et ce, sur un océan dont nul homme n'est jamais revenu… »

- Que dis-tu ?! Souffla-t-il sans comprendre.

Seigneur… comment avait-elle pu ne pas le voir ?!

- Les Pirates…

- Qu… quoi ?!

- C'est ça !

- Mais enfin…

- Ne le voyez-vous pas ?! S'exclama-t-elle brusquement. Les raisons de notre naufrage, la magie qui nous a fait dériver, cette carte et l'existence même de ce désert… tout cela nous ramène inlassablement à notre quête !

Oui… elle ne pouvait pas se tromper. Car alors même que leur quête semblait leur échapper, un nouvel espoir la faisait vibrer ; celui de trouver ce qu'ils étaient venus chercher, de comprendre le sens du Sort qui les avaient frappés, de revenir victorieux malgré la fatalité… et d'enfin exhumer l'île maudite que l'Océan cherchait à leur dérober…

- Tu n'es pas sérieuse… gronda-t-il les lèvres pincées.

- Bien sûr que si !

- Hermione… notre quête s'est achevée dès l'instant où ce bateau a été éventré !

- Peut-être pas ! Insista-t-elle. Peut-être que tout comme cette mer qui n'en est pas une, les apparences nous trompent ?! Peut-être que nous sommes précisément là où nous devons être pour accomplir notre mission ?!

Seigneur… Avait-elle raison d'y croire ? Avait-elle raison d'y voir un sens alors que son Maître lui-même n'y croyait pas ? Elle ne savait pas, mais ne pouvait renoncer à cet espoir.

- Vous avez parlé d'une île maudite ! S'exclama-t-elle.

- Je t'ai parlé d'une île cachée au cœur des tempêtes ! Rectifia-t-il.

- Mais que seules les âmes des marins égarés pouvaient trouvé !

- Et donc ?!

- Et donc nous sommes perdus ! S'écria-t-elle l'esprit en ébullition.

- Hermione… Soupira-t-il affligé. Je comprends ce que tu veux dire mais… franchement, quel lien pourrait avoir cette île avec notre situation ?! Avec cette carte ou… ce désert ?!

Hésitante, la jeune femme se mordit la langue… peut-être avaient-ils raison de jouer la carte de la prudence ? De prendre du recul et de faire preuve de clairvoyance ?! Mais même si elle l'avait voulu, elle n'en avait pas le temps…

- Je ne sais pas… admit-elle. Mais je ne vais pas m'arrêter là !

- Hermione…

- Je trouverais ce lien ! Je trouverai ce chemin !

Trouver ?! Mais pour aller où ?! Et comment ?! Ils ne savaient même pas où ils étaient ! Dans un désert ? La belle affaire ! Cela n'éclairait pas davantage leur situation ! Cela ne répondait pas davantage à leurs questions ! Pire encore, cela en rajoutait de nouvelles ! A croire que cet enfer n'en finirait jamais…

- Hermione, je t'en prie… calme toi. Dit-il devant les tremblements de sa jambe. Nous ne savons rien de cette carte…

- Mais elle sait des choses !

- Des choses ?! Cette carte à plus de mille ans ! S'étouffa-t-il.

- Justement ! La plupart des légendes sur les pirates datent de cette ère ! Et puis, si des marins ont pris le temps d'écrire cette carte, cela signifie qu'ils ont traversé les mêmes épreuves que nous ! Le naufrage, l'incompréhension, le soleil, la soif… ils ont tout vécu ! Expliqua-t-elle sans respirer. Mieux encore, ils y ont survécu ! Cela veut donc dire que tout comme eux, nous avons une chance d'y échapper !

Il voyait où elle voulait en venir… plus encore, il comprenait son engouement et frénésie ! Pourtant et alors qu'il la voyait déjà se relever dans un second élan d'adrénaline, le Mage Noir sentit un violent tourment agiter son esprit. Par Merlin, si elle disait vrai alors… cela signifiait que cette carte n'était pas erronée. Que ses dessins, citations et mots latins n'étaient pas l'œuvre d'esprits désœuvrés ! Que ses présages n'étaient pas mensongers ! Et que ses repères et étoiles n'étaient pas inventés ! Mais si une telle chose était possible… si ce bout de papier était aussi crédible que son Initiée se plaisait à le dire alors… alors le pire était à venir.

Epouvanté à cette seule pensée, Voldemort sentit sa magie crépiter depuis ses poings serrés, symptôme hurlant de la terreur qui commençait à le faire haleter. Il avait vu beaucoup de chose au cours de sa vie… des choses dénuées de sens magique et d'explications logiques ; des choses que personne au monde ne pouvait imaginer à part lui ! Mais ce que cette carte prédisait aujourd'hui ? Par tous les dieux… cela surpassait la plus indécente des folies. Car Hermione se trompait ! Aussi prometteuse soit-elle, elle n'était pas la clé de leur survie ! Tout au contraire, elle… elle était le messager de leur avenir. Le guide de leur déchéance ! La liste explicite de leurs futures tourmentes ! Une évidence dont elle ne semblait rien voir, mais qui le laissa pétrifié devant le mirage de leurs prochains cauchemars…

- Il faut l'étudier ! S'exclama-t-elle. Il faut percer ses secrets !

Elle était transcendée… enjouée… surexcitée ! Une image que son Maître contempla sans respirer, mais dont le manque de lucidité le fit brusquement grimacer. Par Merlin, elle se laissait aveugler ! Et se faisant, elle manquait les prémices d'un nouveau danger ! Un danger qu'il n'aurait lui-même jamais imaginé, mais dont l'imminence l'assourdissait déjà de son pas endiablé…

- Attend… Souffla-t-il désemparé.

- Quoi ?! Non ! Il faut s'y mettre maintenant !

- Hermione, s'il te plaît…

- Non ! Se révolta-t-elle outrée. Nous enfin une piste à étudier ! Nous ne pouvons pas attendre au risque de voir notre situation empirer !

- Tu es sûr de ça ?! Demanda-t-il sceptique.

Ahuri, la jeune femme ne sut comment réagir. Mais enfin, que se passait-il ?! Elle savait qu'il était du genre pragmatique… mais cette carte était leur ticket de sortie ! Leur réponse ! Leur seule chance de survie ! Pourtant ce n'est qu'un regard inquiet et des mains tremblantes qui l'accueillirent…

- Mais… nous avons une carte ! Répéta-elle sans comprendre. Vous vous devriez être aussi heureux que moi !

- Heureux ?! Hermione, ne vois-tu pas ce qu'il se passe ?

- Mais…

- Cette carte est exacte ! S'horrifia-t-il. Une carte de plus de mille ans, trouvée au fond d'une malle !

Etonnée devant l'urgence de son ton, la jeune femme balbutia brusquement sous l'étau de ses pupilles rougeoyantes. Elle ne rêvait pas, il… il était effrayé. Non, pas effrayé… Sidéré. Comme si un danger plus grand qu'eux s'apprêtait à les frapper, son aura grandissait à mesure que sa magie s'éveillait, l'enveloppant alors de ses vagues brutales et désordonnées. Une réaction toute aussi surprenant que démesurée, qui la laissa chancelant dans les cris de son serpent paniqué.

- En quoi est-ce un problème ? Demanda-t-elle. La majorité de vos cartes sont très anciennes et…

- Bon sang, réfléchie ! Cette carte ne comporte pas uniquement un désert !

- Quoi ?

Affligé, le Mage Noir la rejoint en deux enjambées et détailla son trésor dans un soupir agacé. Ce que son Initiée pouvait être butée ! Pourtant, c'était évident ! Criant ! Ahurissant ! Mais non… heureuse et soulagée, elle ne voyait que la réponse que son cœur se languissait d'entendre. Une réponse certes pertinente, il ne pouvait le nier… mais qui n'était en réalité que le reflet distordu d'un mensonge savamment tissé. Car il ne pouvait pas se leurrer ! Ce qui les attendaient dépassaient tout ce qu'ils pouvaient imaginer…

- Regarde… Dit-il en la pointant du doigt.

- Je ne comprends pas.

- Le monde Hermione ! Regarde le monde !

- Mais…

- Il est plat ! S'écria-t-il. Sur cette carte, le monde est plat !

Figée sous la violence de ses mots, Hermione sentit une sueur froide ramper dans son dos… Par Merlin, il n'était pas seulement sidéré, mais véritablement mortifié. Un détail qui ne parvînt qu'à l'effrayer tandis qu'il agitait la carte sous son nez.

- Oui… mais je ne…

- Et ce n'est pas le pire ! Gronda-t-il ahurit.

- Le pire ?!

- En plus d'un désert, les trois quarts des terres et des Océans que nous connaissons n'existent pas ; des volcans et des serpents de mer sont dessinés de part et d'autre de l'Atlantique, des noms d'étoiles inconnus sont inscrits dans un ciel dépourvu de la moindre nuit, une liste d'annotations latines répertorie chacun des monstres marins appartenant à la Mythologie Nordique et Poséidon lui-même est représenté siégeant sur un trône d'aigue-marine !

Sonnée devant un tel descriptif, Hermione ne comprit pas où il voulait en venir. Oui, cette carte était graphique, un peu désuète et accès sur la mythologie grecque et nordique… mais cela ne voulait rien dire !

- Je… je ne suis pas certaine de vous suivre.

Accablé, Voldemort serra les dents pour ne pas hurler. Bon sang, elle le faisait exprès !

- J'ignore si les pirates ou… cette île maudite ont le moindre rapport avec tout cela ! Mais si cette carte a vu juste pour le désert, alors il se pourrait bien qu'elle… qu'elle le soit également pour le reste.

Interdite, la jeune femme ne réagit pas immédiatement à l'hypothèse d'une telle prémonition. Confuse, elle se contenta de regarder ses doigts courir sur les dessins et symboles délavés qui ornaient le parchemin froissé. Des symboles qu'elle n'avait jusqu'alors jamais vraiment détaillé… avant qu'un profond effroi ne la fasse subitement trembler. Juste pour… pour le reste ? Juste pour le reste ?! Pour le reste comme… les serpents de mers ? Poséidon ? Les volcans et les monstres ?! Non… Non, ce n'était pas possible ! Tout cela n'était que légendes marines et contes millénaires ! Un recueil de fantaisies désuètes appartenant au monde du rêve et de l'imaginaire ! Rien ne pouvait être réel ! Rien ! Et pourtant… son Maître tremblait. Transcendé par une crainte plus grande que ses ténèbres, sa magie défensive s'agitait tout autour d'eux ; et avec elle, le présage d'un nouveau fléau tombant des Cieux...

- Attendez… vous… vous voulez dire que…

- Je ne sais pas. Dit-il brusquement. Et en toute honnêteté, je crois que je ne veux pas le savoir…

Non… Non, non, non, non ! Elle ne pouvait pas… elle… elle ne pouvait pas y croire ! Ce n'était pas concevable ! Pas même imaginable ! Un monde plat ?! Des Dieux Nordiques ?! Un ciel sans nuit ?! Non… non, rien de tout cela n'était crédible ! Ni en pensée, ni en théorie, ni même en Hypothétique conceptualisation Magique ! Plus que du bon sens, c'était une évidence ! Une certitude scientifique et indélébile ! Un principe aussi fondamental que basique ! Mais bien qu'Hermione tente fermement de les tenir pour acquis, ses pensées commencèrent à s'étioler sous le feu avide de son esprit. Elle ne voulait pas y croire… mais si elle se risquait à l'imaginer ? Ou à le concevoir malgré l'absurdité ? Se pouvait-il que… ou était-il possible que… Non ! C'était de la folie ! De la folie ! De la folie ! Ils n'avaient pas changé de monde ! Ils n'avaient pas changé de planète ! Ils n'avaient pas changé d'Univers ! Mais ils avaient fait naufrage dans un désert… Un détail et une concordance qui finirent par faire pâlir la fièvre de ses lèvres.

- Mais… mais c'est… Bégaya-t-elle.

- Je sais.

- Non, je… enfin, je veux dire… ça n'aurait aucun sens ! Souffla-t-elle.

- Hermione, nous sommes coincés sur une mer sans courant où la température avoisine de 55 degrés à l'ombre…Grimaça-t-il atterré. Crois-tu vraiment que ce monde ait encore un sens ?

Ce monde…
Ce monde !
Mais pas le leur…

- Alors… alors nous serions entrés dans une… autre dimension ?! Demanda-t-elle sans y croire. Un autre monde où la terre serait plate ? Où la Nuit n'existe pas et… où notre magie ne fonctionne pas ?!

A sa question Voldemort serra amèrement les dents.

Il ne voulait pas le dire.
Il ne voulait pas y croire !
Mais la vérité gisait là...

- Je ne sais pas… mais où que nous soyons, je ne crois pas me tromper en affirmant que nous sommes très loin de Poudlard.

Très loin de Poudlard…

- Et j'avoue que ça me dépasse…

Non. Il mentait. Hermione le vit à son regard inquiet et grimaces réflexes, il n'était pas seulement dépassé… mais indéniablement et profondément terrifié. Mortifié ! Horrifié ! Et même plus encore ! Car ils ignoraient encore tout de ce qui les attendaient… et que jusqu'à preuve du contraire, leur magie semblait incapable de les sauver.


Hello tout le monde ! Gros chapitre aujourd'hui ! Comme vous pouvez le voir, des pistes de réponses se dessinent ;) et ils ne sont pas au bout de leurs surprises ! En tout cas, j'espère que ça vous aura plu !

Je vous dis à la semaine prochaine pour de nouvelles aventures ;)