Chapitre 7
« La seule raison pour laquelle tu respires encore, c'est parce que tu nous as débarrassé d'un block. Je ne sais pas encore quelles sont tes intentions donc je vais le demander une fois et seulement une. »
La jeune femme sentit des gouttes de sueur perler sur le haut de son front. A chaque mot qu'il prononça, la pression du couteau contre sa gorge devenait plus pesante. Elle fit appel à toutes les gouttes de sang froid qui coulaient dans ses veines pour ne pas laisser place à la panique. Entre l'émotion d'être de retour à Kadic, ses combats contre les blocks et sa douleur à l'épaule, Yumi avait juste envie de se blottir dans son lit et de ne se réveiller qu'une semaine plus tard.
Elle essaya de se concentrer sur la personne derrière elle pour évaluer ses chances de survie si elle venait à décider de se battre. Sa voix n'était pas rauque, assez aigue même. Il devait faire à peu près sa taille. Elle glissa son regard sur sa main. Son avant-bras n'était pas très épais, musclé peut-être mais il semblait… maigrichon. Elle fronça les sourcils lorsque ce mot apparu dans son esprit. Non, ça ne se pouvait pas… Elle essaya de tourner la tête mais la piqure de la lame contre la peau fine l'empêcha de continuer dans sa lancé. Elle repensa aux peu de mots qu'il lui avait dits. Il les a appelé des blocks ?
Il se rapprocha à peine d'elle lorsqu'il lui demanda enfin :
« Où est-ce que tu comptes aller comme ça ?
« Jusqu'au bout du monde… »
C'était risqué. Elle n'était même pas sure d'avoir réellement parlé, jusqu'elle ne sente plus la pression métallique contre sa gorge. La personne derrière elle recula d'un pas mais elle l'entendit émettre un hoquet de surprise. En gardant les mains en l'air, elle se retourna lentement, par inquiétude de ce qu'elle pouvait découvrir. Une fois face à face, elle mit une seconde avant d'ouvrir les yeux sur son attaquant. La première chose qu'elle remarqua, c'était ses cheveux blonds, les bouts en pique, avec une tâche violette sur le dessus. Lorsqu'elle baissa les yeux sur son visage, elle vit qu'il fronçait les sourcils et lu toutes les interrogations qu'il avait dans les yeux. Elle se porta la main au visage pour baisser le bandana qui la couvrait. Les yeux du jeune homme s'ouvrirent en grand en même temps que ceux de la japonaise se remplir de larme.
« Salut… elle essaya de parler mais le sanglot qui lui montait à la gorge lui donnait une voix enraillée, presque méconnaissable.
« Yumi… ? »
Elle hocha la tête vigoureusement. Un grand sourire se dessina sur son visage en entendant la voix de son meilleur ami dire son nom. Elle laissa les larmes couler sur ses joues et couru dans ses bras. Encore sous le choc, il mit un instant avant de répondre à son embrassade. Il finit par serrer le corps de la jeune fille contre le sien de toutes ses forces. Il enfouit son visage dans son cou en lui disant combien cela était impossible, qu'il ne pouvait pas y croire. Elle hocha la tête en le serrant un peu plus fort, laissant un rire de soulagement s'échapper de sa gorge.
Ils finirent par s'éloigner un peu l'un de l'autre mais Odd ne lâcha pas sa main. Il voulait s'assurer qu'il ne rêvait pas.
« On est allé vers ta rue, ta maison n'y était pas, on a pensé-
« Je sais, le coupa-t-elle, j'étais en ville quand ça s'est passé.
« Je n'arrive toujours pas y croire !
« Moi non plus ! Jérémie va être tellement-
« Jérémie ?! Il est avec toi ? Il tourna la tête en le cherchant des yeux.
« Non pas là, mais on peut aller le retrouver et-… »
Elle fut coupée par le bruit d'une explosion. Les deux amis se rapprochèrent instinctivement, chacun voulant protéger l'autre. Des bruits métalliques leur vinrent depuis le rez-de-chaussée.
« Les blocks, dit Yumi. Ils sont entrés.
« Oui, à la base j'étais venu pour m'occuper de ça. Lui répondit Odd.
« Dans ce cas cher monsieur, allons-y de ce pas. »
Il lui sourit, sortit un marteau de son sac et lui tendit. Il récupéra le couteau qu'il avait fait tomber lors de leur embrassade et avança vers les portes coupe-feu, Yumi à ses côtés. Juste avant de les ouvrir et de se lancer dans l'arène, il lui jeta un dernier regard plein de défis.
« Chacun le sien ?
« Evidemment, même si j'en ai déjà un d'avance. »
Essoufflés et fatigués, les deux amis se regardèrent et parvinrent encore à sourire. Il était plus facile de se battre contre des blocks de XANA, mais ceux-là étaient de bons exercices.
« Est-ce que ça va ? Demanda Odd en arrivant à côté de la jeune femme.
« Nickel, une promenade de santé.
« Je vois ça. Il sourit. Allez viens.
« où ça ?
« Bah, rejoindre les autres.
« Les autres ? »
L'expression sur le visage de Yumi était un mélange d'incompréhension et d'espoir. Le blond passa son bras sur les épaules de son ami et lui offrit son soutien pour remonter les escaliers. Ils ne s'arrêtèrent pas à premier mais continuèrent jusqu'au deuxième étage. Ils passèrent les portes battantes et se retrouvèrent face à un mur de débris, de plafond effondré et de fils électriques qui gisaient entre le sol et le trou béant qui servait de plafond. Seul le toit les empêchait de voir le ciel, et encore, quelques rayons de lumières arrivaient à passer entre les fissures. Yumi tourna la tête vers son ami, ne comprenant pas où il souhaitait aller, puisque tout passage semblait impossible. Il ouvrit une porte sur leur gauche, la seule qui tenait encore debout, et ils entrèrent dans ce qui servait auparavant de placard à balais. Elle lui demanda où est-ce qu'il compter aller mais il ne lui répondit pas. A la place, il ouvrit une porte de placard, tâtonna le fond avant de trouver une sorte de poignée, invisible pour toute personne qui ne connaissait pas son existence en amont. Il tira dessus et déplaça le morceau de bois qui agissait comme une porte coulissante au fond du placard. Yumi ouvrit grand les yeux face à cette entrée secrète.
« Si madame veut bien se donner la peine. »
Il s'inclina de manière exagéré, ce qui arracha un sourire à la femme aux cheveux de jais. Elle se glissa à travers la petite ouverture pour se retrouver dans ce qui était auparavant une chambre mais qui avait maintenant des airs de salon. Elle eue à peine le temps d'inspecter la pièce qu'une silhouette entra comme une tornade.
« Odd, enfin ! Encore une minute et je venais te… »
La voix de la jeune femme se stoppa en même temps que ses pieds. Elle s'attendait à trouver un jeune homme blond et au sourire espiègle. A la place, il se tenait derrière une grande femme tout de noir vêtu, un marteau à la main et un bandana pendant autour du cou. Elle mit un moment avant de retrouver le contrôle de ses membres tant cette vision lui semblait invraisemblable. Ce n'est que lorsque la japonaise baissa sa capuche, révélant ses cheveux lisses et noirs, qu'elle comprit. Un choc, sans doute similaire au sien, pouvait se lire sur son visage.
« Est-ce que je rêve ? Demanda la petite femme aux cheveux roses.
« J'espère vraiment pas… »
Elles se sautèrent dans les bras avec la même émotion que lors de sa rencontre avec Odd. Aelita laissa couler un peu plus de larme, sans doute parce que Yumi avait déjà subit le choc de retrouver ses amis. Odd finit même par se joindre au câlin en lançant une plaisanterie concernant l'impossibilité de résister à une si belle image. La vérité était seulement qu'après tout ce qu'ils avaient vécu, il ne s'était jamais senti aussi bien.
Ils se séparèrent en se souriant, seule preuve que les larmes sur leurs joues étaient bien des larmes de joie. Aelita ouvrit soudain de grands yeux, comme si elle venait de se souvenir de quelque de chose d'important et attrapant la main de Yumi.
« Viens vite !
« Où ça ? »
Elle n'opposa cependant aucune résistance et suivi son ami et s'était mise à courir vers une autre chambre. Elle l'ouvrit mais celle-ci était vide, si ce n'est pour la table au centre avec au fond ce qui ressemblait à une cuisinière improvisée. Elle allait interroger ses amis quant à la provenance de ces équipements mais la poigne d'Aelita la tira une nouvelle fois dans le couloir. Elle s'arrêta cette fois devant la porte des douches et l'ouvrit mais aucun son n'en sortait. Yumi jeta un regard interrogateur à Odd qui se trouvait derrière elle mais il ne fit qu'hausser les épaules avec un sourire en coin au bord des lèvres. Elle finit par remonter jusqu'à la dernière porte au fond du couloir et l'ouvrit sans frapper. Un grand sourire se dessina sur ses lèvres lorsqu'elle tira Yumi plus proche d'elle pour qu'elle puisse voir ce qui se passait à l'intérieur.
La pièce était sans doute une de celles qui avaient le moins changé. Il y avait un lit dans un coin, tout de suite à côté de la porte, une armoire au pied de celui et un grand bureau qui s'étendait sur toute la longueur du mur du fond. La lumière qui passait par la grande fenêtre éclairait les papiers éparpillés dessus. Debout, face au bureau, se dressait une grande silhouette brune. Le jeune dépassait le mètre quatre-vingt, ses cheveux brun étaient complètement désordonnés sur le sommet de sa tête. Ses larges épaules remplissaient le t-shirt vert foncé qu'il portait. Il tenait une feuille dans la main droite et s'appuyait de sa main gauche sur le dossier de la chaise devant lui. La tension de ses muscles se voyait jusque dans ses phalanges presque blanches à force de serrer le dossier. Il ne prit pas la peine de se retourner lorsque la porte de sa chambre se fracassa contre le mur.
« Odd je n'ai vraiment pas le temps de t'entendre fanfaronner à propos de ces trois block que tu as réussi à détruire, comme le magnifique que tu es. »
La tension dans sa voix reflétait celle de son corps entier. Même le sarcasme qu'il avait essayé d'utilisait ne réussissait pas à couvrir sa frustration.
« Il n'y a pas vraiment de quoi se venter, surtout qu'il n'en a eu qu'un sur les trois. »
Elle ne pensait pas réussir à aligner trois mots à la suite, mais voilà que la réponse de Yumi avait réussi à résonner dans la pièce. Plus personne ne bougeait. Ils attendaient de voir la réaction du brun, qui s'était complètement figé en entendant sa voix. Son cœur fut le premier à réagir et se lança dans une course folle, ne suivant plus du tout sa course dans un rythme correct. Il se tourna et lorsque le corps de la jeune femme entra dans son champ de vision, il se redressa. Il sembla plus grand, comme si tout le poids du monde avait enfin quitté ses épaules et lui permettait de reprendre sa respiration. Il dut prendre appuis sur le dossier qui se trouvait derrière, peu certain que ses jambes le soutiennent encore longtemps. Sa bouche bougeait, dans l'espoir de réussir à formuler des phrases, des mots sensés, mais aucun son ne sortait. Il remarqua les larmes qui coulaient le long de ses joues, aussi pale que de la porcelaine, et réussit à se lever. Il traversa la pièce et leva une main pour essuyer le flot qui ne tarissait de ses yeux noirs, si profond, et si pleins de sentiments. Il n'arrivait pas à tous les reconnaitre mais il arriva tout de même à distinguer le soulagement qu'elle ressentait.
« Ne pleure pas, je vais finir par croire que tu es triste de me revoir. »
Ils sourirent tous à la plaisanterie. Il avait la voix si grave, et pourtant bien plus chaleureuse qu'il n'y a quelques instants.
Yumi laissa son visage reposer contre la main chaude d'Ulrich, sans jamais le quitter des yeux. Elle avait peur que tout ne disparaisse si elle faisait le moindre mouvement, ne serait-ce que cligner des yeux. Elle finit par lâcher la main d'Aelita pour entourer le torse devant elle de toutes ses forces. Un peu comme Odd l'avait fait avec elle, elle plongea son visage dans le coup d'Ulrich, même si ce dernier était plus grand qu'elle. Il l'entoura à son tour, lâchant un grand soupire, comme s'il avait retenu sa respiration tout ce temps. Cela faisait des mois qu'il était sous l'eau, qu'il se noyait, et voilà que sa bulle d'oxygène lui revenait, le ramenant à la surface.
