Chapitre 4

Dans les jours qui suivirent, Abbacchio avait conduit Bruno et Narancia à l'hôpital pour voir des médecins et Narancia avait fini par céder et avait accepté de se faire opérer, au plus grand soulagement de Bruno et d'Abbacchio. La date de l'opération a été fixée rapidement au lendemain, l'état de Narancia étant trop grave pour le laisser trop longtemps dans cet état. Narancia avait donc passé la nuit à l'hôpital car son opération se passe le lendemain matin, très tôt.

Ce matin-là, Fugo s'était déplacé pour voir Narancia après son opération, il s'inquiétait vraiment pour ce gamin qui voulait à tout prix lui tenir tête. Il avait un instinct de protection très développé avec Narancia, jamais il n'avait connu ça. Alors qu'il allait toquer à la porte de la chambre de Narancia, il entendit des éclats de voix et Bucciarati qui haussait le ton, fait rare qu'on ne peut ignorer.

"- Mais…

- Tu ne rejoindras pas le gang ! Tu es trop jeune pour ça !

- Mais Fugo a bien rejoint le gang alors qu'il est plus jeune que moi ! Ce n'est pas juste !

- Fugo est différent ! Il connaît les risques qu'i intégrer le gang ! Il les connaît très bien et il sait faire attention à ses arrières !

- Je peux apprendre ! Je saurai me rendre utile ! Bucciarati, prends-moi dans ton gang !

- Ta place est à l'école, Narancia ! Étudie, réussis tes études et refais ta vie ! Le gang n'est pas fait pour toi ! Je ne veux pas que tu t'imposes cette vie avec le gang, pense à ton avenir en priorité !

- Mais… Bucciarati…

- La discussion est close, Narancia… Repose-toi et retourne à l'école comme un adolescent normal… Je ne veux que le plus grand bien pour toi. Alors comprends ma décision… Au revoir Narancia. Prends bien soin de toi."

Bruno sort de la chambre, croisant Fugo. Il le salue brièvement, l'ayant déjà vu plus tôt dans la matinée. Fugo hésite donc à entrer voir Narancia, ne se sentant pas très bien pour lui d'avoir été recalé aussi "brutalement" par Bucciarati. Fugo comprenait le choix de son chef mais ça devait être dur à accepter pour Narancia qui voyait en Bucciarati une figure paternelle. Il soupire et entre dans la chambre pour voir un adolescent énervé mais en même temps triste. Le blond comprenait parfaitement le sentiment qui pouvait animer l'adolescent devant lui : il s'était senti rejeté par Bucciarati. Il avait l'impression d'avoir perdu son père à nouveau, le reniant pour continuer sa vie sans lui. Narancia avait placé trop d'espoir en Bruno et maintenant, il n'était plus là pour lui.

"- Pars, je ne veux voir personne.

- Je ne te laisserai pas seul Narancia, même si Bucciarati me l'ordonne. Tu es comme un frère pour moi.

- Laisse moi rire… Tu t'en fiches de moi, tu viens juste me voir rater là où tu as réussi…

- Ce n'est pas ça… Il faut passer un test très dangereux pour rejoindre le gang, c'est de ça que Bruno voulait te protéger, ça et tous les ennuis qui peuvent survenir par la suite… Malgré tout ce que tu penses, il s'est énormément attaché à toi. Et il a besoin de te savoir en sécurité pour continuer à avancer.

- Je veux être avec vous, moi ! Je veux vous aider… Je serai en sécurité, vu que vous serez toujours avec moi au cas où quelque chose tourne mal…

- N'as-tu pas pensé que Bucciarati pouvait mettre tout le gang en danger pour te protéger en priorité ? Car tu aurais été sa priorité, n'en doutes pas. Il se sentirait mal de ne pas pouvoir tous nous protéger. Quand Bucciarati s'attache à quelqu'un, il fera tout pour que cette personne soit heureuse.

- Mais je serai heureux avec vous… Plus que tout seul en tout cas…

- Narancia…

- Non! Je ne comprends pas votre logique ! Je veux être avec vous c'est tout! Si c'est pour continuer à dire que Bucciarati a bien fait, tu peux partir.

- Bien. De toute façon, ça ne sert à rien de te raisonner !"

Fugo sort énervé de la chambre. Le sale gosse avait encore mis sa patience à rude épreuve. C'était à se demander si ce n'était pas son jeu favori dès qu'il avait Fugo dans les parages. Il avait eu du mal à retenir Purple Haze à la fin, ce qui aurait été un massacre s'il était sorti. L'hôpital aurait pu finir en quarantaine à cause de ses bêtises, il soupire et quitte le bâtiment, sur les nerfs. Il ne voulait plus voir Narancia, il le rendait dingue et ça ne faisait que ressortir son mauvais côté qu'il essayait tant bien que mal de cacher et de contrôler.

Il ne voulait plus le voir mais Narancia en avait décidé autrement. Après s'être rétabli de son opération, il s'est informé et a été passé le test de Polpo en cachette. Il le réussit avec brio, retrouvant l'équipe de Bruno au restaurant pour étaler la réussite. Devant tant de naïveté et d'effort de la part de Narancia, Bucciarati ne pouvait qu'accepter l'admission de Narancia dans son gang. Il n'était pas d'accord de laisser Narancia face au danger, mais il était quand même un peu rassuré par la présence du stand du garçon : il pouvait repérer la présence d'ennemis après tout. Son Stand pourrait leur être utile à l'avenir pour leurs prochaines missions.

De son côté, Mista était rassuré par l'arrivée de Narancia dans l'équipe. Il n'allait pas être le quatrième membre ! Il allait pouvoir passer tranquillement le test de Polpo et enfin être toujours aux côtés de Bucciarati. Il était trop éloigné de ce bel homme : comme il ne faisait pas partie du gang, il ne pouvait pas rester souvent avec eux. Mais maintenant, tout allait changer, et il allait tout faire pour battre Abbacchio et avoir Bucciarati pour lui.

"- Il est temps Mista, déclara Fugo qui s'était approché de lui.

- Oui. Je vais aller voir ce Polpo demain.

- Donne toi à fond pour Bucciarati et tout ira bien.

- Oui, je ferai de mon mieux ! déclare Mista plein de confiance

- Bien… On se voit après-demain, alors… Fais attention à toi !"

Mista hoche la tête vivement, Fugo ne voulait pas perdre le moyen qu'il avait pour faire avancer les deux amoureux aveugles. Il n'en pouvait vraiment plus de ce couple désespérant, même si la présence de Narancia rendait la situation moins pesante, il voulait qu'ils retirent leurs oeillères et qu'ils se déclarent enfin !

Mista quitte le restaurant où toute l'équipe était rassemblée, lui souhaitant bonne chance, Fugo reporte son attention sur Narancia qui se cassait la tête sur des exercices de lecture que le blond lui avait donné. Bruno avait accordé à Narancia qu'il apprenne les bases avec Fugo, pour qu'il ne soit pas désavantagé par rapport aux autres, vu qu'il refusait d'aller à l'école, l'école venait à lui. Et pas la plus tendre des écoles, Fugo était un professeur exigeant et pointilleux, mais il était le meilleur que pouvait avoir Narancia.

Le reste de la journée se passa sans encombres et le lendemain était plus lourd, on sentait que tout le monde était un peu inquiet pour Mista, même s'il restait un étranger, s'il réussissait l'épreuve, il allait devenir l'un de leurs amis pour sûr. L'idée n'enchante pas Abbacchio mais il ne pouvait rien dire sans que ça paraisse suspect. Il ne voulait pas que Bucciarati se doute de quelque chose. Mais si cet "abruti" réussit l'épreuve, il va se faire repérer trop facilement par Bruno. Il devait trouver quelque chose ! Mais à part se déclarer - ce qu'il n'oserait jamais faire - il n'avait aucun idée. Il ne pouvait pas demander d'aide à Fugo, il avait bien remarqué que le blond était du côté de Mista, ce qui ne lui plaisait guère. Il ne restait plus que Narancia qui était neutre dans cette affaire, ou plutôt trop innocent pour se rendre compte de quoi que ce soit. Il ne voulait pas l'impliquer, car lui expliquer la situation serait juste trop gênant pour lui, ça serait comme demander des conseils romantiques à un enfant de quatre ans. Il n'avait pas d'autre choix : il devait prendre sur lui. Il soupira tout en se servant une tasse de thé. Il était tellement bien quand il n'y avait que lui et Bucciarati. Il voulait tellement revenir à cette période ! Mais il savait que Bucciarati avait besoin d'être entouré, d'avoir une famille à lui, même s'ils n'avaient pas le même sang.

"- Tout va bien Abbacchio ? demanda Bruno, ce qui le fit sortir de ses pensées.

- Oui, ne t'en fais pas Bucciarati, je réfléchissais juste à quelque chose de pas très important.

- Je suis là si tu as besoin d'en parler, ne l'oublie pas.

- Je sais, ne t'inquiète pas.

- Bien…

- Bucciarati…

- Oui ?

- J'ai une question disons… personnelle à te poser.

- Je t'écoute.

- Es-tu heureux ?

- Oui Abbacchio… J'ai enfin formé une famille avec vous, même si je voudrai qu'il y ait plus avec une certaine personne."

Abbacchio se figea. Avait-il bien compris ? Bucciarati était amoureux de quelqu'un ? Il n'avait donc aucune chance avec lui depuis le début… Il n'était qu'un simple ami et il le serait toujours… De qui était-il amoureux alors? Vu sa réponse, il s'agit de quelqu'un du gang. Narancia? Non, trop jeune et trop innocent, il est comme un fils pour Bucciarati. Fugo? Non plus, ils n'ont jamais été aussi proche. Mais alors… il ne restait que Mista. Il n'était pas encore officiellement dans le gang, mais ça n'allait pas tarder… Bruno allait-il se déclarer à cet idiot ? L'idée serre le coeur de Leone, il était persuadé qu'il devait taire ses sentiments pour Bruno pour qu'il soit heureux avec celui, qu'il pensait, que Bucciarati aimait.

"Je ne peux que te souhaiter d'avancer avec cette personne et d'être heureux avec, déclara un Abbacchio qui tentait de retenir ses larmes. Tu le mérites."

L'ancien policier se leva de sa chaise et partit sans un mot de plus, sous le regard inquiet et triste de Bucciarati. Il avait besoin de prendre l'air pour se remettre les idées en place. Fugo soupire de désespoir, ils ne pouvaient pas croire qu'ils étaient aussi aveugles ou juste idiots. Il espérait vraiment que la drague de Mista allait faire bouger quelque chose, même si la conversation qu'il venait d'entendre lui avait donné des doutes.

Abbacchio sort du restaurant, soupirant lentement et espérant pouvoir se reprendre. Ses larmes se calment, il les essuie doucement, surveillant les alentours pour qu'on ne le repère pas en train de pleurer.

"- Abbacchio ? Est-ce que… ça va ?

- Ca peut aller… Qu'est-ce que… tu fais là, Mista ? Tu n'étais pas en train de passer ton épreuve ?

- Euh… Si, je suis en train… Mais je passais par là. Tout va bien ? Tu fais une drôle de tête…

- Ca ne te regarde pas, je n'ai pas besoin de ton aide ! Dégage maintenant…

- Oh… D'accord… Je m'en vais dans ce cas, de toute façon je dois aller retrouver Polpo, j'ai bientôt terminé. J'espère juste pour toi que Bucciarati ne souffre pas, déclara-t-il avant de partir, laissant Abbacchio seul."

Abbacchio se retrouvait coincé avec ses sentiments à nouveau, essayant de se détendre et d'accepter l'idée que Bruno pourrait être plus heureux avec quelqu'un qui n'était pas lui. Ca faisait mal mais il devait l'accepter pour permettre à Bruno de vivre la vie qu'il désire et ne pas être un obstacle à celle-ci. Si seulement cet idiot savait la vérité, mais bon il ne se sentait pas capable de demander à Bruno qui lui avait pris son coeur. Il n'était pas prêt d'entendre un autre nom que le sien. Il ne voulait pas souffrir plus… C'est déjà assez, c'est même trop… Instinctivement, ses pas l'avaient mené à l'endroit où Bucciarati lui avait parlé pour la première fois, et où il l'avait sauvé. Il repensa à cette période où tout allait bien entre eux. Il aurait dû être plus courageux à l'époque, et se déclarer avant que Mista n'entre en jeu. Maintenant, il n'avait plus de chance. Mista est arrivé trop tôt, il n'avait pas eu le temps de rassembler son courage pour se déclarer à Bruno.

"J'ai tellement besoin de toi, Bucciarati… Pourquoi…? Pourquoi tout n'est pas aussi simple que dans les films…? Je n'arriverai pas à vivre en te voyant avec un autre… Je t'aime tellement…"

Il s'assit à l'endroit où Bruno lui avait parlé pour la première fois, et il pleura pour son amour à sens unique.

De son côté, Bruno était inquiet en voyant Abbacchio… triste ? Avait-il dit quelque chose de mal ? Il avait espéré se déclarer à Abbacchio, mais ce dernier s'était enfui avant qu'il en ait eu le temps. Il ne savait pas quoi faire maintenant, il était dépité, il avait enfin réussi à prendre son courage à deux mains que son cher et tendre avait pris ses jambes à son cou. Bucciarati soupire, reportant son attention sur Fugo et Narancia, toujours occupé avec ses cours. Au moins, Bruno pouvait surveiller Narancia et s'assurer qu'il suive correctement ses cours. Voyant que tout allait bien de ce côté-là, il repensa à Abbacchio.

Bruno ne comprenait pas pourquoi il était parti si subitement, était-il homophobe ? Il rejeta rapidement cette idée : il s'était souvenu de deux anciens collègues d'Abbacchio qui étaient en couple et ça ne l'avait jamais gêné, il sortait et s'amusait souvent avec eux. Avait-il peur des relations amoureuses ? C'est vrai qu'il ne l'avait jamais vu en couple depuis qu'il le connaît, c'était son hypothèse la plus plausible. Bruno devait peut-être être un peu plus patient et y aller plus doucement. Il soupira : il allait encore devoir attendre avant d'avoir enfin cet homme pour lui. Ca commençait à être long mais il pouvait encore l'attendre… Enfin il imaginait pouvoir encore patienter. Il prit la décision d'attendre leur anniversaire de rencontre pour se déclarer, cela lui laisse du temps pour arranger le terrain avec Abbacchio.

C'est au moment où il prit cette décision que Mista entra dans le restaurant.