- Tes cheveux ont poussé…

Toujours à moitié endormie sur sa poitrine, Hermione sourit en sentant la main de son Maître se perdre dans sa chevelure. Etendu de tout leur long sur le banc, tous deux avaient désormais oublié la notion même de temps… Incapable de se résoudre à sortir de leur cocon de chair et de caresses enflammées, ils se laissaient dériver entre baisers et silence ensommeillé, la tiédeur du bassin engourdissant délicatement leur sens à mesure que leurs corps se délassaient... Combien de temps cela durerait-il ? Combien de temps mettraient-ils à se rassasier de leurs frissons et soupirs ? Aucun d'eux n'aurait su dire… mais à quoi bon s'en soucier ? Cet instant n'avait jamais été plus parfait.

- Oui… Souffla-t-elle dans un sourire. Ça doit être le grand air.

- Peut-être…

Perdu dans sa contemplation, Hermione le vit détailler ses longueurs d'un œil intrigué, le regard vissé sur ses pointes et nouveaux reflets dorés… de petits détails qu'il n'avait jusqu'alors jamais remarqué, mais qui désormais habitaient ses pensées.

- Rappel moi pourquoi tu les avais coupés ? Demanda-t-il intrigué.

- Oh, je… je voulais tourner la page de mon passé. Ce n'était pas grand-chose mais… je crois que j'avais besoin d'un nouveau départ.

Haussant un sourcil, Voldemort sentit sa gorge trembler d'un léger rire.

- Hum… j'avais presque oublié la complexité de la gente féminine.

- Hé ! S'offusqua-t-elle amusée. C'était symbolique !

- Voilà bien une drôle d'idée… Rit-il.

Se redressant sur ses coudes, la jeune femme le bouscula d'un coup d'épaule exaspéré, la mine boudeuse à mesure qu'il l'assiégeaient d'œillades moqueuses.

- Vous pouvez parler… gronda-t-elle Vous vous êtes bien réincarné dans votre ancien corps après votre victoire !

- Pas pour des cheveux !

Explosant de rire devant leurs chamailleries infantiles, Hermione se blottit contre lui dans un sourire complice. Le genre d'instant qu'elle n'aurait jamais cru vivre, mais qui suffirent à gonfler son cœur dans sa poitrine.

- Il n'y a pas de honte à porter de l'importance à son apparence ! Dit-elle amusée. Et puis en toute honnêteté, je ne suis pas mécontente de votre nouveau corps. Il vous va mieux que le précédent…

Loin de pouvoir la contredire, le Mage s'entendit grimacer dans un soupir…

- J'avoue que… ma première réincarnation n'était pas ma plus grande réussite. Admit-il à voix basse. Non pas que ce soit une surprise ! J'étais très affaibli, mes mangemorts étaient en fuite, Quedver n'avait que peu d'esprit et les circonstances étaient… eh bien… difficiles.

Décontenancé par la vivacité de ses propres souvenirs, Voldemort sentit son regard se perdre dans le vide… le même vide dans lequel il s'était senti flotter pendant plus de quinze longues années et dont la froideur jusqu'alors inégalée manqua de le faire frissonner.

- J'ai mis des années à concevoir ce plan… souffla-t-il. A ramper dans l'ombre, ni mort ni vivant… A attendre le bon moment, dans l'espoir d'un jour pouvoir me relever sur une paire de jambe… et à prier pour que cet enfer ait enfin un sens…

Surprise de le voir aborder de tels détails, Hermione déglutit devant l'étrange douleur de sa grimace. Et pour cause… elle avait beau avoir été témoin de ses pouvoirs, jamais encore elle n'avait entendu son versant de l'histoire.

- J'imagine que… que la magie des Horcrucx n'était pas parfaite.

- Non… non, elle ne l'était pas.

Et encore… aucun mot sur cette terre n'aurait été capable de dépeindre une brève esquisse de l'horreur qui habitait ses souvenirs… de l'effroi qui transcendait encore sa chaire… et de la douleur qui avait décharné son être.

- Peux-tu l'imaginer ? Souffla-t-il sans la regarder. Vivre sans corps… détaché de toute réalité… dans un néant que toi seul peut hanter ? Vivre et pourtant ne jamais pouvoir respirer, parler, marcher ou seulement… exister ? Vivre tout en sachant que ce supplice pourrait ne jamais cesser ? Et que l'immortalité dont tu as tant rêvé, pourrait être réduit à cet enfer que tu as toi-même créé ?

Troublée, la jeune femme sentit son souffle se couper devant la profondeur de son regard d'ébène. Fixées au-dessus du ciel, ses pupilles s'étaient égarées dans les aires, quelque part entre rêve et enfer… douleur et ténèbres… souvenirs et réel… un bref instant emplit de silence, dont les échos latents ne tardèrent pas à assourdirent leurs tympans.

- Non… finit-elle par dire du bout des lèvres. Non, je ne peux pas.

Et pourtant, elle le savait… cet enfer à peine imaginable, cette douleur à peine concevable, cette prison aux murs de glaces… étaient ceux dans lesquels avait rampé les restes de son âme.

- Quinze ans… te rends-tu comptes ? Quinze d'agonie, pour le rêve de toute une vie…

- Cela semble cher payé…

- Ça l'a été.

- Pourtant, vos Horcrucx vous ont sauvé. Ils vous ont offert ce que vous souhaitiez… l'invulnérabilité.

A ces mots, Voldemort se pinça les lèvres dans un soupir étouffé. C'était vrai… il avait eu ce qu'il voulait. Du moins, en partie.

- Je le croyais aussi… mais maintenant que j'ai gagné la guerre, récupéré mon corps, accompli l'impossible et redéfinit les limites de la magie, je… je me rends compte du mensonge qu'a été ma vie.

- Que voulez-vous dire ?

- Je croyais mes Horcrucx introuvables. Dit-il d'un ton plus grave. Je croyais mes pouvoirs inégalables. Je… je me croyais intouchable. Mais j'avais tors… je ne l'étais pas.

Confuse, la jeune femme vit ses yeux se perdre sur les reflets du marbre, ses rétines frémissant alors d'un éclat qu'elle ne leur connaissait pas.

- Dumbledore le savait. Souffla-t-il. Potter le savait… et toi aussi, tu le savais.

Ne trouvant pas quoi dire, Hermione déglutit dans un soupir. C'était vrai... elle ne pouvait pas le contredire. D'aussi loin qu'elle s'en souvienne, elle avait toujours cru en ses faiblesses ; en ses failles et l'avènement de sa future défaite. Guidée par la seule volonté de détruire le mal qui les chassait, elle n'avait cessé de se complaire dans la noblesse de sa quête. Une quête qui, galvanisé par ses convictions, certitudes et valeurs guerrière, n'était cependant parvenu qu'à lui apporter peine, trahison et regret… Oui, elle le voyait désormais. Sa foi en leur victoire avait toujours été mensongère, les discours d'Harry et de Ron lui avait mis des œillères tandis que la peur de perdre avait attisé sa haine… non pas qu'il y ait qui que ce soit à blâmer pour ça. Elle avait fait ses choix. Elle avait choisi sa route. Elle avait décidé de combattre ! Une détermination certes respectable, dont l'issue finale faisait désormais partie de l'Histoire…

- Je ne savais rien. Souffla-t-elle. J'espérais mais… je ne savais rien.

- Oh si tu savais… de tous, tu es celle qui a toujours su.

- Maître…

- C'est la vérité.

Se tournant lentement vers elle, Voldemort effleura sa joue d'une légère caresse, le cœur tremblant face à son regard emplit de tendresse. Seigneur… elle était si belle.

- Tu as toujours été la plus maline.

- J'ai fait de mon mieux. Sourit-elle. Mais ça n'a pas suffi… et vous avez gagné.

- Je n'ai pas dit que tu étais plus maline que moi.

Riant doucement contre lui, Hermione se mordit la langue pour ne pas renchérir. Dieu qu'elle aimait son sourire…

- Mais j'avoue que tu m'aurais été d'une grande aide du temps de la guerre. Concéda-t-il. Avec une telle Déesse à mes côtés, Dumbledore aurait rendu les armes en une journée…

- Oh pitié… vous ne m'auriez jamais prise comme fidèle !

- Tu n'en sais rien !

- Vous tuiez les nés-moldus !

- Oui et bien… personne n'est pas parfait.

C'était vrai… il ne l'était pas. Loin de là même ! Mais ce souvenir était oublié… tout comme le Mage qu'il avait été. Non pas qu'il est énormément changé… Et pourtant, Hermione ne pouvait s'empêcher de voir une différence. Légère certes… mais existante. Vivante. Palpitante. Et parfois même criante ! Une différence qui bien qu'elle semble induite par le feu ayant ravagé leur sang, ne réussit qu'à la laisser songeuse dans son silence. Et pour cause ! Il y a quelque mois encore, elle n'aurait jamais cru Voldemort capable d'affection… de considération ou du moindre de sentiments. Après tout, il n'était qu'un meurtrier ; qu'un Mage sanguinaire guidé par l'avidité et les ténèbres... qu'un homme de vices et de colère ! Un homme qui pourtant la couvrait de ses bras ce même instant… l'embrassait avec douceur, tendresse et passion… ne cessait de la détailler avec attention… et était devenu son amant. Des détails qui loin d'être infimes, peinaient encore à se frayer un chemin jusqu'à sa conscience, mais dont leurs seuls contours suffirent à transir son cœur de nouveaux battements.

Seigneur… c'était vrai.

Elle était devenue son amante…
A lui…
Voldemort…

Par tous les Dieux, existait-il plus fou ? Plus illogique ? Plus historique ?! Elle n'aurait su dire, l'esprit encore engourdi par le souvenir de leurs effusions de plaisirs… des souvenirs qui déjà, la firent se languir à mesure qu'il la pressait contre lui.

- Tu as toujours eu ce grain de beauté ? Demanda-t-il subitement.

Sortant brusquement de ses pensées, la jeune femme se sentit frissonner à la caresse de ses doigts sous sa poitrine... des doigts volages, délicats et curieux, qui tels les pinceaux d'une toile prestigieuse, parcouraient son corps de leurs touchers soyeux.

- Oh ça… c'est juste une tâche de naissance. Souffle-t-elle.

- Vraiment ?

Amusée par sa surprise, Hermione se redressa lentement sur lui à mesure qu'il détaillait les contours de sa tâche légèrement brunie. Pas plus large qu'une pièce de monnaie, elle ornait son sein gauche de son motif tacheté, mélange de demi-cercle et de bourgeon mal dessiné… rien de très exceptionnelle en soit ; mais cela sembla suffire à ce que son Maître y perdre son regard.

- Ce n'est pas grand-chose… Dit-elle. J'en ai une autre sur le crâne.

- Sur le crâne ?

- Hum hum… d'après mes parents, elle serait même en forme d'étoile.

- Comment ont-ils pu la voir sur ton crâne ? Demanda-t-il confus.

- J'ai attrapé des poux quand j'avais 4 ans… grimaça-t-elle. C'était si terrible que ma mère a été obligée de me raser la tête ! Dieu Merci ça a vite repoussé… mais ça m'a tellement traumatisé qu'après ça j'ai refusé toute coupe de cheveux pendant plusieurs années.

Manquant de s'étouffer devant l'étrangeté d'une telle anecdote, Voldemort s'esclaffa entre ses dents. Un rire tout aussi spontané que bruyant qui ne parvînt qu'à offusquer son Initiée grondante.

- Ne vous moquez pas !

- Je… je ne moque pas !

- Vous riez ! Soupira-t-elle excédée.

- Non, je… je suis seulement admiratif ! Peu d'enfant surmonte un tel traumatisme…

Outrée, la jeune femme le bouscula d'un coup d'épaule agacé, les lèvres pincées devant l'audace de ses rires effrénés. Mais qui aurait pu le blâmer ? Imaginer son Initiée d'Honneur en petite moldu au crâne rasé, était la plus belle chose qu'il ait entendu de l'année…

- Moquez-vous tant que vous le voulez… gronda-t-elle. Je suis certaine que vous deviez en attraper vous aussi !

- Des poux ?! S'étouffa-t-il.

- Bien sûr ! C'est presque un rite de passage !

Réfléchissant un court instant, Voldemort fronça les sourcils devant l'aplomb d'une telle affirmation. Lui ? Attraper des poux ? Par Salazar…

- Non… non, je n'en ai jamais attrapé.

- Impossible !

- Je t'assure ! Et heureusement d'ailleurs ! J'aurais incendié l'orphelinat tout entier si une telle horreur m'étais arrivée !

Riant franchement devant son air révolté, Hermione le vit renverser la tête sur le côté, les yeux écarquillés devant la tragédie qu'il était parvenu à éviter… du moins, qu'il croyait.

- Prenez garde ! Vous pouvez encore en attraper.

- Qu… quoi ?

- Et oui… Lança-t-elle moqueuse. Je ne voudrais pas m'avancer mais j'ai vu Connor se gratter la tête à plusieurs reprises. Ce n'est peut-être rien mais… ça peut être un signe.

- Tu… tu penses qu'il en a ?! S'inquiéta-t-il.

- Je ne sais pas… Soupira-t-elle. Mais ce ne serait pas étonnant. Ce pauvre petit n'a vécu qu'avec des marins et n'a jamais reçu le moindre soin ! Allez savoir à quand remonte son dernier bain…

Troublé, le Mage se redressa sur son coude dans un soupir étouffé. C'était vrai… aussi vif d'esprit et indépendant soit-il, Connor ne semblait pas avoir été soigné, baigné ou seulement examiné depuis des années. Non pas que cela soit une grande surprise aux vues de son naufrage sur cette île ; et pourtant… à son âge, aucun enfant ne devrait avoir à endurer une telle vie.

- J'avoue qu'il me fait de peine… ajouta-t-elle du bout des lèvres.

- Tu es bien trop maternelle. Grimaça-t-il.

- Comment ne pas l'être ?! Il est si petit, si frêle, si… vulnérable ! Qu'il ait survécu jusque-là est un véritable miracle…

Un miracle… oui, cela y ressemblait. Mais en était-ce vraiment un ? Voldemort ne parvînt pas à s'en persuader. Bien sûr, il ne pouvait nier que Connor avait tout d'un rescapé… d'un miraculé que le Sort avait étonnement épargné ! Et pourtant, jamais ses doutes ne s'étaient apaisés. Un détail qui plus tous les autres, le fit amèrement grimacer.

- Je ne sais pas quoi en penser… Avoua-t-il.

- De quoi donc ?

- De de lui. De sa vie… et de son récit.

Et pour cause… il avait appris à croire en beaucoup de choses ces derniers temps ; aux légendes, au Destin, aux Fléaux et à la providence… mais pas à la chance. Et certainement pas en celle d'un enfant exilé aux confins du monde, sur la seule île un tant soit peu viable de l'Autre Versant.

- Vous vous méfiez toujours de lui ? Demanda-t-elle sceptique.

- Oui. Non… je ne sais pas... Grimaça-t-il subitement.

- Vraiment ?!

- Eh bien… je mentirais en te disant qu'il ne m'attendrit pas ; que son histoire ne me touche pas ou que ses insupportables bavardes ne m'amusent pas. C'est un enfant étrange, inspiré, sauvage et… bien que cela me coûte de le dire, oui… il est adorable.

- Alors où est le problème ? S'inquiéta-t-elle.

- Je ne sais pas… Il y a quelque chose dans son regard ; quelque chose que je ne m'explique pas…

Etonnée, Hermione le vit passer une main sur son visage défait, le cœur tourmenté à mesure que son esprit s'agitait sous de nouvelles pensées… à mesure que son inconscient cherchait désespérément à percer le secret qu'il lui manquait.

- Je veux dire… as-tu jamais vu un enfant agir comme lui ? Demanda-t-il agité. Parler comme il le fait, boire du rhum à grande lampées, se claquer le front chaque fois qu'il est étonné ou se désintéresser complètement du monde qu'il a quitté ?

- Non, mais…

- Exactement !

- Maître… il est seulement un peu différent ! Et puis ce n'est pas surprenant ! Peu d'enfant survive à un naufrage, à la mort de son équipage ou la vie à l'état sauvage ! Certes, il peut lui arriver d'être maladroit mais…

- Justement. Souleva-t-il. Je ne crois pas qu'il le soit...

- Que voulez-vous dire ?

Agacé par sa propre confusion, le Mage se redressa dans un soupir abattu. Seigneur… ce qu'il haïssait ses incertitudes ; ses doutes et ses inquiétudes ! Et pourtant, ce n'était pas faute de les avoir combattus… d'avoir tenté de les étouffer, de les oublier et de se résigner à n'être qu'un Mage noir à l'esprit obtus ! Mais même quand ce pauvre petit s'était évertué à l'aider, à lui apporter une soupe et à le réconforter… jamais Voldemort n'était parvenu à faire taire la méfiance qui l'étranglait. Pourquoi ? Il se l'était demandé… après tout, ce n'était pas comme si Connor les avait menacés, trompé, volé ou semblait capable de représenter un danger. Mais même cette évidence ne parvenait pas à l'apaiser ; pas plus que son regard bleuté, ses sourires légèrement retroussés et la gentillesse avec laquelle il les avait aidés.

- Il est venu me parler après que toi et moi nous soyons séparés sur le rivage.

- Vraiment ?

- Hum hum… nous avons discuté, partagé un repas et bu une bouteille ; rien de très exceptionnel en soit, et pourtant, je…

- Et pourtant quoi ? Insista-t-elle.

Sentant sa gorge se serrer sous l'étau de sa pensée, Voldemort se tut dans un grondement étouffé. Bon sang… cela semblait illogique ; impossible même ! Mais rien n'aurait su faire taire le pressentiment qui l'habitait... et l'étrange signification que cela impliquerait.

- Et pourtant je… je n'ai jamais eu l'impression de parler avec un enfant.

Etait-il dans le faux ? Faisait-il fausse route ? Se laissait-il sombrer dans de nouvelles fabulations ? Ou ses suspicions n'étaient-elles que l'expression de son aversion pour les enfants ? Il n'aurait su dire… mais quoi qu'il fasse, jamais cette idée n'avait quitté son esprit : celle que Connor était plus que ce qu'il voulait bien leur dire…

- Co… comment ça ?

- Il y a quelque chose de construit chez lui. Quelque chose de mature et de réfléchit ! Quelque chose qu'aucun enfant ne devrait avoir en lui…

Oui… il en était persuadé, quelque chose résonnait chez ce petit. Quelque chose de fort, de puissant et d'indescriptible ! Quelque chose qui l'avait frappé dès l'instant où leurs regards s'étaient ancrés dans l'ombre orageuse de ses pupilles… Quelque chose dont la seule pensée, le fit violemment frémir.

- Je veux dire… Rien ne le surprend ! Rien ne l'effraie ! Pour preuve, il n'a même pas été effrayé d'apprendre que j'étais un Mage Noir ! Pas même quand je lui ai raconté notre rencontre, pourquoi j'avais essayé de te tuer étant enfant et d'asservir le monde !

Or, une telle réaction n'était pas un simple détail ! En particulier pour enfant de son âge…

- Il n'était même pas troublé ou mal à l'aise ! S'exclama-t-il. Au contraire, il… il semblait impressionné ! Certes, mes exploits le sont mais venant d'un enfant, je… je ne sais pas.

Et là était le problème… quoi qui leur dise de lui, Connor était un mystère.

- Tu dois sûrement penser que je perds l'esprit…

Décontenancée, Hermione déglutit en le voyant se détourner dans l'écho d'un soupir gêné… Grand Dieu, craignait-il qu'elle le juge ? Le réprimande ? Ou le traite de dément au seul motif que Connor n'était qu'un enfant ?! Cela aurait été bien plus simple… mais après tout ce qui leur était arrivé, était-elle vraiment en droit d'ignorer ce qu'il ressentait ? Et de nier ce qui demain, pouvait être leur réalité ? Non… elle n'en avait pas le droit ; pas plus qu'elle n'était en mesure d'affirmer quoi que soit.

- Non, je… je pense simplement que son passé l'a rendu ainsi. Souffla-t-elle. Et que derrière ses sourires, questions indiscrètes et vigueur d'esprit, se cache l'âme d'un petit garçon qui a grandi trop vite…

- C'est fort possible. Admit-il. Mais même son histoire me laisse sceptique…

- Maître !

- Hermione… reconnaît le ! Cet enfant a vécu à presque autant de tragédies que nous en moins de dix ans de vie ! S'exclama-t-il ahurit. Et malgré tout cela, il… il parvient à survivre ! Or et même aidé de cette l'île ou de je ne sais quelle magie, un tel exploit devrait être impossible !

Du moins, en théorie…

- Peut-être le sous-estimez-vous ?

- Non… il y a autre chose. Réfléchit-il.

- Maître, vous l'avez dit vous-même ! S'agaça-t-elle. La vie de cet enfant n'a été qu'une suite de tragédie ! De telles choses laissent des traces ! Et vous mieux que quiconque devrait le savoir…

Mal à l'aise, le Mage se mordit la joue dans un pincement de lèvre. Oui... peut-être disait-elle vrai. Mais que pouvait-il y faire ?! Cet enfant n'était pas celui qu'il prétendait être ! Plus qu'un présentiment, cette certitude l'étouffait ! Une certitude dont il ne savait pas quoi faire, et dont l'étrange étau le paralysait…

- Et puis, nous le connaissons à peine ! Ajouta-t-elle. Nous devrions… nous devrions apprendre à le connaître !

- Pourquoi faire ?! S'exclama-t-il.

Affligée, Hermione leva les yeux au ciel face à son air hébété. Décidément, elle devait tout lui expliquer…

- Parce que c'est un enfant ! Il faut communiquer avec lui ; lui parler, s'intéresser à lui, à ce qu'il aime faire et à ses ressentis... Et puis avec un peu de chance, vous aurez des réponses à vos questions.

S'intéresser à lui ? Et à ses… ressentis ? Par Salazar, cette seule idée lui donnait le vertige ! Et pourtant, il n'avait aucun mal à voir où elle voulait en venir.

- Tu crois que ça marcherait ? Demanda-t-il sceptique.

- Bien sûr ! Tout le monde n'est pas mal attentionné vous savez… Et puis qui sait, peut-être réaliserez-vous que vous l'avez mal jugé ?

Haussant un sourcil surpris, Voldemort se redressa dans un grondement irascible. Lui ? Mal juger ? Seigneur, elle rêvait !

- Je ne me trompe jamais… siffla-t-il agacé.

- Dans ce cas, il ne vous reste plus qu'à le prouver.

Sonnée devant l'audace de ce défi à peine dissimulé, le Sorcier sentit son orgueil s'embraser à mesure que ses joues s'empourpraient. Le prouver… le prouver… le prouver… bien sûr qu'il pouvait le prouver ! Mais pour cela, il devrait se rapprocher de Connor ; et le faire parler... Une idée qui en dépit de sa fierté, laissa un profond malaise l'habiter. Non pas que cet enfant soit véritablement désagréable à côtoyer… mais qu'aurait-il pu nier ? Sa grandeur d'âme n'avait jamais été sa plus grande qualité ! Pas plus que son intérêt pour les orphelins naufragés…

- Bien… si tel est ton souhait, je m'efforcerais de discuter avec ce petit démon.

- Gentiment… Précisa-t-elle.

Bon sang…

- « Gentiment » ... Grimaça-t-il résigné. Mais ne t'attends pas à ce que je le paterne dans le seul but d'avoir des réponses !

- Je doute que vous y arriveriez même si vous le vouliez…

Outré devant l'éclat de son regard moqueur, Voldemort lui pinça la joue dans un grondement orgueilleux. Un petit geste tout aussi amusé que joueur, qui laissa son Initiée exploser de rire entre deux battements de cœur.

- Quand bien même, cela importe peu… Soupira-t-il brusquement. Nous n'aurons bientôt plus à nous inquiéter de tout cela.

- Que voulez-vous dire ?

- Que nous serons bientôt partis ! Et que se faisant, nous n'aurons plus à nous interroger sur les mystères de cette île.

Oh non…

- Partis ? Répéta-t-elle confuse.

- Bien sûr ! Nous avons la sphère prophétique !

Non, non, non…

- Plus rien ne nous retient sur cette île !

Oh Seigneur…
Oh Seigneur...
Oh Seigneur !

Sonnée, Hermione sentit son cœur s'arrêter à l'écho de son soupir soulagé. Un écho sincère et profondément heureux, dont la seule signification la rendit soudainement nauséeuse.

- Maître… Souffla-t-elle d'une voix blanche.

- Hum ?

- Il y a… il y a quelque chose que je dois vous dire.

Surpris par la gravité de son ton, Voldemort la vit se redresser sur leur banc, le regard sombre et la le menton tremblant. Une attitude pour le moins inquiétante, qui ajouté à son étrange claquement de dent, le fit se relever en un battement.

- Qu'y-a-il ?!

Ce qu'il y avait ?! Elle aussi se l'était demandée ; avant que son esprit ne s'efface et qu'elle ne s'effondre ivre-morte sous un cocotier ! Par tous les Diables… comment avait-elle pu oublier ? Comment avait-elle seulement pu cesser d'y penser ?! Sûrement à cause du rhum dans lequel elle s'était laissée sombrer ; de sa chemise qu'elle avait tenté d'incendier et tous les cris qu'elle avait poussés... des cris qui contrairement à ce que l'on aurait pu croire, n'étaient pas uniquement dû à leur dispute sur la plage. Car la cause de ses larmes était bien plus grave… à tel point que c'est cette ultime découverte qui avait fini par renverser son âme. Aussi, c'est profondément mal à l'aise que la jeune femme se mordit la langue, les jambes repliées contre sa poitrine à mesure que résonnait l'écho de son cœur battant. Un cœur désormais troublé, anxieux et profondément apeuré… qui ne parvînt plus à rester muet devant le regard de son Maître inquiet.

- Connor… Connor vous a dit que j'avais légèrement perdu pied après que nous nous soyons quittés. Débuta-t-elle.

Si « perdre pied » était un synonyme de « disjoncter » …

- Oui… mais si c'est à propos de cette histoire de cette barrique de rhum, je t'assure que…

- Oh non ! Non, ce n'est pas ça… Sourit-elle gênée.

- Alors quoi ?

Bon Dieu… comment dire ça ? Comment lui dire qu'un nouvel écueil contrecarrait leur voyage ? Qu'ils étaient les cibles d'un nouveau drame ? Et que les Dieux eux-mêmes œuvraient pour qu'ils ne rentrent jamais à Poudlard…

- Eh bien, je… je n'ai pas été tout à fait honnête. Avoua-t-elle du bout des lèvres. Car vous n'avez pas été la seule raison qui m'a poussé à boire...

- Comment ça ?

Elle pouvait le dire…
Elle pouvait le dire !
Elle pouvait le dire !

- J'ai tenté d'invoquer un navire.

Voilà.
C'était dit.

- Quoi ?!

- Un navire. Répéta-t-elle sans respirer. J'ai tenté d'en faire apparaître un, après notre dispute sur la plage.

- Mais… pourquoi ?

Rougissant de honte devant lui, Hermione peina à déglutir, les mains tremblantes devant ce qu'elle s'apprêtait à dire…

- Je… je voulais que vous oubliiez tout ce que je vous avais dit.

- Pardon ?! S'étouffa-t-il.

- Je ne savais pas que vous finiriez par me rejoindre ! A vrai dire, je… je ne savais même pas si vous pourriez à nouveau me regarder en face ! Alors je… je me suis dit que le meilleur moyen d'oublier toute cette histoire était de quitter celle île et de rentrer à Poudlard ; de rapporter la sphère prophétique et de faire comme si je ne vous avais jamais rien dit sur ce rivage…

Ebranlé par son aveu, Voldemort la vit détourner le regard dans un sursaut honteux. Seigneur… le croyait-elle vraiment capable de faire ça ? D'oublier ? De faire comme si rien n'était jamais arrivé ? Et de nier jusqu'à l'existence même de son amour jusqu'alors inavoué ? Par Salazar… cela semblait inconcevable ! Et pourtant, il put le voir ; cette partie de son récit n'était qu'un détail…

- J'ai donc tenté d'invoquer un navire… reprit-elle dans un soupir. Pendant des heures, à vrai dire…

- Mais ?

- Mais je n'ai pas réussi…

Confus, le Mage fronça les sourcils devant son regard abattu. Un regard bien trop grave pour qu'il ne s'en inquiète pas, et qui le laissa la contempler d'un air hagard.

- Peut-être t'y t'es-tu mal pris ? Dit-il. Je veux dire, nous… nous ne maîtrisons pas encore la magie de cette île !

- C'est ce que j'ai cru aussi… jusqu'à ce que je rejoigne Connor et que je lui demande de l'aide.

- Il a refusé ?

- Non… non loin de là…

- Alors qu'a-t-il dit ?! Paniqua-t-il.

Ce qu'elle avait toujours redouté… et ce qu'il ne pouvait encore imaginer.

- Que depuis la mutinerie, personne n'a jamais pu invoquer le moindre navire… Souffla-t-elle.

- Qu'est-ce que ça veut dire ?!

Que leur quête était achevée.
Qu'ils avaient enfin gagné.
Mais qu'un nouveau fléau venait de les frapper…

- Que le vœu du Capitaine ne peut être trahit... et que personne ne peut plus jamais quitter cette île.


Et voilà ! J'espère que ces deux chapitres vous aurons plu en dépit de mon retard XD Et que ce nouveau rebondissement attisera votre curiosité pour la suite ;)

Je vous embrasse ! A très vite !