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Chapitre 15 : Short Size Complex

-Le rendez-vous a lieu cet après-midi à quinze heures, annonça Tseng. Ça nous laisse peu de temps pour nous préparer, mais ça devrait aller. Reno, tu vas jouer au négociateur avec la personne qui se présentera pour l'échange et Rude s'occupera des détails. Moi , je superviserai tout ça.

-Et comment donc si tu n'es pas là ? demandai-je.

-On restera en contact à l'aide de micro-émetteurs-récepteurs, expliqua-t-il.

Rude hocha la tête. Moi, je sentais déjà que j'allais haïr ces gadgets. Dagenflitz nous les confia après quelques explications (ça captait tous les sons dans un rayon d'un peu plus de deux mètres et ça pouvait transmettre les ordres directement dans l'oreille interne, et c'était plutôt discret). Nous étions presque prêts. Ne manquaient plus que les cent milles gils… qui ne tardèrent pas à arriver. L'heure tournait. Je me sentais nerveux. Je me demandais si c'était parce que je savais que Tseng ne serait pas là. …Je me sentais stupide. J'avais seize ans et j'étais un Turk, j'avais seize ans et les mains couvertes de sang… J'avais seize et j'avais appris à tuer de sang froid, j'y prenais presque plaisir. Et là. On m'envoyait taper la discut' avec un inconnu pour sauver la peau d'une gamine de sept ans. La joie.

-Mmh… Je crois que je préférais me faire trucider par les membres du CAT à Midgar…, soupirai-je. Au moins, le sang coulait…

Tseng et Rude me lancèrent tous deux un regard troublé.

-Ouais… En fait… C'est plus amusant d'être du côté des « méchants », poursuivis-je. Mmh… C'était quoi déjà ? « Nul ne mérite d'être loué de bonté, s'il n'a pas la force d'être méchant : toute autre bonté n'est le plus souvent qu'une paresse ou une impuissance de la mauvaise volonté ». C'est si simple d'être gentil, il suffit d'être un tantinet naïf et oisif… Les gens gentils ne sont que des imbéciles heureux.

Je tournai mon regard vers Tseng.

-J'ai déjà rencontré une gamine qui vendait des fleurs. Elle n'a pas encore compris qu'on se faisait plus de fric en rackettant ou en tuant qu'en faisant pousser des fleurs de Gysahl à un gil…

-Reno, ferme-la veux-tu ? Et une fois de plus, laisse Aerith en dehors de tout ça… Cette gosse n'a rien à voir avec nous…

Il se tut un instant avant de se reprendre.

-Enfin, si, mais… elle n'a rien à voir avec cette conversation… De toute façon il va être temps. Il ne faudrait pas que vous soyez en retard.

Sinon quoi ? Une gamine innocente se ferait tuer ? Et alors ? On la connaissait même pas. Si ça se trouvait, c'était une vraie peste laide comme pas deux et à moitié décérébrée. Mais bon. Les ordres n'ont jamais été quelque chose de grandement discutable. En plus, ils venaient directement de Dagenflitz et non de Tseng, alors les discuter n'avait aucun intérêt…

°°°

Ah, ce rouquin… Un vrai petit salopard, mais un salopard qui faisait quand même bien son boulot. J'espérais juste qu'il ne s'attirerait pas toutes les emmerdes possibles et inimaginables, une fois de plus. Je fixais avec appréhension les points rouge, pour Reno, et bleu, pour Rude, se déplaçant dans les rues de Junon. Au moins, je saurais où se trouvaient mes collègues à défaut d'être à leurs côtés. J'étais un peu nerveux. Travailler de cette manière était assez inhabituel pour moi, mais j'avais tout intérêt à préparer les autres à ce genre d'éventualité. Je ne pourrais pas toujours être à leurs côtés. Soupir… Mes yeux étaient comme hypnotisés par l'écran. Rude s'était embusqué. Reno arrivait sur les lieux du rendez-vous, un chantier à découvert.

°°°

C'était chiant de trimballer cette mallette de pognon. D'autant plus que j'étais sensé revenir avec. Ça faisait un peu crétin dit comme ça. Un homme attendait, seul, au milieu du chantier, complètement à découvert.

-Tiens… On m'avait dit de troquer une gosse contre du pognon, mais j'ai l'impression que ce que je suis venu chercher n'est pas là…, notai-je d'un ton moqueur.

-Alors c'est ça qu'on nous envoie pour faire l'échange ? rétorqua le type. C'est quoi ce gamin ?

-Un Turk, répondis-je.

J'en avais marre qu'on me traite de gosse. J'avais seize ans, d'accord, mais tout de même !

-T'avise pas d'essayer de me butter pour te tirer avec le fric, j'ai plus d'expérience qu'il n'y paraît et tu serais pas foutu de sortir d'ici vivant, déclarai-je. Maintenant que t'es prévenu, où est la gamine ?

-Ce serait si simple de le dire… t'aurais plus qu'à me butter, moi.

-En effet. J'ai l'impression qu'on est encore là demain à ce rythme…

Il eut un léger rire. Je fourrai ma main gauche dans ma poche de pantalon et attrapait une pièce de dix gils.

-Je te propose un petit jeu. Pile ou Face. Si je perds, je te file mille gils, si tu perds, te me file un indice pour trouver la gamine.

-File-moi dix mille à chaque fois que tu perds et ça marche.

-Hum. Ça ne me laisse que dix possibilités de perdre… Toi, tu devras dans ce cas me donner la ville, le quartier, la rue, le numéro de la maison ou de l'immeuble. Si c'est un immeuble, tu as plus de chance, il faudra le numéro du bâtiment, celui de l'étage, celui de l'appartement, indiquer dans quelle pièce la gamine et séquestrée, les dangers encourus et le nombre de complices. Ça fait dix. Est-ce que ça te va ?

Il réfléchit un instant.

-Si je dis oui, tu en concluras que la gamine est dans un immeuble, et si je dis non, qu'elle est dans une maison, or, je ne peux pas te donner d'indice alors que le jeu n'a pas commencé.

-Alors jouons ta réponse, proposai-je.

Il réfléchit à nouveau.

-D'accord, ce sera Face pour oui et Pile pour non.

Je lançai la pièce. Face.

-Face. A présent, commençons. Je prends le côté Pile.

-Et moi Face, donc…

Je relançai la pièce. Face. Je donnai dix mille gils. Face. Encore dix mille gils pour lui. Pile.

-Elle est à Junon.

Face. Plus que sept chances contre neuf. Face. Six… Pile.

-Elle est dans le haut de la ville.

Pile. La chance revenait-elle ?

-Avenue Reagan.

Face. Encore Face. A nouveau Face. Plus que trois chance contre six.

« Rude est sur les lieux » me chuchota Tseng via l'oreillette.

Entendre sa voix me redonnait un peu d'assurance, je n'étais pas si seul que ça… Pile.

-Résidence des Hauts de Junon.

Face. Plus que deux chances. Pile.

-Bâtiment 2.

Pile.

-Étage 6.

Pile.

-Appartement 608.

Face. Plus qu'une chance contre trois. Est-ce qu'on avait assez d'informations ?

« Fais attention à ce que tu fais, Reno, ce jeu devient dangereux… »

-Alors, tu la lance cette pièce ? Ou bien tu as peur de perdre ? me lança l'homme.

Je lançai la pièce. Pile.

-Elle est dans…

Il se tut un instant et se gratta nerveusement la tête.

-Si tu ne t'en rappelles plus… tu peux toujours passer à l'indice suivant, ou m'accorder un joker, prononçai-je avec lenteur.

-Non, je vais m'en souvenir.

-Je t'accorde cinq secondes.

Je braquai un Outsider sous son nez. La sueur commencer à perler sur son front.

-Cinq. Quatre. Trois. Deux…

-Non, attends ! Je… Je passe à l'indice suivant…!

-Les dangers, donc…

-Il n'y a pas de piège, mais la gamine est ceinturée d'explosif et ça explosera si on essaye de lui retirer.

-Hum, la joie…

Une chance contre deux. Je lançai la pièce. …Oh non…

« Reno, Rude y est… »

Je ne cherchais pas à comprendre davantage.

-Désolé, mec, mais on a la gamine, tu n'es plus d'aucune utilité…

Il avait visiblement très peur de mourir.

-Non ! Je peux vous donner des informations ! Je ne suis qu'un relais, on m'a payé pour effectuer la transaction mais je n'ai rien à voir avec l'enlèvement !

-Qui t'a payé ? Parle où je t'éclate la cervelle…

-Non ! Je vais vous le dire ! Je connais son nom ! C'est…

Il n'eut pas le temps d'achever sa phrase qu'une balle lui explosa la tête. J'étais pourtant sûr de ne pas avoir pressé la détente. En effet, ce n'était pas moi qui avait tiré. Mais c'était maintenant sur moi qu'on essayait de tirer. J'attrapai le pognon et filai, rapide comme l'éclair. Quand je revins au QG, Rude était là, lui aussi, encore en train de reprendre son souffle comme s'il venait de courir un marathon. Ce qui était d'ailleurs presque le cas.

-T'as été rapide, lui lançai-je. Sans toi j'étais un homme mort.

-Haha… Non, Reno… Ce serait impossible ça…

Je haussai un sourcil.

-Et pourquoi donc ? Quelques secondes de plus et j'avais plus qu'à annoncer « Face » et il m'aurait tiré dessus…

-C'est pas ça… Tu peux pas être un homme mort, puisque tu n'es encore qu'un petit garçon…, se moqua-t-il.

Je tentai de lui envoyer un coup de pied dans les bijoux de famille, mais il para le coup sans difficulté et me mit à terre.

-Si j'étais toi, je ne jouerais pas à ce jeu là avec moi.

-Ouais c'est ça… Frime, pro des arts martiaux de mes deux…! En attendant, je suis pas un « petit garçon » ! Je suis au moins un adolescent !

Je sautai sur mes jambes et levai les yeux vers lui. C'était vrai que je devais paraître petit et maigrichon à côté d'un grand type baraqué comme Rude… mais tout de même…

-Je suis peut-être pas très grand par rapport à toi…

-Tu n'es pas très grand tout court… dans tous les sens du terme d'ailleurs…

-Oh, ta gueule ! C'est moi qui parle, hein ! J'en ai marre que tu te foutes de moi à cause de ma taille ! J'vais encore grandir !

-Oui, c'est ça, va manger de la soupe…

Je lâchai un grognement.

-Oh et puis tu me fais chier ! Foudre !

Une expression de surprise s'afficha sur son visage. Un fraction de seconde à peine plus tard, il se prenait le sort. Je tournai les talons.

-Allez, j'en ai marre, j'me barre. J'vais emmerder Tseng, tiens.

Et je le plantai là. Le sort ne lui avait pas causé grand tort, mais il ne s'y attendait vraiment pas…

°°°

Reno se planta devant moi, visiblement nerveux et déjà assez énervé.

-Reno, il m'a semblé entendre du bruit…, commençai-je.

-J'ai lancé un sort de Foudre sur Rude parce qu'il m'énervait, lâcha-t-il sans ménagement.

Je haussai un sourcil.

-Parce qu'il t'énervait ? répétai-je. C'est tout ce que tu as à dire ? Excuse-moi Reno, mais je te conseille de ne pas recommencer ce genre de conneries, ça pourrait un jour te coûter cher…

Il détourna les yeux et fixa son regard sur la gamine, assise non loin de nous.

-Elle va garder cette ceinture d'explosifs toute sa vie ? demanda-t-il.

-Bien sûr que oui, répondis-je avec ironie.

Il s'approcha un peu plus d'elle et vit le triste état dans lequel elle était. Ses yeux étaient rougis par les larmes, ses vêtements étaient déchirés, elle avait reçu quelques coups à en juger sa peau bleuie par endroit et l'odeur qui se dégageait d'elle n'était pas sans rappeler celle de la mort. J'étais partagé entre le dégoût et la pitié pour cette gosse. Elle avait réellement été traumatisée par ce qu'elle venait de vivre et en avait perdu la parole. Ça ne nous arrangeait pas.

-Comment on lui retire la ceinture ? demanda encore Reno.

-Des experts vont s'en charger. Nous, ce qui nous intéresse c'est plutôt le nom du kidnappeur, mais étant donné que la gamine est victime de mutisme et que ton homme s'est fait tué…

-A ce propos, coupa-t-il, on était surveillés. J'ai manqué d'être abattu comme lui par un sniper, ou quelque chose dans le genre…

Petit temps de réflexion.

-Bon… je demanderai une enquête… Ce kidnappeur semble avoir besoin de fric mais aussi de rester anonyme… Je vais essayer de refiler ça à Ichigo, j'ai pas spécialement envie de me casser la tête pour ces conneries.

Un éclair passa dans le yeux du rouquin.

-Tseng, tu deviens laxiste, dis-moi…, se moqua-t-il.

-Écoute-moi bien Reno, ici, c'est Junon, et le chef c'est Dagenflitz et non Heidegger, ici, je me prend pas une raclée à chaque fois que je vais faire mes rapports ou recevoir de nouveaux ordres, alors j'en profite. Nous sommes les Turks, des pros, nous faisons partie de l'élite de la Shin-Ra, pigé ? Mais, ça, ça ne signifie qu'on est sensés se sacrifier pour notre boulot…

-Je vois… Un pro n'est pas quelqu'un qui se sacrifie pour son travail, ça, c'est un imbécile. C'est souvent pour ça que je traite d'imbécile d'utaien d'ailleurs…

Je restai un instant en arrêt.

-Tu trouves que je me sacrifies tant que ça ?

-Un peu… Mais c'est surtout pour ta réputation que tu te sacrifies, non ?

Je préférais déjà ça…

-J'vais me prendre un café en attendant la suite du programme, lança-t-il avant même que je lui aie répondu.

Il s'éloigna et je me retrouvai seul. Seul, si on oubliait la vingtaine de personnes présentes, une bonne dizaine d'entre elles s'affairant notamment autour de la gamine.

-Vous avez fait du plutôt bon boulot, me félicita Dagenflitz.

Je haussai les épaules.

-Moi personnellement, je n'ai pas fait grand chose à par donner des ordres… C'est plutôt le petit et l'armoire à glace qu'il faut remercier…

-Quel modeste…! se moqua-t-il. Mais c'est pas le moment de se reposer, je veux que vous me retrouviez ce kidnappeur.

J'échappai un soupir de lassitude.

-On va régler ça en vitesse alors…

Je me dirigeai vers le salon pour me prendre moi aussi un café. Dormir avec Reno n'était pas toujours de tout repos et la nuit passée avait été plutôt mouvementée. J'entrai dans le salon. Reno était assis sur une des banquettes, les pieds posés sur la table devant lui, sirotant distraitement son café et jetant de temps un temps un coup d'œil furtif vers Rude, assis à une table à l'autre bout de la pièce. Premièrement, un café. Deuxièmement…

-Vous tirez une de ces têtes tous les deux… …Querelle d'amoureux ?

Le rouquin termina son café d'un trait et lança son gobelet dans ma direction.

-Dis pas de telles conneries ! siffla-t-il.

-Tu t'énerves trop facilement Reno…, soupirai-je. Qu'est-ce qu'il se passe ici ? D'habitude vous êtes inséparables…

Ils restèrent un instant silencieux puis Rude prit la parole.

-Il refuse d'admettre qu'il ne fait même pas un mètre soixante-dix et qu'il a tout juste seize ans, en bref, il en a marre de son statut de gosse…

-Je suis un a-do-le-scent ! Au moins un adolescent, mais pas un gosse !

Je me plaquai une main sur les yeux.

-Vous vous faites la gueule pour une connerie pareil… J'y crois pas !

-Il m'a lancé un sort de Foudre, ajouta Rude.

-Il m'a blessé dans mon amour propre, rétorqua Reno.

-C'est un dialogue de sourd que vous menez là…, tentai-je.

Rude détourna les yeux et secouant la tête d'un air buté et Reno fit de même après lui avoir tiré la langue.

-Un instant, je reviens tout de suite.

Je m'éclipsai le temps d'aller chercher un mètre.

-On va régler le problème en vitesse. Reno, viens ici, lui ordonnai-je.

Il me lança un regard buté.

-Pourquoi moi ?

-Rude, viens aussi, soupirai-je, exaspéré.

Ils se levèrent et se plantèrent devant moi. J'attrapai le rouquin et le plaquai contre le mur le plus proche.

-Maintenant, bouge plus.

Je déroulai rapidement le mètre et mesurai sa taille, de la tête au pieds.

-Un mètre et soixante-neuf centimètres…, annonçai-je. A ton âge, j'étais pas beaucoup plus grand. C'est donc normal.

-En même temps, vous, les utaiens..., commença Reno.

-Quoi, « nous, les utaiens » ?

-...Faire un mètre soixante-dix c'est être vachement grand, non...?

Je levai les yeux au ciel d'un air désolé.

-Rude, à ton tour.

Je le mesurai à son tour.

-Un mètre… quatre-vingt quatorze… Mais toi, t'es un cas à part…

-Et toi, Tseng ? me demanda Rude. Quelle taille fais-tu ?

Reno m'arracha le mètre des mains et me plaqua contre le mur comme je l'avais fait pour lui.

-Un mètre soixante-douze et demi, annonça-t-il rapidement avec un sourire moqueur sur les lèvres signifiant quelque chose comme « ouah, Tseng, t'es vachement grand pour un utaien ! ». Mais vous, vous êtes adultes, moi, j'ai encore le temps de grandir…

J'esquissai un sourire.

-Bien sûr, Reno… Mais dans la famille que nous formons, nous les Turks, tu n'en reste pas moins notre petit frère, ne serait-ce que pour ton âge. Tu vas grandir, c'est certain, mais tu seras toujours notre petit frère, quand bien même tu nous dépasserais…

-Mais je suis pas si petit que ça… Je me sens rabaissé quand vous me dites ça ! s'entêta-t-il.

-Tu te fous bien de notre gueule, c'est normal qu'on se foute de ta gueule en retour de temps en temps, expliqua Rude. Faudrait être moins susceptible… Et cesse un peu de reprocher aux autres ce qu'on pourrait te reprocher…

Il détourna les yeux en tirant machinalement la langue.

-Et range ta langue dans ta bouche, lui lançai-je. Je croyais qu'il n'y avait que les enfants pour faire ça…

-J'suis pas un gosse, Tseng… Enfin… Peut-être que si, encore un peu, au fond de moi, mais… Je n'veux plus être traité comme tel. J'veux être traité comme votre égal.

Je rencontrai un instant son regard. Triste. Tentant de ne pas être suppliant. Ça me faisait drôle. C'était la première fois que je voyais un tel regard dans les yeux du rouquin… Il voulait vraiment qu'on le traite comme un adulte…

-Reno… Je suis ton supérieur, moi, et ce quoi qu'il advienne… Mais Rude en revanche est bien ton égal, lui, alors je te conseille de faire la paix avec lui.

Je passai une main dans ses mèches écarlates.

-…Et puis, tu es mon chien. Après tout.

Il me frappa la main et me fixa durant quelques secondes. La fureur avait fait place nette dans son regard.

-Ne me touche plus. Je ne suis pas ton chien, tu n'es pas mon maître…

-Un jour, tu seras à nouveau mon chien, assurai-je.

Je tentai de passer à nouveau ma main dans ses cheveux mais il m'en empêcha. J'esquissai un sourire moqueur et quittai la pièce.

°°°

-C'est pas malin de te mettre tout le temps Tseng à dos, me lança Rude.

-Je suis pas son chien. Ça te plairait, à toi, d'être considéré comme tel ?

Il ne répondit pas mais baissa les yeux. Je me sentais un peu stupide. On s'était vraiment engueulés pour une connerie. J'étais en colère contre moi-même. Tseng m'avait encore humilié. Ça m'excédait.

-Rude, désolé de t'avoir lancé ce sort…

-Allez, on oublie…

-Merci.

Le silence envahit la pièce. Ça me stressait.

-Rude ?

Il tourna son regard vers moi.

-Non, rien… J'essaye juste de meubler le blanc…

Et le silence s'installa à nouveau. Je finis par me lever et entrepris de faire le tour de la pièce. Rude me regardait avec appréhension.

-Tu peux pas rester tranquille trente secondes ? me demanda-t-il quand je passai devant lui pour la quatrième fois.

J'échappai un léger grognement et m'étalai de tout mon long sur la banquette et fixai le plafond durant dix secondes. Incapable de rester immobile plus longtemps, je sorti mon PHS et consultai mon répertoire pour me motiver à appeler quelqu'un. N'importe qui. Juste quelqu'un.

« Allô ? »

-Chat ? C'est Reno…

« Tu vas bien ? J'ai reçu ton message et il me paraissait un peu trop beau pour être vrai… »

-Qu'est-ce que je t'avais dit déjà ? Que tout allait bien et que Junon était très calme ? Je préférais ça plutôt que la vérité, tu te serais inquiétée pour rien. Néanmoins, maintenant que j'y pense… Tu travailles pour Hojo, non ?

« En effet… Pou… Pourquoi tu me demandes ça ! »

Je n'aimais pas du tout le temps qu'elle avait. Je pouvais facilement imaginer la teinte écarlate que ses joues devaient avoir.

-Ce type est un malade et il n'a aucun scrupule à faire des expériences sur ses assistants. Je ne sais pas ce qu'il t'a fait pour que tu aies des yeux Makô, mais dis-toi bien que Tseng et moi avons failli crever à cause d'un Serial Killer ex-assistant de Hojo. Ce type était plus proche du monstre que de l'humain et je voudrais pas qu'il t'arrive la même chose…

« Dis pas des choses pareilles, Reno… Je… Je dois beaucoup à Hojo, sans lui, j'aurais pas ce poste dans le Département de Recherche Scientifique… »

-Ouais, c'est ça… En attendant, méfies-toi de lui comme de la peste. A part ça, Coup de Lune va bien ?

« Oui, plutôt… mais il n'arrête pas de faire de petites fugues… »

-Quoi !

« T'inquiètes, rien de grave, il va juste retrouver un ami à lui… enfin, je crois que c'est son ami… »

-Qui donc ?

« Dark. Dark Nation… j'ai parfois l'impression qu'ils complotent dans notre dos… »

-Drôle d'histoire…

« En effet… Bon, c'est pas tout ça mais j'ai encore du boulot… »

-Je vois… Alors à plus tard, je suppose…

« Oui… à plus, Renard. »

-A plus, Chat…

Et elle raccrocha. Je soupirai et tournai mon regard vers Rude. Il n'avait pas bougé. J'avais envie d'appeler quelqu'un d'autre. Rufus ? …Non. Je pensai soudainement à cette jolie blonde aux yeux verts… Elena. Elle n'était pas mal du tout… J'avais été con à Kalm… Tant pis, en rentrant à Midgar je n'aurai qu'à essayer de la revoir et sortir avec elle si elle était toujours libre. Histoire de se changer un peu les idées… J'allais l'appeler quand Tseng entra dans le salon, suivit d'Ichigo et d'un jeune homme à la peau noire, vêtu d'un uniforme de soldat, un tireur d'élite visiblement.

-Bon, Dagenflitz veut qu'on retrouve le kidnappeur, annonça Tseng. Ichigo va nous aider sans quoi on est pas sortis de l'auberge. Et lui, c'est Tigre, un sniper professionnel.

-Il est jeune, non ? remarqua Rude.

-J'ai presque dix-sept ans, répondit Tigre.

-On s'en fiche de son âge, lançai-je. C'est pas ça qui détermine l'efficacité !

Je défiai Rude et Tseng du regard. Je n'avais pas apprécié la remarque de Rude, elle avait ravivé ma colère et je m'étais, du coup, senti très proche de ce garçon. Nous étions à peu près du même âge, ça nous faisait un premier point commun. Nous avions droit au même genre de remarques en raison de notre jeune âge, ça nous faisait deux points communs. Tseng eut un léger rictus et se tourna vers Tigre. Il lui chuchota quelque chose à l'oreille et je fut bien incapable d'entendre quoi.

-En quoi ce garçon va-t-il nous aider ? demanda Rude.

-Le type envoyé pour l'échange a été abattu par un sniper. Qu'y a-t-il de mieux pour chasser une bête qu'une autre bête ? Qu'y a-t-il de mieux pour chasser un sniper qu'un autre sniper ?

Mais ledit sniper devait avoir eut tout le loisir de s'enfuir entre temps… Néanmoins, je préférai me taire. Nous quittâmes le QG pour le chantier. En chemin, Tseng discutait avec Ichigo, Rude les écoutait, et moi, je restai en retrait avec Tigre. Il me lançait des coups d'œil curieux, visiblement intrigué par la couleur de mes cheveux et les cicatrices rouges de chaque côté de mes yeux. Moi, je me demandais d'où il venait. « Tigre »… Quel drôle de nom. Il avait des yeux semblables à deux grenats. Leur couleur s'alliait parfaitement avec sa peau sombre. Ses cheveux étaient tressés, de sorte qu'ils formaient des rayures noires sur sa peau brune. Seules les mèches au bas de sa nuque étaient longues, tressées elles aussi, serrées à la base et aux extrémités à l'aide d'un lacet rouge sang enroulé autour d'elles sur quelques centimètres. Deux ou trois perles métalliques ornaient également le bout de ses deux tresses. J'avisai l'anneau à son oreille gauche auquel pendait une dent, une canine visiblement.

-C'est une dent de quoi ? demandai-je avec curiosité.

-Une dent de jeune tigre, répondit-il. Elle est liée à mon histoire…

Il m'intriguait.

-Ton histoire ? répétai-je.

-Je ne voudrais pas t'ennuyer en racontant ma vie, mais si ça t'intéresse, sache que ça ne sera pas gratuit…

-Combien faut-il payer ?

-Je n'accepte pas de paiement en gils pour ça…

-Tu veux tout de même pas que je te paye en nature…! plaisantai-je.

Il éclata de rire.

-Non, c'est juste du troc. Je te troque mon histoire contre la tienne…

-Si les histoires honteuses t'intéressent…

-Tout m'intéresse. Tout ce qui est en rapport avec la vie. C'est comme ça pour tout le monde, là d'où je viens…

-Là d'où tu viens, c'est à dire ta ville natale ?

-Oui. Le Canyon Cosmo.

J'avais déjà entendu parler de ce paradis, jusqu'à présent je me demandais encore si ce n'était pas qu'un mythe…

NdVixen : Fallait que je coupe, sans quoi ç'aurait été trop long. J'ai eu un peu de mal à conduire ce chapitre et il a faillit partir en délire plus d'une fois… Qu'est-ce que vous pensez de Tigre ? Pour l'instant j'essaye de garder un peu de mystère autour de lui. Qu'est-ce que Tseng a bien put lui chuchoter à l'oreille ? Mystère, mystère… (pour une fois, l'auteur connaît la réponse…°).