Souviens-toi de moi…

Chapitre 7

« La petite maison dans le bois »

Les jours passèrent et Terrence venait voir Eliza autant qu'il le pouvait pour voir Juliette. Cette dernière se mit attendre l'arrivée de Terrence avec impatience. Elle se sentait un peu déloyale envers Daniel, mais la presence de Terrence la rendait heureuse. Et puis elle ne faisait rien de mal, elle parlait avec le copain d'Eliza ou du moins un de ses prétendants, car Eliza en avait beaucoup…

Un jour Daniel et Eliza n'étaient pas là et Terrence arriva l'improviste. Eliza ne l'attendait pas, sinon, elle ne serait pas sortie avec son frère. Ces derniers étaient allés voir d'autres prétendants et prétendantes. Daniel frustré de n'avoir rien chez Juliette, se tournait vers d'autres filles plus susceptibles de se laisser faire. Mais ça ne voulait pas dire qu'il n'aimait pas Juliette ; il était fou d'elle, mais espérer qu'elle se laisse faire sans sa mémoire… Autant attendre que la neige devienne noire !

Terrence avait surveillé les vas et viens des Legrand, il savait que Juliette était seule. La grande-tante et les parents étaient en voyage pour quelques jours.

- Terrence, dit Juliette, bonjour

- Bonjour… Juliette

Il voulait l'appeler « Taches de son » mais il dut presque se mordre la langue pour ne pas le faire.

- Eliza n'est pas là… commença Juliette

- Mais, toi tu es là…

- Oh… Mais ça ne serait pas convenable que je te vois, sans chaperon

- Un chaperon ? Je ne suis pas ton prétendant…

- Ce n'est pas l'impression que j'ai eue au bal des débutantes…

Terrence sourit.

- D'accord, je te l'accorde.

- Tu es le prétendant officiel d'Eliza et moi je suis fiancée à Daniel…

- Alors, il n'y a pas de problème…

- Pas de problème avec un garçon et une fille seuls ? D'où tu sors, toi ?

- On ne fait que parler Juliette, dit-il en souriant

- D'accord, comme tu veux. Je voulais me promener dehors…

- Je t'accompagne…

Ils sortirent et se dirigèrent vers les écuries. Une fois à l'intérieur, Juliette eut un petit vertige, comme si l'endroit lui était familier. Mais c'était très rapide. Terrence vit son trouble.

- Juliette, tu vas bien ?

- Oui, j'ai juste un peu le vertige. On va voir les chevaux ?

- D'accord

Elle entra dans l'écurie, c'était la première fois depuis qu'elle habitait chez les Legrand, après l'accident, mais c'est comme si elle connaissait l'endroit. Elle courut vers les chevaux qui l'accueillirent joyeusement

- On dirait qu'ils te connaissent, dit Terry

- J'ai l'impression de les connaître aussi, c'est probablement avant l'accident…

- Probablement, dit Terry qui savait que c'était bien avant ça

Il ne pouvait pas lui dire que son « fiancé » et sa sœur l'avait envoyé vivre dans une écurie jadis et que les chevaux la connaissaient parce qu'elle vivait avec eux littéralement.

- Tu veux monter ? Demanda Terrence

- Je ne sais pas si je sais monter, je ne m'en souviens pas…, dit Juliette

- Tu peux monter avec moi…

- Avec toi… ?

- Sur le même cheval…

- Oh mais, il faudra que je tienne par la taille…

- Tu seras devant, c'est moi qui vais te tenir par la taille…

Juliette hésita un peu. Terrence lui inspirait confiance, mais être si près de lui… Ça ne pouvait être qu'une sensation délicieuse qu'elle n'avait aucune envie de se passer. La tentation était trop forte.

- D'accord, dit-elle enfin

Terrence la regarda. Depuis qu'elle habitait chez les Legrand, ses cheveux étaient bouclés sur ses épaules ou en papillotes comme ceux d'Eliza et elle était toujours vêtue élégamment. Mais c'était toujours sa demoiselle Tarzan d'autrefois.

Terrence attela un cheval et ils montèrent, ils galopèrent doucement et lentement dans le bois. Terrence avait les cheveux de Juliette sur son visage et il ne se lassait pas de sentir l'odeur de ses cheveux. Comme il lui manquait, comme toutes les fois où il était avec Juliette, il ne voulait pas la quitter. Il voulait rester ainsi pour toujours. Ils arrivèrent à une clairière où il y avait une petite maison inhabitée. Ils s'arrêtèrent pour marcher un peu.

- Regarde, Terrence, la petite maison !

- On dirait qu'il n'y a personne. C'est certainement un refuge pour ceux qui se perdent

Juliette courut vers la cabane et ouvrit la porte.

- Ce n'est pas verrouillé ! Dit Juliette

- Ceux qui se perdent ou qui se retrouvent au milieu d'un orage ou d'une tempête, peuvent y entrer pour s'abriter, dit Terrence

Juliette entra dans la maisonnette. Terrence attacha le cheval à un arbre et la suivit dans la maison. A l'intérieur c'était propre. Il y avait une petite salle de séjour et trois petites chambres à coucher, une salle de bain et toilette et une petite cuisine. Il y avait aussi une cheminée dans la salle de séjour.

- C'est mignon ici, dit Juliette, on peut s'asseoir un peu Terrence ?

- D'accord…

Juliette prit place sur le grand canapé et Terrence sur le fauteuil. Il y en avait d'autre à deux places.

- Alors, dit Juliette, Terrence, tu aimes faire du théâtre ?

- J'adore être sur scène. Ça a toujours été mon rêve

- Tu aimes jouer Roméo ?

- C'était mon premier grand rôle. Tu aimes la pièce, as-tu dit ?

- Oui, à cause du nom Juliette, et bien que ce soit en ancien anglais et que parfois le sens de la phrase veut dire autre chose…

- Comme… ?

- Par exemple ; la phrase que j'ai récité au country club ; « O Roméo, Roméo, pourquoi t'appelles-tu Roméo… ? » La façon dont la phrase est écrit, ça veut dire ; où es-tu Roméo ? en ancien anglais….

- Wow, beaucoup de gens ne savent pas ça… Je suis impressionné…

- J'ai eu le temps de lire à l'hôpital, de lire, d'analyser, de relire…

- Je vois. Juliette… Tu veux m'aider à pratiquer mon rôle ?

- D'accord, Roméo…

Il s se mirent à réciter les rôles de Roméo et Juliette en s'amusant, pendant un moment. Juliette faisait même l'accent britannique.

- J'aurai aimé que tu sois l'actrice qui me donne la réplique sur scène

- Oh non, je le fais que pour m'amuser, je ne pourrai pas le faire sur scène…

- Balivernes ! Dit Terrence, je peux te mettre sur ma liste des remplaçantes ?

- Tu veux rire ?

- Non, je suis très sérieux

- Euh… Je ne sais pas trop…

- Allons Juliette, il y a une chance sur un million qu'on ait besoin de toi

Juliette réfléchit un peu. On aurait jamais besoin d'elle sur scène et pourquoi pas ?

- D'accord, dit-elle, de toute façon à moins que toutes les actrices se retrouvent malades en ou indisposées en même temps… Il n'y a aucune chance que tu aies besoin de moi !

- On ne sait jamais, dit Terrence, Juliette, je sais que le sujet t'ennuie, mais tu as pensé à ton oncle William ?

- Pourquoi ce sujet t'intéresse-t-il ?

- Parce que tu ne sais pas qui tu es et ça ne serait pas sage de prendre une si grande décision, comme épouser Daniel sans ta mémoire. Et si ta mémoire revenait et que tu te rendais compte que épouser Daniel n'a jamais été sur ta liste des priorités ?

Juliette resta silencieuse pendant un moment. Terrence avait raison. Si sa mémoire revenait et elle se rend compte qu'elle ne voulait pas épouser Daniel ? Mais quelqu'un d'autre ? Pourquoi ne pas attendre la bénédiction de l'oncle William et sa mémoire ?

- Mais la grande tante et Mme Legrand sont d'accord, dit-elle, elles veulent que j'épouse Daniel le plus tôt possible…

- Juliette, ton oncle William est un des hommes les plus riches d'Amérique. Il n'est pas marié. Tu es sa seule héritière… Ne le prends pas mal !

- Tu crois que ses parents sont d'accord à cause de mon héritage ?

- C'est une possibilité…

Terrence avait-il raison ? Il lui inspirait confiance. Il était intéressé par Eliza, mais si tendre et gentil avec elle.

- Tu as raison. Mais j'avais décidé de rien faire sans ma mémoire de toute façon

- Daniel va essayer de te faire changer d'avis…

- Oh, il essaye….Il n'a pas réussi à me convaincre de l'embrasser… Pourquoi es-tu si gentil avec moi ?

- Parce que je te trouve sympathique … Et j'aime tes taches de son

« Taches de son » elle avait déjà entendu ça. « Melle taches de son »… Mais où ? Terrence vit son expression et s'inquiéta.

- Juliette ? Ça va ?

- Oui, dit-elle, Terrence c'est gentil tout ça mais je croyais que tu t'intéressais à Eliza…

- Eliza est une amie…

- Mais elle est folle de toi…

- C'est pour ça qu'elle a tant de prétendants ?

- Tu es au courant…

- Oui et je m'en fiche, car la seule raison qui me pousse à fréquenter Eliza, c'est toi…

- Oh… dit Juliette troublée

Elle se sentait attirée par Terrence, comme elle n'avait jamais été attirée par Daniel et ça la troublait.

- Terrence pourquoi me fais-tu ça ?

- Qu'est-ce que je fais ?

- Tout ça, tous ces mots… Je suis fiancée !

Terrence ne pouvait pas résister à la tentation. Il s'approcha d'elle sur le canapé.

- Justement, tu crois que si tu aimais Daniel, tu te sentirais comme ça avec moi ?

- Comment oses-tu ? Dit-elle en s'éloignant en colère pour cacher son trouble, Daniel m'a sorti du néant !

Terrence poussa un soupir exaspéré.

- Tu vas me dire que si un clochard t'avait reconnu comme sa fiancée, tu l'aurais cru !

- Pourquoi dis-tu ça ? Tu me connaissais avant ? Si oui, où étais-tu ? Pourquoi ne m'as-tu pas sauvé ?

- Je…

- Daniel m'a sauvé…

Oui, Daniel l'avait trouve quelques jours avant que le détective que Terry avait engagé n'arrive. S'il avait été là quelques jours plus tôt, les amis de Candy et lui l'aurait trouvé et ça aurait été toute une autre histoire…

- Tu peux me ramener, s'il te plait ?

- Mais Juliette…

- S'il te plait, je n'ai plus la force de continuer cette discussion…

Ils retournèrent chez les Legrand à cheval comme ils étaient venus. Pendant le trajet Terrence parla dans son oreille. Il ne pouvait pas la laisser comme ça.

- Juliette excuse-moi, je ne voulais pas te mettre en colère…

- Qu'est-ce que tu veux Terrence ?

- Je veux être ton ami, je veux te voir seul, si tu le veux seulement, je veux qu'on parle de tout et de rien… Je veux que tu apprennes à me connaître

Juliette resta silencieuse, car les sentiments qu'elle éprouvait quand Terrence était là, devenaient de plus en plus forts. Mais il y avait une raison pour tout….

- Moi aussi je veux être ton amie, dit-elle enfin, mais je ne pense pas que Daniel et Eliza seront d'accord…

- Ils n'ont pas besoin de le savoir…

- Que veux-tu dire ?

- On peut se voir à la maisonnette de temps en temps pour parler

- Mais ça serait comme tromper Daniel…

- Tu veux qu'on soit amis ?

- Oui mais…

- Tu crois que tu fais quelque chose de mal en étant mon amie ?

- Non

- Alors ne te sens pas coupable. Je peux te jurer que tu ne fais rien de mal

- Tu sais quelque chose que je ne sais pas ?

- C'est toi qui as perdu la mémoire, non ? Dit-il en riant

- D'accord, Britannique… fit-elle riant aussi

Ils éclatèrent de rire tous les deux, la tension était finie. Ils retournèrent au manoir, prirent le thé et Terry s'en alla. Dorothée, une des bonnes des Legrand regardait la situation avec tristesse. Candy s'était humiliée pour sauver son emploi jadis. Elle décida de l'aider, après tout ce temps, après avoir observé comment les Legrand lui mentait. Elle suivit Terrence dehors.

- M. Grandchester…

- Oui ?

- Mon nom est Dorothée…

- Bonjour Dorothée. Je peux faire quelque chose pour vous ?

- Je voulais vous parler de Melle Juliette, je travaille chez les Legrand…

- Oui, je vous reconnais. Pas ici, dit Terry, venez me rejoindre au café du coin dans 5 minutes

- D'accord

Cinq minutes après, ils étaient assis dans un coin reculé du café.

- Merci, Monsieur de m'accorder votre temps, dit Dorothée

- Vous vouliez parler de Juliette…

- Oui, je voulais l'aider, elle s'est humiliée jadis pour que je garde mon emploi

- Vous savez ce qu'ils lui font ?

- Lui faire croire qu'elle est fiancée à M. Daniel ? C'est écœurant !

- C'est le mot, je crois, dit Terry en souriant, si seulement mon détective était arrivé quelques temps plus tôt dans cet hôpital…

- Comment puis-je aider ?

- On ne peut pas lui dire la vérité, elle doit se souvenir elle même, pour qu'elle ne confonde pas les dires et les souvenirs mais aussi pour qu'elle nous croie. Mais il faut à tout prix l'empêcher d'épouser ce petit morveux…

- Oui, c'est le plus important, dit Dorothée

- Essayez de l'aider lorsqu'elle est déprimée et quand elle se pose des questions sur Daniel, essayez de la décourager et lui dire de suivre son cœur… Je suis sûre que son cœur ce n'est pas Daniel… Mais moi.

- Ok, Monsieur, j'espère que vous allez la sortir de là…

- J'espère arriver à la convaincre

- Moi aussi. Merci Monsieur.

Pendant ce temps-la à New York, Susanna était en train de broyer du noir. Sa mère était venue rester avec elle pour un moment.

- Susanna, tu ne peux pas rester ainsi à broyer du noir…

- Maman, Terry est parti à la recherche de Candy !

- Je sais, chérie, je suis l'histoire…

- Maman !

- C'est la femme qu'il aime. Qu'est-ce que tu espérais ?

- Mais, c'est moi qu'il a choisie

- Parce que tu lui as sauvé la vie, je faisais pression sur lui, et elle l'a quitté pour qu'il soit libre de rester avec toi…

- Mais…

- Susanna, Candy t'a sauvé non ?

- Oui…

- C'est normal qu'il aille l'aider. Il l'aime, Susanna…

- Maman, je n'ai pas besoin d'entendre ça ! Tu ne m'aides pas du tout, là !

- Ma chérie, allons faire un tour au parc au lieu de rester ici à te morfondre

Elles allèrent donc au parc. C'était une belle journée. Elles arrivèrent au central parc et elles virent des enfants qui jouaient et leurs parents assis sur les bancs publics.

- Maman, je n'ai aucune envie d'être ici, dit Susanna grincheuse

- Arrêtes de faire la petite fille gâtée, dit Mme Marlowe, je vais chercher des glaces

Susanna resta dans son fauteuil roulant à bouder.

- Allô… Allô mademoiselle… Oui vous, sur le fauteuil roulant, c'est à vous que je m'adresse, dit la voix d'un homme

- Que voulez-vous ? Dit Susanna brutalement

- Vous dire bonjour…

- C'est une question d'opinion !

- Woo ! On s'est levé du pied gauche ?

- Laissez-moi tranquille !

- D'accord, avec votre humeur, volontiers ! La vie est assez courte comme ça, je n'ai pas besoin de rabat-joie…

Susanna se retourna enfin pour voir d'où venait la voix, elle vit un beau jeune homme, blond foncé avec une autre dame à côté de lui. Il portait des lunettes noires.

- Excusez-moi, dit Susanna en souriant, je suis de mauvaise humeur…

- Ça je peux le sentir ! Dit-il en souriant, je m'appelle Lionel Sands et voici mes yeux pour le moment, Maman Sally

- Vos yeux ?

- Oui, je suis aveugle…

- Oh… Moi je n'ai qu'une jambe… Je suis désolée…

- Merci et je suis désolé aussi

La mère de Susanna revint avec les glaces.

- Tiens, dit sa mère

- Merci Maman, Maman, je te présente Lionel Sands, Lionel voici ma mère et je suis Susanna Marlowe

- L'actrice ?

- Oui…

- Oh dommage pour votre accident… Vous étiez une excellente actrice. Vous pouvez m'appeler Lionel

- Vous pouvez m'appeler Susanna…Vous m'avez vu ? Oh… je suis désolée…

- Non, ne vous excusez pas, Je voyais jusqu'à il y a un mois, j'ai eu un accident de voiture… Et je me suis réveillé dans les ténèbres…

- Ça a du être choquant

- Vous devez en savoir quelque chose ; vous réveillez sans votre jambe…

- Je voulais mourir

- Moi aussi…

Mme Marlowe la regarda et elle fut ravie de voir sa fille s'ouvrir finalement à quelqu'un. Susanna et Lionel continuaient à parler de leur expérience mutuelle. Lionel était un Playboy, bon viveur jusqu'à ce que son accident le rende aveugle et le ramène sur terre.

- Depuis que je suis aveugle, j'utilise plus mon sens du toucher, l'ouie… j'ai du apprendre le braille pour lire…

- Pour moi le plus dur c'est de me déplacer avec mon fauteuil il y a très peu d'établissements accessible par fauteuil roulant…

Mme Marlowe et Maman Sally se mirent à parler de leur coté.