Comment ça il ne tiendra pas longtemps ? Quand Trowa a téléphoné tu as dit qu'il allait bien, reprocha l'Américain.
Parce que c'était le cas ! Entre temps il a eut une crise.
Le regard de Duo, empli de reproches, fixait le Chinois comme pour lui dire que si lui avait été là, rien ne se serait passé. Le natté ne sortit pourtant aucun mot et se contenta de se rendre dans la chambre qui renfermait le malade. En le voyant si pâle et presque sans vie, les poings de l'Américain se serrèrent au point d'entamer la chair sévèrement sous la pression des ongles. Heero, son Heero qu'il avait promis de protéger, était comme mort. Le corps, autrefois si vif et si rapide dans ses déplacements, se fondait dans le lit aux draps blancs dans lequel il semblait condamné à rester. Duo sentit le pas léger de Wufei se rapprocher de lui mais fut surpris en entendant ce dernier parler rageusement, lui qui s'attendait presque à des excuses ou du moins à de la compassion.
Reprends-toi, Maxwell !Ce n'est pas comme cela que tu vas l'aider. Notre temps est compté ! Etre deux ici ne sert à rien. Tu étais venu prendre un échantillon de sang,
fais -le. Ne sois pas défaitiste et continue à y croire car, si toi tu n'y crois pas, comment veux-tu que Yuy y croit ? Il va se réveiller et quand ce sera le cas, je t'appellerai pour que tu viennes le voir.
Le dit Maxwell sentit une bouffée de colère et de rancœur remonter en lui et menacer de sortir, mais elle retomba aussitôt devant le visage blanc de l'ancien pilote 01 qu'il regarda encore un instant. Le chinois avait parlé durement mais il avait raison et donc le natté ne put que s'exécuter.
Quatre laissa son regard balayer lentement ce qui l'entourait et aperçut enfin ce qu'il cherchait, un taxi. Comme ce n'était pas la première fois qu'il se rendait en Italie, le blond demanda avec un accent parfaitement Italien de se rendre à l'adresse qu'il tendit au conducteur. Ce dernier attarda son regard un instant sur le papier tendu, puis hocha légèrement la tête avant de démarrer la voiture. Quatre était exténué et profita du trajet pour laisser son esprit vagabonder doucement. Une sorte de lien l'avait toujours uni au Japonais et aujourd'hui, ce lien semblait si fin, comme la vie du Japonais, qu'il pouvait se briser à la moindre brise. L'Arabe voulait tant protéger son ami…Il avait bien essayé de pénétrer son esprit pour le rassurer, soulager sa douleur mais rentrer dans l'esprit d'Heero était quasi impossible et la seule fois où Quatre avait réussi à entre-apercevoir quelques images, la violence des sentiments du Japonais avait provoqué l'évanouissement de l'empathe. Bien sur, après cet incident, son amant n'avait plus voulu entendre parler d'une nouvelle tentative. Ce chercheur Italien était donc le dernier espoir de l'Arabe pour aider son ami qu'il sentait en ce moment bien faible. Pourtant Quatre se sentait presque rassuré car, derrière la faiblesse du corps d'Heero, il sentait une flamme d'espoir dans son coeur, minuscule mais bien réelle, qui ne demandait qu'à briller plus fort si on l'y aidait et aucun doute que Duo et Wufei feraient tout pour l'entretenir. Quatre fut coupé dans sa réflexion par la voix du conducteur qui lui indiquait qu'il venait d'arriver. L'arabe remercia et paya généreusement le chauffeur, puis sortit du véhicule pour faire face à un immense bâtiment couleur brique qui s'étalait allégrement sur six bonnes centaines de mètres en plus des innombrables étables que cette construction laissait deviner . Quatre se conforta dans l'idée qu'il ne s'était pas trompé d'adresse et qu'un homme possédant de tels moyens ne pouvait qu'être un des chercheurs les plus avancés en génétique. L'empathe se dirigea vers ce qui semblait l'entrée principale et ne put qu'admirer l'allée d'arbres florissants qui menait au bâtiment. Un petit groupe d'hommes en blouse blanche, en grande conversation, clôturait l'allée que venait de traverser Quatre. Un homme d'âge moyen et d'allure gracieuse se détacha de ses confrères pour aller au devant de l'ancien pilote et le salua poliment :
Vous devez être Quatre Raberba Winner, il me semble ? Nous vous attendions. Suivez- moi je vous prie.
L'Homme à la blouse blanche invita le visiteur à le suivre dans le grand bâtiment et traversa, toujours suivi de son hôte, un dédale de couloirs où nombre d'hommes et femmes allaient et venaient d'un pas précipité. Tous semblaient en proie à une agitation extrême, sentit l'Arabe dont l'empathie ne faisait que confirmer les doutes. Enfin, l'homme en blouse blanche s'arrêta et se retourna vers notre jeune ami :
-Veuillez attendre quelque instant.
Sans rien dire de plus, l'homme s'en alla, laissant Quatre seul avec son impatience croissante. Quelques minutes interminables passèrent quand enfin un autre homme plus âgé cette fois d'après sa chevelure grisonnante et ses quelques rides apparut .
Bonjour M.Winner. D'après votre appel téléphonique et la rapidité de votre déplacement, il semblerait qu'il s'agisse d'une affaire urgente…
Monsieur Giovani ? demanda Quatre.
En effet. Alors, racontez moi encore une fois ce qui vous amène ici.
Quatre prit une bouffée d'oxygène et expliqua le plus clairement possible la situation d'Heero, ses crises, son enfance, ce que Réléna leur avait appris, les recherches de J, d'un ton qu'il voulait calme mais il ne pouvait empêcher sa voix de trembler au nom de son ami souffrant. L'Italien écouta le récit de son visiteur sans l'interrompre et quand ce dernier eut fini de raconter ce qui l'amenait ici, le docteur sembla réfléchir un instant et dit enfin :
Ce que vous me dites là est difficile à croire M.Winner. Toutefois je ne vois pas l'intérêt que vous auriez pu avoir à venir d'aussi loin pour me raconter des sornettes. Disons donc que je veux bien vous croire mais je vois mal en quoi je peux aider votre ami qui je le crains risque bien d'y laisser sa vie…
Vous êtes le plus grand généticien de notre époque et le chercheur qui a le plus de moyens ; faites un miracle pour mon ami !
Malheureusement, je ne vois vraiment pas…Enfin…
L'homme en blouse se mordit la lèvre inférieure et détourna son regard de celui de l'Arabe comme pour réfléchir. Après quelques secondes ce dernier soupira et lâcha enfin :
Depuis peu, je fais des recherches sur les chromosomes. J'ai pour ambition de réussir à changer tout chromosome défectueux pour empêcher des maladies telle que la trisomie ou bien d'autres encore. Mais ce projet n'est qu'au stade d'ambition. Jamais rien n'a été tenté et les répercussions pourraient être grave sur un être humain si toutefois cela réussissait…
Heero n'est pas un homme comme les autres , sa résistance est extraordinaire…
Vous semblez beaucoup tenir à votre ami et j'aimerais vous aider mais vous ne savez même pas si ses crises sont vraiment liées à une dégénérescense génétique…
Quatre s'apprêta à répliquer mais se retint n'osant dire que c'était le professeur J qui, dans l'espoir de perfectionner l'unique espoir des colonies, avait administré toutes sortes de produits. L'Arabe se contenta d'ajouter :
On ne pourra en être certain que si vous venez le voir. Jugez par vous même si vous pouvez faire quelques chose pour lui, tenta le blond.
Le scientifique semblait partagé : ce jeune homme qu'il ne connaissait pas lui proposait d'expérimenter ce qu'il n'avait jusqu'alors qu'osé imaginer sur un être vivant et, qui plus est, sur son ami ; ce jeune homme devait être ou bien fou ou bien désespéré…Pourtant la chose était tentante et le regard douloureux de son vis-à-vis acheva d'apitoyer le chercheur qui poussa un long soupir de résignation et dit :
Je viendrai voir votre ami, j'analyserai son sang si vous mettez à ma disposition un laboratoire bien équipé et je verrai si je peux faire quelque chose pour lui. Laissez- moi trois quatre jours pour prendre quelques dispositions…
L'Arabe se dérida légèrement suite à cette réponse encourageante mais se permit tout de même d'insister sur le fait que le temps leur était très précieux et que les crises du patient étaient de plus en plus violentes.
Le chercheur acquiesça et appela un de ses subalternes afin d'installer le jeune homme dans une chambre le temps que les préparatifs soient achevés.
Quatre, sitôt installé, s'empara du téléphone pour appeler son amant.
Allo ?
Trowa, c'est Quatre. Je suis arrivé chez M.Giovani qui a accepté de venir. Nous serons là dans deux ou trois jours. Comment va-t-il ?
Ses crises sont de plus en plus violentes, lâcha le français après quelques instants de silence. Wufei est avec lui et Duo est passé prendre l'échantillon de sang que J a demandé.
Ils tiennent le choc ? demanda le blond en serrant ses poings suite à la nouvelle.
Ils sont à bout et sont prêts à se sauter à la gorge à la moindre réflexion, résuma le français platement du moins en apparence. Ne t'inquiète pas pour eux ; pour Heero ils feront un effort …Reviens vite, tu me manques, avoua Trowa.
Toi aussi…Trowa…
Oui ?
J'ai peur pour Heero.
Moi aussi.
Je t'aime.
Je t'aime aussi Quatre.
Trowa raccrocha le combiné quand Duo arriva telle une tempête rouge et proférant diverses injures que le Français devinait à l'adresse d'un certain Chinois qui devait l'avoir contrarié.
Tu l'as ? se contenta de demander Trowa.
Oui je l'ai, répondit le natté en essayant de se calmer. Mais Heero va mal. Il a fait une crise et depuis il est inconscient, ajouta l'américain en frissonnant sous l'émotion.
J'ai eu Quatre au téléphone. Il arrive dans deux ou trois jours avec un chercheur en génétique.
D'ici là il sera peut-être mort, s'emporta Duo en tapant sur le mur le plus proche.
Un léger filet de sang coula du poing vengeur et s'écrasa sur le sol. Le professeur J, qui venait d'apparaître dans l'embrasure de la porte, s'approcha de l'américain et dit d'un ton tranchant :
J'ai choisi Heero comme pilote pour sa force et sa volonté hors du commun. Ne le sous-estime pas, 02, si tu dis l'aimer.
Elle est belle votre morale, répliqua le jeune homme, mais Heero est humain et il a ses limites comme tout le monde.
Le natté s'apprêtait à ajouter quelque chose quand il sentit son portable vibrer. Pensant tout de suite à un appel de son rival à propos d'Heero, il décrocha et fut plus que surpris quand il entendit une voix qu'il chérissait plus que tout :
Duo ?Duo ? t'es là ? réponds…
Il fallut quelques instants au natté pour se remettre de l'émotion provoquée par la voix mais il dit enfin :
Oui, oui, je suis là Heero…Tu es réveillé !Ca va mon amour ? Comment tu te sens ? C'est Wufei qui t'as donné le téléphone ? Il est fou, tu dois te reposer ! Passe-le moi ce con que je lui passe un savon ! Non attends, je préfère te parler un peu avant…J'ai eu vraiment la trouille pour toi, bon sang ! Ne me refais jamais ça, tu m'entends ! Quatre arrive avec un super chercheur et…Mais, j'ai une idée, j'arrive pour tout te raconter ! tu m'attends d'acc ? Heero, Heero !
Maxwell, ta gueule !
Wuffei ? mais Heero il est où ? Passe le moi ! c'est à toi que j'ai parlé ou à lui !
J'ai repris le téléphone pour pas que tu l'achèves avec ton babillage incessant ! Si tu veux lui parler, déplace-toi !
L'Américain, fou de rage et de joie mélangées raccrocha sans plus attendre, se tourna vers le français et cria :
Il est réveillé. J'y vais, m'attends pas !
A peine eut-il achevé sa phrase qu'il se précipita vers la sortie, oubliant sa rancœur pour le Chinois.
L'Américain arriva essoufflé dans le bâtiment blanc pour avoir trop couru et opta pour un pas plus calme qui était de toute façon de rigueur dans un tel lieu . Il se dirigea donc avec maîtrise vers la chambre du Japonais et ne put empêcher un sourire idiot d'orner ses lèvres. A présent il le savait : Heero était bien plus fort que tous, que la maladie, que la mort, que Dieu lui même !Une bouffée de joie et d'amour l'envahit mais cette dernière retomba aussitôt que l'Américain aperçut Wufei, devant la chambre comme cerbère empêchant à Orphée de retrouver sa bien aimée. Le Chinois ne manqua pas de voir le natté et stoppa sa conversation avec un homme qui était sans nul doute au soin d'Heero.
Maxwell, lâcha l'asiatique d'un ton froid pour tout salut.
Chang, répliqua le vis-à-vis pareillement. Je voudrais voir Heero, aurais-tu l'obligeance de te pousser ?
Wufei contracta sa mâchoire comme seul signe de son mécontentement et se poussa légèrement de l'entrée , puis, à la suite de l'Américain, il entra. Le natté excédé faillit répliquer qu'il n'avait pas besoin de gardien mais jugea inopportun de tenir des propos blessants envers le Chinois devant Heero. Mais le Japonais n'eut pas besoin d'entendre de répliques entre ses deux compagnons pour sentir la tension entre ces derniers. Ses sourcils se froncèrent légèrement et il fit un mouvement pour se dégager des couvertures qui l'oppressaient.
Yuy, tu ne dois pas te lever, rappela le Chinois.
Duo comme pour défier son rival railla :
Tu n'es pas sa mère que je sache, il fait ce qu'il veut !Depuis le temps qu'il est couché, tu vas pas l'empêcher de bouger en plus !
Il a besoin de se reposer Maxwell !Il vient à peine de se réveiller et il est encore fragile !
Non, ça, c'est ce que tu voudrais qu'il soit, gronda le natté dont l'emportement colora les pommettes.
Je pense à Heero quand je dis cela et tu ferais bien de penser un peu plus à lui et un peu moins à toi !Tu n'étais pas là quand il a fait sa crise …
Duo s'apprêtait à répliquer lorsque Heero prit la parole de sa voix grave :
Si vous êtes venu pour vous disputer, faites-le dehors !Vous dites que vous voulez m'aider ?Et bien soit, commencer par arrêter de vous comporter comme des enfants, je n'ai pas besoin de ça !Vous aviez mis vos différents de côté à ce que vous n'aviez dit et bien je constate que vous avez encore des points à éclaircir. Revenez quand vous serez d'accord car c'est tous les deux que j'ai envie de voir . Quand comprendrez vous que je vous apprécie tous deux parce que vous êtes différents mais que je n'en préfère pas un à l'autre, s'emporta à son tour le Japonais en durcissant sa voix déjà pleine de colère.
L'Américain et le Chinois baissèrent les yeux sous ses reproches qu'ils sentaient véridiques et dont déjà ils se sentaient honteux.
Scus, grommela le natté sur un ton boudeur au Chinois.
Hm…Je regrette, maugréa à son tour Wufei en adressant un coup d'œil à Duo.
Le Japonais se calma aussitôt qu'il entendit ces excuses qu'il savait dites plus à son adresse qu'à l'un et l'autre, mais s'en contenta et se repositionna confortablement dans le lit.
