« Au cœur de la dernière lumière… à la mort du dernier soleil… et dans le cri de l'ultime millénaire… s'accomplira le rêve d'une promesse. Celle d'un monde lavé de la lâcheté de ceux qui l'on profané. Celle d'un monde libéré de l'orgueil de ceux qui l'ont bafoué. Celle d'un monde enfin unifié sous les auspices protecteurs de Dieux apaisés… Rien ne pourra l'empêcher. Rien ne pourra l'effacer. Rien ne pourra le surpasser ! Les Sorciers devront payer le prix de leur avidité ! Cependant, une infime chance sera accordée… la seule dont les dignes pourront se voir honorer.
Ainsi, c'est dans un lit de sang maudit que l'éclat des trois larmes divines se révélera.
C'est sous les pleurs d'une Déesse affranchie que le ciel se repentira.
Et c'est sous les larmes d'un enfant bannit que la providence s'accomplira.
Ainsi et seulement là, une nouvelle ère naîtra. Car la vérité ne s'achète pas, les Dieux ne mentent pas et la magie ne se marchande pas. La mort du dernier astre le prouvera… mais que les fous prennent gardes !
Le ciel ne s'ouvrira qu'une fois… et la Mort n'attendra pas. »
Immobile devant la sphère prophétique, Voldemort laissa échapper un soupir. Auréolé de magie, il n'avait pas bougé depuis qu'avait résonné les vers de son ultime prophétie. Les deniers capable d'assurer leur survies… et qui jouaient leur rengaine incessante telle la plus insidieuse des mélodies.
« Ainsi, c'est dans un lit d'un sang maudit que l'éclat des trois larmes divines se révélera.
C'est sous les larmes d'une Déesse affranchie que le ciel se repentira.
Et c'est sous les cris d'un enfant bannit que la providence s'accomplira. »
Du sang, des larmes, des cris… que d'indices tous aussi incompréhensibles que décisifs. Que signifiaient-ils ? De quel sang, de quelles larmes et de quels cris était-il fait allusion ? Etait-ce métaphorique ? Vide de sens ? Tangible ? Ou seulement lyriques ? Il n'aurait su dire, l'esprit ensuqué par la tournure de cette nouvelle énigme, et ne put que frémir sous l'étau de leur clameur fatidique. La seule qui parvînt à supplanter l'infâmie de leur captivité sur cette île…
« Ainsi et seulement là, une nouvelle ère naîtra. Car la vérité ne s'achète pas, les Dieux ne mentent pas et la magie ne se marchande pas. La mort du dernier astre le prouvera… »
La mort du dernier astre… il était de toute évidence fait référence à l'éclipse. Mais s'agissait-il du soleil ? De la Lune ? D'un alignement astral plus complexe ? Ou d'une simple tournure de vers ? Il aurait aimé le savoir. Il aurait aimé avoir enfin l'occasion de percer les secrets de ces maudites boules de cristal ! Mais il le savait ; aucune réponse ne se donnait sans mal… et aucun cadeau n'était à attendre d'un oracle.
« Mais que les fous prennent gardes ! Le ciel ne s'ouvrira qu'une fois… et la Mort n'attendra pas. »
Esquissant un sourire ironique, le Mage s'entendit rire devant une proclamation aussi futile : « La Mort n'attendra pas… ». Comme si elle avait déjà attendu qui que ce soit…
Aussi, c'est le cœur lourd que Voldemort laissa son regard se perdre sur ses volutes bleutées de la sphère, mélange de bénédictions enchanteresses et prémonitions mortelles. Se mouvant élégamment dans leur écrin de cristal blanc, il les vit danser avec indifférence, leurs milles paillettes tournoyant majestueusement au rythme de ses légers vrombissements. Un spectacle lent, tranquille et incontestablement sublime, dont les promesses de morts et de déluges bibliques semblèrent le narguer d'un sourire hypocrite. Seigneur… il semblait fou de croire qu'une si petite chose était porteuse d'un tel fléau ; de tant de morts et de chaos. Pour preuve, il aurait pu presque croire tenir un petit cœur battant au creux de sa paume, sa douce chaleur engourdissant lentement son poing dans l'écho de son présage divin. Pourtant, il n'en était rien ; car aussi sublime soit-il, ce cœur-là n'était pas gorgé de vie, mais de malice, de cris et de supplice… et de tout ce que monde ne tarderait pas à subir s'ils ne parvenaient pas à quitter cette île. C'est donc sans respirer que le Mage Noir la regarda une dernière fois avant de la disposer au centre d'un immense rocher… de se saisir d'une craie… et de lentement dessiner la seule chose qu'il avait toujours redouté.
Un pentagramme inversé.
Oui… il n'était plus question de douter, d'hésiter ou de tergiverser désormais. Ce temps-là était passé… et avec lui les derniers remords qui l'avaient taraudé. Ne restait plus que sa résignation, sa colère et sa frustration ; des émotions toute aussi douloureuses qu'avilissantes, qu'il avait lentement sentir naître au rythme de leurs échecs à répétition… avant qu'elles ne finissent par lui nouer le ventre et ne le pousse lui aussi à prêter serment : quoi qu'ils adviennent, ils partiront. Oui… il ne savait pas encore comment, ni même quand, mais se l'était juré.
Jamais il n'abandonnerait.
Jamais il ne capitulerait !
Et jamais il ne resterait prisonnier…
- Vous êtes sûr que ça peut marcher ?
Grondant entre ses dents, Voldemort se tourna vers son Initiée, peu surpris par son froncement de sourcils inquiet. Si ça allait marcher ? Eh bien… Il l'espérait. Mais savait-il vraiment ce qu'il faisait ? Quelle magie il s'apprêtait à manipuler ? Quels risques ils encouraient ? Et quels résultats ils obtiendraient ? En toute honnêteté avec lui-même, non… il n'en savaient rien. Un ultime détail qui ne manqua pas de lui faire maudire l'étrange sadisme de leur Destin.
- Je l'ignore… Mais nous le découvrirons bien assez tôt. Souffla-t-il.
Incertaine, Hermione le regarda faire dans un tressaillement fébrile, le cœur battant devant les volutes de la sphère prophétique. Installés dans un coin isolé de la forêt, elle était restée en retrait, muette et immobile à mesure que son Maître se torturait l'esprit entre deux murmures frénétiques. Pourtant, elle ne pouvait le nier ; jamais un silence ne lui avait autant coûté. Non pas que ce soit très surprenant ! Le fléau se rapprochait, leurs délais s'amenuisaient, leur captivité s'éternisait et leurs chances de trouver les navires du Capitaine s'étiolaient ! Certes, cela ne faisait que dix jours qu'ils s'étaient échoués sur cette île… et Connor faisait tout pour leur facilité la vie… mais l'incertitude de leur retour hantaient leurs esprits. Pire encore, elle les laissait sombrer dans la plus inconstante des folies, obscurcissant leurs pensées de songes hurlantes et d'espoirs irréalistes ! Et pour cause ; il avait fouillé l'intégralité de l'île… Oui, c'était fait. Acté ! Qu'il s'agisse de chemin de traverses, des sentiers, montagnes, talus, lagons, rivières ou forêts, ils avaient tout exploré ! Pour preuve, n'y avait plus rien à découvrir ! Plus rien à cartographier ni même à parcourir ! Et se faisant, il n'y avait plus rien à attendre de leur recherche de navire... Une déception supplémentaire – qui bien qu'elle soit prévisible – les avaient plongés dans un nouvel état de panique ; un état qui avait atteint son paroxysme quand son Maître s'était donné pour mission de « détourner » la magie de l'île…
- Tu les as apportés ? Demanda-t-il.
Jetant un bref regard à sa besace, la jeune femme se redressa d'un air las. A croire qu'ils n'en finiraient jamais de miser leur vie sur un jeu de hasard…
- Sable, eau salée, eau douce, fleurs, fruits, bois, racines, écorces, pierres… il y a tout ce que vous avez demandé. Enuméra-t-elle.
- Tu es sûr ?
- Oui…
- Et le sel ?! S'inquiéta-t-il.
- A vos pieds Maître…
Se saisissant du petit sac, Voldemort l'étudia un court instant, l'œil aiguisé et le pouls battant… avant d'en attraper une poignée, d'en étaler sur son pentagramme à peine achevé et de ne se mettre subitement à prier…
- Ne devrions-nous pas attendre Connor ? Demanda Hermione mal à l'aise. Il est parti chercher quelques mangues mais je suis sûr qu'il…
- Je sais. Dit-il brusquement. C'est moi qui les lui ai demandés…
Etonnée, Hermione vit son regard se détourner dans une grimace gênée ; le genre qu'il ne lui ressemblait pas et qui la fit balbutier d'un air béat.
- Vous… vous l'avez volontairement éloigné ?
Ne manquant pas le jugement de son ton, Voldemort acheva son œuvre sans répondre, l'œil ancré sur la roche et la sphère en son centre. Un silence lourd, anxieux et pesant, qui ne tarda pas à leur arracher un frisson.
- Oui… finit-il par dire.
- Mais pourquoi ?!
- Il n'a pas à voir ça. Dit-il durement. Et si jamais… si jamais les choses tournent mal, je préfère ne pas le savoir dans les parages.
Partagée entre attendrissement et frayeur, Hermione sentit une nausée lui étreindre le cœur. Oui… il n'avait pas tort. Mais tout de même… était-il judicieux de l'évincer ? De lui cacher ce qu'ils s'apprêtaient à réaliser – et ce même si cela n'avait pour but que de le protéger ? Allez savoir… il était si sensible qu'il ne ferait aucun doute qu'il passerait les prochains jours à leur en vouloir ! Mais ils n'avaient pas le choix ; en particulier avec une magie aussi instable… Aussi, c'est le souffle court que la jeune femme s'avança face à son Maître, le regard ancré sur les nouvelles runes qu'il s'étaient mis à dessiner à même la pierre.
Des runes aux symboles proscrits…
Inscrites dans un pentagramme aux pouvoirs hérétiques…
Avec en son cœur une sphère prophétique née d'une larme divine...
Dans le seul et unique but de détourner la magie d'une l'île maudite…
Seigneur… autant les interner tout de suite ! Jamais personne n'avait autant condensé de magies proscrites depuis… depuis jamais d'ailleurs ! C'était une folie ! Une hérésie ! Que dire… la quintessence même de la plus odieuse des vésanies ! Et pourtant, c'est en dépit de tout bon sens qu'elle et Voldemort s'apprêtaient à commettre l'impossible : user des pouvoirs d'une sphère prophétique et des éléments constitutifs de l'île, afin de contenir l'essence même de sa magie et d'en retracer l'histoire jusqu'à son origine… Ainsi, ils n'auraient plus à se contenter de simples légendes ! Non, ils… ils connaîtraient la base de sa création ! Percevraient jusqu'aux frémissement de ses fondations ! Exhumeraient ses secrets, dangers et serments ! Et appréhenderaient enfin l'essence même de la magie de leur prison !
Etait-ce une bonne idée ? Devraient-ils renoncer ? Ou trouver un autre moyen de rentrer ? Elle se l'était demandée… et pour cause ! Ce qu'ils s'apprêtaient à réaliser était à n'en pas douter le plan le plus suicidaire qu'ils n'aient jamais réalisé ; non pas qu'ils risquent de réveiller un monstre, de déchaîner les foudres d'un démon ou d'ouvrir une porte sur un autre Monde ! Mais la magie qui les entouraient était étrange, brutale, rancunière et violente… Ainsi, aucun d'eux n'était capable d'anticiper ses réactions, sa colère ou encore le prix qu'elle risquerait de leur faire payer pour un tel affront ! Et encore ! C'était sans compter les interférences que pourrait causer leur seule présence dans l'Autre Versant ! Sans parler des risques d'explosions, de destruction ou de pur et simple anéantissement ! Car cette magie n'était pas seulement puissante ; son, elle… elle était vivante. Comme si son créateur lui avait cédé sa propre conscience, elle n'avait cessé de les tourmenter de ses vœux et promesses infâmantes, allant jusqu'à les accabler de cauchemars jusque dans leur tente ! Pourquoi ? Ils s'étaient posés la question… pendant des jours et des jours, ils s'étaient interrogés, avaient cherché et étudié dans le seul but de comprendre le sens de cet acharnement ! De ce déluge de cris et de frissons ! Mais jamais l'île ne leur avait offert la moindre réponse… Restant fidèle à son serment, elle les contemplait depuis le trône de son implacable silence, indifférente à leurs supplications dont elle se repaissait avidement, amusée de les voir parcourir ses sentiers la rage au sang, fière de leurs craintes et épuisement lancinant et heureuse de les voir assiégés par le poids de milles questions ! Oui… telle une Reine d'arrogance, de vice et de défiance, l'île les assaillaient de son insupportable puissance, les condamnant alors à gésir en son sein telles les proies de son appétit dévorant. Or, c'était bien sa magie que son Maître s'était mis en tête de trahir en dépit de ses avertissements… et de manier de telle façon à ce qu'ils puissent enfin avoir des réponses.
- Dispose les fruits et les fleurs sur le plan Nord-Est. Lui intima-t-il subitement.
- Et l'eau ?
- Au Nord-Ouest… Nous mettrons les minéraux sur la face Sud-Est et les écorces, bois et racines séchées au Sud-Ouest.
Hochant vaguement la tête, la sorcière se mit à exécution, les mains tremblantes à mesure les éléments prenaient lentement place sur le pentagramme géant.
- Et pour la dernière branche ? Se risqua-t-elle à demander.
Bien moins enjoué, Voldemort serra les dents… La dernière branche. La plus importante.
- Mon sang.
- Pardon ?! S'étouffa-t-il.
- Ne commence pas… gronda-t-il durement.
- Mais…
- La sphère prophétique ne fera que canaliser la magie de l'île ; or il nous faut nous connecter à elle via un élément plus tangible ! Quelque chose auquel elle pourra se raccrocher et qui fera écho à sa magie…
Ahurit, Hermione sentit son visage se liquéfier de surprise. Se connecter ? Il… il voulait se connecter ?!
- Mais en quoi votre sang fera-t-il écho à sa magie ?!
- Le Sorcier qui a créé l'Autre Versant était le plus puissant ayant jamais existé… son sang doit être l'un des éléments fondateurs de cette île. Or et comme nous n'en avons pas, nous devons trouver un substitut. Grimaça-t-il.
- Et ?!
- Et dans la mesure où je suis le… second… plus puissant Sorcier ayant jamais existé, nous n'avons d'autre choix que de prier pour que mon sang dupe ce satané rocher.
Dupe…
Dupe…
Dupe ?!
Mais… il se basait donc sur du bluff ? Un mensonge ? Un déguisement ? Un… un leurre ?! Pour piéger une magie fondée sur la rage, l'abandon et la rancœur ?! Une magie capable de leur envoyer une déferlante à toute heure ?! Dont les réflexes n'avaient d'égale que ceux d'un prédateur ?! Et dont ils n'étaient même pas en mesure de discerner l'ampleur ?! Seigneur… c'était de la folie ! Pire encore, un véritable suicide !
- Mais… et si l'île se retournait contre vous ? Balbutia-t-elle livide. Si elle dénaturait l'essence de votre magie ?!
- Impossible…
- Nous n'en savons rien !
- Tu exagères.
- Non ! Non, elle… elle pourrait se raccrocher à votre corps ! Plus encore, elle pourrait faire de vous le vaisseau qui la liera à notre sort !
Horrifiés face à l'assaut de telles idées, Voldemort fit les yeux de la jeune femme s'embraser, mélange de peur et panique incontrôlée…
- Je sais…
- Sans parler des interférences ! S'exclama-t-elle.
- Hermione…
- Après tout nous sommes dans l'Autre Versant ! Rien ne nous dit que vous ne serez pas sans défense ; que sa magie n'intoxiquera pas votre sang, ne surpassa pas votre immortalité ou ne détruira pas les fondements même de votre conscience ! Vous pourriez sombrer dans la folie ! Perdre l'esprit ! Ou vous paralyser comme avec le venin d'Aloff en Turquie !
- Hermione !
L'agrippant soudainement par les épaules, le Mage Noir sentit son corps trembler contre ses paumes. En apnée, elle avait cessé de respirer au milieu de sa tirade, les yeux fous et les joues rouges à mesure que son esprit ses délitaient sous le mirage de mille menaces. Une réaction pour le moins prévisible, qui ne manqua pas de lui arracher un soupir devant la frénésie de ses battements de cils... Car il n'était pas fou ; il n'ignorait rien de ce qu'elle s'évertuait à lui dire. Les risques, les complications, le conflit de magie, les interférences… il avait tout envisagé. Tout imaginé. Tout calculé ! Mais le savait… quoi qu'il tente de contrer, de préparer et d'anticiper, aucun de ses efforts ne ferait le poids si cette magie se décidait à les attaquer. Une évidence qu'il se garda bien de lui partager, mais dont l'étau mortel le fit amèrement grimacer.
- Calme toi… Souffla-t-il du bout des lèvres.
- Mais… mais vous…
Incapable de respirer, Hermione haleta sous la chaleur de son regard ébène, les tempes bourdonnantes à mesure que son front s'échauffait d'une nouvelle migraine. Seigneur… elle devait se reprendre. Elle devait se reprendre ! Mais comment aurait-elle pur réagir autrement ? Il allait user de son sang ! Son sang ! Autrement dit, la seule et unique chose qui ouvrirait une porte directe sur son intégrité corporelle, magique et spirituelle ! Que dire ! Sur l'essence même de son Être et sa condition d'Immortel ! Et elle devait l'accepter ? Le laisser se sacrifier au risque de voir cette magie le posséder ? Le tourmenter ? Le décharner ? Et peut-être même le tuer ?! Bien sûr, une telle chose ne devrait pas être possible… mais ils ne connaissaient rien de cette magie ! Rien de véritables risques ! Et rien de leur chance de réussites.
- Tout va bien se passer. Assura-t-il.
Bien se passer…
Bien se passer…
Bien se passer…
- Mon corps, mon sang et l'essence même de mon être sont imprégné de Magie Divine… Lui dit-il.
- Mais…
- Rien ne peut l'altérer, rien ne peut la dénaturer et plus important encore… rien ne peut m'arriver.
Elle voulait le croire… plus que toute autre chose, elle voulait se persuader qu'aucun de ses scénarios ne se réalisera ! Que son plan marchera ! Et que son sang suffira ! Et que l'île ne le dévora pas ! Mais ils le savaient tous deux… leurs promesses ne valaient pas grand-chose entre les mains des Dieux.
- Maintenant respire.
Se grandissant lentement contre elle, Hermione le sentit caresser ses joues, inspirer avec force et effleurer son cou. Pressé l'un contre l'autre, elle se laissa aller à la sureté de son regard, à la douceur de ses bras et la chaleur de son aura… un bref instant pendant lequel leurs souffles se mélangèrent, leurs cœurs résonnèrent et leurs mains tremblèrent, mais qui elle le savait, serait bien trop éphémère…
- J'ai besoin que tu restes calme… lui dit-il à voix basse. Et que tu me promettes que quoi qu'il arrive, tu n'interviendras pas.
- Qu… quoi ?! Mais…
- Hermione, j'ignore ce qu'il se passera une fois que le Sortilège sera lancé ; et j'ignore quels effets cette magie est capable d'engendrer…
- Justement ! Nous devrions attendre que…
- Non. Claqua-t-il durement. Nous n'avons plus le temps d'attendre.
Balbutiant un court instant, la jeune femme le détailla le cœur tremblant. Accablée, elle vit une ride ciller son front, se regard se faire fuyant et un étrange grincement de dent hérisser leurs tympans… celui d'une profonde et irrémédiable résignation, dont le seul écho lui donna un frisson.
- Alors promets moi que quoi qu'il se passe, quoi que je dise et que quoi je fasse, tu n'interviendras pas…
Par tous les Dieux…
- Même si je hurle, implore, pleure ou t'ordonne de m'aider…
Non ! Non ! Non !
- Tu resteras en retrait…
Il ne pouvait pas lui demander ça !
- … et n'essayeras pas de me sauver.
C'était impossible ! Inconcevable ! Et quand bien même elle essayerait, elle ne le pourrait pas ! Comment pourrait-il en être autrement d'ailleurs ?! Il était son Maître ! L'homme qu'elle aimait ! Le seul pour qui elle serait prête à mettre le monde à feu à sang et à briser tous les serments ! Et elle devrait le laisser à son sort ? Rester là ? Sans rien faire ? Alors même qu'une magie risquait d'infiltrer son corps ?!
- Non… Dit-elle. Non, c'est hors de question !
- Hermione…
- Non ! Je… je m'y refuse ! Insista-t-elle.
- Je ne te demande pas ta permission…
Horrifiée, Hermione sentit sa gorge se serrer sous l'étau d'une nouvelle nausée. Oh non… non, non, non ! Il n'avait pas le droit de faire ça ! Il n'avait pas le droit !
- Non… non Maître, s'il vous plaît ! Paniqua-t-elle brusquement.
- Ne rend pas les choses plus dures qu'elles ne le sont… Souffla-t-il résigné.
Plus dures ? Il voulait qu'elle l'abandonne entre les mains de cette magie, et c'était elle qui rendait les choses dures ?!
- Non !
- Hermione…
- Je vous en prie !
- C'est un ordre, Initiée ! Tonna-t-il durement.
Frappée de plein fouet par l'exigence de sa sommation, la jeune femme haleta violement devant lui, le cœur battant et le regard ahurit… avant que ne résonne le sifflement perçant de son serpent… et que sa marque ne s'échauffe douloureusement sous la brûlure d'un nouveau serment. Le seul qu'elle aurait prié ne jamais devoir un jour honorer, mais qui transcendait déjà son corps d'une magie qu'elle ne pouvait briser : celle de sa loyauté et de son devoir d'Initiée.
- Non… Souffla-t-elle livide.
Au bord du malaise, Hermione sentit un sanglot l'étrangler, mélange de consternation et de rage étouffée. Grand Dieu… il l'avait piégé. Pire encore, ils les avaient tous deux condamnés.
- Je suis désolé. Dit-il les dents serrés. Mais je préfère que tu me détestes une journée, que tu ne risques ta vie pour me sauver…
Ebranlée, la jeune femme ne trouva pas le courage de parler, consciente que le moindre de ses mots se transformerait en cris enragés… Or, cela n'aurait servi rien. La sphère était conditionnée, le pentagramme dessiné, les éléments de l'île entreposés et l'ordre avait déjà été donné ; et se faisant, il n'y avait plus rien qu'elle puisse contrer… ne lui restait donc plus qu'à se résigner devant son Maître déterminé, qu'à serrer les poings dans un silence forcé et qu'à contenir sa rage qui ne demandait qu'à être hurlée. Aussi, c'est sans rien ajouter que les Sorciers se jetèrent un dernier regard. Un regard dur, anxieux et porteur du même espoir... mais aussi emplit de tout l'incertitude qui enserraient leurs âmes. Oui… ils n'avaient pas le choix. Il fallait que ça marche ! Et c'est dans cette ultime prière… un ultime hochement de tête et un ultime baiser du bout des lèvres, que tous deux tournèrent vers les portes de leur dernier enfer.
Le pentagramme de Lucifer.
Le sceau de Cerbère.
Le symbole d'une mort certaine…
Rayonnant dans l'éclat de sa craie trop pâle, il gisait là… indifférent sur son rocher et encore vierge de toute magie. Du moins jusqu'à ce que son Maître ne se grandisse lentement devant lui et n'invoque un petit canif…
- Recule.
Obéissant malgré elle, Hermione sentit un étrange frisson entrechoquer ses vertèbres, mélange de peur panique et d'acouphène. Immobile à plusieurs pas de son Maître, elle se mordit la lèvre pour ne pas trembler, son serpent s'enroulant machinalement autour de sa marque tandis que son corps luttait contre la colère qui l'empourprait… Et pourtant, que n'aurait-elle pas donner pour hurler ? Pour se saisir elle-même de ce maudit couteau et achever ce qu'ils avaient commencé ? Pour s'assurer que rien ne lui arriverait ? Ou simplement être libre de pouvoir intervenir si les choses dégénéraient ?! Elle ne savait pas… mais comprit à l'éclat scintillant de la lame, qu'aucune de ses doléances ne changeraient quoi que ce soit. C'est donc le cœur battant que la jeune femme vit le Mage se diriger lentement vers la dernière branche du pentagramme, le menton haut et le regard bas ; inspirant profondément, ses yeux se fermèrent un court instant, comme pour figer le temps et s'imprégner du calme de ces dernières secondes… avant de ne brusquement serrer les dents et d'entailler sa paume sans la moindre hésitation. Un geste tout aussi symbolique qu'incroyablement décisif, dont les nouvelles coulures carmines ne tardèrent pas à les faire frémir… Gouttant silencieusement sur les reliefs de la dernière branche, tous deux restèrent muets devant l'éclat de son sang, conscient qu'il leur serait désormais impossible de remonter le temps... Car tout comme la sphère prophétique, un pentagramme maudit ne pouvait être trahit ; pas plus que la magie que Voldemort sentit lentement croître dans sa poitrine. Une magie étrange, vive et presque enivrante, dont les prémices lui échauffèrent doucement les tempes… avant que son échine ne s'hérisse sous l'assaut d'un nouveau vent… que ses pupilles ne parent d'un éclat vermillon.
Oui… c'était le moment.
Il pouvait le sentir depuis l'écho de son cœur vrombissant, ses muscles transit de milles frissons et l'acuité grisante de ses sens… le pentagramme réagissait à son sang. Les runes résonnaient sous sa puissance. Et se faisant, il avait une chance. Mais suffirait-elle à les sauver ? Là était toute la question…
- Si les choses viennent à mal tourner, que l'île envoie Marise nous terrasser ou que sa magie commence à nous frapper… Souffla-t-il d'une voix changée. Prends Connor et partez vous cacher.
Sonnée, Hermione sentit son cœur s'arrêter, sa marque l'incendiant plus que jamais à mesure qu'une nouvelle nausée l'étouffait.
- Entendu Initiée ? Tonna-t-il plus fort.
Ne trouvant pas la force de parler, la jeune femme ne put que hocher la tête, la gorge serrée et les yeux embués par la douleur de cette idée… une idée que Voldemort ne pouvait ignorer à cette heure de vérité, et dont la probabilité ne manqua pas de le faire grimacer.
Il fallait que ça marche.
Il fallait que ça marche.
Il fallait que ça marche !
Mais il ne pouvait rien assurer… et refusait de prendre le moindre risque quant à son Initiée. Aussi, c'est dans l'écho de cette ultime apnée que le Mage ferma les yeux et fit taire ses dernières pensées. Auréolé de magie, son corps se grandit d'un réflexe instinctif, sa tête se renversa dans un grondement inaudible et les veines de son cou se gonflèrent d'une nouvelle adrénaline ; un instant pendant lequel ne résonnèrent que les murmures latents de la magie et les prières d'une Hermione fébrile… avant que sa voix ne s'élève dans l'écho de son aura divine.
- Ô toi larme divine, Enfant de Dieu et Mère d'avenir...
Seigneur… c'était lancé.
- Entend mon appel par de là les Cieux, et béni ce sang de ta magie.
Plus rien ne pourrait l'arrêter.
- Que ce pentagramme maudit soit ton lit… que cette eau, ce sable et ce sel te nourrissent…
Une réalité qu'Hermione vit peu à peu se dessiner sous ses yeux et dont l'énormité la frappa d'un spasme fiévreux.
- Que tes promesses prophétiques s'accomplissent… et que cette offrande t'anime.
Pétrifiée devant l'autel, la sorcière n'osa plus respirer, son regard ancré sur le sang vermeil qui gouttait abondement depuis le poing de son Maître ; un sang bouillant d'adrénaline… un sang auréolé de magie divine… un sang qui se mit doucement à serpenter jusqu'à la sphère prophétique… avant de ne brusquement scintiller entre les éléments de l'île.
- Transcende le temps et éveille les âmes. Terrasse les cœurs et frappe les infâmes ! Et montre à tous ce qu'est le véritable pouvoir… car c'est en ce jour glorieux que j'implore ta grâce.
S'illuminant un peu plus à chacun de ses mots, Hermione sentit son cœur bondir de milles sursauts, une nouvelle sueur froide rampant brusquement dans son dos. Hypnotisée, elle vit le pentagramme lentement s'animer, les runes commencer à briller, la pierre se mettre à trembler et l'air ambient s'échauffer sous l'exigence de sa clameur effrénée... Une réaction en chaîne seulement guidée par l'invocation divine de son Maître, dont les étranges promesses se mirent brusquement à assombrir le ciel.
- Ressent la force de ces terres, écoute les tourments des vagues, lis dans le cœur de ces pierres et entend les échos de sable !
En transe, Voldemort sentit une nouvelle fièvre lui prendre le front, le souffle court à mesure que la magie s'infiltrait lentement depuis son sang… Un sang désormais effervescent, dont les vapeurs et éclaboussures vermillon palpitèrent au rythme de son cœur battant.
- Honore-les de ton sacre ! Tonna-t-il avec force.
Frappé par la puissance d'une magie aussi sauvage, le corps du mage trembla, le pentagramme s'enflamma, le vent se leva et la sphère s'embrasa…
- Imprègne les vestiges de l'Histoire !
Accroché au rocher, il sentit ses muscles se contracter, sa poitrine s'oppresser, son souffle osciller et ses yeux se révulser… avant que ton son être ne semble possédé par les assauts d'un pouvoir désormais déchaîné.
- Eclaire nous de ton savoir ! Révèle le passé qui m'accable !
Parcouru de flammes, le pentagramme crépita violemment sous la puissance de sa voix, laissant alors le vent s'embrumer d'une fumée âcre. Tremblant de toute part, le sol sembla vouloir s'ouvrir, le rocher se fendit et les fleurs, bois et autres fruits commencèrent soudainement à flétrir sous l'aura grandissant de la sphère prophétique… un spectacle de feu et de magie indescriptible, dont la puissance dévastatrice se joint à l'écho de son ultime cri.
- Corromps le serment des Pirates ! Et je t'en conjure… exhume enfin les secrets de cette île profane !
Abaissant son poing au même instant, le rocher se brisa en une mare de sang, le ciel se para de nuages grondants et la sphère vibra d'un éclat flamboyant… un éclat comme aucun d'eux n'en avaient jamais vu de leur vivant, et qui avant même qu'ils ne puissent le comprendre, les terrassa d'une onde de choc foudroyante. Frappé par la violence d'une telle puissance, Hermione s'écria sous la douleur de ses tympans, Voldemort s'écroula entre mille hurlements et l'île toute entière sembla s'embraser sous l'exigence de cette sommation… des secondes de pur chaos, de cris, de tonnerre et de vent, dont les Sorciers ne perçurent qu'étincelles sanglantes et flammes dévorantes. Des secondes qui ne tardèrent pas à endiguer leurs consciences, à déliter leur sens et décharner leurs cœurs de leurs pouvoirs harassants ! Des secondes dont la brutalité, l'horreur et l'éternité suffirent à les réduire à deux corps prostrés sous les assauts d'un pouvoir que nul n'avait encore imaginé…
Un pouvoir prophétique…
Invoqué au cœur d'un pentagramme hérétique…
Depuis l'essence d'une mage divine…
Sous les auspices d'une île maudite…
Soit la quintessence de la plus létale des folies, qui se mit brusquement à résonner dans l'écho d'étranges cris…
- Ça ne peut continuer ainsi !
- Nous ne sommes plus des bannis !
- Nous devons partir !
Des cris enragés, qu'Hermione et Voldemort crurent reconnaître.
- Cette île nous a maudit !
- Le capitaine nous a menti !
- Le Sorcier aussi !
Des cris galvanisés par la clameur d'une colère céleste.
- Le Grand Versant nous oubli !
- Il nous oubli à cause de lui !
- Le temps passe trop vite !
Des cris dont les seules vibrations transcendèrent leurs chaires, ébranlèrent leurs êtres et ensanglantèrent leurs oreilles…
- Oui ! Il est temps d'en finir !
- Au diable la magie ! Au diable le Capitaine ! Au diable l'île !
- Nous méritons de vivre !
Mais des cris en réponse à leur requête…
- Nous volerons les navires !
- Et s'il nous défie, nous prendrons la mer sans lui !
- Il ne pourra pas nous suivre !
- Nous serons libres ! Libres !
Libre… tel fut le mot qui surpassa tous les autres ; le seul que les Sorciers entendirent clairement et qui raviva subitement leur sens. Et pourtant, c'est à peine s'ils parvenaient encore à respirer sous les assauts de tels hurlements. Toujours à terres, ils peinèrent à se redresser, à parler et à penser, le corps pétrifié par les vagues qui ne cessaient de les assiéger ; avant que la sphère ne se mette subitement à léviter dans les aires, et que de nouvelles ombres ne commencent à danser dans son halo de lumière… Loin des mirages prophétiques d'apocalypse, se dessinèrent devant eux les contours scintillant de la mer, du rivage et du ciel ; un paysage calme, identique à toutes les plages de l'île constamment baignées de soleil… jusqu'à ce que le reflet de deux silhouettes n'apparaisse soudainement devant leurs prunelles. Auréolé d'étincelles, leurs formes se confondirent, leurs couleurs s'embrasèrent et leurs voix se mélangèrent, n'offrant qu'une cacophonie de sons instables et de lumière... Du moins, jusqu'à ce que l'une d'elle, la plus courbée et grabataire, ne mette subitement un genou à terre.
- Capitaine… Résonna la voix du pirate.
- Je ne veux rien entendre.
Cette voix… Bon dieu, cette voix ! Pourquoi ne parvenaient-ils pas à l'entendre clairement ? A la reconnaître par-delà son étrange grésillement ? Ou ne serait-ce qu'à la discerner par de là l'éclat de l'horizon ?! Ils se demandèrent… avant que ne résonne un nouveau grondement.
- Mais…
- Je ne changerais pas d'avis ! Tonna-t-il.
- Je vous en prie !
Plus floue que les autres, la silhouette du capitaine leur tourna le dos, ne laissant voir de lui qu'un corps frêle couvert d'un imposant manteau… Indifférent aux supplications d'un subordonné étonnement âgé, il ne daigna même pas le regarder, la tête baissée sur une bouteille de rhum tout juste entamée. Une attitude pour le moins désintéressée, dont les soupirs et épaules affaissées ne manquèrent cependant pas de traduire toute la peine qui l'affligeait…
- Non… personne ne quittera cette île !
- N'avez-vous donc aucun cœur ? Lui demanda-t-il.
- Dois-je comprendre que tu me défies toi aussi ?
Hoquetant brusquement, le pirate grinça entre ses dents, le regard voilé d'une tristesse sans nom…
- Vous savez que ma loyauté vous est à jamais acquise… Souffla-t-il d'une voix éraillée.
- Alors cesse de tendre l'oreille à leurs plaintes !
- Mais ça fait des années qu'ils vous supplient ! Des années qu'ils rêvent de partir !
Seigneur… des années ?!
- Vous ne pouvez pas les ignorer éternellement…
- Tout comme ils ne peuvent pas ignorer notre serment ! Claqua-t-il violemment.
Se renfrognant un instant, le pirate se mordit la langue, désespéré devant la détermination sans faille de son capitaine… et pourtant, en dépit de son âge, de leurs épopées et de son infini respect, il vieil homme ne put se résoudre à abandonner si docilement son propre rêve.
- Mais… mais ça fait si longtemps…
- Ne commence pas… Gronda-t-il.
- Mais nous ignorons tout du nouveau monde ! Insista-t-il. Les terres, les Océans, les Empires, les mœurs et les pays… tout changent trop vite !
- Le Grand Versant nous a bannît ! Comment peux-tu l'oublier ? Comment pouvez-vous tous l'oublier ?!
Horripilé, ils virent le capitaine jeter sa bouteille dans un cri enragé, la laissant alors s'exploser brutalement entre les rochers… Un geste face auquel le pirate s'aplatit, avant de ne l'entendre dire.
- Le Sorcier nous a fait jurer de protéger cette île ! Scanda-t-il. Il nous a fait jurer de voguer et de toujours alimenter sa magie ! Pourquoi suis-je le seul à m'en souvenir ? Pourquoi suis-je le seul à vouloir honorer la promesse que nous avons fait jadis ?!
- Les choses ont changé mon Capitaine… et les hommes aussi.
- Je ne le tolèrerais pas !
- Mais….
- Nous avons une mission ! Un devoir ! Et ils seraient temps que ces misérables ingrats se souviennent de leur juste place !
Leur juste place… mais quelle place ? Celle de vulgaires pirates ? De bannis du monde, condamnés à vivre de sang et de pillages ? D'un équipage sans foi ni loi ? D'exilés sans espoirs ? Non… ce n'était pas une juste place ; mais une malédiction barbare.
- Capitaine, je vous en prie…
- Inutile !
- Mais ils préparent une mutinerie !
Se figeant brutalement à ces mots, les Sorciers virent le Capitaine se taire dans un jappement, son corps se redressant soudainement à mesure qu'une nouvelle menace lui incendiait le sang. Pétrifié aux côtés de son subordonné, il ne parvînt plus à bouger, parler ou respirer, sa stupéfaction résonnant dans l'écho d'un silence mortifié ; un silence synonyme d'incrédulité et de consternation… de peur et d'effarement… mais aussi de la plus insupportable des douleurs pour la plus odieuse des trahison…
- Qu'as-tu dit ? Souffla-t-il sans y croire.
- Une mutinerie capitaine…
Une mutinerie…
Une mutinerie…
Une mutinerie…
- Quand ? Demanda-t-il vivement.
- Je l'ignore… mais plus vous persistez, plus leur impatience grandit. Ce n'est plus qu'une question de temps avant qu'ils ne vous défient et ne dérobent les navires !
Trahir leur serment… défier leur capitaine… dérober les navires… abandonner l'île… et partir pour ne jamais revenir.
- Vous pouvez empêcher cela ! Vous pouvez les raisonner ! Mais pour ça vous devrez leur accorder une chance… Implora le pirate.
Leur accorder une chance ? Comment ?! En acceptant qu'ils rompent leurs serments ? En tolérant qu'ils partent pour le Grand Versant et renient leurs siècles d'abondance ? D'allégeance ? De bonheur ? D'explorations ? Et de protection ? Par tous les Dieux… cette idée lui retournait le ventre. Mais pas autant que la nausée que lui inspira leur infâme projet de trahison…
- Je doute qu'une chance suffise à réparer ce qu'ils s'apprêtent lâchement à briser… Souffla-t-il.
- Capitaine…
- Que la honte m'emporte… Grimaça-t-il. Mon propre équipage veut me défier ! Je n'aurais jamais cru que les Dieux m'en accablerais après tant d'années de si belle loyauté...
A croire que rien n'était destiné à durer…
- Mais ils vous aiment mon Capitaine... vous le savez ! Insista-t-il. Durant des siècles, ils l'ont toujours fait ! Contre vents et marées, ils se sont battus à vos côtés ! Ont risqué leurs vies pour vous protéger ! Et ont sacrifié leurs rêves et leurs orgueils, dans le seul but de faire votre fierté !
- Un capitaine est aimé de son équipage… pas d'une bande de mutins.
Or, c'était bien cela qu'il devrait affronter ; non pas ses hommes, qui lui avait juré honneur, respect et fidélité… mais des mutins dont la lâcheté n'avait d'égale que leur trahison éhontée.
- Ils ne veulent pas vous trahir ! Ils ne veulent pas vous défier ! Mais votre obstination à nous garder prisonnier de la volonté du Sorcier les poussent à se rebeller !
- Les poussent ?! S'écria-t-il outré. Je m'efforce de préserver leur honneur !
- Mais ils veulent vivre !
- Ils vivent comme des rois depuis des siècles déjà ! Mangent et boivent les meilleurs mets de cette terre ! Croulent sous les richesses ! Se couvrent d'or, d'argent, de rubis et d'obsidienne ! Se baignent dans les eaux les plus claires, dorment sous le plus beau des soleils et vivent chaque jour en sachant que leur bonheur ne dépend que du respect d'une seule promesse ! Que leur faut-il de plus ?!
Se renfrognant un court instant, le pirate baissa les yeux sous la rage de telles exclamations. Pourtant, il n'y avait qu'une seule réponse à sa question… la plus fatale comme la plus évidente.
- De l'espoir… Dit-il du bout des lèvres.
- Quoi ?!
- De l'espoir Capitaine.
De l'espoir… mais quel espoir ? Celui de quitter l'île pour le Grand Versant ? De retourner à leurs vies de mendiants ? De ramper tel des rats dans les rues marchandes, priant pour que les passants s'épouvantent devant leurs côtes apparentes ? Leurs gencives sans dents ? Leurs yeux injectés de sang et pâleur mortifiante ? Non… ce n'était pas un espoir ! Ce n'était pas vivre ! Ce n'était… ce n'était rien ; rien si n'est un immonde gâchis.
- Sottises… siffla-t-il.
- Non mon capitaine… Privez un homme de tout espoir et vous révèlerez le pire de lui-même.
Le pire de lui-même… Oui. Si une mutinerait se préparaient alors ils y étaient ; et pourtant, ce n'était pas faute d'avoir tout fait pour l'empêcher… d'avoir tenté de leur parler, de leur rappeler leurs vœux si chèrement payés et de leur offrir tout ce qu'ils désiraient ! Mais ce que ses hommes voulaient dépassait tout ce qui pouvait être invoqué… une évidence dont la gravité le fit amèrement grimacer. Seigneur… il n'aurait jamais cru en arriver là un jour ! Mais la vérité éclatait et était sans détours ! Aussi, c'est le cœur éventré et l'âme meurtrie que les épaules du Capitaine s'affaissèrent d'un soupir. Le plus long, douloureux et accablant de sa vie… dont l'écho accablé résonna depuis sa voix fébrile.
- Rien… rien ne les convaincra de rester. N'est-ce pas ? Demanda-t-il la gorge serrée.
- Non mon Capitaine…
- Ils sont déterminés ?
- Oui… plus que jamais.
Ainsi, leurs intentions étaient claires.
Ainsi, ils s'étaient condamnés eux-mêmes.
Ainsi, il ne lui restait qu'une seule chose à faire…
- Je vois…
Se redressant dans un nouveau silence, le Capitaine étouffa un grondement entre ses dents, le souffle court et les mains tremblantes à mesure qu'une nouvelle résignation intoxiquait son sang. une résignation mais aussi une décision… la plus atroce qu'il n'aurait jamais cru devoir prendre.
- Réunis les hommes ce soir…
Ebranlé, le pirate releva la tête dans un sursaut stupéfié.
- Ce soir ? Répéta-t-il.
Oui…
Ce soir.
Car lui aussi venait de perdre tout espoir…
- Si mon équipage souhaite me quitter pour le Grand Versant, j'estime mériter une dernière soirée de réjouissance… Déclara-t-il lentement.
Abasourdis, le vieil ne trouva plus quoi dire. Par tous les Dieux… avait-il bien entendu ?
- Mais… mais alors vous…
- J'accepte de leur accorder une chance.
Une chance d'honorer une dernière fois leurs serments… Une chance de faire à jamais taire leurs démons… et une chance de pouvoir enfin faire repentance.
- Oh… oh Capitaine ! Merci ! Merci ! S'écria le vieil homme, la larme aux cils. C'est tout ce qu'ils demandent ! Juste une chance ! Une seule !
Et ce serait la seule qu'ils auraient…
- Je m'en vais de ce pas les convier !
Et c'est ce qu'il fit… vivement… ardemment… empressement... Le cœur léger et l'esprit insouciant, les Sorciers virent le pirate détaler à toutes jambes, un sourire inespéré remontant jusqu'à ses tempes. Mais ce qu'il ne vit pas dans sa course, fut une larme silencieuse rouler douloureusement sur une joue ; celle de son Capitaine, qui désormais seul face à l'horizon, tomba tragiquement à genoux. Car il le savait... il n'allait ni manger, se réjouir ou boire ce soir ; mais accomplir le plus infâme de tous ses devoirs.
- Ô toi île de mes rêves… Sanglota-t-il du bout des lèvres.
Résonnant avec horreur dans leurs tympans, Hermione et Voldemort se cambrèrent violemment au sol, les yeux rouges et les oreilles en sang… Seigneur, c'était atroce.
- Pardonne ton Capitaine…
Comme si les derniers mots du capitaine leur étaient interdit, ils virent la sphère trembler sous les grippes de l'île, le vent les terrasser de bourrasques en série, les arbres se plier dans l'écho de mille cris et le pentagramme s'effacer sous ses flammes hérétiques… une déferlante de haine et de magie, dont la brutalité assiégea leurs esprits du plus infâmes des supplices.
- Mais je t'ai fait une promesse…
Oh non… le sort allait se rompre ! Ce n'était qu'une question de temps, le sort allait se rompre ! Non… non, non, non ils devaient tenir ! Ils devaient résister ! Ils devaient connaître le dernier secret que l'île s'acharnait à protéger ! Plus qu'un devoir, c'était une nécessité ! Pourtant et alors même que leurs pensées se délitaient, que leurs corps cédaient et que leurs cœurs s'arrêtaient, tous deux ne parvinrent qu'à se pétrifier devant les nouvelles images qu'ils virent défiler…
- Et je jure devant toi…
Des images distordues, que la sphère peina à leur montrer.
Des images qu'aucun d'eux n'auraient jamais soupçonné.
Mais des images porteuses d'une ultime vérité…
- Que moi…
Le Capitaine s'était redressé. Son manteau était tombé. Son dos, sa poitrine et ses bras striés s'étaient dénudés. Son bandana s'était dévoilé. Sa taille infantile s'était révélée… et avec elle, le seul et unique visage qu'ils n'aurait jamais imaginé.
- Connor McGalighan, orphelin du monde et fils de naufrage, ne te trahirais pas…
Terrassés par une nouvelle onde de choc, le pentagramme s'effaça… l'île hurla… la sphère prophétique explosa... et la magie cessa.
Heyyy !
Ok tout le monde ! Nous y sommes ! L'ultime secret de l'île... et de Connor... ;) Bien sûr, plein de questions se posent ! Mais je ne vais pas m'aventurer dans davantage d'explication au risque de vous spoiler le chapitre de la semaine prochaine XD
J'espère en tout cas que ça vous aura plu !
A très vite !
