- J'apprécie toutes les critiques, même négatives du moment qu'elles sont constructives. Merci de signaler les fautes, ce serait rendre service pour corriger ça au plus vite n_n -
Bande-son : « Proof_ » de Dark, « Float » d'Oxalis
Bonne lecture !
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Chapitre 25 : A bout de souffle
Eren se réveilla brusquement. Les yeux grands ouverts et les membres crispés, une sensation angoissante lui pressait la poitrine. Il tenta d'inspirer de grandes bouffées, mais ce poids lui atrophiait les poumons.
« Eren, tout va bien ? »
Il tenta de répondre, mais articuler lui était douloureux .
Le Caporal s'était levé, légèrement penché au-dessus de lui. Le voir aussi réactif n'arrangeait rien, et son odeur non plus. Un sentiment de malaise inexplicable le submergeait. Il avait besoin de respirer, et ses sangles l'entravaient. Il essaya de s'en défaire, la peau de ses poignets à vif. Eren frissonna. Son dos se cambrait, ses bras et ses jambes se soulevaient par à-coups. C'était comme si son corps entier était parcouru de spasmes.
« Besoin… d'air… »
Le Capitaine fit un bref signe vers la caméra de surveillance, puis relâcha ses attaches, sans rien rajouter. Dès qu'il le put, Eren se redressa afin de mieux reprendre sa respiration. Il se calma doucement, même s'il avait encore l'impression de suffoquer. Ses membres se détendirent et il poussa un long soupir de soulagement.
« Tu devrais aller te passer un coup d'eau », fit son supérieur. « Tu es trempé. »
Il n'avait pas tort. Son haut de pyjama lui collait à la peau. Eren acquiesça rapidement de la tête, puis alla dans la salle d'eau. Il ouvrit le robinet à fond et s'aspergea le visage. Il avait vraiment besoin de reprendre ses esprits.
Il se sentait encore dérangé. C'était comme s'il s'était réveillé après un de ses cauchemars… Pourtant, rien ne lui revenait en tête pour expliquer l'état dans lequel il se trouvait. Il se gratta nerveusement le creux du coude droit, puis repassa une main dans sa chevelure ébouriffée. Lorsqu'il daigna regarder son reflet dans le miroir, il ne pouvait que déplorer les poches ornant le dessous de ses yeux. A ce train-là, il allait bientôt ressembler au Caporal…
Après une bonne douche, il retourna vers sa couchette. Le Capitaine patientait, assis sur son fauteuil rouge, de la paperasse posée sur ses genoux.
« Il est quelle heure ?
- Cinq heures moins le quart, environ. »
Eren grimaça. A peu près les mêmes heures auxquelles il se réveillait lorsqu'il faisait ces foutus mauvais rêves. Il allait vraiment en baver au réveil.
Une fois allongé, son supérieur se chargea de le rattacher. Lorsqu'il s'occupa de la sangle étreignant sa poitrine, Eren distingua son parfum épicé, musqué avec cette légère pointe d'agrumes. C'était à la fois agréable, mais dérangeant, sans trop savoir comment l'expliquer… Il s'efforça d'en faire abstraction.
« Un cauchemar ? » lui demanda-t-il.
Eren marqua une pause avant de lui répondre : « Peut-être, je ne sais pas trop… Je ne me souviens de rien. »
Chose assez surprenante, la fatigue semblait déjà le plomber. Un peu comme s'il subissait le contrecoup d'une montée d'adrénaline.
Avant que ses paupières se ferment, Eren leva une dernière fois le regard vers lui. Même si le Capitaine semblait impassible, il remarquait bien ses sourcils légèrement froncés. De l'inquiétude, sans doute.
-oOoOoOo-
Tandis que l'escouade s'entrainait, Livaï profita tant bien que mal pour grappiller quelques heures de sommeil.
Allongé sur le canapé du réfectoire, il émergeait peu à peu de sa léthargie. Ses paupières papillonnèrent un bref instant avant qu'il ne se décide à se lever. Il étira doucement sa nuque, puis se redressa. Il fit chauffer la bouilloire, puis plongea la main dans une de ses boîtes à thé. Il en profita pour humer l'intérieur du récipient, avant de glisser les feuilles dans le filtre. Pendant que sa boisson infusait, il examina brièvement l'horloge murale en grimaçant. Onze heures et demie. Il ne devait pas trop s'éterniser s'il voulait assister à la session d'entraînement avant de rejoindre la prochaine réunion avec Erwin et Hanji.
A sa place, n'importe qui d'autre serait totalement amorphe et songerait à regagner son plumard plutôt que de se soucier de son planning. Mais pas lui. D'un naturel insomniaque, trois heures de sommeil d'affilée était déjà un bel exploit. Mais malgré tout, il sentait le retard de sommeil le rattraper. Même s'il aurait pu retrouver le confort de sa chambre, comme après chaque surveillance nocturne, il se sentait tellement épuisé qu'il n'aurait pas eu la force de traverser le camp.
Sans doute était-il plus agité que d'habitude, notamment après la crise nocturne de leur apprenti. Ça faisait un moment qu'il ne prêtait plus trop attention à lui lorsqu'il révisait ses rapports : leurs nuits étaient devenues si calmes… Mais ce réveil soudain l'avait rapidement ramené à la réalité. Et bien qu'Eren soutînt avoir bien dormi ensuite, Livaï avait dû se rapprocher à maintes reprises pour que son odeur l'apaise.
Il s'était sans doute trop reposé sur ses lauriers, et il en subissait à présent le contrecoup.
Après avoir profité d'un temps de répit dans la salle vide et silencieuse, Livaï rejoignit la salle d'entraînement. Lorsqu'il poussa la porte, il ne put que constater qu'Hanji s'était encore plié en quatre.
Dans une cacophonie de détonations, la plupart des membres de l'escouade s'entrainaient au tir. Les cibles en panneau de bois étaient installées sur une bonne quinzaine de mètres le long du mur, avec d'immenses écrans d'acier en tant que backstop. Quelques tables et tabourets faisaient office de bancs de tir. L'odeur habituelle de la sueur avait été remplacée par celle de la poudre, ce qui lui irritait un peu plus les narines.
Il se rapprocha d'Eld, bien occupé à nettoyer et à ranger du matériel tandis que les autres étaient affairés à tirer.
« Ces installations sont là depuis quand ? » lui demanda-t-il.
« Je dirais depuis ce matin », répondit Eld d'un haussement d'épaule. « Hanji et Moblit venaient tout juste de terminer lorsque nous sommes rentrés dans la salle. Ils nous ont un peu expliqué comment ranger et entretenir le matériel pour que nous puissions nous exercer au tir à n'importe quel moment. »
Livaï examina les équipements autour de lui. Pour avoir autant mobilisé de moyens tout en gérant le cas d'Eren suite à leur dernière mission à l'extérieur, Hanji devait avoir le même quota de sommeil que lui. Et ceci expliquerait la tête de déterré de Moblit lors de l'examen d'Eren ce matin.
« Au moins, nous serons plus peinards qu'à l'extérieur », fit Livaï.
« Oui », acquiesça vivement Eld. « Plus de risque qu'on dézingue le mur en se défoulant sur de vieilles conserves !
- Et une installation plus pratique pour les entraînements d'Eren avec son kagune.
- Hanji y pensait également. Elle m'a dit qu'elle prévoyait un mécanisme mobile sur les cibles très prochainement. »
Même si Livaï saluait tout cet investissement, il se demanda si Hanji ne devait pas sérieusement songer à faire soigner son hyperactivité.
Sa tête se tourna en direction des cris. A priori, Petra et Auruo étaient bien trop occupés à se critiquer l'un l'autre sur leur façon de tirer. Équipés de paires de lunettes de sécurité et de casques anti-bruits, il se demandait s'ils ne beuglaient pas juste pour mieux se faire entendre.
« On dirait deux gamins », ricana Eld derrière lui. « Auruo passe son temps à tirer sur la cible de Petra, ce qui l'empêche de bien calculer son score. »
Le regard de Livaï s'attarda ensuite de l'autre côté. Gunther semblait montrer certains gestes à Eren, sans doute pour améliorer son tir.
« Comment ça se passe avec le gamin ? »
Eld grimaça : « On va dire qu'il essaie de faire de son mieux… »
Livaï haussant un sourcil, l'air interrogateur.
« Ça se voit que ça fait un moment qu'il n'a pas tiré », poursuivit-il. « Même s'il se débrouille pas si mal avec son kagune, on dirait qu'il a perdu l'habitude de viser avec son revolver. On a beau lui faire répéter les gestes, il a encore du mal à s'y remettre. »
En remarquant de loin l'air dépité de Gunther et la frustration d'Eren, les explications d'Eld faisaient sens.
Livaï se rapprocha d'eux lorsqu'Eren reprit ses essais. Il soupira lourdement en analysant sa position : bassin relâché, ses épaules trop crispées et son bras dominant pas assez stabilisé. Avec cette dégaine, c'était étonnant qu'il soit arrivé dans le top dix de sa promotion.
Une fois les tirs interrompus, Gunther soupira :
« On fait une pause. J'ai l'impression que ça empire.
- Je ne suis pas fatigué », répondit Eren. « La prochaine devrait être meilleure.
- Ça ne sert à rien de t'acharner tant que tu te tiendras aussi crispé ! », s'exaspéra Gunther.
« Va prendre une pause si tu veux », fit Eren, chargeant son revolver d'un geste déterminé. « Pas question que je lâche tant que je n'aurai pas retrouvé mon score habituel !
- Arrêtez de geindre tous les deux, vous me cassez les oreilles », coupa Livaï, l'air désabusé.
Les deux supervisés sursautèrent, ne l'ayant pas remarqué jusqu'à présent.
« Gunther », l'interpella Livaï. « File-moi tes protections, je prends le relais. »
Gunther ne se fit pas prier, et en profita pour filer un coup de main à Eld un peu plus à l'arrière. Le Capitaine se tourna vers l'adolescent : « Ça ne m'étonne pas qu'il soit à cran, vu tes résultats. J'ignore qui, de ta cible ou de toi-même, est le plus en danger quand tu la mets en joue. »
Les joues de l'adolescent s'empourprèrent. Sensiblement offusqué, il se défendit comme il le put : « Je vous assure que j'ai plutôt de bons résultats au tir ! Avec mon kagune, je vise dans le mille !
- Mais pour le moment, tu es avec un revolver », rétorqua Livaï. « Il faut que tu sois aussi à l'aise au tir à balles Q qu'avec ton kagune. Et tu serais bien heureux de t'en servir convenablement si tu te retrouves en 'panne' en pleine intervention. Donc concentre-toi sur tes positions.
- Je ne fais que ça depuis une heure ! Je… », assura Eren.
Livaï l'interrompit en levant sa paume vers lui : « Regarde-moi faire, puis ensuite on repasse. Ok ? »
Eren acquiesça d'un léger hochement de tête, mâchoire serrée.
Une fois les lunettes et son casque équipés, Livaï se positionna. Il n'avait pas besoin de tourner la tête pour sentir l'intense regard de l'apprenti le scannant de la tête aux pieds. Ses conseils accompagnèrent ses mouvements : « Tu t'affaisses trop quand tu tires. Ancre bien tes pieds dans le sol, et garde ton bras armé immobile jusqu'à ce que ta balle atteigne ta cible. »
Trois détonations s'échappèrent du canon. Trois au centre. Score plus que correct, même si le tir n'était pas vraiment sa spécialité. On va dire que cette faible distance l'aide. Pourtant, il n'en fallait pas plus pour que l'adolescent soit émerveillé.
« A ton tour », lui ordonna-t-il. « Positionne-toi, et ne tire que lorsque je te le demande. »
L'adolescent déglutit. Il remit son casque, puis se plaça. Il essaya de rectifier sa posture tant bien que mal, mais Livaï déplorait qu'il soit encore loin du compte.
« Arrête ce massacre, et baisse-les bras. »
Eren s'exécuta, sans trop comprendre. Livaï se rapprocha derrière lui, puis lui agrippa les épaules sans ménagement.
« Tiens-toi droit, et ne te raidis comme un piquet. Et écarte un peu plus les jambes, ton appui gauche plus à l'avant. »
Accompagnant le geste à la parole, il glissa sa jambe entre les siennes pour le forcer à maintenir la bonne position.
« Ton bassin doit rester rétroversé, ton tronc et tes épaules doivent former un T. »
Livaï posa ensuite ses mains sur son bassin, puis les remonta le long de ses transverses. Il guida ses bras, afin de décomposer le mouvement de tir.
« Maintiens cette position, les épaules plus abaissées. Voilà, comme ça. Et maintiens en joue … »
Il se plaça devant lui, sa main droite lui saisissant le poignet, la gauche maintenant fermement son épaule arrière baissée. Livaï regrettait qu'il soit plus grand que lui : le guider n'était pas chose facile. Il devait vraiment le coller pour qu'il puisse rectifier ses positions. Sachant que les casques de protection l'obligeaient à hausser la voix pour qu'il soit bien entendu.
« Vas-y, tire. »
Il eut à peine prononcé ces mots que l'adolescent s'exécuta. Il y eut deux détonations. Une balle se logea presque au centre, tandis que l'autre partit à la limite de l'extrémité de la cible.
Trop instable, pesta intérieurement Livaï. Lorsqu'il se tourna vers Eren, ce dernier se couvrit le nez et la bouche de la paume. Sa respiration devenait de plus en plus bruyante.
« Je dois aller... aux toilettes… »
Livaï le dévisagea, sans trop comprendre ce qu'il se passait.
« Il y a un problème ?
- Je dois y aller… Vraiment… »
Sans lui demander son accord, l'apprenti décampa. Livaï le laissa se précipiter en direction des vestiaires, sans trop comprendre la situation.
Aussitôt rentré dans les vestiaires, Eren claqua la porte avant de plaquer le dos contre elle. Il avait du mal à respirer, son cœur battait à cent à l'heure. Sa tête était lourde, ses jambes devenaient tellement faibles qu'elles se dérobèrent. Sur le sol, le souffle court, il tentait de reprendre ses esprits.
C'était quoi ça ? Qu'est-ce qui lui arrivait ?
Il s'était pourtant retenu, avait essayé de résister. Au début, il avait préféré ignorer cette sensation. Mais la situation n'avait fait qu'empirer.
Cette odeur épicée l'envoutait de plus en plus. Il arrivait même que ce parfum revienne en sa mémoire lorsqu'il n'était pas près de lui. Comme un souvenir persistant, une obsession.
Et cette proximité fut la fois de trop… La fragrance des débuts, la même qui le détendait lors de ses crises, s'était mutée en une espèce de transe. Et puis peu à peu, cette sensation bizarre lui incendiait les entrailles. C'était fort, puissant… Une odeur qui lui donnait littéralement les crocs. Il n'avait jamais vécu quelque chose comme ça, et il ignorait pourquoi. Mais il n'avait qu'une crainte : relâcher cette bestialité en lui, qu'il perde le contrôle, qu'il se mette à attaquer le Caporal.
Eren respira un bon coup, l'esprit encore brumeux. Il se releva fébrilement, puis s'appuya au rebord d'un lavabo. Il leva la tête et s'examina devant le miroir. Pas d'œil rouge, au moins. Il devait reprendre son calme, ne pas tirer de plans sur la comète.
Il ne pouvait plus le nier : l'odeur du Caporal était devenue un problème et il devait faire preuve de vigilance.
Comment en était-il arrivé là… Pourquoi fallait-il que sa présence le calme, puis devienne progressivement une source d'angoisse ?
Devait-il le dire à quelqu'un ? Non, ça l'exposerait à bien trop de risques. Il avait déjà eu du mal à gagner suffisamment de confiance au sein de la MAG, et cette déviance envers une personne de l'escouade risquait de lui porter préjudice.
Demander l'exclusion du Caporal du projet ? Impossible. Il assurait son rôle, et cette demande serait trop ambigüe. Et puis c'était son formateur, et surtout son principal allié dans tout ce bordel.
La seule option qui lui restait demeurait de garder le silence. Ça devrait suffire, normalement. Rares sont les fois où ils sont aussi proches, il suffit juste de faire attention et de garder ses distances. Quant aux fois où il perdait les pédales, il suffisait que le Caporal se rapproche un peu pour qu'il revienne à lui. Il avait pu bien le repousser la dernière fois, après tout. Et vu que le Caporal n'était pas quelqu'un de tactile de base, il ne devrait pas trop se plaindre s'ils gardaient leurs distances. Et peut-être que ça passera avec le temps, comme pour Petra.
Eren se détendit progressivement. Il se redressa et sortit des vestiaires, avec un peu d'appréhensions. Lorsqu'il passa la porte, l'ensemble de l'escouade était déjà en train de ranger le matériel.
« Ça va mieux, gamin ? » lui demanda une voix grave familière.
Le Caporal s'était adossé au mur, à côté de la porte des vestiaires. Eren déglutit, mais ne s'en formalisa pas. La distance était suffisamment respectable pour qu'il ne s'emballe pas.
« Oui. Désolé du contretemps…
- Pas grave. Il fallait remballer de toute façon, vous vous êtes suffisamment exercés. On reprendra ça demain.
- Je vais aider, alors... »
Il eut à peine avancé de deux pas qu'il sentit une force lui agripper le poignet. Il se retourna vers le Caporal, qui le tenait fermement.
« Tu n'as absolument rien à me dire ? »
Le cœur d'Eren rata un battement.
« Non non, rien…
- Ce n'est pas ton habitude de décamper d'un seul coup en plein milieu de l'entraînement. Qu'est-ce qui s'est passé ? »
Le Caporal ne l'aidait vraiment pas dans ses résolutions, mais il était normal que son comportement soulève certaines questions. Il sentit le regard de ses autres coéquipiers se braquer sur eux.
Le parfum du Caporal recommençait à titiller ses sens... Il essaya de garder son calme, limitant comme il pouvait sa respiration. Il fallait qu'il débloque rapidement la situation pour qu'il puisse s'éloigner.
« J'avais la tête qui tournait. Peut-être le manque de sommeil… »
Le Caporal le dévisagea quelques secondes, l'air suspicieux. Puis il finit par le relâcher.
« Tu peux y aller. »
Eren put enfin reprendre son souffle trois pas plus loin. Il s'en est tiré cette fois-ci, même s'il doutait que le Caporal adhérait complètement sa version. Il rejoignit les autres, afin de remballer l'ensemble du matériel. Il fallait qu'il trouve un moyen de limiter leurs interactions sans adopter un comportement suspect.
-oOoOoOo-
Livaï se rendit à la salle de réunion du camp. Il continuait de s'interroger sur les réactions d'Eren : son attitude de tout à l'heure était vraiment bizarre, pour ne pas dire suspicieuse. Un mal de tête ? Son cul. Eren avait tenté de le repousser, comme lors de leur dernière mission.
Il fut interrompu dans ses pensées lorsque des bruits de pas tonitruants se précipitèrent dans sa direction. Livaï eut à peine relevé la tête qu'Hanji s'était présenté devant lui, essoufflé et cheveux en bataille. Son homologue tenta de brièvement se recoiffer, paire de lunettes légèrement de traviole.
« Livaïïïï ! Comment ça va ?
- C'est plutôt moi qui devrais te poser la question. T'as vu ta gueule ? »
Livaï constata les énormes cernes sous ses yeux, et le fait qu'Hanji portait les mêmes vêtements que la veille. Il préféra ne rien commenter sur son hygiène déplorable.
« J'ai dû courir un peu à droite et à gauche. Mais tu connais, la paperasse… »
Ils pénétrèrent tous deux dans la salle de réunion. Livaï s'occupa cette fois-ci de brancher l'équipement, tandis qu'Hanji continuait de lui parler :
« Alors, qu'est-ce que tu en as pensé ?
- De… ?
- Du stand de tir ! » insista Hanji d'une voix aiguë. « Il claque, hein ?
- Vous vous êtes vraiment fait chier pour installer tout ça. Mais oui, c'est du bon travail.
- Je savais que ça te ferait plaisir !
- Quand as-tu pris le temps de faire tout ça ? J'espère que tu n'as pas abusé de Moblit.
- Pour qui me prends-tu ? » s'offusqua son homologue. « Je ne lui ai même pas demandé d'intervenir, il s'est proposé de lui-même !
- Sans doute pour t'éviter le surmenage. S'il n'était pas derrière toi constamment, tu nous aurais déjà claqué entre les pattes.
- C'est l'hôpital qui se fout de la charité ! Dis-moi la dernière fois que tu as dormi ? Tes yeux vont finir par t'obstruer la vue à force de gonfler ! »
Touché. Livaï ne pouvait décemment pas la contredire à ce sujet.
Une fois qu'ils furent installés, l'écran s'alluma et fit apparaître leur commandant. Avec sa coupe impeccable et son uniforme tiré à quatre épingles, Hanji et lui faisaient tous les deux tâches en comparaison.
Après quelques échanges de salutations et de banalités, leur supérieur aborda le motif de leur entrevue.
« L'objet de notre réunion ne concerne pas directement Eren. Il n'y a d'ailleurs pas de nouveauté, et la situation semble sous contrôle après tous les rapports que nous avons fournis. »
Hanji laissa échapper un bruyant soupir de soulagement. Sans doute qu'il comptait sur cette nuit pour rattraper sa dette de sommeil.
« Mais j'ai quelques informations importantes à vous transmettre concernant la cérémonie.
- Enfin ! On avance dans cette affaire ! » s'enthousiasma Hanji.
Le visage d'Erwin paraissait grave. Ça ne présumait rien de bon.
« Je ne vais pas y aller par quatre chemins : il y a une taupe parmi nous. »
Un court silence surplomba la salle, avant qu'Hanji bondisse de son fauteuil, effaré : « Quoi ?!
- Je me disais bien que tu allais nous balancer encore une nouvelle de merde », maugréa Livaï.
« Comment ça, une taupe ? Elle aurait participé à l'attaque ?
- Nous ne savons pas encore. Impossible de dire encore s'il s'agit d'une seule personne ou de plusieurs. Mais une chose est sûre : quelqu'un s'est infiltré et a sans doute aidé les goules à préparer l'attentat de la Cérémonie.
- Elle vient de chez nous ? » poursuivit Hanji.
« Veilleurs, Elites, Traqueurs… Nous ne savons pas encore. Nous n'avons que des suspicions.
- Quelles sont tes sources ? » lui demanda Livaï.
Erwin esquissa un léger sourire. Il n'allait certainement pas cracher le morceau si leurs origines étaient trop sensibles. Et vu la bombe que représenterait ce type d'accusation, c'est toute l'institution de la MAG qui éclaterait. Le gouvernement guettant encore la moindre faille pour lancer un remaniement, il valait mieux opérer en toute discrétion.
« Le sujet étant hautement sensible, je ne peux pas me permettre de vous en exposer davantage. Actuellement, les seules personnes au courant sont le Général Zackley, les commandants Pixis et Dork, ainsi que moi-même. Et maintenant vous.
- Et qu'attends-tu de nous ? » lui demanda Livaï. « Notre temps reste consacré au projet Jaeger.
- Livaï n'a pas tort », confirma Hanji. « Pourquoi n'alertes-tu pas plutôt les autres Capitaines qui sont déjà sur l'enquête ?
- Nous ne sommes pas à l'abri que l'un d'eux soit corrompu », répondit calmement Erwin. « Tout le monde peut être suspect, du nouvel arrivant au milicien expérimenté. Et c'est justement grâce à votre ancienneté au sein des Traqueurs et votre investissement sur le projet que nous vous mettons dans la confidence.
- Je sens le coup foireux venir », pesta Livaï. « On fait quoi ? »
Erwin marqua une pause, tout en croisant les doigts.
« Faites comme d'habitude. »
Livaï tiqua tandis qu'Hanji s'insurgeait :
« Comment ça, comme d'habitude ? Tu nous transmets cette bombe, et on doit continuer comme si de rien était ?! »
Erwin leva les mains en signe d'apaisement.
« Ce n'est pas vraiment ce que j'ai voulu dire. Tout ce que je vous demande, c'est plutôt de suivre les instructions, sans vous poser plus de questions.
- Tu as déjà des plans en tête », se manifesta Livaï. « Mais vu le casse-tête que ça doit représenter, il vaut mieux pour tout le monde que nous n'en sachions pas plus.
- C'est tout à fait ça », acquiesça Erwin d'un air placide. « Pour les prochains jours, j'encouragerai certaines missions à l'extérieur. Essentiellement de la traque, mais avec plusieurs équipes de soutien.
- Ca me paraît trop risqué de s'exposer autant...
- Mais l'idée n'est pas mauvaise », interrompit Hanji, l'air sérieux. « Il est sûr que notre taupe souhaite nuire à la MAG. L'attaque de la Cérémonie servait clairement à déstabiliser nos recrutements. Alors si elle est au courant qu'une goule hybride comme Eren se trouve dans nos effectifs, forcément elle cherchera à tout faire capoter ! Enfin, je dis « elle », mais aussi toute l'organisation qui peut être liée à tout ça.
- Ou Clan, tu peux le dire », glissa Livaï.
« Ça reste très fortement probable, mais je préfère ne pas écarter toutes les pistes », déclara Erwin.
Il leur sourit, semblant satisfait des déductions d'Hanji.
« Dans tous les cas, la protection d'Eren reste votre priorité numéro un. Je vais vous transmettre les prochaines consignes, afin que vous ayez un peu de visibilité dans vos plannings à venir. Tout ce que je vous demande, c'est d'avoir confiance en mes instructions et de les suivre, sans réfléchir.
- Entendu », obtempéra Hanji, sans ciller.
Erwin marqua une pause, semblant attendre le retour de Livaï. Il soupira. Comme s'il lui donnait vraiment le choix.
« Tu sais bien que je te suis toujours, même dans tes plans foireux. »
Oh oui, les plans foireux d'Erwin, il y en avait eu des tas, même avant ses débuts à la MAG. Ses qualités de stratège n'étaient d'ailleurs plus à prouver. Mais malgré les sales situations dans lesquelles il les engouffrait, cela leur avait permis de tirer au clair les affaires les plus floues, avec des coups de bluff et une bonne part de culot. Quand Erwin avait un plan en tête, il mettait tout en œuvre pour ne rien laisser au hasard. Et pour que leur Commandant soit aussi secret, c'était qu'il comptait frapper fort.
Erwin continua d'exposer les prochaines actions à venir, tout en restant discret sur ses intentions.
-oOoOoOo-
Le reste de la journée s'était déroulée sans encombre. Eren avait pu poursuivre ses entraînements physiques classiques et le Caporal était suffisamment occupé au camp pour ne pas les assister l'après-midi. Ce qui n'était pas plus mal aux yeux de l'adolescent.
« Allez, qui veut du rab' de hachis ? » demanda Gunther en levant une spatule.
« Hey ! Tu pourrais me demander l'autorisation ! » protesta Eld. « C'est ma femme qui me l'a préparé !
- Tout ça était vraiment pour toi ? » demanda naïvement Eren. « Elle a carrément préparé un plat pour dix !
- Bien sûr que tout n'est pas pour lui ! » ria Petra. « Sa femme aime cuisine, et prépare de temps en temps des repas pour toute l'équipe. Sauf qu'Eld a du mal à partager…
- Bande de vautours ! » fit Eld en brandissant sa fourchette. « A chaque fois c'est pareil !
- Pense un peu à ton bide, vieux », ricana Gunther. « On te rend service ! Tu connais le mariage ? Une fois la bague au doigt, c'est foutu, tu prends deux tailles en plus !
- Si ma femme devait me cuisiner des plats comme ça, j'accepterai de doubler de volume ! » dit Auruo sur un ton tellement sérieux que Petra manqua de s'étouffer avec sa bouchée.
« Merci Auruo ! Ça fait plaisir que tu me soutiennes, pour une fois !
- Pourquoi tous les compliments sortant de ta bouche se transforment en tas de merde ?
- Auruo ! » s'écria Petra. « Ne recommence pas ! »
Eren eut un léger rire. Même si la compagnie de Mikasa et Armin lui manquait, il se sentait de plus en plus à l'aise avec le reste de l'escouade. Malgré leur palmarès et années d'expériences, ils restaient de bons vivants. Gunther était plutôt quelqu'un de raisonnable et de sérieux, même s'il ne manquait pas une occasion pour taquiner ses coéquipiers. Eld était le plus comique d'entre eux, et ne manquait pas une occasion pour lancer une vanne. Petra était plutôt soucieuse de tout le monde, au point d'être un peu la figure maternelle de l'escouade. Eren se demandait même si elle ne s'en voulait pas encore de leur rencontre tumultueuse, et qu'elle n'essayait pas de se rattraper auprès de lui comme elle le pouvait. Quant à Auruo, même si Eren avait encore beaucoup de mal avec sa vantardise et son côté lèche-cul devant le Caporal, il restait quelqu'un sur lequel il pouvait compter.
« Eren », l'interpella Petra dans une messe basse. « Voici une petite part ! Ça te changera un peu des barquettes d'Hanji. »
Elle lui déposa une petite assiette, tandis que les trois autres étaient bien trop occupés à se disputer pour y prêter attention.
« Merci », lui sourit-il. « Même si Hanji essaie de s'appliquer, on ne peut pas dire que c'est de la grande cuisine… »
Il plongea la fourchette et engouffra un morceau dans sa bouche. Certes, c'était moins savoureux que ses repas habituels, mais un peu de variété lui faisait du mien.
« Et le Caporal ? » lui demanda-t-il. « Il ne faudrait pas lui en laisser un peu ?
Petra eut à peine le temps de lui répondre que la porte s'ouvrit en grand. Quand on parlait du loup…
Le Caporal se rapprocha de la tablée, ignorant tout ce boucan. Il se tourna vers Petra.
« Encore la femme d'Eld qui a cuisiné un truc ?
- C'est ça », lui sourit-elle en lui tendant une assiette. « Il vaut mieux se servir avant que ces goinfres terminent tout.
- Merci. »
Il s'installa à une place vide, non loin d'Eren. Ce dernier se leva instantanément.
« Je crois qu'il commence à se faire tard », se justifia-t-il avec un sourire crispé. « Eld, Auruo, vous voulez toujours m'accompagner ? »
Les deux traqueurs interrompirent leur querelle, et hochèrent la tête à l'unisson.
« Pas de problème, Eren. On y va quand tu veux ! » lui dit Eld, le pouce levé. « Petra, je compte sur toi pour surveiller le plat !... Attends, tu en as servi ?!
- Tu n'as qu'à mieux surveiller tes arrières si tu trouves ça si bon ! » se moqua Auruo. « Je plains vraiment ta femme ! »
Quelques joutes verbales plus tard, les deux traqueurs accompagnèrent Eren jusqu'à sa cellule.
Livaï fronça les sourcils. Eren ne l'avait-il pas évité une nouvelle fois ?
Ses sourcils se froncèrent, mais il s'efforça à passer à autre chose. Qu'il profite de cet instant tranquille, avec un petit plat et un bon thé, avant de replonger dans cette cellule sombre pendant des heures.
-oOoOoOo-
Eren était déjà attaché dans sa couchette lorsque le Capitaine descendit dans sa cellule. Après quelques échanges avec Auruo et Eld, il s'installa sur son fauteuil près de la tête de lit, avec sa pile de papiers habituelle sur les genoux.
Eren resta silencieux. Après les derniers événements de la journée, la situation l'embarrassait plus qu'autre chose. Et puis son odeur flottait légèrement dans la cellule. Pas de quoi le troubler suffisamment pour le mettre dans tous ces états, mais ce simple rappel le déstabilisait. Il se contenta de fixer le plafond, les paupières mi-closes. Vu que le Caporal était peu loquace à l'accoutumée, il ne chercherait sans doute pas plus d'explications sur ce qu'il s'était passé.
« Tu n'as toujours rien à me dire ? »
La gorge d'Eren se serra. Lorsqu'il rouvrit les yeux vers lui, le Traqueur le fixait sans ciller. Comme s'il attendait un aveu. L'adolescent soutint son regard, essayant de ne rien laisser paraître.
« Que voulez-vous dire ? »
Cette réponse irritait Livaï. Il voyait très bien que ce gamin se forçait de rester impassible. Malgré son visage fermé, il voyait bien à travers ses yeux expressifs que sa question le troublait.
« On a déjà eu cette discussion », rappela Livaï en adoptant un ton posé. « Ne garde pas tout pour toi. C'est aussi valable pour notre mission que pour toi-même. »
Eren marqua une pause, les lèvres pincées. Cette situation le gênait, mais il préféra faire preuve de retenue.
« Je vous remercie de votre inquiétude, mais je vous assure qu'il n'y a absolument rien. »
Conneries…
Livaï prit une grande inspiration, mais ne préféra pas insister. Ça ne servait à rien de forcer une tête de mule pareille. Le mieux était de faire preuve de patience. Il cracherait bien le morceau un jour ou l'autre le morceau, quand ça finira par lui peser.
« Comme tu voudras. »
Eren se sentit mal, mais il avait bien trop peur de sa réaction s'il devait lui révéler ce qu'il ressentait. Il appréciait ses échanges avec le Caporal, et il avait pris l'habitude de lui lâcher certaines confidences. Mais son secret était trop lourd pour qu'il puisse se risquer à tout lui déballer.
La pièce demeura silencieuse, renforçant le malaise d'Eren. Voulant briser cette ambiance inconfortable, il préféra initier la conversation : « Vous avez des nouvelles pour les missions à venir ? »
Le Caporal tourna légèrement la tête vers lui, comme s'il attendait plus de précisions de sa part.
« Votre réunion au camp… » hésita-t-il. « Vous y rapportez souvent de nouvelles directives…
- Rien de spécial », répondit Livaï. « On va juste multiplier un peu plus les sorties à l'extérieur.
- Vraiment ? » s'étonna Eren. « Mais avec ce qu'il s'est passé, ils veulent vraiment me faire sortir ?
- Les objectifs devraient s'apparenter à ta première mission », expliqua-t-il. « Tu devras participer à des traques, mais possible qu'on ne te mette pas en contact direct avec les cibles. Il faut qu'un peu d'eau coule sous les ponts, et montrer que tu peux avoir une attitude exemplaire sur le terrain. Mais ce n'est pas prévu pour tout de suite. On continue un peu les entraînements avant d'enchaîner. »
Eren hocha la tête, sans dire un mot. Il était aussi enthousiaste à cette idée autant qu'il redoutait. Il était heureux de pouvoir participer à des missions extérieures, mais assez anxieux vis-à-vis du Caporal. Même si, en toute logique, il y avait plus de chance qu'ils restent éloignés l'un de l'autre lors des courses-poursuites.
Après quelques échanges de banalités avec le Caporal, ce dernier l'encouragea à s'endormir. Eren n'aurait pas pensé que ce serait aussi compliqué.
Il se tortilla, tournant la tête sur différents angles, afin d'essayer de trouver la meilleure position pour trouver le sommeil. A croire que Morphée avait décidé de le narguer ces dernières nuits !
Puis doucement, un vêtement vint le recouvrir. Le parfum du Capitaine vint l'embaumer. Pas assez fort pour perturber ses sens, mais suffisants pour le détendre.
« Ma veste », expliqua-t-il. « Je suppose que ça t'aidera à dormir. Si ça te gêne, préviens-moi pour que je t'en débarrasse.
- Ça ira, merci », lui répondit Eren. « Il fait un peu frais ici, ce n'est pas plus mal. »
Il avait menti, mais le remercier de lui déposer son odeur aurait été bizarre.
« Oui. Ce serait con que tu chopes la crève en plein mois d'août. »
Le Capitaine lui avait répondu ça en étouffant un rire. Eren se doutait bien qu'ils connaissaient tous les deux la vérité, mais que c'était moins embarrassant que de la formuler de vive voix.
L'odeur de cette veste lui donnait l'impression d'être réfugié dans un cocon. Ses muscles se décrispèrent, et cette sensation d'apaisement le fit somnoler. C'était fou comment ce parfum pouvait l'influencer en fonction de son intensité…
Il n'y avait plus de malaise, d'agitation, de peur ou de secret.
Il s'endormit rapidement, l'esprit calme et serein.
-oOoOoOo-
Livaï avait la tête plongée dans ses dossiers. La nuit lui semblait longue, et ces dossiers cruellement ennuyeux. Que des faits divers, çà et là, sans aucun lien avec tout ce qu'il avait traité jusqu'à présent. Sans doute Erwin qui faisait de la rétention sur les dossiers reliés à la Cérémonie ou au Clan Sina. Il continua de griffonner en jetant un coup d'œil vers Eren entre deux pages, histoire de tuer le temps.
Petit à petit, et faiblement, il entendit un sifflement. Il se tourna vers l'adolescent : sa poitrine se soulevait de plus en plus vite, sa respiration devenait de plus en plus hachée. Ses paupières étaient closes, mais ses sourcils froncés et ses membres crispés laissaient présager qu'il traversait un cauchemar pour le moins pénible. Ça recommençait…
Livaï écarta le vêtement, afin de lui éviter toute gêne. Mais rien à faire, Eren haletait de plus en plus, comme s'il manquait d'air. Le Caporal s'adressa à la caméra de surveillance : « Besoin de renforts, on a un problème ! »
Il se précipita ensuite sur Eren pour le réveiller.
« Eren ! » le pressa-t-il. « Ouvre les yeux ! Eren ! »
Mais rien à faire. Il avait beau l'appeler et le secouer, il restait toujours bloqué dans ce sommeil profond angoissant. Livaï était coincé : sa respiration devenait de plus en plus instable, et lui détacher les sangles présentait un risque. S'il retombait dans une crise et qu'il déployait inconsciemment son kagune, il se ferait réduire en charpie ! Et toujours personne qui arrivait pour l'aider….
« Eld, qu'est-ce que tu fous ?! » vociféra Livaï. « Bouge ton cul, merde ! »
Mais rien. Et Eren semblait manquer d'air. Le gamin faisait carrément de l'hyperventilation dans son sommeil ! Seul et à court d'idées, Livaï n'avait plus qu'à miser sur son intuition pour essayer de calmer la situation.
Il prit le risque de détacher la sangle au niveau de sa poitrine, espérant le soulager. Mais pas d'amélioration, ça continuait d'empirer, au contraire. Il plaqua alors sa main contre la bouche de l'adolescent, lui bloquant toute arrivée d'air par cette voie. Toujours inconscient, Eren essayait désespérément de respirer. Livaï sentit son souffle réchauffer sa paume et son inspiration la comprimer. Ses narines se dilatèrent, son torse se soulevait brusquement par à-coups. Livaï n'était pas bien sûr de sa méthode, mais s'il souhaitait arrêter son hyperventilation, il n'avait pas d'autre moyen que le forcer à limiter ses appels d'air.
Puis, progressivement, le corps de l'adolescent se détendit. Toujours endormi, il semblait plus apaisé. Comme si rien ne s'était passé.
Livaï resta un moment comme ça, la main muselant toujours l'apprenti. Il redoutait que le cauchemar ne reparte au moment où il la retirerait. Il patienta un peu, puis décida d'écarter très doucement la main. Mais contre toute attente, une réaction imprévisible se produisit : alors que sa paume s'éloignait lentement, le visage d'Eren se rapprocha d'elle. Comme magnétisé, sa respiration paraissait dépendre de la proximité de sa main. Bien qu'il ne semblait plus en difficulté une fois sa main retirée, les sourcils de l'adolescent se fronçaient et des plaintes étouffées s'échappaient de sa gorge lorsqu'il éloignait sa main. Curieux de cette expérience, il rapprocha sa main. Les traits de l'adolescent se détendirent, le bout de son nez caressant ses doigts.
Livaï était partagé entre la surprise, la curiosité et la fascination. Bien qu'il avait conscience des effets de son odeur pour calmer les crises d'Eren, voir ses expressions changer en fonction de sa proximité l'intriguait. Jamais il n'avait pris autant conscience de la force de son emprise sur l'adolescent. Comme si un bout de tissu imprégné de son odeur ne suffisait plus, Eren semblait réclamer sa présence toute entière pour l'apaiser.
Ses réflexions se stoppèrent brutalement lorsqu'il entendit quelqu'un dévaler les escaliers. Il retira sa main, malgré les geignements de l'adolescent endormi.
« Tout va bien, Caporal ?
- Qu'est-ce que tu foutais ? » lui demanda-t-il froidement.
« J'étais parti aux toilettes… », se justifia Eld, terriblement gêné. « C'est assez calme d'habitude, et c'est quand j'ai vu que vous l'aviez détaché…
- Arrête avec tes excuses », l'interrompit-il sur un ton impassible. « On n'était pas loin d'une sacrée merde. Si tu n'arrives pas à retenir ta vessie au prochain roulement, pense à des couches ou une bouteille. »
Eld s'excusa platement, rendant Livaï encore plus excédé. Il l'invita à remonter pour occuper son poste, afin qu'il puisse avoir la paix. Une fois le Major sorti de la pièce, Livaï se tourna vers Eren. Il semblait toujours plongé dans un sommeil paisible.
Livaï regarda sa main : elle était encore chaude et humide de la respiration de l'adolescent. Il tira un foulard blanc d'une de ses poches pour s'essuyer.
Il ignorait si cette étrange attraction était en lien avec ce pressentiment. Et même si c'était ça, le gamin ne risquerait pas de lui révéler quoi que ce soit. Ce serait bien trop gênant.
Livaï soupira et rangea le tissu. Ce n'était que des suppositions, peut-être qu'il se faisait des idées. Même si leur promiscuité n'avait pas posé de problème jusqu'à présent, possible qu'Eren arrive aussi à saturation de leur cohabitation. Et même si Eren était vraiment troublé par son odeur, il préférait ne pas forcer les choses et laisser l'adolescent le lui dire si ça en devenait une véritable gêne pour lui.
Il se rassit, puis préféra se vider la tête en poursuivant sa paperasse, tout en tendant la main vers la tête de lit.
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… On peut dire qu'on a changé de registre sur ce chapitre…
Vraiment, je veux connaître votre ressenti ! On est d'accord, il se passe un truc-là ? Dites-moi que vous avez aimé :')
N'hésitez pas à rejoindre le Discord si jamais vous souhaitez échanger et connaître la progression d'écriture en live (voir page de profil) !
Au plaisir de lire vos avis et théories dans les reviews !
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Réponses aux reviews :
Yaoki Yoki Yo : mais j'aime les review longue ! Continue, j'adore (et ce n'est jamais assez long) ! J'espère que ton petit cœur n'a pas lâché sur ce chapitre XD Quant à ce qui s'est passé au chapitre précédent (scène où Eren est suspecté d'avoir tué la goule), on ne sait rien du tout à ce stade… Je vous laisse à vos hypothèses )
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Merci beaucoup à Sarachan et à Easyan pour la revision, vous êtes au top !
