Chapitre trois : Après
Le printemps arrivait.
On le sentait dans l'air, la vie reprenait ses droits. La mer était d'un bleu azur.
Hermione marchait sur la plage, pieds nus dans les vagues. Elle adorait le contact de l'eau, elle y ressentait une magie primitive, une force terrible, surtout en cette période de l'année.
Pour la première fois depuis longtemps, Hermione ressentit une sorte de paix intérieure … elle ne pensait plus au passé, plus rien ne la faisait souffrir maintenant.
Elle n'avait plus eu aucun contact. Elle n'avait pas eu non plus d'autres hiboux, ni d'eux ni de lui. D'ailleurs il n'était pas revenu.
Ses affaires marchaient bien. On ne pouvait pas dire qu'elle était heureuse. Elle avait trop souffert. Elle s'était sentie trahie. Ses blessures se refermaient. Oh non, il ne fallait pas croire qu'elle voudrait les revoir!
Cela faisait maintenant deux ans qu'elle les avait vus pour la dernière fois. Comme le temps passait vite. C'était incroyable. Allongée sur son lit d'hôpital, elle avait cru mourir de désespoir, elle avait même voulu mourir. Pourtant c'était impossible. Le sort que lui avait lancé Lestrange faisait croire à un coma mais le corps restait en bonne santé… Elle aurait pu succomber à la tentation de la folie. Non, elle n'avait pas voulu se le permettre, c'eut été donné raison à Lestrange et à Voldemort. De leur tombe, ils auraient gagné. Elle n'avait pas voulu se le permettre. Elle, la sang-de-bourbe, était plus forte qu'eux.
Et le prix avait été dur à payer. Juste se rendre compte que ceux qu'elle considérait comme ses amis l'avaient abandonnée, trahie.
Quelque chose de brillant attira son regard.
Elle s'en approcha doucement. Elle se baissa et ramassa l'objet. Elle le reconnut aussitôt. Elle le nettoya avec sa manche. Elle ne s'était pas attendue à le revoir comme ça, maintenant. Elle le croyait englouti par les flots. Au moment même où elle nettoya la pierre, un flot d'images la submergea.
La bataille finale. Voldemort se battant en duel avec Dumbledore. Le plan marchait à merveille. Le vieux sorcier devant d'abord épuiser le seigneur des Ténèbres pendant que Harry resterait en arrière plan protégé par un sort d'invisibilité. Elle était restée avec lui, pour le couvrir… Et puis, Bellatrix Lestrange était apparue devant eux. Les flashs de lumière crépitant autour d'eux, on était au plus fort de l'assaut. Lestrange prononça le contre sort faisant apparaître Harry devant elle, le rendant vulnérable. L'horreur se peignit sur leurs deux visages, on les avait trahis. Une taupe était parmi eux. Seul le cercle restreint des membres fondateurs de l'ordre connaissait le plan d'action.
Elle tomba sur le sable, à genoux.
« Alors Potter, on est sans défense… Ne compte pas sur cette sang-de-bourbe pour te sauver. Après tout, c'est grâce à elle que l'on sait que tu es là. » ricana Bella.
Hermione secoua la tête et leva sa baguette. Elle essaya en vain de lancer un sort, rien ne marchait. On aurait dit que sa baguette ne fonctionnait plus. Elle regarda Harry et y vit l'horreur, la perplexité… Il doutait… Profitant de leur baisse d'intention, Bella pointa sa baguette en direction d'Harry et murmura un sort. Une lumière rouge se dirigea vers celui qui devait sauver leur monde.
Pas une seconde Hermione ne réfléchit, elle se jeta sur la trajectoire du sort et s'écroula sur le sol. Elle n'avait plus rien à perdre. Elle eut la satisfaction de voir Harry jeter un avada kedavra avant que l'inconscience ne l'emporte.
Une larme coula sur sa joue, elle se laissa glisser complètement sur le sol.
Elle s'était réveillée à l'hôpital. Seule. Elle ne pouvait pas bouger, elle était comme paralysée. Elle entendait les médicomages parler d'elle. Elle était dans un coma suite à un sort perdu pendant la bataille finale. Que c'était triste pour elle. Qu'elle aurait mieux fait de mourir, gagner le statut de héros et d'avoir son nom sur le monument commémoratif élevé en l'honneur de ceux qui avaient combattu pour la cause. Au début, elle n'avait pas bien compris la signification de leurs paroles. Qu'au pire si elle se réveillerait, elle n'irait pas à Azkaban, le ministre Weasley l'ayant graciée pour ses actions passées lui pardonnant une faiblesse somme toute compréhensible en ces temps noirs.
Elle avait glané ces informations pendant de longs mois, le puzzle se fixant peu à peu. Elle se sentit trahie, personne ne vint la voir… Après tout pourquoi, Potter avait cru Lestrange… Sa parole valant plus que la sienne, celle de sa meilleure amie. Il n'avait pas compris que c'était du bluff.
Elle laissa échapper un sanglot, les larmes coulant abondamment sur ses joues. Allongée sur le sable, la tête dans les mains, les vagues commençaient à la toucher, elle revivait les pires moments de sa vie. Elle tenait toujours pourtant serrée dans son poing son anneau.
Et puis l'improbable s'était produit, un médicomage avait tenté de la regarder dans les yeux, il n'avait pas eu peur lui. Elle était une patiente qu'il fallait sauver. Il ne l'avait pas vu comme un traître. Comme une moins que rien. Il lui avait parlé et puis un jour, il avait le cran de regarder dans les yeux de celle qui était devenue une paria.
Lorsqu'elle sortit de son coma, il lui indiqua juste s'être occupé d'un autre patient présentant les mêmes symptômes, qu'il avait dominé sa méprise pour faire son travail correctement.
Après, il ne lui adressa plus la parole.
Elle avait été heurtée, blessée. Néanmoins, il l'avait aidée, il l'avait guérie c'était déjà cela.
Pourquoi avait-il fallu qu'elle trouve cette maudite bague ? Elle ouvrit les doigts laissant reposer sur sa paume la bague qui brillait au soleil. Elle allait la rendre à la mer. Elle attendrait que les vagues l'emportent.
Elle représentait tout ce qu'elle n'était plus. Une autre Hermione, vive, toujours joyeuse même dans les moments les plus durs, après tout, ceux qu'elle aimait seraient toujours avec elle, tous unis.
Incapable les arrêter, de profonds souvenirs l'envahir, l'étouffant presque. Des souvenirs de lui. Il avait toujours été si beau à ses yeux. Ses longs cheveux noirs et ses yeux d'un noir d'ébène qui façonnaient son visage. Et son nez, souvent la source de commentaires idiots, elle avait toujours trouvé qu'il ajoutait une touche supplémentaire d'intrigue. Elle se rappellerait toujours le jour où il lui avait demander de l'épouser dans ce jardin de rose, il avait l'air si apeuré, si incertain…que la tendresse l'avait alors submergée. Il ne lui était jamais venu à l'esprit de dire non. Ils n'avaient même pas été mariés un an. Mais dix mois de pur bonheur, d'amour, de rires et de passion. Dix mois alors qu'elle aurait voulu une vie. Et maintenant elle n'avait plus rien. Par leur faute.
Tous des traîtres.
La bague, son anneau de mariage, fut emportée doucement par le courant. Elle se releva.
Elle ne pouvait plus vivre comme cela.
Elle avança dans la mer et tomba à genoux à nouveau, les larmes roulant sur son visage… Elle ne souhaitait plus vivre ? Elle savait que ce jour viendrait. Elle ne pouvait plus faire face à son passé. C'était trop lourd, elle se sentait si blessée… Tout ce qu'elle voulait, c'était être emportée par le courant… Alors qu'elle allait sombrer dans les vagues, elle sentit des bras puissant l'attraper, la sortir de l'eau…
Son regard si noir… Et puis plus rien.
Brutalement, elle se vit hors de son corps… Un homme en noir, lui, était agenouillé près d'elle… Il lui caressait le visage, il pleurait… Merlin pourquoi ? Pourquoi maintenant…
Il parlait, sa voix entrecoupée de sanglots…
« Hermione… Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi n'as-tu jamais voulu m'écouter ? Je ne pouvais pas, je ne pouvais pas venir te voir… Je ne pouvais pas… je n'avais pas le droit… »
Il était revenu.
Il lui parlerait cette fois.
Et qu'elle le veuille ou non, elle l'écouterait.
Il n'en pouvait plus de la voir ainsi.
Il l'avait vu marcher paisiblement sur la plage.
L'espace d'un instant, il avait retrouvée. Elle paraissant si insouciante, paisible. Il s'était approché doucement savourant cette vision retrouvée mais quelque chose s'était passée.
Il l'avait vu impuissant tomber sur le sable. Son corps secoué par les sanglots. Il avait été paralysé une seconde de trop. Avec effroi, il l'avait vu entrer dans les vagues.
Il avait hurlé son prénom comme une supplique.
« Hermione ! »
« Hermione ! »
Elle ne l'entendait pas. Elle continuait d'avancer. Toujours plus loin, toujours plus loin de lui.
Il l'avait attrapée au moment même où vaincue elle se laissait sombrer.
Luttant contre les flots, il la ramena vers le rivage, l'y déposant délicatement.
D'une main tremblante, il écarta une mèche de cheveux de ses yeux.
Sa voix entrecoupée de sanglots.
« Hermione… Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi n'as-tu jamais voulu m'écouter ? Je ne pouvais pas, je ne pouvais pas venir te voir… Je ne pouvais pas… je n'avais pas le droit… »
Leurs regards se croisèrent. Il y vit défiler l'étonnement, le regret et peut-être de la compréhension et puis…
Plus rien…
Du plus profond de son être, un cri rauque s'échappa, une plainte, le signe d'une douleur épouvantable… « Non ! Non ! Non ! Non ! »
Il enfouit un instant sa tête dans le creux de son cou s'allouant une dernière fois, le plaisir d'une étreinte… avec celle qui avait été sa femme, son amour, sa vie.
Les larmes coulèrent sur ses joues…
Merlin, ils allaient payer tous. Il n'y aurait plus de héros pour le monde sorcier.
Il se releva.
Il prit délicatement sa main dans la sienne une dernière fois. C'est alors qu'il remarqua son poing fermé.
Il l'ouvrit les mains tremblantes. Son anneau. Il sourit un instant. Même dans la mort, au fond d'elle-même, elle était restée sienne.
Au moment même où il lui passa la bague au doigt, il sentit quelque chose.
Habité par un espoir fou, il l'a pris dans ses bras et transplana vers Hogwarts.
Qu'ils étaient étranges.
Un homme en noir dont le visage reflétait une détresse immense portait un fardeau gris comme s'il était la chose la plus précieuse qu'il possédait.
Elle. En gris. Inerte. Il la serrait si fort contre lui. Naturellement étrange.
Les étudiants leur renvoyaient des regards moqueurs, le maître des potions tenant une femme dans ses bras. Les jeunes sorciers étaient inconscients du drame qui se jouait devant eux. D'une destinée marquée dès l'origine par la fatalité.
À présent, il courait à en perdre haleine vers l'infirmerie la serrant toujours plus fort habité par un fol espoir.
Il ignora le regard choqué de la faculté, des murmures autour d'eux.
Il la déposa sur un lit le plus délicatement possible.
Il se retourna soudainement pour parler à la médicomage lorsqu'il se rendit compte qu'ils étaient là… Tous… le dévisageant avec curiosité comme un fou.
« Pomfrey, occupez-vous de ma femme ». Sa voix était froide et dure. Elle n'admettait aucune supplique.
A ces mots, l'horreur se peignit sur leurs visages.
Ils n'avaient pas reconnu Hermione.
Du moins, tant que les paroles fatidiques n'étaient pas prononcées, elle n'existait plus.
Bannie de leur existence, de leur vie...
Loin de leur conscience…
Tout au plus un vague souvenir.
« Hermione ? » demanda doucement la médicomage.
Snape leva sa baguette menaçant « Maintenant ! » Saisie par la peur Pomfrey s'exécuta.
Mais bien vite, elle secoua la tête de dépit.
Trop tard ?
